Mes deux tantes vieilles filles lisaient l'une Femmes d'aujourd'hui, l'autre Bonne soirée.
Jusqu'à mes huit ans nous passions les deux mois d'été chez elles. Je réunissais tous les numéros, je les classais afin de mettre dans l'ordre les épisodes les feuilletons (dont les romans-photos. J'avais une passion pour ces personnages figés au visage tourmenté dont une bulle exprimait le désarroi et les dilemmes) et je lisais les encarts centraux («en supplément une histoire d'amour détachable», promettait à peu près la couverture) plus ou moins en cachette, vaguement consciente que je n'étais pas censée lire à sept ans des histoires aussi violentes et terribles.
C'est ainsi que j'ai lu très tôt des Barbara Cartland ou équivalent, enfin je suppose, je ne sais plus, cela ne m'a pas laissé grand souvenir.
En revanche j'avais été très frappée par un rossignol saignant contre l'épine d'un rosier pour transformer une rose blanche en rose rouge nécessaire pour satisfaire le caprice de la bien-aimée d'un jeune homme, et très heureuse de retrouver cette histoire par hasard des années plus tard: il s'agissait d'un conte d'Oscar Wilde.

Tout cela pour dire qu'il faut que je me renseigne: peut-être que ces numéros sont soigneusement classés et entassés dans le grenier de ma tante.