Billets qui ont 'Europe' comme autre lieu.

Une grosse con***

J'ai posé ma matinée pour participer à un atelier sur l'Europe à Melun.
Je suis toujours un peu perdue dans les diverses offres autour de l'Europe; en l'occurence ce matin, il s'agissait de la communication institutionnelle du parlement européen dont le but est de faire voter, mais «de préférence pour des députés pro-européens», a fini par ajouter une des participantes, pointant les limites du parti pris apolitique.

La plupart des présents étaient professeur, préoccupés d'avoir des outils pour parler aux lycéens et aux étudiants. A été évoquée avec fierté par les jeunes organisateurs une vidéo de mauvais goût: un jeune votant et sa grand-mère, avec le slogan «c'est la première fois que je vote, c'est peut-être la dernière fois que je vote» (mais quelle horreur: eux étaient tout fiers de ce lien générationnel). Je vous mets quelques liens (s'ils sont en anglais, fouillez un peu, il est toujours possible d'obtenir du français): dans ma région, dans ma vie et quelques gros plans, série de podcasts.

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Le matin j'étais comme d'habitude en retard. En constatant que je n'avais pas de raclette pour gratter le gel sur le pare-brise, j'ai utilisé la coque de mon téléphone.
J'ai bousillé le pare-brise. Il est profondément rayé, de plusieurs grandes rayures, juste au niveau des yeux puisque c'est l'endroit qu'on gratte en premier.
Je ne comprends pas comment c'est possible. Sans doute le pare-brise n'est-il pas en verre? mais la coque est bien en plastique, comment est-ce possible?

Quoi qu'il en soit, cela met fin à notre espoir de faire réparer la fuite dans le dossier de la voiture due à une erreur du garage mandaté par l'assurance suite à l'accident de mars dernier. En effet, un nouvel expert devait passer. H a remarqué: «quand il va voir le pare-brise, il va réformer la voiture».
Nous allons devoir trouver une solution tous seuls. Je me demande combien ça va coûter.

Ce soir nous sommes déprimés.

La différence entre assurance et solidarité

Ce soir à 18h30, je serai .
Je sais, c'est un peu tard pour prévenir, mais je doute que cela intéresse qui que ce soit. Et non, ce n'est pas professionnel, c'est ma façon de gagner du temps, d'apprendre en deux heures (enfin, d'apprendre: d'obtenir une première teinture) ce qui me demanderait des heures de lectures (que je ne ferais pas) et ce que les médias ne m'expliqueront jamais.
Autre curiosité: découvrir la Cour de cassation et les ors de la République... (si vous désirez venir, n'oubliez pas de vous inscrire en ligne: il s'agit de mesures de sécurité).


Cycle Assurance et protection sociale - Les risques marchands et non marchands : quelles clefs de répartition?
Késako?
Il s'agit dans le cadre de la directive européenne sur les services ("ex-Bolkestein", profondément remaniée) de croiser deux axes de réflexion:

1/ Dans le cadre de la directive sur les services, que va devenir le secteur social, qui couvre «l'économie sociale, l'éducation populaire, le soutien aux familles, la politique de la petite enfance», financé par les prélèvements sociaux? Ce secteur devra-t-il être soumis intégralement à la concurrence pour obéir à la directive européenne?

Définition du secteur non marchand : aucune définition n'est donnée à priori au niveau de l'Union européenne, il s'agit d'une appréciation au cas par cas, selon les pays, selon les équilibres nationaux, au fur à mesure des affaires jugées par la Cour de Justice des Communautés européennes. (Rappel en gros: vous payez votre femme de ménage, c'est du secteur marchand, elle est payée par les allocations familiales ou la sécurité sociale, c'est un service non marchand).

Débat entre ceux qui pensent que l'Union européenne participe de la pensée libérale — ce qui est à peu près ce qu'on entend tous les jours dans les discours politiques, relayés et amplifiés par les médias — et ceux qui constatent, de facto, que l'étude de la jurisprudence de la CJCE montre que « la solidarité a progressivement acquis la valeur d'un principe juridique en Droit communautaire» tandis que «les systèmes de solidarité ont fait preuve d'une remarquable robustesse, du moins dans la vieille Europe»1.


2/ Quelle différence entre l'assurance et la solidarité?
Cette différence est fondamentale pour comprendre les choix de société que nous avons à faire, que nous allons devoir faire, mais elle est rarement expliquée.

Je vais faire un détour dans mes explications en développant un exemple.
Il existe en assurance la notion de "zonier". Le zonier pévoit des tarifs différents en fonction des risques que présente chaque zone géographique (la zone peut être la commune, le département, un pays (le risque de terrorisme, le risque politique, etc.),...)
Pour donner un exemple s'appliquant à un particulier, s'il existe un zonier, vous ne paierez pas la même prime d'assurance contre le vol pour la même surface d'appartement protégée par les mêmes serrures à Tulle ou à Paris. Il peut ne pas avoir de zonier, ou sa maille peut-être plus ou moins fine: il s'agit de choix que font les assureurs quand ils construisent leur tarif (algorithme basé sur des statistiques). Par exemple, la Maif, mutuelle des instituteurs et des professeurs, a longtemps tarifé sans zonier, ce qui voulait dire que l'habitant de Tulle payait un peu pour l'habitant de Paris. C'était un système fondé sur la solidarité, typique d'un véritable esprit mutualiste (Juste ou pas juste? On peut considérer que l'habitant de Tulle payait le fait de courir moins de risques, on peut répondre que l'habitant de Paris n'avait qu'à choisir d'habiter Tulle... Etc.)
S'il n'existe pas d'autre mutuelle ou assurance que la Maif, la situation est figée. Mais si le secteur est concurrentiel, l'assuré habitant Tulle choisira peut-être un jour une assurance ayant un tarif basé sur un zonier correspondant au niveau de risque que représente Tulle, c'est-à-dire faible. Il fera le choix de l'assurance contre celui de la solidarité.

Question: jusqu'où peut-on mutualiser, jusqu'à quand peut-on faire payer ceux qui présentent le moins de risques pour ceux qui en présentent davantage?
Réponse: tant que ceux qui présentent le moins de risques acceptent de payer pour les autres, tant qu'ils ne résilient pas leur contrat pour passer à la concurrence.

Problème: la concentration des mauvais risques.
Exemple encore: à la fin des années 90, la Macif avait entrepris de résilier tous les contrats habitation situés en zone inondable dans la vallée du Rhône2. Cela lui permettait de baisser ses primes et devenir très attractive pour les bons risques... tandis que les assureurs qui acceptaient les maisons à risques étaient logiquement obligés d'ajuster leur prime à la hausse et de devenir moins concurrentiels...3.

C'est ce qui se passe dans un secteur de la santé fonctionnant librement: très vite, les meilleurs risques paient de moins en moins chers, tandis que les plus "mauvais" (cigarette, antécédents familiaux, métiers à risque, etc) n'ont plus les moyens de payer leur prime alors que ce sont eux qui en ont le plus besoin.

Or un pays ne peut jamais s'abstenir totalement de soigner les plus démunis, non par humanité, mais par rationalité: car il y aura dans ce cas des risques d'épidémie (cf. la malaria, le sida, etc.). D'autre part, les soigner trop tard n'est pas une solution non plus: il coûte moins cher à la collectivité de soigner une bronchite qu'une pneumonie ou une tuberculose...

Les pays (européens) (l'Allemagne, l'Italie et les Pays-Bas) qui laissent le choix de leur assurance à leurs concitoyens ont dû mettre en place des systèmes de compensation obligeant les sociétés d'assurance attirant les meilleurs risques à reverser une quote-part à ceux prenant en charge les plus mauvais, péréquation compliquée à calculer et à rendre efficace.
En France, la Sécurité sociale obligatoire permet la solidarité entrel les bons et les mauvais risques. Une législation fiscale plus favorable pour les complémentaires de santé qui ne font pas remplir de questionnaires de santé incite également à une répartition équilibrée des "bons" et "mauvais" risques.

Vers quoi va-t-on aujourd'hui? Une privatisation de l'hôpital public (la crainte sous un gouvernement de droite... sachant que du fait d'une gestion défaillante, les hôpitaux publics coûtent bien plus chers que les hôpitaux privés à soins égaux fournis) ou une étatisation de la médecine privée (multiplication des contraintes pour les médecins afin de contrôler les dépenses de santé)? A la lecture des textes, les juristes eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux.

Je vais donc aller écouter quelques interventions sur ces sujets ce soir.


P.S.: Cette présentation est une présentation"d'amateur". Il est possible que j'y expose des partis pris dont je n'ai pas conscience, étant loin de maîtriser toutes les finesses du sujet.
Mes partis pris conscients: je suis pour la Sécurité sociale "à la française" qui organise la solidarité (ce qui n'empêche pas souhaiter de la rendre plus efficace et moins coûteuse) et pour l'Union européenne qui, quoi qu'on en dise, ne l'interdit pas et aurait même tendance à la défendre. (Pourquoi ne dit-on pas davantage que l'Europe est souvent un recours pour les citoyens contre leur propre Etat?)





Notes
1 : Alain Supiot, M. E. Casas, J. de Munck, P. Hanau, Au-delà de l'emploi : transformations du travail et devenir du droit du travail en Europe : rapport pour la Commission des Communautés européennes, Flammarion, coll. «Flammarion Documents et Essais», Paris, 1999. (Notons pour ne pas donner une image contraire de l'opinion d'Alain Supiot par une citation isolée, qu'Alain Supiot pense justement que la CJCE vide le champ social de son contenu.)
2 : Le contrat d'assurance est un contrat; il faut l'accord des deux parties, on ne peut parler d'un refus de vente.
3 : En France, quand une telle situation dégénère, on assiste généralement à l'intervention du législateur. Exemple: la Corse.

Pour l'Europe : un peu de politique

Je m'aperçois que j'ai si bien assimilé les principes républicains qu'il ne me vient jamais à l'idée d'exposer mes opinions religieuses ou politiques, elles font pour moi entièrement partie de la sphère privée, et un blog est déjà public.
D'autre part, il me semble que chacun choisit le parti pour lequel il vote en fonction de son histoire personnelle, avec sa raison et son cœur, et qu'il n'y a aucune raison de vouloir le faire changer d'opinion. La sienne est forcément la meilleure pour lui, c'est celle qui lui convient le mieux, tautologiquement.
Bref, je suis une bien piètre militante.

Cependant cette fois-ci je vais faire une exception. J'ai trop regretté de n'avoir pas bataillé plus ferme lors du referendum sur l'Europe, ahurie que j'étais par la mauvaise foi et la violence des partisans du non (surtout, je ne croyais pas, je n'ai pas cru un seul instant, que le non pouvait l'emporter. C'était impensable, pas en France, pas la France).
L'Europe est un rêve, mais c'est un rêve avec des bases techniques et juridiques complexes, alambiquées, rendues plus alambiquées encore par les différences de langues et de traditions qu'il faut respecter. Elle se met en place lentement, à coups d'essais et de reprises, tant bien que mal d'élections en élections (car elle subit tous les à-coups dus aux changements d'équipes en place, à la fois ceux résultant des élections nationales dans chaque pays et ceux résultant des élections européennes).

Et je suis un peu agacée de savoir que ce que lui reprochent ses détracteurs, c'est-à-dire d'être compliquée et de se mettre en place lentement, est justement ce que ces mêmes détracteurs ne lui pardonneraient pas si elle allait vite, c'est-à-dire si elle écrasait tout en imposant tyranniquement sa volonté sans tenir compte des particularités nationales (perspective inenvisageable quoi qu'il en soit, l'écrire le fait percevoir immédiatement): la lenteur et le compliqué sont son handicap, sa contrainte et sa force, l'assurance de liens noués solidement. Après tout, le chemin parcouru en cinquante ans est impressionnant.

C'est donc un rêve qu'il faut protéger et défendre.

Je me rends compte que ce rêve est devenu pour moi inséparable d'internet et de la littérature, qu'entre les colloques réunissant des Espagnols et des Hollandais pour parler de la forme (littéraire et artistique) dans le bocage normand, des Ukrainiennes et des Italiens pour évoquer Poe à Nice, des Tchèques et des Allemands pour étudier la patristique à Paris, entre les projets Erasmus des uns ou Brigitte Sauzay des autres, entre les heures passées sur FB ou sur des blogs, l'Europe est devenue quelque chose de vivant et d'impalpable, que je serais très malheureuse d'abandonner, même si je peste à l'idée qu'ils ont autorisé que le chocolat belge surgras soit appelé "chocolat" (et autres râleries du même acabit).

Réunion du Modem ce soir (j'ai ma carte, si si). Marielle de Sarnez venait à Yerres, avec pour invité d'honneur Sandro Gozi, député européen italien, qui devait nous parler d'économie tout en illustrant la volonté de différents partis nationaux de s'unir pour un véritable projet européen.
Le slogan est simple: l'Europe économique doit être au service de l'Europe sociale. Sandro Gozi a très justement appelé à une harmonisation des fiscalités permettant de donner un sens à un espace économique de libre circulation. Il souhaite également que l'Union européenne puisse être représentée par une unique personne lors des sommets internationaux (comme le G20), plutôt que de présenter le ridicule d'être accompagné de représentants de chaque pays européen. Etc, etc: toute la difficulté est de trouver un équilibre entre ce qui est de l'ordre du projet (à court ou moyen terme) et ce qui est de l'ordre de l'horizon (ceux vers quoi l'on doit tendre, même si c'est à trente ou quarante ans).

Quoiqu'il en soit, mon but ici n'est pas de vous convaincre de la pertinence des idées du Modem, mais de vous adresser une seule prière, de vous geuler une seule injonction: allez voter le 7 juin! Pour qui vous voulez, mais allez voter!


Rappel : le traité de Lisbonne en 10 fiches, une revue de presse de la presse européenne et un site clair présentant les élections.


Un petit mot de Rémi.

Conséquences économiques du non irlandais

Tant que le traité de Lisbonne n'est pas appliqué, le traité de Nice continue de gouverner l'Union Européenne. Dans ce traité, l'Union reste essentiellement une zone de libre-échange et de libre circulation du capital, sans coordination des politiques économiques, avec une règle d'unanimité et non de majorité qualifiée s'appliquant à de nombreuses décisions.

Le traité de Nice implique une concurrence fiscale toujours forte ; l'absence de policy-mix coopératif entre la politique monétaire et budgétaire qui pose particulièrement problème en phase de ralentissement économique ; un pouvoir de blocage des décisions par les petits pays de l'UE.

Sur le plan économique, le non irlandais est donc défavorable aux grands Etats membres, vis-à-vis des PECO notamment. Sur le plan financier, le non irlandais est favorable aux actions (concurrence fiscale, coûts salariaux), défavorable à l'euro (taux d'intérêt, zone monétaire sous-optimale).

Flash-CDC-Ixis, 16 juin 2008
Depuis que j'ai compris à quel point le traité précédent (refusé par la France) était avant tout une affaire juridique devant faciliter le fonctionnement des institutions (cela m'a pris un peu de temps, j'ai dû comprendre six mois après le referendum, en étudiant le site europa.eu (se déplacer dans ce portail nécessite de connaître les institutions, ce qui peut paraître étrange, mais bon)), j'en veux beaucoup aux politiciens et aux journalistes d'avoir si mal expliqué les tenants de l'affaire. Je soupçonne qu'eux-mêmes n'avaient pas tout saisi.
Quelle stupidité de soumettre à un referendum une question du style «Souhaitez-vous accorder la personnalité juridique à l'Union européenne?»
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