A-C m'appelle dans le RER. Elle divorce. Son aîné à dix-sept ans demain. Elle s'est mariée en juin 2014, le même mois que Matoo, après vingt ans de vie commune.
Comme une idiote, ce qui m'a échappé quand elle m'a dit cela (après un quart d'heure de conversation professionnelle, après que je lui ai raconté la folie de B. (elle appelait aussi pour s'excuser de ne pas avoir fait signe pour mon anniversaire (puisque nous avons une semaine d'écart et que je lui avais envoyé des fleurs, je suppose))), c'est: «déjà!».
Elle a éclaté de rire. Qu'a-t-elle compris? Je ne voulais pas dire que je pensais ce mariage condamné — ils avaient traversé de telles tempêtes, enfant anormal, enfant non désiré, adultère — que je le considérais solide: l'alliance avait été soumise à rude épreuve et avait résisté; mais plutôt que le mariage est une expérience terriblement difficile.
Je lui en veux à la fois de ne pas être plus résistante (je leur en veux de ne pas être plus résistants) et d'autre part je l'envie imperceptiblement, je sais quelle liberté elle s'ouvre, je la lui envie et je lui en veux de ne pas comprendre que c'est justement à cela qu'il faut apprendre à renoncer — au nom de quoi? je ne sais répondre et pour le peu que je saurais je n'ose.
Je songe à cet "amour" toujours brandi dans les textes et les exhortations: dans mon expérience, l'amour dans les familles ou entre amis, c'est surtout de l'obstination et de l'exaspération, de la persévérance malgré l'exaspération.