Depuis que j'ai assisté au colloque "Plaisir, souffrance et sublimation", je suis régulièrement informée des vernissages, tables rondes et autres manifestations qui se tiennent à la librairie La Mauvaise Réputation à Bordeaux.

Ce soir, le message suivant m'attendait dans ma boîte mail :
Même nombre de pages, même format, même présentation graphique, à première vue, "La Déroute", catalogue pastiche réhabilitant les cités, ressemble à s'y méprendre à son "frère jumeau" de La Redoute, le leader français de la vente par correspondance. La ressemblance s'arrête là car ce "pavé" de 1236 pages et de près de deux kilos, réalisé par Simarik et par les 600 habitants du quartier réputé difficile d'Empalot à Toulouse, vise, loin de tout objectif commercial, une réhabilitation, par l'art, de l'image des cités. Le but de ce projet est "d'améliorer le regard que l'on porte sur les quartiers", explique Isabelle Tardiglio, directrice de l'association toulousaine "Entrez sans frapper", à l'origine de l?initiative, et qui avait déjà organisé en 2002 une exposition de portraits géants d'habitants d'Empalot sur les immeubles de la cité.

"Les médias mettent l'accent sur les choses négatives dans les quartiers. On parle essentiellement des voitures brûlées, des violences. J'ai voulu rectifier cela avec un pavé d'images, mettre l'accent sur les choses positives. C'est une oeuvre d'art collective, un véritable projet artistique plein de subtilités, créateur de lien social, qui dresse un portrait des habitants d'Empalot, à la manière de La Redoute, et montre un quartier pouvant s'apparenter à beaucoup d'autres en France et dans le monde. J'ai transformé le quartier en un grand studio tout au long de l'année". Simarik précise qu'il a pris un total de 22.000 photos des quelques 600 habitants de la cité d'Empalot, posant dans leur cadre de vie habituel, à la manière des mannequins de La Redoute proposant des articles à la vente. Le traitement des images et la mise en page ont été effectués par des bénévoles et par les habitants eux-mêmes, après initiation aux logiciels informatiques. De même, le "détournement" des slogans habituellement utilisés par le catalogue de La Redoute, a vu le jour au sein d'ateliers d'écriture.

"La Déroute n'est pas une critique de La Redoute, mais de la société actuelle", souligne Nicolas Simarik, qui ne cache pas que ce pastiche n'a guère été du goût de la société de vente à distance. "Au début, La Redoute était très intéressée par notre projet, qu'elle pensait peut-être pouvoir le récupérer. Elle nous a envoyé vingt exemplaires de son catalogue de juin 2005, qu'on a épluché, décortiqué pendant un mois. Et puis, on s'est rendu compte qu'elle n'acceptait pas ce décalage humoristique."
Les 650 habitants de la cité Empalot, co-auteurs du catalogue, qui a été tiré à 6.000 exemplaires et mis en vente dans les librairies au petit prix de 14 euros, sont venus nombreux à la fête organisée pour la sortie de La Déroute, dont ils ont reçu chacun un exemplaire gratuit.

Nicolas Simarik sera présent à la Mauvaise Réputation le vendredi 17 novembre à 18h pour une présentation exceptionnelle du très étonnant et très réussi catalogue « La Déroute ».




Plus je regarde les photos, plus les visages me plaisent.
Finalement, on n'est pas si loin de Kaurismäki.

PS : Simarik sera chez Florence Loewy 9 rue de Thorigny à Paris le 24 novembre à 18h30.