Billets qui ont '2020-05-11' comme date.

Questionnaire du confinement

J'avais repéré ce questionnaire à travers Gilda.
J'y réponds maintenant que le confinement est officiellement terminé (officiellement, parce qu'en pratique je ne sais pas quand cela sera vrai).

Qu’est-ce qui te manque le plus dans ce confinement (la première chose qui vient à l’esprit, spontanément) ?
L'insouciance.
Pouvoir agir sans planifier, sur un coup de tête.
Je trouve ridicule l'épouvantable gravité donc certains se sentent obligés de se parer.

Quelque chose de positif dans cette période ?
Voir mon jardin changer tous les jours.

La boisson du confinement ?
Ginger beer + gin.



Alors c’est comment le télétravail ?
Normal. Par dérogation, j'avais beaucoup travaillé ainsi l'année dernière.
Pour moi ça n'a pas changé grand chose; en revanche le niveau informatique de la boîte a beaucoup augmenté: plus fluide, plus stable.

La chanson du confinement ?
Messe en si et concerto de Bach.

La série du confinement ?
Better Call Saul

Et ta coupe de cheveux ?
Ça va. Déçue de ne pas avoir reçu à temps ma teinture irresponsable.

Le livre du confinement ?
Euh… De bono conjugali d'Augustin… (bon je plaisante, mais d'un autre côté c'est le seul que j'ai fini).
Jared Diamond toujours en cours.

Des stocks de bouffe ?
Non.
Découvert un marchand de légumes frais vraiment top.

Des symptômes du Coronavirus ?
Non.

Sur-informé ou sous-informé sur l’épidémie ?
Je n'écoute plus rien. Les gens sont dingues. J'attends d'apprendre qu'il existe un vaccin.
Je regrette un certain manque d'élégance, l'élégance qui consisterait à parler d'autre chose.

Optimiste ou pessimiste ?
Fataliste et agacée.

Une citation pour illustrer la pandémie ?
Non. «L'éternité c'est long, surtout vers la fin.»

Ozark

Trois saisons d'Ozark.
Ce n'est ni franchement bon ni mauvais, agaçant avec son sempiternel «je protège notre famille».
Etonnant par la place des personnages féminins aux caractères très forts, maléfiques — sauf un, angélique.

J'ai beau savoir qu'aux Etats-Unis tout s'achète — la transaction est au cœur-même de leur système judiciaire, The good wife, The good Fight, Better Call Saul, les séries le démontrent à longueur de temps — j'ai été scotchée par ce qu'ils songent à acheter: verser un dessous de table au conseiller conjugal pour que ses conseils soient en votre faveur, je n'y aurais jamais pensé. (C'est un spoil, mais un petit spoil, sans grande importance.)

Une solution simplissime pour se débarrasser des cadavres est enfin utilisée: acheter une maison mortuaire et un crématorium. C'est si évident que je ne comprends pas que cela ne fasse pas partie de toutes les séries autour de la drogue, au même titre que les meurtres, le blanchiment, la torture. (Au départ l'achat était destiné à blanchir de l'argent mais cela se révèle très vite très pratique.)


Un livre : Thomas Wolfe, : Look Homeward, Angel. Plusieurs traductions. La dernière.
Et une explication des Chroniques martiennes: le regret de la Terre, même par ceux qui ne l'ont pas connue, et les problèmes que l'on emmène avec soi, même lorqu'on part pour tout oublier.
(Je pars toujours du principe que ce genre de références sont des pistes laissées à dessein pour donner des clés d'interprétation à qui veut chercher.)

J'ajoute deux jours plus tard (esprit de l'escalier): j'ai également appris par cette série qu'un type, Eugène Schieffelin, en bon obsessionnel, avait eu l'idée d'importer en Amérique tous les oiseaux dont parle Shakespeare: aujourd'hui les étourneaux (starlings) sont une menace pour la biodiversité américaine.

Ahurie

Certains textes du Magistère sont lunaires. Extrait de Casti Conubii (1930):
Pour ce qui concerne les motifs allégués pour justifier le mauvais usage du mariage1, il n'est pas rare — pour taire ceux qui sont honteux — que ces motifs soient feints ou exagérés. Néanmoins, l'Eglise, cette pieuse Mère, comprend, en y compatissant, ce que l'on dit de la santé de la mère et du danger qui menace sa vie. Et qui ne pourrait y réfléchir sans s'émouvoir de pitié? qui ne concevrait la plus haute admiration pour la mère qui s'offre elle-même, avec un courage héroïque, à une mort presque certaine pour conserver la vie à l'enfant une fois conçu?
De la maternité comme martyre. D'une certaine façon ça ne me surprend pas, il me semblait bien que c'était la tendance Jean-Paul II. Mais je ne pensais pas que c'était écrit aussi franchement.
J'ai de plus en plus l'impression que l'Eglise catholique mène une guerre contre les femmes. (A ceux qui me diront que c'est évident depuis toujours, je répondrai que j'ai accumulé des lectures qui sont autre chose qu'une impression informée par l'anticléricalisme.) C'est sans doute pour cela qu'avec finesse mon directeur de mémoire m'a proposé en second lecteur une jeune religieuse.
De façon générale, le problème est le même que d'habitude: ceux qui ont le pouvoir veulent le garder, ceux qui sont loin du terrain ne comprennent pas grand chose à la réalité.

Au téléphone lors de notre dernier atelier je disais à un camarade de cours que si les femmes avaient deux sous de bon sens, elles déserteraient l'Eglise catholique pour devenir protestantes (je sais que cette phrase paraît incompréhensible aux personnes qui n'ont pas la foi: pourquoi ne pas jeter tout cela aux orties, tout simplement? Parce que).
Ça l'a beaucoup choqué: — Il ne faut pas dire ça.

Le même, soixante-dix ans, ayant toujours travaillé comme juriste des ressources humaines pour la direction de grands groupes, a choisi comme sujet de mémoire «les écarts de rémunération». Il m'a beaucoup fait rire en me déclarant: «Vous savez, Jésus n'a pas eu le temps de tout dire, il n'est pas resté assez longtemps. Il y a beaucoup de sujets qu'il n'a pas abordés».
Ce n'est pas la phrase en elle-même qui m'a fait rire mais le contexte: il était très vexé d'être mis dans le même sac que… les homosexuels.
En effet, la plus jeune d'entre nous fait son mémoire sur le genre. Elle a regroupé les catégories rejetées ou condamnées par l'Eglise, soit entre autres les divorcés et les homosexuels.
Or notre homme est divorcé.
Il était tout à fait indigné: — Mais tout de même, ce n'est pas pareil, on ne peut pas nous mettre ensemble.
C'était jouissif. Ainsi donc, quand c'est lui qui n'entre pas dans les cases, c'est carrément Jésus qu'il remet en cause. Prêt à trouver des justifications à toutes les injustices, mais si ça le concerne, il faudrait rajouter quelques lignes aux Evangiles.
Well well.



Note
1: je traduis car toutes ces périphrases ne sont pas évidentes : avoir des relations sexuelles sans intention de concevoir un enfant.
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