Plus personne n'écrit, solitude. Je ne sais même plus ce que j'ai fait hier. Je me souviens avoir fumé en lisant une très mince plaquette de Bonnefoy sur Celan.
Ce matin, déchiré une toile d'araignée en allant chercher la bêche, dérangé une autre araignée, bien différente, pendue à la bêche, une boule blanche d'œufs sous le ventre, utilisé la bêche pour déplacer une charogne d'oiseau grouillante avant l'arrivée d'amis. (Se souvenir de jeter les carcasses d'oiseau sans attendre).
Joué au whist, selon des règles qui me paraissent très fantaisistes. Beaucoup ri.
Mal à la tête.
Un peu déprimée par moi-même: voilà plus de dix jours que je me promets de terminer un travail. Je ne l'ai toujours pas commencé. Je ne sais pas comment commencer. Je sais que je ne le saurai qu'en commençant.
Procrastination.
Je vais finir par me mettre dans une situation impossible.
Feuilleté Whitman ce matin. (Je suis seule dans la cuisine, je prends un livre, le feuillette, le repose. De livre en livre au fur à mesure du désœuvrement. Des dizaines de livres feuilletés de jour en jour, de désirs éclos inassouvis. Je repose les livres sur les étagères, ils se fondent dans la masse. Il me reste des lambeaux de phrases.)

Je souffre de ne plus lire "en tranches épaisses". Je sais que c'est la seule façon d'entrer dans le rythme des phrases. Toutes les lectures en tranches minces ne s'attachent qu'au sens, et encore, au sens lié à des raisonnements courts. Il faut que je réussisse à lire en tranche épaisse, sans m'endormir.

Allons dormir, justement.