Billets qui ont 'Nanterre' comme ville.

Formation accélérée

J'ai pu écourter ma période de préavis sous réserve de revenir une ou deux journées pour fiabiliser la clôture des comptes.

J'ai donc passé la journée à Nanterre pour former J. sur certains tableaux et revoir les traitements fiscaux.

J'ai des remords de ne pas lui avoir montré tout cela il y a des siècles.
Il faut que je me souvienne que cela ne fait que cinq semaines que nous (H. et moi) avons décidé de pousser sa candidature pour qu'elle me succède. (Oui, c'est un complot mené de notre salle à manger. J'ai poussé des pions avant de partir, je continue maintenant).

Le trésorier est passé devant le bureau pendant que J. et moi travaillions ensemble (hasard incroyable quand on considère qu'il n'est venu dans ce bureau qu'une fois en quinze mois). Ce qui m'a étonnée c'est qu'il ne m'a posé aucune question sur mon nouveau poste. Avait-il oublié que je ne travaillais plus là? Ou avait-il peur de ce que je pouvais répondre? Ou s'en fiche-t-il totalement? (pourtant il est d'un naturel curieux).

J'en discute avec H.:
— Tu crois qu'il est timide? Mais même timide, il aurait pu me demander si tout se passait bien. Ou c'est moi qui m'étonne pour rien?
— Tu es quand même tombé sur des drôles de zozos.

A la fin de la journée j'étais pleine de courbatures tant je m'étais concentrée et crispée devant les tableaux Excel en accumulant les détails et les recommandations, de plus en plus effondrée intérieurement de tout ce que j'aurais dû transmettre plus tôt.

Je m'en fais trop. J. est solide et va très bien s'en sortir.

A Nanterre

A Nanterre pour l'avant, ou l'avant-avant, ou l'avant-avant-avant dernière fois.
J'y vais pour poster des lettres : impression, timbres, c'est plus simple ainsi.
J'ai posté mon futur contrat de travail.

Partis ensemble, H. et moi. Il testait pour la première fois le trajet jusqu'à Bois-Colombes, où il a un client en passe de devenir son employeur. On pouvait difficilement rêver plus compliqué d'accès à partir de Moret (je pense à cet ami toujours surpris par nos choix insensés. Il n'y a pas d'explication rationnelle à ce phénomène).

H. est revenu en passant par Yerres récupérer sa voiture (laissée à O. quelques temps). J'en ai profité pour ramener de mon côté les livres en attente au bureau.

Et donc, en grande partie pour Dominique qui un jour a voulu savoir ce que je transportais:
- Julien Green, Dixie, réservé par Patrick,
- Wole Soyinka, Cet homme est mort, car je garde à jamais le souvenir de ma honte quand un client de la librairie Mollat m'a dit incrédule «Vous ne connaissez pas Soyinka?» (celui-ci venait d'avoir le prix Nobel de littérature)
- Peter Handke, Le Chinois de la douleur
- Thomas Wolfe, L'ange banni
- Théophile Gautier, Le Capitaine Fracasse, en Classiques Garnier (les "jaunes") relié. Va remplacer mon poche
- Jorge Luis Borges, Le livre de sable, là aussi pour remplacer un poche
- Donald Westlake, 361
- Donald Westlake, Les sentiers du désastre
- Donald Westlake, Le paquet (j'ai un faible pour Westlake: enfin un polar américain qui ne se prend pas au sérieux)
- Charles Bukowski, Nouveaux contes de la folie ordinaire (pour savoir enfin ce qu'il raconte, au delà de ses contempteurs)
- Charles Bukowski, Contes de la folie ordinaire (les deux aux éditions Sagitaire: pas sûre qu'elles existent encore)
- Dino Buzatti, Le rêve de l'escalier
- Dino Buzatti, Les nuits difficiles
- Dino Buzatti, Le régiment part à l'aube (Buzatti, c'est l'hommage au père d'une amie italienne quand j'étais en seconde)
- Dino Buzatti, Le désert des Tartares (je vais donner mon poche)
- Toni Morrison, La chanson de Salomon (parce que Morrison, sa puissance)
- Göran Tunström, Le buveur de lune (parce que j'aime Le voleur de Bible)
- M Malinski, mon ami Karol Wojtyla (un livre rescapé: je voulais le donner, au dernier moment j'ai décidé de le lire d'abord, pour juger)
- Benoît XVI, La charité dans la vérité (idem. Un livre est toujours plus facile à lire que sa version en ligne)

Tout cela était lourd. Je continue Le grand incendie de Londres. Emotion du voyage à Londres. Dans le train, deux jeunes gens discutent. L'un raconte notre situation: «j'en ai marre de faire le tampon entre X [son frère] et mes parents.»

Soulagement: investiture de Joe Biden sans incident.

Nanterre

Hier j'ai vu Patrick à Nanterre hier. Le quartier des assurances est construit sur l'ancien plus grand bidonville d'Europe.

Max et les ferailleurs… Il faut reconnaître que Chaban-Delmas… quand ils ont commencé à construire la préfecture, ils se sont rendus compte que ça faisait désordre et ils ont relogés tout le monde. Pas déplacés, relogés.

— Il faudrait retracer la chronologie, je ne sais plus très bien… La déstalinisation, avec les communistes français…
— Ah oui, «ne pas désespérer Billancourt».
— Ils ont débaptisé l'avenue Staline et ils l'ont renommée… Lénine! (Il rit.) Ils ont renommé la rue principale (rue de la gare? rue des berges? quelque chose du genre) rue Maurice Thorez. Et un jour… quand ça, vers 1973, 74? — enfin une nuit — toutes les plaques de rue ont été recourvertes par des affiches sur fond bleu bordées de vert, comme des plaques de rue, au nom de Soljetnitsyne! (Il rit.) Il fallait voir le lendemain les employés de rue en train de gratter…

Nous marchons rue des Trois Fontanots.
— Ici, je ne sais plus où, vers le parc, il y a un arbre, à la mémoire du bidonville.

Je l'emmène voir les trois armoires de désherbage de la bibliothèque de mon entreprise. Elles ont été reremplies. Je trouve Le capitaine Fracasse en Classique Garnier relié, deux Tolkien des années 70 en grand format, un Toni Morrisson. Je lui conserve Dixie et il emporte… je ne sais plus exactement quoi.

En vélib

Il y avait moins de participants aujourd'hui, je me suis donc désistée et j'ai tenté d'aller à Nanterre préfecture en vélib. Je n'ai pas trouvé l'entrée du tunnel accessible aux vélos sous la Défenseet j'ai donc fait le tour, je me suis perdue dans Courbevoie et me suis retrouvée le long du cimetière (un sacré détour m'avisé-je maintenant en regardant la carte).

Je suis passée devant les Groues, l'occupation d'une friche à Nanterre. Camping, réparation de vélos, il paraît y avoir pas mal de choses à voir dans cet espace.





Photo un peu sombre car la luminosité était intense (ô paradoxe de la photographie).

Au bureau c'est la dèche: pas de machine à café, pas d'eau chaude pour le thé, le coin cafeteria est fermé. Je mange au self pour la première fois depuis le déconfinement.

Le soir, rencontre apéro avec une député LREM de l'Essonne au golf d'Etiolles. J'ai laissé tomber le Modem car je suis fatiguée de leurs querelles internes — treize ans que ça dure et je ne comprends rien à leurs dissensions. Je me suis emballée à propos de l'éducation, exprimant ma conviction qu'il faut un socle commun de lectures de référence. Je propose quelques fables de La Fontaine et Les trois mousquetaires, rien de révolutionnaire, mais quelque chose que vraiment nous ayons tous en commun — car il nous reste si peu de choses. Quand je l'interroge O. me dit qu'à deux ou trois ans près les jeunes n'ont pas les mêmes références, ne regardent pas les mêmes youtubeurs. Tout est devenu si éparpillé, si difficile à rassembler.

Est-ce ce soir-là que H. m'a demandé dans la voiture où je déménagerais si nous déménagions?
— Soit le long de la Seine vers le sud ce qui te rapprocherait de Pascal, Coudray-Montceaux m'a beaucoup plu, par exemple; soit vers St Germain-en-Laye pour un accès plus direct à la Défense.

Retour à Nanterre

Je ne sais plus vraiment comment je me suis retrouvée à Nanterre Université. Je crois que j'ai tapé "bibliothèque" dans CityMapper et que j'ai vu apparaître la BU de la fac de Nanterre à huit cent mètres. Alors j'y suis allée, d'abord le midi en reconnaissance, puis le soir pour y travailler deux heures (enfin, une heure et demie).

Ça a beaucoup changé. En trente ans des bâtiments ont poussé partout, la sortie du RER est devenue une esplanade, le silo central de la BU est toujours là mais entouré de plateaux devenus salle de lecture. Je n'aurais jamais imaginé qu'il y aurait autant d'ouvrages de fond en théologie et patristique. Très intéressant.

(Je n'y viens pas pour les livres. Je cherche un endroit où travailler deux heures par jour, à peu près sur mon chemin, loin de la maison où je ne peux m'empêcher de jouer ou regarder des films ou surfer sur les réseaux sociaux. Par ailleurs j'ai trouvé une fonctionnalité de mon téléphone qui me donne mon temps d'écran. J'ai réglé le temps "réseaux sociaux + jeux" à une heure par jour. Je perds beaucoup trop de temps. Entre l'aviron, la dissertation de baccalauréat canonique, les éléctions européennes et la recherche (pour l'instant très nonchalante) d'un boulot, il faut que je perde moins de temps.)

Souvenir de grève 1

Mon plus vieux souvenir remonte à 1986. J'avais une chambre à Nanterre, j'allais à Sciences-Po, dans le VIe arrondissement.
Devaquet, il me semble. Il neigeait. Vers la fin, l'armée amenait les gens en camion aux portes de Paris (pas le droit d'entrer dans Paris). Je me suis souvent demandé pourquoi cela n'avait pas été remis en place en 1995.
Il me semble que cela a pris fin quand un agent de la SNCF a été agressé par une foule exaspérée. Mais il est possible que je confonde, car dans ma mémoire cette conclusion est liée à des souvenirs de fortes chaleurs, ce qui est incompatible.

En 1992, j'ai eu un collègue qui me racontait qu'il avait mis en place sa grève personnelle : il avait prévenu sur les cahiers de doléance de la SNCF qu'il ne présenterait plus sa carte orange (c'était son préavis de grève). Chaque fois qu'il était contrôlé, il refusait de présenter quoi que ce soit, les contrôleurs l'emmenaient au poste de police, il montrait son titre au policier en le cachant pour que les contrôleurs ne le voient pas. Il était alors verbalisé pour refus d'obtempérer.
Cela me plaisait beaucoup, mais il faut avoir du temps à perdre.

Il m'a raconté qu'une fois, en voyant les contrôleurs entrer dans un wagon une voiture (ligne Achères-Poissy), il s'était levé et avait arrangué le wagon les voyageurs: «vous n'allez pas vous laisser faire, après tout ce qu'ils nous ont fait, vous n'allez pas présenter vos billets!». Le wagon Les voyageurs se sont enflammés, «Ouais, t'as raison, on est pas des bœufs, …» (etc); ça a commencé à ressembler à une émeute, les contrôleurs ont voulu se saisir de lui, le train arrivait en gare, les voyageurs ont fait barrage aux contrôleurs, «vas-y, barre-toi, on les tient».
— J'ai eu très peur, je ne maîtrisais plus rien, je ne recommencerai jamais ça.

Je trouve les gens beaucoup plus calmes qu'à cette époque. Les RTT, les ipods?
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