Billets qui ont 'folie' comme mot-clé.

Concours de WTF

— Et toi, ta journée?
— J'ai appris que X, Y, Z, la boîte et moi, nous avons tous été attaqués au pénal en avril dernier.
— En avril? (La fille qui rentre tard et ne sait plus où elle en est) En avril? Mais ça fait longtemps… Comment c'est possible? Comment avez-vous pu être accusés sans être avertis?
— Je ne sais pas.
— Et vous êtes accusés de quoi?
— Je ne sais pas. On va m'envoyer les papiers, je vais lire. Ils ont également accusé le commissaire aux comptes et même l'avocat de la boîte.
— L'avocat de la boîte? Ils ont trouvé un avocat pour accuser un avocat? Le juge va apprécier.


(Moi aussi j'avais une nouvelle WTF, mais c'est professionnel. Je le raconterai dans quelques années. D'après H., j'ai gagné le concours.)


Et sinon une vidéo incroyable. Cliquez et regardez jusqu'au bout.

Ubu

Je ne sais pas comment expliquer les événements.
Depuis le 7 septembre, H. a reçu de la part de Tullius, associé à 1% dans la boîte de H. et à 11% dans une autre1, trois lettres recommandées et trois injonctions via huissier.

Pour rappel, Tullius est président de cette autre société. L'investisseur principal a convoqué pour demain une AG extraordinaire pour le destituer. A la demande des avocats de cet associé, un huissier nommé par le tribunal de commerce y assistera afin d'éviter toute contestation ultérieure (car avec la destitution du président vient l'accès aux comptes bancaires: personne ne sait dans quel état ils sont depuis juillet).

Tout était donc balisé. Jusqu'à huit heures du soir.
A huit heures, alors que nous étions en train de regarder Mrs Maisel, un ami-associé téléphone: «Tu as vu les derniers mails de Tullius?»
Tullius a envoyé cinq ou six mails, pour déclarer irrégulière l'AG de demain, réclamer huit cent mille euros à l'investisseur principal, annoncer qu'il démissionnerait le 14 octobre, nommerait un administrateur judiciaire (pour empêcher la nomination d'un autre président) et qu'il convoquait une AG ordinaire le 19 octobre (nous devrions recevoir la convocation par lettre recommandée).

Coup de chaud, mails, appels, sms. Décision de ne pas céder à l'intimidation et de maintenir l'AG extraordinaire pour destituer Tullius.
L'amusant — et c'est à ça que je voulais en venir — c'est que l'AG du 19 devra se tenir malgré tout — car elle aura été convoquée par un président en exercice même si le 19 il ne le sera plus — du moins nous l'espérons.



Note
1: Rappel : sept parts à 11,43% (dont H. et Tullius) et la huitième à 20% (l'investisseur principal)

De plus en plus fort

J'avais aimé le printemps 2017 pour la touche de folie de l'affaire Fillon; la certitude en se levant le matin et en ouvrant la radio qu'il y aurait quelque chose de neuf, d'inattendu, d'inimaginable (ah tiens, sa montre, ah oui, sa femme, et ses vestes, et des emplois fictifs pour son fils et sa fille, mais en payant moins sa fille, faut pas déconner avec le patriarcat, etc.) J'avais adoré qu'il gruge même son propre parti, le hashtag #rendslargent avait fait ma joie. Chaque jour une envie de rire d'incrédulité.

Désormais j'ai l'impression de vivre quelque chose de cet ordre dans ma vraie vie à moi.
Aujourd'hui, Tullius le voisin fourbe nous a envoyé un huissier pour présenter seize questions à H. Les questions, rédigées par un avocat (paraît-il, ce point ne me paraît pas clair), sont du genre «Êtes-vous actionnaire de la société X?», sachant que H. et le voisin en sont les seuls associés.
— Dis donc, ça doit lui coûter une blinde.
— Mais non, il fait payer la société Y. (dont H. et Tullius sont associés avec six autres personnes.)
— Tu veux dire qu'il utilise l'argent de la société Y pour en attaquer l'un des associés? (sachant que l'associé principal et investisseur de Y est en train de mener la procédure nécessaire pour démettre le voisin de son poste de président de Y.).
Finalement c'est autant Pettigrew (pour ceux qui connaissent Harry Potter) que Tullius Detritus (pour ceux qui connaissent La zizanie).

Les deux frères qui voulaient vendre leurs parts de la société Y ont envoyé ce soir un mail aux six autres associés pour les prévenir qu'ils avaient adressé vendredi dernier au voisin président une lettre recommandée en ce sens.
Il ne s'agissait donc pas d'une manœuvre de leur part — ils souhaitaient réellement vendre — et Tullius ne pourra pas faire comme si la lettre n'existait pas (ce qui était ma crainte s'il en était le seul destinataire).

***


Visite de l'agente immobilière qui nous remercie (?!) d'avoir suivi ses conseils.
Euh, si on fait appel à un pro plutôt que passer par De particuliers à particuliers, c'est bien pour suivre ses conseils, non?
Elle est accompagnée par une consœur qui prend des photos et paraît elle-même intéressée pour acheter la maison. A suivre.

***


Toute la journée sur la formation Wordpess financée par mon compte de formation. Ils ont une vision extrêmement rigoureuse des catégories et des tags. Il ne faudrait pas qu'ils voient le foutoir de mes blogs.
Je me rends compte que sur mon site pro en Wordpress, j'ai mélangé le html, l'éditeur Gutemberg et le thème Divi. Sacrée salade qui ne va pas faciliter la formation de ma collaboratrice.

Aide à la rédaction

En 2017, H. a monté sa propre entreprise en prenant le voisin comme associé à hauteur de 1% (pour des raisons de statut personnel il ne voulait pas être seul associé).

Par ailleurs, il fait partie des huit associés1 d'une entreprise plus ancienne (cinq ou six ans, j'en retrouverai la trace sur ce blog, je ne sais plus ce que j'avais écrit) qui associait H., le voisin et deux frères.
Par bonté d'âme, démocratie, souci que chacun ait un rôle, à l'été 2019 le voisin a été nommé président de cette société afin de lui permettre d'avoir un rôle puiqu'il n'était ni investisseur, ni développeur, ni technico-commercial.
Depuis que le voisin Tullius sème la zizanie, deux groupes se sont formés: d'une part H., deux amis de longue date et l'investisseur (qui paie les salaires des deux salariés et est associé majoritaire); d'autre part Tullius, un jeune développeur (l'un des deux salariés) et les deux frères.

Il y a quelques jours, prenant acte de la folie dévastatrice du voisin, les frères ont téléphoné à H. pour dire qu'ils voulaient vendre leurs parts (11,43% chacun) selon ce que prévoyaient les statuts, c'est-à-dire qu'elles soient offertes à tous au prorata de leur détention actuelle. Ils demandaient à H. son aide pour rédiger la lettre nécessaire.

C'est trop beau pour être vrai et nous nous demandons si c'est une manœuvre. Malgré tout, H. a dicté la lettre nécessaire — entièrement au téléphone, pas d'écrit. Nous sommes prêts à nier toute implication en cas d'accusation d'intimidation ou de manipulation ou de je ne sais quoi.
Mais non nous ne sommes pas parano.



Note
1 : sept parts à 11,43% et la huitième à 20%

Crise de chagrin

Entraînement d'ergo. Je n'arrive à rien. Samedi nous avons un test. Attaque de chagrin, sanglots incontrôlables, incapacité à parler et H. qui m'en veut parce que je n'ai pas la force de répondre à ses questions (il faudrait reprendre souffle pour répondre. Et que répondre? )

Mais qu'est-ce que c'est que ce truc? Les hormones? La ménopause? Déprime profonde.

Puis je découvre un tweet de Trump.


Stupeur profonde.

Lueurs de raison dans un monde qui perd la tête

Aux USA, les enfants cherchent à se faire vacciner en cachette de leurs parents (ce qui est illégal dans la plupart des Etats). Pour cela ils posent des questions sur des forums, dont Reddit.


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Un barbecue anniversaire

Pas assez dormi : couchée bien trop tard zonée devant The Good Wife. Cette série met bien en scène l'intimité : ce que c'est que se connaître intimement entre époux, même après la trahison et dans la colère. L'actrice est exceptionnelle.

Anniversaire chez the voisins (ils sont nés à une semaine d'écart, pratique).

Cette année sera décidément sous le signe de la folie : une connaissance (qui a lui-même était hospitalisé plusieurs mois pour dépression) raconte la maladie de sa fille de quinze ans, pour laquelle il n'y a pas de nom pour l'instant : trop tôt pour l'instant. Parmi les symptômes, il y a la scarification ; l'incapacité à supporter d'être dans un espace confiné avec d'autres, donc l'incapacité à aller en classe ; la peur d'approcher ses parents, car celle qui habite dans son corps risque de les attaquer et de leur faire du mal…

Le voisin a un esturgeon de vingt centimètres dans un bassin de seize mètres carrés dans le jardin. Caviar dans vingt ans… Ah non, zut, c'est un mâle. Je suggère qu'on pourrait manger le sperme plutôt que les ovules, cela n'a pas l'air de réjouir les messieurs présents.

Tard le soir, nous mettons à jour mon CV pour un poste mieux payé, plus prestigieux et sans doute ennuyeux à mourir. Je ne sais pas si c'est une bonne idée. (Je suis sûre que c'est une mauvaise idée mais cela peut être un tremplin utile vers autre chose.) H. a l'idée étrange de mettre "grec" en loisir. C'est un bon test pour jauger ceux qui vont lire ce CV. Quelle quantité de déviance à la norme sont-ils prêts à accepter ?

Les fous

— A une époque, nos bureaux étaient à côté de l'hôpital xxx. C'est là que j'ai découvert que la folie ne se voyait pas. Il y avait celle que j'appelais "la rafleuse": quand elle arrivait, il fallait tout planquer, les stylos, les tampons, les téléphones… Elle attrapait quelques bics et elle repartait… Il y avait le type super sérieux en cravate qui venait t'expliquer qu'il y aurait des travaux dans la rue, qui te montrait des plans, t'exposait les conséquences. On l'appelait l'architecte. Un jour un homme très bien habillé m'a demandé de lui prêter mon téléphone pour prévenir sa mère qu'il ne rentrerait pas à l'heure. Au fur à mesure qu'il parlait, j'ai compris qu'il s'adressait à l'hôpital et qu'il ne voulait pas rentrer…

It is closing time in the gardens of the West

Comme prévu jeudi ou vendredi, H. a rencontré B. chez son avocate (plus un autre avocat et le patron du cabinet comptable). A l'origine cela devait être une réunion pour décider de ce qui pouvait être sauvé, mais avec le licenciement de Carole, il n'y a plus rien à sauver.

"Ils" ont essayé, pourtant. Nous avions réfléchi aux conditions: reprendre Carole, ouvrir la filiale aux US. Les deux conditions ont été refusées. En revanche, proposition financière mirobolante pour rester malgré tout. Je méprise ces gens qui pensent pouvoir tout obtenir avec un gros chèque. Allez vous faire f***! Tout ça pour que le cirque recommence dans une semaine ou un an… La confiance est définitivement brisée.

H. me rejoint à La Défense. Nous déjeunons ensemble. Nous faisons la liste des personnes à prévenir personnellement, ceux dont il me semble important qu'ils n'apprennent pas cela par la bande, ceux que nous voulons (espérons) conserver comme amis ou au moins connaissances. Six ans, sept ans… Je me souviens de ce jour de juillet ou août 2010, j'allais entrer dans le RER pour rentrer, j'ai H. au téléphone: «Il faut que je te parle.» Quelle solemnité soudain. J'ai eu peur: j'ai fait une conn**? il a fait une conn***? «Que dirais-tu si j'allais travailler à Mulhouse?» Euh… comment avouer que je ne situe pas exactement Mulhouse, là tout de suite maintenant sur un quai de RER. «Euh, rien… si ça te va, pourquoi pas?» (La même année, en septembre, C. devait partir en Suisse.)
And now back home. (Ça me fait penser que je vais pouvoir m'absenter le week-end: j'évitais, sinon nous ne nous voyions plus du tout.)

Nous faisons la liste du matériel qui appartient à l'entreprise et à rendre. Quand je le quitte, il va s'acheter un téléphone. «L'employé m'a proposé de m'aider à configurer mon iPhone, je lui ai dit que je m'en sortirai».

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La chienne que j'ai d'une certaine façon sauvée il y a deux ans (c'est ma fierté) est morte hier soir.

Début de clôture

Sortie en huit (de couple) pour la première fois depuis juin 2015. Nous avons fait beaucoup de progrès depuis cette époque où j'avais cru un moment que nous n'arriverions jamais à tourner (et nous voilà partis jusqu'au Havre). L'équilibre était même meilleur que dans certains quatre.
Ce qui me fait plaisir, c'est que c'est Vincent qui nous l'a proposé et non nous qui avons quémandé: il nous considère enfin à niveau. Cela conforte mon idée de proposer aux filles de s'inscrire à la coupe des dames à Angers. (Si nous réussissons à trouver le nombre de rameuses nécessaires (l'expérience prouve qu'il faut être douze ou treize pour faire un huit, paraît-il), il faudra aussi trouver un conducteur pour la remorque. Enfin, nous n'en sommes pas encore là.)

J’ai écrit un mail pour lister les risques réels que court la mutuelle (la question d’un actuaire dans l’après-midi donne à penser que le dernier (des risques que j'ai listés) est peut-être en train de se réaliser, ou est en train de commence à se réaliser (cela prendra bien trois ou quatre ans).
J’ai lancé les premières opérations pour la clôture du bilan. Ce sont les travaux que je préfère, jusqu’à fin avril, le moment où tous les chiffres coïncident et les engrenages s’emboîtent parfaitement.

Front de B.: H. a eu l'expert-comptable au téléphone et a rétabli quelques vérités («B. ment comme un arracheur de dents, ce n'est pas nouveau»), il a rendez-vous lundi avec l'avocat et B. pour essayer de définir une ligne de conduite. «Au moins, dit-il, je vais avoir affaire à quelqu'un qui a toute sa tête.»

Hier H. m'avait proposé de passer le week-end à Caen, j'ai fait une contre-proposition ce matin: Nancy. Au moment de prendre les billets nous nous apercevons avec surprise que les billets de TGV sont en sur-réservation: une fois encore, nous avons négligé de prendre en compte les vacances scolaires qui désormais nous échappent. Nous pourrions prendre un train très tôt, nous choisissons paresseusement 12h20 gare de l'Est: je n'ai pas envie de me presser.

Risques

Pas grand chose.
Un peu agacée de lire la "revue des risques" écrite par un cabinet d'audit avec le président et le trésorier pour qu'à la fin ceux-ci concluent: «en fait il n'y a pas de sujet».
Ben non il n'y a pas de sujet. S'il y en avait eu, croient-ils vraiment que j'aurais attendu cette mission d'audit pour le faire savoir? Enfin, ça fera plaisir à la commissaire aux comptes.
L'agacement au carré, c'est qu'il y a bien des risques (de disparition de la Mutuelle), trois, que j'ai cités. Mais comme ils ne sont pas "opérationnels", ils n'ont pas été repris.

Il se passe quelque chose au niveau de la paie. Je sens des jeux d'influences sans comprendre entre qui et qui ni pourquoi. La mise en place de la DSN (déclaration sociale nominative) exacerbe les tensions.

A la maison, sur le "plan B.", cela ne va pas mieux. H. s'en veut : «si je n'avais pas attendu, tout serait signé».
Mais à l'époque (les quinze premiers jours de janvier, comme cela paraît loin), il s'agissait de ne pas trahir B., de deviner sa volonté pour ne pas agir contre son gré. Il n'y a pas à s'en vouloir de cela, c'est tout à son honneur.
Maintenant tout semble bloqué: ne pas aller en Amérique, perdre les deux ingénieurs-clé, ne pas pouvoir livrer à temps l'Etat, perdre la face… Comment se faire embaucher ensuite?
Tout paraît si grave. Je lui rappelle que c'est une illusion: personne ne se souvient de rien, personne ne se soucie de rien, il suffit de continuer.
H. a enfin mis Nat au courant. Il était temps.

Angoisse

Quatre secoué par les péniches : Pascal (qui brûlait de prendre la nage depuis mercredi dernier), Peter et ?? (Christian?) Je suis à la barre. Il fait doux.

J'avais posé mon après-midi pour aller assister à un cours sur la génétique des films (avec Daniel Ferrer) mais entre Trump et B. je me sens fatiguée. Un détour par Ladurée (fatalitas, il n'y a plus de glace au gingembre!) et je rentre. Le voisin est là.

H. a appris que B. a demandé à son avocat de gérer ses affaires. Jusqu'où va le mandat de celui-ci? En attendant, la BPI s'inquiète, plus personne ne lui répond, il y a deux millions d'euros en jeu, ce qui représente une grosse somme pour une PME de quatre-vingt personnes. Et Nat aux Etats-Unis qu'il va falloir payer… et les virements qui ne peuvent être faits sur les comptes américains sans la signature de B… Et les quatre-vingts salariés qui ne savent pas que leur entreprise est sur le fil…
H. est épuisé. Trop de chauds et froids et la perspective de voir disparaître tout ce pour quoi il s'est investi depuis 2010.

Incompréhension et amitié

Une fois encore, pas de rapport entre les deux éléments du titre de ce billet : ce sont les deux teintes de la journée, tant la seule unité de nos journées n'est parfois que nous-mêmes.

H. m'appelle vers midi. Il est décomposé:
— B. ne veut pas signer les billets d'avion pour Nat. Il ne veut plus aller aux Etats-Unis.
— Mais il a bien signé pour la création de l'entreprise?
— Oui. Il est fou. C'est impossible de travailler avec lui. Je ne sais plus quoi faire.

Je donne quelques conseils, en particulier d'envoyer sans commentaire un résumé en français en quelques points ne dépassant pas la page A4 des documents envoyés en anglais, puisque B. ne veut pas avouer qu'il ne parle pas anglais.

Le voisin est d'un grand secours. H et lui ont organisé un concours pour savoir qui avait le patron le plus fou.

Le soir je vois Aline. Nous parlons chats, santé, voyages. Elle me raconte la grande époque des éditions J'ai lu, avant les années 90, le début de la financiarisation. Cela me paraît toujours mythique, j'ai commencé à travailler à ce moment-là.
Elle me parle d'un voyage des cruchons pour visiter les châteaux de la Loire. D'un côté je viendrai de les visiter une fois encore avec Nat, d'un autre côté il s'agit de la partie au-delà de Tours, que je ne connais pas. Et puis H. devrait être aux Etats-Unis, s'il est encore possible d'y croire. Je vais essayer d'y aller.

Vendredi

Encore un beau quatre. Le moment où le bateau quitte le ponton et se retrouve au milieu du courant est un moment de ravissement: à chaque c'est une redécouverte, à chaque fois j'oublie combien j'aime être là, surtout avec trois autres rameurs que je connais maintenant depuis des années. Confiance et fraternité le temps d'une sortie, voilà un sentiment que je n'éprouve plus sur la terre ferme. Marc, Philippe, Jean-Pierre, moi à la barre. Un tour de l'île et un barrage. Un bateau sans doute moins beau que mercredi, mais les conditions sont moins dures, il fait moins froid.

Absurdement je passe l'après-midi à trier et jeter des mails dans mes archives (mais pourquoi?)

Le soir réunion avec les CAC (commissaire aux comptes). (Réunion à 16 heures un vendredi soir. Lol.) J'abandonne mon vocabulaire zazou (celui destiné à ne pas me prendre au sérieux qui fait qu'on ne me prend pas au sérieux) pour utiliser des mots davantage Science-Po (celui qui écrase toute personne ne me prenant pas au sérieux).
Je n'arrive pas à comprendre comment quelqu'un de mon âge peut encore utiliser la rhétorique du yaka faukon:
— Mais il suffit de rapprocher les fichiers puisqu'on a une clé commune…
— Certes, je vous fournis les fichiers puisque vous proposez de nous aider. Mais je vous ferai remarquer que ce qui compte, ce sont les dates d'affiliation et de radiation. Le fait que les personnes apparaissent dans les deux fichiers ne suffit pas. Or le fichier fourni par X ne comporte pas de date.
— Ah…

Ben oui. Sinon nous aurions déjà fait le nécessaire. Que croit-elle ?

Jeudi et vendredi H. a vu son patron B. (sorti de l'hôpital psychiatrique le week-end dernier). Il lui a exposé tout ce qui ne lui convenait pas, exactement comme si B. était (dans son état) normal (mais il n'y a pas d'état normal de B., c'était connu avant, cela ne paraissait pas si grave. Le problème, c'est que la forme juridique de l'entreprise est une SAS, c'est-à-dire qu'il en est le seul actionnaire. Il n'y a personne pour prendre le relais en cas de défaillance de B. maintenant qu'il a révoqué le mandat de mandataire social de H. en sortant de l'hôpital.)

Mort de Henry-Louis de La Grange. Pensées pour Vincent.

Troisième jour après Noël

H. arrive dans la cuisine. Il fait une drôle de tête, il est blanc.
— Ça va ?
— Non.
(Mon cœur se serre: ses parents? sa famille? Les décès sont brutaux, inattendus, de son côté.)
— J'ai eu un coup de fil de Grégory. B. a disparu. Il s'est disputé avec son frère et il a disparu. Les gendarmes le recherchent.

Je tente de le rassurer comme je peux, de rationaliser. Je ne comprends pas comment il est possible de lancer un avis de recherche sur une personne majeure disparue depuis quelques heures seulement (cela m'inquiète mais je ne le dis pas). Je souligne à quel point cela n'est rien par rapport à un problème de santé dans la famille. Mais il pense à la fois à leur propre dispute de vendredi dernier et aux projets en cours, aux Etats-Unis, etc.: comment prendre des décisions légales avec un patron disparu? Le côté feuilleton américain est si prégnant qu'il en est irréel: est-il possible que cela soit vraiment en train de se passer?

Je classe des papiers, range un peu, non plus les pièces de la maison, mais les documents, autre sorte de pièces. Il fait un temps magnifique, nous pensons aller visiter le château de Fontainebleau mais il est déjà trop tard (il est 15 heures pour une fermeture à 17), je déroute les projets vers le club de Melun et nous suivons (à pied) la Seine rive gauche à Chartrettes. Il fait beau, froid, un skiff, un pair-oar, un double: les "compèts". La route cycliste dont l'indice quand je rame sont les vélos suit apparemment un conduit d'hydrocarbure (puits de pétrole en Brie, péniches et réservoirs à la sortie de Melun). O. et H. discutent de la nature des fils électriques: fibre ou pas fibre?
Il faudrait fibrer la France tout entière pour mieux répartir la population. C'est un argument de choc pour un village: «nous avons la fibre».

Coup de fil, B. est retrouvé, il a fallu cinq équipages de gendarmerie (dix gendarmes) pour le maîtriser (je pense à la colère de Valérie Trierweiler), il est à l'hôpital: ouf, il n'est pas mort d'hypothermie dans un fossé. Risque-t-il d'être déclaré irresponsable? Et dans ce cas, que se passera-t-il? un juge de tutelle, un conseil de famille? Comme nous sommes peu préparés à ce qui ne devrait arriver que dans les films. Comme nous oublions que la fiction s'inspire de la réalité et ne constitue pas un monde en soi.

Cahier des charges pour le film vespéral: «quelque chose de gai». J'ai repéré Ciel d'octobre il y a quelques jours. Ce n'est pas gai mais encourageant, plein d'espoir: un garçon fils de mineur veut sortir de son trou et se passionne pour les fusées. Le ciel d'octobre est celui du Spoutnick. Le jeune garçon, c'est Jake Gyllenhaal.

Episode 11 de Sense8 saison 1.

Enquête

Les questions sont ici .

1/ Je suis incapable de faire ça. Quoi qu'il en soit, je ne reconnais pas grand monde.

2/ Hypersensibilité de l'ouïe (tare familiale. Mallarmé avait la même paraît-il): peut-on parler de "développement"?

3/ Je fais moins, je suppose.

4/ Oui. Beaucoup, mais de façon inconsciente, la plupart du temps.

5/ Non (je touche du bois).

6/ Souvent, très souvent, moins souvent qu'avant. Ou peut-être plus.

7/ L'hôtel de la plage et Préparez vos mouchoirs.

8/ Non, pas spécialement. Mais il m'arrive d'attaquer, par malice (sens fort et sens faible).

9/ Trop facilement. C'est contre-productif.

10/ Non. Quoi qu'il en soit, des années sur la toile m'ont démontré qu'il y avait une certaine prétention à se croire la cible de tous les regards. Tout le monde s'en fout, en fait, et c'est très rassurant.





Agenda
Anniversaire de Raymond. Première réunion de chefs pio pour Clément.

Dans la série t'es folle

H. vient de me le rappeler (en secouant la tête: «tu es complètement folle»): la semaine dernière, à la banquière qui nous demandait: «Que voulez-vous?», j'ai répondu «Qu'on nous aime». (Mais ce n'était pas si fou, et ça n'a pas si mal marché (je veux dire qu'elle a compris ce que je voulais dire (ça intervenait après une bonne demi-heure de conversation): ne pas être ennuyés pour des détails, être contactés pour les pépins importants).

(Et ce même jour, j'ai découvert (je veux dire: j'ai réellement compris) — vous allez rire — que les banquiers aimaient l'argent (la pauvre, elle était toute déconfite que nous n'ayons aucune velléité d'économie ni de placements).)

Lars von Trier : le nouveau Paco Rabanne

Ce que je savais de Lars von Trier, dans l'ordre de mes vues / visions / visionnages (quel est le mot adéquat?) avant de voir ce film:
Breaking the Waves fascinant, Element of crime le meilleur, Dancer in the Dark exaspérant dans son pathos larmoyant et ses erreurs de logique.

La première partie de Mélancholia m'a amusée (le personnage de Charlotte Rampling m'évoque quelques souvenirs personnels: communauté de folie), mais plus le temps passait plus il ralentissait, et le film devenait franchement ennuyeux (un beau verger avec des pommes, une balançoire, que c'est beau, et le cheval qui ne passe pas le pont, et le contraste entre la blonde et la brune,…: un catalogue de clichés), je n'arrivais pas à voir ma montre, j'hésitais à sortir quand j'ai eu envie de rire en voyant Kirsten Dunst allongée à poil près de l'eau (je vous l'ai dit: cliché sur cliché, dans tous les sens du terme) (s'est-elle fait refaire les seins?)

Imaginez à peu près ça (mais nue) :







Et ça continue, d'illogisme en invraisemblances (et pendant ce temps je pense à Pournelle), pour finir comme un mauvais tee-shirt.





Arrghhh.

Diagnostic

Literal interpretation, and insensitivity to context, are not marks of rationality but mental disorders.
John Kay

Et dans ce cas-là, on fait quoi?

Folie I

J'ai évoqué autrefois ma terreur de finir comme Ruth Fisher, enterrée vivante entre la machine à laver et "les enfants à élever" (syntagme figé). Me revient en mémoire une émission d'Eve Ruggieri (j'entends encore sa voix prononcer les mots), en 1985 ou 1986, dans laquelle elle évoquait une jeune femme qui, venant d'apprendre la mort de son mari, hurlait d'affolement dans les couloirs du château de Versailles: «Pas le couvent! Pas le couvent!»1. Parfois devant les tâches ménagères et les heures de RER je hurle dans les couloirs de ma tête: «Pas le couvent! Pas le couvent!»

(Qu'est-ce que je pense de Mad Men? Qu'est-ce que je pense de Don Draper, un personnage qui enferme sa femme, lui fait suivre une psychothérapie, interroge le psychiatre (ce qui pour moi est l'équivalent d'un viol de l'âme), mais n'est pas capable de lui confier sa vraie identité, ne lui parle pas, la laisse mourir à petit feu? Je n'en pense rien, tout cela m'est étranger, à mille lieues de mes préoccupations. Ce ne sont pas des personnages qui se battent, ce sont des personnages qui survivent. (A la rigueur Roger…) (Parenthèse dans la parenthèse: Et si l'on considère que la représentation dit une certaine vérité, à la fois sur les années 60 et les années 2000, il me semble que le personnage de la femme de Don Draper (son prénom m'échappe: Bett? Elisabeth?) est l'ancêtre (bien que la chronologie de la production soit inverse) des clinquants Desperate Housewives d'une part, Sex and the City d'autre part. De cela je tirerai une conclusion concernant mes goûts: je n'aime pas les téléfilms "vernis", qui montrent un monde où tout est brillant, au sens propre (la décoration, les vêtements, les couleurs) et figuré (la situation sociale, les métiers, l'éducation, etc).))

Pas Ruth Fisher, donc.
Mais en ce moment, c'est une question de Claire qui me trotte dans la tête:
— Maman, pourquoi est-ce que j'attire toujours les dingues ?


Note
1 : Laurent m'apprendra qu'il s'agit de la princesse Palatine.
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