Billets qui ont 'aviation' comme mot-clé.

Dernier jour

Voyage Yerres-Blois dans l'après-midi. Très douloureux pour H., j'espère que cela aura au moins pour effet de faire descendre le caillou.

Nathan nous appelle sur Facetime. Je suis heureuse et étonnée que nous n'ayons pas perdu son amitié à travers cette année tourmentée. Il est en voiture, autour de lui défilent les paysages enneigés de Pennsylvanie.

Soirée en famille et beaucoup de champagne pour le petit nombre de buveurs. J'ai droit à mon portrait Snapchat avec oreilles de lapin ou de chien, je suis donc entrée définitivement dans le XXIe.

— Vous avez vu mon côté Jennifer Aniston ?
— Plutôt Jennifer qu' Aniston.

J'ai reçu de quoi m'offrir un vol en avion de chasse : le billet n'a pas été acheté car il faut un certificat médical au moment du paiement. Je vais en profiter pour faire le test d'effort recommandé par mon généraliste.

L'heure du bilan annuel : positif, le voyage de cet été (les nuages, les paysages, les rêves, l'accueil de Rémi, de JY et de Michèle à Prague) et la MX5, les nouvelles fenêtres et la rénovation de l'escalier qui rendent la maison accueillante ; négatif, la folie de B. qui a fait s'écrouler le rêve américain, l'obsession de G, le départ d'Aurélie et d'Hubert, le lumbago.

Samedi de pré-rentrée

Rendez-vous chez le médecin pour un certificat médical. « Quel sport ? … De l’aviron ? Ah c’est bien, ça me change.»
Plus tard :
— Vous devriez faire un test d’effort pour être tranquille trois ou quatre ans.
— Ah, ça va venir : il est probable que mon père m’offre un tour en Mirage, les avions supersoniques. Un test cardiaque est obligatoire.

Nous avons emmené Clara à son appartement, ou plutôt sa chambre : une pièce avec douche individuelle dans une maison de maître à Créteil. Six colocataires à cinq cents euros mensuels chacun (hors charge), ça rapporte davantage que de louer à une famille.
Elle revient avec nous et repart en vélo, avec le vélo de mes onze ans qui roule toujours parfaitement. Si réellement elle s'en sert (je n'en reviens pas qu'une "jeune" de vingt-sept ans accepte de rouler sur mon vieux clou taché de rouille donc j'attends de voir si son enthousiasme a hérité d'un vélo gratuit persiste) si réellement elle s'en sert je le ferais repeindre (et de repasser mentalement les couleurs possibles : blanc, mauve, rose, violet, orange ? Pas bleu ou noir, non, quelque chose qui ne donne pas envie de le voler.)

Le soir, O. m'accompagne à la cinémathèque voir L'Atalante. Il a été restauré grâce au travail de Bernard Eisenschitz, ce qui est l'occasion de penser à Marie et Jérémy (il faut que je leur envoie un mot. Que s'est-il passé avec Marie ? Elle a été choquée que je proteste devant la vague de suicides à France Telecom, que je proclame qu'il fallait arrêter de leur faire de la publicité, qu'il y avait d'autres façons de résister. Elle a coupé les ponts. Est-ce irréversible ?)
Restauration argentique, montage à partir de la comparaison de plusieurs versions, et notamment une version anglaise. O. est surpris et un poil narquois devant la ferveur des présentateurs et des spectateurs, qu'il comprendra d'autant moins après vision : quoi, ce film un peu crachotant, cette histoire simplissime, c'est cela qui les enthousiasme ?
— Mais tu te rends compte, juste après le muet… tu as vu la diversité des plans, l'endroit où il a fallu réussir à mettre la caméra ? le cadrage de la caissière et le jeu des vitres, la façon dont tout est expliqué dès le cortège de la noce, la jeune fille qui quitte son village, qui n'a jamais rien vu,…
Devant l'admiration de tous, il veut bien convenir qu'il doit y avoir quelque chose, même s'il ne saisit pas exactement quoi (mais moi non plus, moi non plus : comment saisir les difficultés d'un montage, de la durée exacte d'une scène pour que tout soit montré et rien de trop ? A quel moment devient-on poétique au-delà de réaliste, à partir de quand la réalité bascule-t-elle dans la poésie ? A moins que la réalité soit toujours poésie et que l'art consiste justement à saisir celle-ci, la rendre visible.)

Nicolas Seydoux, de Gaumont, nous a promis une dernière restauration, celle qui saura nous rendre un son audible : en effet, il est aujourd'hui par moment si criard qu'il en devient inaudible.

Une illumination

Je suis passée voir mes parents avant de partir un mois en vacances. J'y suis passée seule, les enfants étant éparpillés et H. ayant des obligations.

Discussion de fin de repas, mon père a gagné des billets pour un tour en montgolfière ; il me dit qu'il avait voulu offrir à ma mère un tour en Mirage mais qu'elle avait refusé («de toute façon la voisine (médecin) a dit qu'elle ne me ferait pas de certificat médical ! »)
— Ah mais moi ça m'intéresse, m'exclamé-je.
— Ah bon ? fait-il étonné.

Je raconte ma visite au stand de l'armée de l'air en juillet 84 après mon bac, leur proposition de me faire conduire des avions-cargo : « Des avions-cargos ? Pas question, je voulais être pilote de chasse. Aujourd'hui je regrette, je me dit qu'une fois dans la place, de fil en aiguille… Ça a tout de même beaucoup changé en trente ans.
— C'est vrai, intervient ma mère. Le chef de la patrouille de France est une femme1. »

Et soudain je me dis qu'il n'est pas trop tard : je peux encore apprendre à piloter.


Note
1 : rectificatif un tour sur Google plus tard : a été une femme, en 2009.

La Suisse

Vieille habituée des Darwin awards, je n'étais pas enthousiaste à l'idée d'emprunter une ligne nommée Darwin Airline.

En débarquant à Lugano, l'air sent la laiterie et la bouse de vache.

Le capitalisme, c'est beau

Avons manqué nous étrangler pendant notre vol en découvrant que la compagnie Swiss nous proposait très sérieusement d'apaiser notre culpabilité de pollueurs par un don à l'organisation myclimate.
Désormais les entreprises ne sont plus les seules à pouvoir acheter le droit de polluer. Je suis émue.

Regrets et projet

A midi, Paul me racontait qu'enfant, il avait gagné un baptême de l'air. Le lot était convertible en argent liquide: un baptême de l'air ou cinquante francs. Comme il n'avait pas un sou vaillant, il avait choisi l'argent et le regrettait amèrement aujourd'hui.
J'ai un souvenir du même genre. Au début des années 70, mes parents faisaient chaque année en juillet le trajet Agadir-Vierzon en voiture avec deux petites filles: pour eux trois jours et trois nuits de conduite en se relayant, pratiquant sans dormir, pour nous un ennui mortel que seules les disputes venaient égayer. C'est ainsi qu'ils décidèrent une année de me renvoyer en France seule, en voyage accompagné. J'avais six ans, l'hôtesse de l'air me proposa d'aller visiter la cabine de pilotage de la Caravelle. J'étais intimidée, j'eus peur de déranger, je refusai. Je le regrette beaucoup.

Après la guerre, Paul passa son brevet de pilote. C'était plus amusant qu'aujourd'hui dans la mesure où il n'y avait pas de contact radio avec le sol: la première fois qu'on s'élançait, on était réellement seul, d'où quelques émotions fortes au moment de l'atterrissage.
Il y a deux ou trois ans, il m'avait proposé de faire un tour en planeur avec lui. J'avais refusé par peur de faire de la peine à H., qui lui aussi aimerait faire du planeur. Aujourd'hui, j'ai changé d'avis. Le temps se fait court, si je dois faire du planeur avec Paul, c'est au plus vite, dès cette année. Lâchement, je l'ai chargé de l'intendance et des détails pratiques.
A suivre.
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