Passé récupérer le petit Taubes chez la relieur (les horaires sont plus variés qu'annoncé sur le site). Je lui laisse mes Fables de La Fontaine (édition scolaire Hatier des années 50) pour qu'elle me le relie à l'identique des Lettres de mon moulin trouvées à Mulhouse en février: que les deux piliers de mon enfance soient frères jumeaux.

Apparemment cela va coûter une petite fortune. Ce n'est pas grave. Ce qui m'ennuie, c'est plutôt que je ne peux assurer l'avenir de ces livres: où iront-ils, qui prendra soin d'eux, à quoi bon les aimer ainsi?
La relieur m'a demandé: «Alors, ils s'en sont rendus compte, que vous aviez des livres reliés dans votre bibliothèque?»
J'ai été interloquée une seconde, puis je me suis souvenue que j'avais dû lui dire que je pouvais bien faire ce que je voulais avec mes livres, personne ne s'en rendrait compte à la maison. Et c'est le cas. La bibliothèque est mon manteau de cheminée à moi (allusion à La lettre volée).
Finalement, le surprenant, c'est qu'elle se soit souvenue de ma remarque.

J'étais venue en vélib de Saint Lazare (Saint Lazare/Caulaincourt, ça monte), je repars en vélib pour gare de Lyon, un peu au pif, en me guidant au soleil (le garder dans le dos). De Caulaincourt à République (boulevard Barbès, avenue Magenta), pratiquement pas un coup de pédale, pente douce sur une piste cyclable sur les trottoirs très larges. Il fait beau, pas trop chaud, les gens sont gais.

H. m'a appelé vers 17 heures pour s'inquiéter de mon RER, il avait appris l'accident de train à Brétigny. Gare de Lyon à 20 heures, l'annonce était «A la suite d'un incident technique, aucun RER C ne circule». (Je prends le D).

J'ai commencé Auguste Valensin (recueil de notes, fragments de journal, etc, mis en ordre par Henri de Lubac et Marie Rougier) après mon orgie de livres vite lus qui m'a reposée. Jean me l'avait chaudement recommandé et les premières pages me donnent l'impression de comprendre pourquoi: interrogations sur la façon d'apprendre, sur les raisons d'apprendre, sur l'humilité, l'arrogance, etc. Je trouve par exemple ceci:
Il faut faire à fond ce qu'on fait. Le travail rapide n'est pas le travail hâtif. Il faut d'abord aller lentement, assurer les degrés… Par exemple, si j'avais bien à fond étudié Platon, de façon à le savoir, j'y aurais mis plus de temps , mais maintenant je mettrais moins de temps pour savoir Aristote, le comparer à Platon, et ainsi de suite: on met de moins en moins de temps pour approfondir. Je m'en aperçois bien pour l'allemand, que j'ai fait selon la bonne méthode: je paraissais aller lentement quand j'appenais Alibaba… j'étais tenté de cesser… les autres me devançaient… mais je suis avant eux tous: Alibaba que j'ai lu lentement me permet de lire Zeller vite. Or si sensée que cette réflexion paraisse, en pratique on s'y tient difficilement et je m'y tiens mal malgré mes résoutions.
Auguste Valensin, p.36
Evidemment, lui écrivait cela à 25 ans, pas à 46. D'une certaine façon c'est reposant: je peux travailler en abandonnant toute idée de compétition ou de réussite, il est trop tard, tout ce que je fais ne peut être qu'en soi, pour soi, il n'y a pas d'autre enjeu que l'avoir fait. Mais cet état d'esprit n'est pas si facile à conserver, par moment le cerveau panique.

Je retiens Alibaba ou les Quarante voleurs, par Wagner: histoire renfermant toutes les racines allemandes et toutes les règles et exceptions de la grammaire allemande dans l'ordre grammatical (Poussielgue, 1902). Opuscule de 36 pages, précise la note de bas de page.