Le petit déjeuner n’est servi que jusqu’à neuf et demie, ce qui nous sauve: à cette heure-là nous sommes sur le pont-canal que nous traversons en flânant, nous observons la Loire, avons le bonheur d’apercevoir le point bleu d’un martin-pêcheur qui plonge à plusieurs reprises.

A dix heures nous sommes le long du chemin de halage à observer une grosse maison de maître (douze pièces principales, cinq —cinq!— caves, nous avons vu l’annonce dans une agence immobilière) en vente depuis si longtemps que la vigne vierge envahit les fenêtres. Il devient urgent de prendre soin de la toiture dont quelques tuiles semblent avoir bougé. Un peu plus loin, de l’autre côté de la rue, une maison aussi grosse est également en vente, mais confiée à une agence hors de Digoin.

Vivre ici: ce ne serait pas raisonnable (autant s’installer à Tours) mais je comprends au désir que j’en éprouve que je ressens un vrai besoin de paix.

Direction Nevers par les petites routes, un temps magnifique, «un temps de cabriolet».

Nevers désert, cette ville semble morte lundi au mois d’août. L’été, il y a les villes qui se vident et celles qui se remplissent, celle-ci est désespérante.
Le château des ducs de Nevers ne se visite pas à proprement parler, son accès est libre. Il est utilisé pour des expositions et par la mairie, un escalier neuf a été installé: je préfère cela à la momification. Ces trois semaines de voyage nous ont montré à plusieurs reprises que rien ne valait les châteaux habités, utilisés, vivants. Même les salles sous les combles utilisées par conseil municipal sont accessibles; c’est en tout cas ce que nous avons compris d’un film diffusé au sous-sol: il était si didactique que nous avons jugé inutile de monter dans les étages…
Bernadette Soubirous a vécu à Nevers les quatorze dernières années de sa vie et y est enterrée.
O. ne connaît pas la botte de Nevers mais Le Bossu n’est pas en vente au château.
Passage dans la rue Marguerite Duras (cf. Hiroshima mon amour).

Nous repartons dans la campagne par des routes un peu plus importantes. Château de Guédelon, nous y étions passés en 2003 au début du projet, c’est devenu une point de passage important, deux parkings et celui des bus. Poussière blanche et odeur animale. Trop cher pour une visite qui nous intéresse peu (quinze euros) mais je tiens à passer par la «boutique aux goodies»: je suis fascinée par les cochonneries (produits dérivés) qui s’y trouvent, autant par leur invention que par leur vente. H. achète de la confiture et des gâteaux.

— On revient avec combien de pots de miel?
— Trois : le château de Bazoches, l’hôtel à Digoin, et la Camargue au bord de la route.
(Digoin: le miel du patron, payable à part, pas avec la note de l’hôtel-restaurant, «c’est la caisse de la patronne».)

Rogny-les-Sept-écluses, aménagement commencé sous Henri IV, désaffecté depuis cent cinquante ans. Admirable et si tranquille. Les hirondelles effleurent l’eau, la touchent, nous ne comprenons pas si elles boivent ou attrapent des daphnies.

Nous rentrons. Montargis, Nemours, Fontainebleau. L’autoroute (chemin le plus rapide) permet d’arriver dix minutes plus tôt (que le chemin le plus court), nous dit Waze. Nous restons sur le chemin des écoliers: pourquoi serions-nous pressés de rentrer?