Cette après-midi réunion à Passy. Retour gare de Lyon à Vélib. Les pistes cyclables ont été bien améliorées, elles suivent la Seine de bout en bout rive droite rive gauche, avec traversée à pont de l'Alma.
Il y a énormément de cyclistes, mais aussi de cycloporteurs, comment cela s'appelle-t-il, des voitures cyclotractées pour touristes, qui prennent beaucoup de places sur les pistes cyclables.
Il faut être très attentif. Tout reste courtois, pas d'insulte, mais ce n'est pas si simple de naviguer en fonction des vitesses relatives des uns et des autres, sachant que les pistes sont prévues côte à côte pour les deux sens, sans couloir séparé (et heureusement, cela permet une meilleure adaptation aux circonstances).
La plus grande crainte, finalement, c'est le piéton inconscient qui traverserait sans estimer la vitesse des vélos lancés à sa rencontre.

J'arrive dans le train (ligne R), m'installe, sors Chronique des sentiments qu'il va falloir que je couvre d'urgence car comme tous les livres POL il s'abime très vite.

Le conducteur au micro: — On vient de m'informer d'un accident de voyageur à Bois-le-Roi. Notre train s'arrêtera à Melun, puis sera direct Montereau par Héricy.
(En clair, à Melun il prendra l'autre côté de la Seine et ne passera ni à Bois-le-Roi, ni à Moret).

Nous partons à l'heure. Je suis admirative de cette décision prise si vite. Il ne doit pas y avoir beaucoup de circulation sur cette branche.

Coup de fil à H. Il viendra me chercher à Montereau.
Je lis jusqu'à Melun, puis dans la voiture vidée je m'installe près d'une fenêtre. Nous suivons la Seine jusqu'à Champagne, tout le bassin que je parcours à la rame, c'est magnifique, Fontaine-le-Port, Héricy, je reconnais le cimetière où est enterré Malarmé.

Montereau. Les passagers qui descendent consultent les panneaux pour repartir dans l'autre sens; il leur faut atteindre les gares évitées par ce train (je songe qu'il suffit de plonger dans la Seine et flotter, le courant est dans le bon sens), le prochain train en direction Paris est dans une heure. Toujours ce pang de culpabilité impuissante, ceux qui ont les moyens ont des solutions, les autres trinquent. Chaque problème de transport le met en évidence.

Nous dînons dans un libanais (majuscule ou pas pour un restaurant? adjectif ou substantif?) le long de la rue principale, peu passante. La serveuse, fille du propriétaire, paraît rassérénée à constater que cela nous plaît. Nous détonons avec notre allure bourgeoise, cela me fait rire. Les gens comme nous vont plutôt à Fontainebleau, cela me fait de la peine (s'il y a un mépris, c'est bien celui-ci). Je crois que les personnes que nous croisons sont surprises mais contentes de nous voir là, contentes que nous ne (les) fuyions pas. Tout respire la pauvreté dans cette ville, les magasins fermés abandonnés (covid?), les magasins ouverts aux devantures décolorées, les jeunes hommes un peu trop musclés, les jeunes filles un peu trop maquillées. Je songe à Faulkner. Mais ici, tout est calme, serein, il fait bon en terrasse, deux femmes à côté de nous se racontent des anecdotes en riant beaucoup.
Falafels et kébés moelleux à souhait.