Tlön ayant signalé une critique de Rannoch Moor par Michel Crépu dans la Revue des deux mondes, j'ai récupéré l'article et l'ai transmis à Franck. (Il apparaît d'ailleurs que Crépu doit être un lecteur régulier, car il aurait déjà fait une allusion à La Dictature de la petite bourgeoisie il y a un an. A suivre.)

Je remarque dans cet article une phrase que je commenterais volontiers : «C'est curieux, je ne supporte absolument pas les rappels historiques, sous sa plume en tout cas.»
Quoi de plus naturel que de commenter cette phrase sur le site de la SLRC ? Quoi de plus artificiel que de la commenter ici, à grands renforts de liens ? La tentation est grande de fermer ces pages à peine entrouvertes, de prendre mes cliques, mes claques, et de retourner dans mon milieu naturel. Quatre ans d'habitudes, de soins, de chemins si souvent empruntés, ça ne s'oublie pas si facilement, et les pas, les doigts, la pensée, ne comprennent pas bien ce qu'ils font ici à taper du wiki dans une fenêtre dotclear...
Sauf que ce n'est pas mon milieu naturel, sauf que je n'y suis pas souhaitée, sauf que je n'ai rien à y faire. C'est une étrange sensation, à laquelle il faut que je me fasse. (Mon oncle lors de son divorce se plaignait à ma grand-mère:
— Mais maman, je l'aime encore.
— Pas elle, il faut t'y faire.)


Ces quatre ans à écrire sur le forum de la SLRC se soldent donc par un échec. Il faut me résoudre à l'idée que j'étais devenue (à moins de l'avoir été depuis le début, ce qui est tout à fait possible) insupportable: trop magistrale, trop sérieuse, trop seule. Se résoudre à cela n'est pas trop difficile, car je le savais depuis longtemps.
Ce n'est pas difficile aussi parce qu'il y a longtemps que je sais que je n'y trouverai pas ce que je cherche: un répons ou du répondant, un dialogue. Las!

Ce qui est difficile, c'est de peser la mesure de déloyauté (sans oser utiliser le mot de trahison) envers le site de la SLRC. Pour qu'il y ait trahison, il faudrait qu'il y ait eu engagement préalable, convention. Il n'y a jamais rien eu, et j'ai sans doute plus donné que reçu (Hmm. Non, bien sûr. J'ai reçu une dédicace. J'ai reçu le nom de ce blog. Oui, c'est sans doute cela le nœud de l'affaire, l'origine de ce sentiment de trahison que je porte en moi.)


J'aimais sur le forum être dans un lieu ouvert, ouvert à tous. J'espérais, j'ai espéré jusqu'au bout, que vienne quelqu'un qui m'enchanterait, que j'aurais eu plaisir à lire, qui m'aurait appris quelque chose sur la lecture et sur la littérature, quelque chose de précis, de simple, d'évident, que je puisse comprendre.
Je n'en reviens pas, finalement, d'avoir pu croire et espérer si longtemps («Quand je fais des erreurs, elles sont généralement très longues», le personnage d'Isabelle Huppert dans Amateur).
Il n'est venu personne, il ne viendra personne.
Pas grave. Maintenant que je l'ai compris et accepté, je vais m'y prendre autrement. J'essaierai d'assister aux cours de Compagnon à la rentrée. Je vais lire Thibaudet.


Et me voilà avec un blog. Ça m'intimide, heureusement que je suis têtue et en rogne.

Typologie des blogs. Depuis que j'en lis, j'ai eu le temps d'y réfléchir. Trois types principaux se dégagent:
- les exhibitionnistes, qui se dévoilent parce qu'ils aiment se montrer;
- les professoraux, qui font des exposés magistraux sur des sujets qu'ils aiment (parfois qu'ils n'aiment pas, mais ne compliquons pas) et qui souhaitent faire partager leur passion;
- les amicaux, qui souhaitent partager leurs histoires, leur solitude, leurs éclats de rire, ceux qui attendent un peu de chaleur humaine et de communion.

Bien entendu, un blog(ueur) est rarement un type "pur". Le plus souvent il mêle les trois, avec une ou deux fortes dominantes. Les blogs poétiques, artistiques, sont plutôt exhibitionnistes, ce qui confirmerait que faire de l'art, c'est bel et bien mettre ses tripes sur la table (la réciproque n'est pas vraie, un blog peut être exhibitionniste sans être artistique). Les blogs critiques font partie de la seconde famille.

Je n'ai pas de préférence pour un type particulier. Tout dépend du ton, de la manière, des affinités électives.

Bon. Je vais aller regarder le début de la saison 3 de 24 heures chrono. Il paraît qu'elle est nulle.