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Brève

Patrick Besson (dont vous savez tous désormais que c'est mon favori) fait de la pub dans le dernier Point pour un nouveau magazine, Service littéraire.
Quitte à avoir de faux amis, mieux vaut se faire de vrais ennemis.
François Cérésa

Le déclin culturel français

Lorsque le Time a titré «Le déclin de la culture française», tout le monde a pris un air outragé et personne n'a admis qu'effectivement, très peu d'artistes français sont connus hors de France, ce qui traduit, si ce n'est un déclin, tout au moins un manque évident d'aura.
Le Nouvel Economiste du 7 février 2008 fait sa Une sur le sujet et confronte les avis de Marc Fumaroli et de Philippe Dagen.
Je cite :

Lorsque l'édition européenne du "Time", du 3 décembre 2007, titre "Le déclin de la culture française", les réactions hexagonales, offusquées, scandalisées, sont unanimes. Et pourtant. Les chiffres prouvent que les arts modernes autant que contemporains - cinéma, livre, musique, peinture... - ne s'exportent plus, de la patrie qui les a tant vu prospérer, qu'en proportion infinitésimale.
[...]
Quelques personnalités de haute volée intellectuelle se sont insurgées dès les années 80 contre les choix politiques dans le domaine de la culture. Depuis le 3 de la rue de Valois, siège du prestigieux ministère inventé par André Malraux, une novlangue et une bureaucratie se mirent en place pour encadrer et subventionner les arts. A la fureur de Marc Fumaroli, académicien, professeur à l'université de Chicago, spécialiste mondialement reconnu du XVIIe siècle. Il dénonce, avec une colère non feinte, "le terrorisme de l'Etat culturel". Lorsque l'un des axes culturels, défini par l'exécutif, fut de "subventionner des espaces alternatifs et squats artistiques pour répondre au désir d'art des populations exclues de la culture", son sang ne fit qu'un quart de tour pour dénoncer "démagogie et démolition programmées des arts." Ce à quoi Philippe Dagen, critique d'art et voyageur sans bagage pour le compte du Monde, ajoute "l'Etat a mis en place une bureaucratie incompréhensible: elle a eu pour effet de créer la méfiance des marchands étrangers envers nos créateurs".
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Flash-back. Depuis les années 80, la bataille pour l'exception culturelle a empoisonné les rapports de la France avec l'Europe et les Etats-Unis. La mise en cause du financement des arts hexagonaux par des nations adeptes de l'économie de marché a provoqué en notre beau pays un combat homérique. Combat remporté par Jacques Chirac qui fit voter par l'Unesco le statut "d'exception culturelle", texte ratifié par 148 pays. Ainsi, notre système d'aides (le cinéma bénéficie chaque année d'aides, directes ou indirectes, de plus de 500 millions d'euros, selon le Centre national de la cinématographie) fut mis hors de portée de toute attaque étrangère. Vingt ans après les premières escarmouches sur ce sujet, en est-on arrivé à l'effet contraire ? Philippe Dagen penche pour le oui. "Quand je rencontre des marchands d'art, que ce soit à Séoul ou à Hambourg, je constate leur méfiance envers le système français." Et de poursuivre, "ils ne comprennent pas cette omniprésence de l'Etat, signe que les arts n'ont aucune confiance dans leurs potentiels". Plus perfide, Fumaroli accuse "cet Etat culturel qui a adopté le nihilisme esthétique mondain comme un impératif démocratique, tout en se targuant d'une exception culturelle expurgée de son sens.''
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Propos corroborés par Eli Broad, dans Le Monde 2, du 2 février. Le fondateur du Kaufman & Broad (immobilier) est l'un des plus grands collectionneurs d'art. Il confie sans ambages "nous voulons que nos investissements obtiennent des résultats tangibles". Et d'ajouter "dans l'éducation, nous voulons améliorer le niveau des études, dans les arts nous voulons former un public plus large". Tout est dit pour ce philanthrope américain, piqué de peinture, sculpture, architecture. Sans marché, point d'art vivant.
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Benoît Delmas, in Le nouvel Economiste n°1418, le 7 février 2008

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