Rêvé que je lâchais le bateau que je tenais au ponton. Il n'avait encore qu'une seule rame. Il s'écartait d'un ou deux mètres et coulait à pic. Quinze à vingt mille euros disparus sous mes yeux, pour un geste malheureux. Prévenir Vincent, vite. Mon assurance allait-elle accepter de payer?
Remords lancinant.

J'ai mis longtemps à sortir de ce rêve, à me rendre compte que c'était un rêve, plus longtemps encore à me dire que c'était totalement stupide, qu'un bateau ne coulait pas, il flottait.

Etait-ce l'influence du récit de Vincent hier? Mardi, prétextant la décrue (mais comme chaque fois que l'eau monte ou descend, il y a beaucoup de courant), deux rameurs ont insisté pour sortir en bateau fin. Ils voulaient faire du skiff, Vincent a refusé, mais ils ont tellement insisté («il m'ont cassé les rouleaux», dixit Vincent, je ne connaissais pas l'expression) qu'il a donné son accord pour un double.
— Un double double, ou un DC ?
— Pas un double canoë, tu penses bien, messieurs voulaient sortir en skiff, ce n'était pas pour prendre un canoë. Bref, cent mètres plus loin, ils se sont retournés.
— Woh, mais elle est froide!
— Oui, sept degrés. Ils n'ont pas réussi à remonter dans le bateau, au bout de trente secondes ils étaient frigorifiés et commençaient à désespérer. (NB: cela signifie qu'on renonce à lutter, c'est ce qui peut arriver de pire) Heureusement j'avais prévu ce qui allait se passer, j'étais resté sur le ponton, je suis arrivé très vite. Ah, ils n'étaient plus fanfarons, belle leçon d'humilité!

N'empêche, je suis frappée par la précision et la violence de mes mauvais rêves, ces derniers temps. (Non, ce rêve-ci n'est pas violent à proprement parler, d'autres le sont, qui concernent famille et amis.)