Grâce à ce blog, j’avais repéré le «festival des jeunes talents» à l’hôtel Soubise. Le cadre semblait beau (j’aime les occasions d’entrer dans des endroits où je n’entrerais pas), le programme prometteur, je choisis naturellement un progamme chanté puisque c’est ce que je préfère et je proposai à Zvezdo de m’accompagner.

L’hôtel est très beau mais un peu vide, je regrette le meuble à consignes en mélaminé installé en bas de l’escalier monumental, il y aurait de quoi tailler plusieurs robes de bal dans les rideaux. Comme je discute avec Z., je ne détaille pas le public. Des couples âgées, des enfants, c’est varié et peu (pas) touristique.
La salle est au premier étage, grande, chaude (les fenêtres ne seront pas ouvertes, même le temps de l'entracte, dommage); au mur derrière l’estrade se trouve un grand tableau que j’essaierai de décrypter durant tout le concert: un navire empli de moines, de religieuses, de saints, est sur le point d’aborder le «port du salut», les occupants du navire remorquent deux barques et tentent d’aider à monter à bord par une échelle les passagers d’une troisième. Deux autres esquifs sont en train de couler, leurs passagers dévorés par des monstres marins, des cartouches indiquent les différentes hérésies auxquelles ils appartiennent. Les diables nautonniers ont de belles ailes vertes bordées de rouge. Le titre semble indiquer une typologie des religions : Tupus religionis.[1]

Henry Bonamy est blond, tout mince dans une veste qui lui arrive aux genoux, compromis étrange entre la queue-de-pie et la veste classique. Les deux musiciens doivent avoir terriblement chaud dans leur costume sombre. Thomas Dolié a les cheveux plus longs que sur la photo dénichée par Zvezdo, son visage m’évoque un peu David Fischer (de Six feet under). (Je fais ma sejan, là).
Bien entendu, je n’ai pas le recul que Zvezdo. Le chanteur me paraît agréable parce qu’il articule bien, et son agitation («il y met trop d’intentions», me dit Zvezdo (révolté par ce zhabité que je n’ai même pas entendu, me concentrant surtout sur les poèmes que je ne connaissais pas)) ne me déplaît pas : voilà un chanteur qui n’est pas loin du théâtre, pourquoi pas. Ce goût du mime semble mieux servir les textes légers, comiques ou satiriques, et Jules Renard lui convient mieux que Goethe.
J’attends avec curiosité une occasion de le voir à l’opéra.


Notes

[1] Une recherche permet d?obtenir une photo et quelques détails : ce tableau saisi dans la chapelle des jésuites de Billon a joué un rôle dans le procès des jésuites devant le Parlement en 1762.