Noir et blanc. Plastiquement beau, de plus en plus beau au fur à mesure que le film avance.

Ce n'est pas un film rationnel, ce n'est pas un film sentimental. C'est un film qui émeut en touchant l'affect, pas les sentiments (quelle est cette nuance, je ne sais).

Je spoile un peu, mais ça n'a guère d'importance.
C'est l'histoire d'un type qui voudrait boire un café.
Le héros est un looser: cela fait deux ans qu'il glande à Berlin en prétendant travailler son droit. Son père s'en aperçoit et lui coupe les vivres. Début de l'errance.
Il ne sais rien faire, mais il est bien élevé et poli, ne profite jamais d'une situation et ne repousse personne (toutes les faiblesses d'une bonne éducation non soutenue par une situation sociale, pensé-je) : par conséquence les gens se confient à lui.

A un moment donné, il commence à dire: «Parfois je trouve les gens bizarres, et puis je me dis que comme ils sont tous bizarres, ce doit être moi qui suis bizarre». La confidence est interrompue, mais nous spectateurs dans la salle avons envie de nous précipiter à travers la toile pour le rassurer: «Non je t'assure, tu es le seul "normal", les autres sont vraiment bizarres, tu ne rêves pas».
Histoire allemande en filigrane, le film sur le nazisme bourrés de clichés, le vieil homme qui revient à Berlin après avoir passé sa vie à l'étranger et raconte ses souvenirs: «Et je chouinais, tu sais pourquoi? Parce qu'avec tout ce verre je ne pourrais plus faire de vélo.»

Un très beau film sur la rencontre, les rencontres, ce mystère que demeure l'autre qui ne peut sortir de son corps pour se dévoiler pleinement (et pourtant, tentative: voir le spectacle de danse).