Billets qui ont 'inventaire' comme mot-clé.

Une table

11h. Café noisette au comptoir.

Une table de café carré, désertée.
Un présentoir de jeu de hasard, deux verres de rosé, un stylo bic posé sur un ticket de jeu, une écharpe mauve poilue, un petit livre carré (7x7 cm, j'ai mesuré du regard) intitulé Un petit livre pour ma femme. De l'autre côté de la table, un paquet de Winston, un flacon tel qu'en donnent les laboratoires pour les examens d'urine. Il contient deux gélules encore dans leur emballage d'aluminium. Le rouge du bouchon du flacon est assorti au rouge du paquet de cigarettes.

Plus tard, quand je me retournerai, ce sera l'homme qui sera assis du côté de l'écharpe et du livre.

Le mystère des valises qui ne ferment plus

Je ne sais si c'est le rhume rapporté de vacances (dû à l'air marin, au parfum des glycines, à la pressurisation de l'avion?), l'âge (puisqu'on dort moins en veillissant, c'est bien connu) ou la preuve que j'ai assez (trop?) dormi pendant les vacances, mais je suis réveillée depuis une heure et je n'arrive pas à dormir.

Un post un peu exhibitionniste pour se remettre en jambes. Il s'agissait à l'origine de comprendre pourquoi les valises ne fermaient plus au retour ("Je ne comprends pas, on n'a pourtant rien acheté").

Sont donc revenus dans nos bagages sans être partis avec nous quatre chemises, une chemisette, un chemisier, une robe, une cravate, une paire de chaussures pour homme (mais une autre a été jetée sur place: compensation), une paire de chaussures pour femme (pour aller avec la robe), Les élégies de Duino aux éditions Rivages, bilingue, commentées par Hannah Arendt, irrésistible (acheté au départ à Roissy, prise de la crainte soudaine de manquer de lecture avec "seulement" Le Journal de Travers (!)), Souvenirs du monde, Ricordi di un tempo perduto d'Elisabeth de Gramont (le titre en français repéré à la devanture d'une librairie d'occasion m'a fait espérer un livre en français, le livre est en italien mais le libraire était si aimable dans un français si parfait à l'accent si charmant que je n'ai pas eu le cœur de ne pas acheter le volume, je l'ai pris en me disant que je pourrais toujours l'offrir… Mais finalement les photos à elles seules valent la peine «a destra: Corise de Noailles, nata de Gramont, sorellestra di Elisabeth de Gramont. È considerata la prima sport-woman in Francia»), des spaghettis n°13 ("Aaaaah, on n'en trouve pas en France, ils s'arrêtent à 11!"), un maillot de foot du Brésil n°9 Ronaldo (je sais, je sais), deux petites briques de crème italienne "panne" (on en trouve difficilement en France chez certains traiteurs italiens), une bouteille de shampooing (même marque qu'en France, mais tandis qu'en France il est indiqué "au lait", en Italie il est précisé "au lait végétal" (?)), des ciseaux à ongles, des kleenex, de l'aspirine, de l'efferalgan, du spray pour la gorge, de la vitamine C (la pharmacienne ne parlait qu'italien (nous avons trouvé les Vénitiens adorables, jamais je ne serais aussi patiente qu'eux avec les hordes de touristes (à leur place, je créerais des endroits réservés aux citoyens (d'ailleurs ce n'est peut-être pas pour rien que c'est la Guidecca qui se repeuple))), un crayon souple de 60 centimètres de long, rouge, une gomme souple en forme de long boudin (25 cm) vert fluorescent, un crayon se terminant par un gens d'arme en métal, un canon taille-crayon, un tee-shirt noir brodé du lion de Venise taille M, c'est-à-dire n'allant à personne, une reproduction des Noces de Cana du Tintoret et le lot de dix cartes postales des Titien de la sacristie de Santa Maria della Salute, un miroir convexe comme celui des Époux Arnolfini (boutique Canestrelli à deux pas du rio de La Toletta, Dorsoduro 1173), une bouteille poussiéreuse d'encre Montblanc couleur bordeaux (pas vraiment en vente, je pense, elle décorait la vitrine d'un tabac sans doute depuis longtemps. Me voilà tranquille pour trois ans (le temps d'une bouteille) (cette couleur n'est plus vendue en France)), un arc en plastique rouge et trois flèches qui ont servi à attaquer l'Arsenal (si, si), une dague en plastique, des fils à scoubidou et Venise: une invention de la ville (XIIIe-XVe) (après une discussion sur les égoûts et les contraintes urbanistiques propres à Venise).

Inventaire à ma gauche

Il faudrait faire un billet court, aller se coucher, se lever tôt demain pour transcrire le séminaire n°12 avant le treizième.
Je n'ai pas d'idée de billet court.
Avant (de bloguer), je pensais qu'il se passait toujours quelque chose à raconter dans une journée. Maintenant je déchante: non, rien, depuis plusieurs jours.
Une autre solution consisterait à aller lire le Journal officiel: on trouve toujours quelque chose à commenter dans le Journal officiel, c'est une mine. Mais je n'en ai pas envie.

Je pourrais essayer de décrire le capharnaüm au milieu duquel j'écris. Le plateau du bureau doit faire un mètre sur soixante centimètres. J'ai exactement dix-huit minutes à tuer.
Je commence: sous le clavier, un calendrier, derrière l'écran, le support de l'iPod et une pile de DVD encore sous cellophane (Alexandre Nevski, Le Cuirassé Potemkine, Hero, Cadet Rousselle), devant le haut-parleur de gauche, une trousse (20x15cm) à broder au point de croix, ma montre, la lettre d'une cousine de quinze ans, en pile, Échange, Été, une boîte qui contenait autrefois quarante cartes de voeux et en contient désormais quatre ou cinq, un protège-livre en cuir, deux chutes de tissu résultant du découpage d'un jean, des photos, des cartes postales, dix cartes triangulaires (pour envoyer des lettres amusantes, c'est immature, je sais), le numéro de juillet 2006 de La Revue d'histoire littéraire de la France, une pochette contenant des cartes en forme d'éventail (voir la remarque précédente, j'aime les cartes fantaisie), un marque-page Sonia Delaunay, le numéro des Infréquentables, deux feuilles de citations distribuées lors des cours de Compagnon, devant la pile, le minuscule magnétophone prêté par Diane, Les Confessions de Jean-Jacques Rousseau, trois cassettes pour le magnétophone (les trois dernières heures de Compagnon and Co, dont une inutilisable), à côté de la pile, un billet de cinéma Fievel ou le nouveau monde daté du 24/02/1987 (c'était pour "un mensonge parmi dix", mais je n'ai pas osé raconter l'anecdote), un paquet de six cartes rectangulaires très longues et très étroites, roses, avec les enveloppes correspondantes, chocolat (voir remarque précédente), un feutre, mon stylo-plume, un stylo Tippex, deux cartes postales reçues, plus loin vers le mur presque sous l'écran, une boîte vide de Dim-Up poivre, un relevé bancaire, un pendentif, un relevé bancaire encore sous enveloppe…

Fin des dix-huit minutes. C'était plutôt amusant, je continuerai un autre jour (bon prétexte pour ne pas ranger d'ici là).
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