Billets qui ont 'racisme' comme mot-clé.

Guinness

Je suis au Glasgow, pub de Fontainebleau qui sert de la Guinness.
C'est ce qui m'a décidée à venir.

Nous regardons ensemble, entre militants, à l'étage privatisé, le débat Macron-Le Pen.

Ce n'est pas ma tasse de thé, je n'avais pas regardé celui de 2017, je n'avais pas l'intention de regarder celui-ci. Cela me met mal à l'aise, un grand O d'adultes qui ressemble à un combat de gladiateurs.
Je n'aime pas cela.

Je regarde à l'écran ce que je connais par cœur : l'impossibilité de se défendre contre le mensonge; le manque de séduction de la réalité (de l'expérience) face au rêve.


Deuxième pinte de Guinness.

Dans la journée, H. a passé un coup de karcher sur la terrasse en teck et j'ai commencé à la passer à l'huile de lin. Commencé, car je n'ai pas eu assez d'huile. Nous en avons commandé.
J'espère qu'il fera beau samedi afin de terminer.



Avant d'aller à Fontainebleau, passage à Vernou chez T. pour lui apporter des tracts : elle a prévu de nombreuses actions dans les deux jours qui restent et manque de matériel. Nous discutons. Elle est asiatique, peut-être chinoise.
— L'autre jour nous avons tracté à Mormant. Un homme m'a dit "je n'étais pas sûr, mais maintenant, je vais voter Le Pen, il faut faire le ménage".
J'ai honte — Cela t'affecte?
— Ça va, mais ma fille, l'autre jour, a pleuré.

J'ai honte. Mais comment m'excuser? Et pourquoi? Et au nom de quoi?

Woke

Magnifique sortie sur la Seine sous un soleil printannier. Au lieu de tourner entre le pont de Valvins et l'île de Samois (toujours ces circuits courts qui permettent aux bateaux moteur de nous surveiller: sortir en skiff l'hiver est dangereux, normalement cette saison est réservée aux bateaux longs. Mais covid oblige), nous sommes montés vers Thomery. Cela fait du bien de changer de décor. La forêt est pixellisée, duvet vert et bois gris.


Au retour j'écoute France inter et tombe par hasard sur la définition des "Woke". J'avais vu passer le terme cette semaine sur Twitter, mais j'avais eu la flemme de chercher.
Cela signifie "éveillé" (awake, je pense à JCVD et son aware). Il s'agit de prendre conscience d'être blanc et d'expier sa culpabilité face aux autres couleurs de peau. J'ai peur d'exagérer en retranscrivant ce que j'ai entendu donc je vous invite à écouter l'émission ici. L'invité est Mathieu Bock-Côté, québecois, auteur de La Révolution racialiste et autres virus idéologiques. C'est peu ou prou ce que j'avais recopié ici. Cela aura mis trois ans à quitter Twitter.

Bock-Côté salue la résistance de la France à cette idéologie, souligne la «tentation totalitaire» des démocraties (et se fait reprendre par le journaliste qui identifie totalitaire au nazisme ou au stalinisme, c'est-à-dire à ses illustrations historiques, et non à son sens, c'est-à-dire à l'exigence de représenter la seule façon admise de penser et d'expliquer le monde), donne l'exemple de Kamala Harris souspçonnée de trahison de la cause parce qu'elle a épousé un blanc «juif de surcroît».
Il explique que le mouvement venu des USA encourage les descendants d'émigrés en Europe à s'identifier au sort des descendants d'esclaves aux US.

En résumé, les races n'existent pas, vous êtes identifiés à et par votre couleur de peau, les blancs sont méchants.

A vendre

Choc en arrivant à JRS ce matin : pas de petit déjeuner, tout le monde porte un masque qu'il faudra garder même pendant les cours. C'est la conséquence du discours présidentiel, c'est cela ou l'école d'été s'interrompt.

Aujourd'hui j'ai davantage d'élèves, un journaliste syrien, un Afghan qui aime la cuisine et est passé par la Russie, des Iraniens. Je fais cours avec Paul, un baby-jéz (jésuite en cours de formation) qui vient de Côte d'Ivoire.
Celui qui est passé par la Russie (et donc parle russe) posera une question qui me laissera interdite: comment faire pour rencontrer des filles en France?
— En Russie c'était facile, on allait dans les bars. Mais ici, tout le monde reste en groupe.1
— Je ne suis pas la bonne personne à qui poser cette question. Je n'ai jamais fait ça, je me suis mariée à dix-neuf ans (ce qui est faux au sens strict, mais vrai sur le fond: j'ai simplifié). A mon avis il vaut mieux choisir un hobby, la musique ou le sport… mais ça coûte de l'argent, il faut s'inscrire en club. Attention, si vous choisissez la religion et que vous êtes musulman, renseignez-vous. Faites attention à l'imam que vous choisissez. Jamais vous n'aurez vos papiers si vous fréquentez une mosquée fondamentaliste. Si vous ne savez pas, demandez ici, ils vous renseigneront.

Le sujet du jour ne m'inspire pas beaucoup, il s'agit de l'actualité. J'ai découvert avec étonnement les ressources proposées: TV5 et RFI.
Nous visualisons un journal télévisé de trois minutes, nous voyons le vocabulaire. C'est compliqué avec le masque.

Je repère un reportage de trois minutes sur Louis de Funès. Je n'aime pas beaucoup les mimiques de cet acteur, ses exagérations me gênent, et j'ai été très surprise de son succès pendant le confinement qui a mené à la rediffusion de beaucoup de ses films.
Je lance la vidéo. Parmi les extraits se trouve un extrait de Rabbi Jacob que je prends le parti de commenter, car je sais que le sujet juif est sensible pour beaucoup d'entre eux. Il me semble important de les sensibiliser à la façon occidentale d'envisager les choses.
— Comment, Salomon, vous êtes juif? Ça ne fait rien, je vous garde quand même.
Je leur demande ce qu'ils en pensent. Seule Ndeye, qui est en France depuis longtemps, dit que c'est raciste.
— Oui. Je ne pense pas qu'on le dirait aujourd'hui. En fait il y a plusieurs niveaux dans ces phrases. «Salomon» est un prénom très juif, personne en France dans les années 70 n'appellerait son fils Salomon sans être juif. Donc le patron n'a pas fait l'association, ce qui peut s'interpréter de deux façons: soit il ne fait absolument pas attention à son chauffeur, soit le fait d'être juif a si peu dimportance pour lui qu'il n'y pense jamais. La deuxième partie de la phrase est plus proche de l'antisémitisme: «je vous garde quand même», comme si le fait d'être juif avait pu être une raison valable de licencier son chauffeur. A l'époque, en 1970, ça faisait rire parce que tout le monde savait que c'était de l'humour, qu'être juif n'était pas une raison pour être licencié. Aujourd'hui c'est devenu compliqué, certains sont capables de ne pas voir l'humour, car le fait que ce ne soit pas une raison de licenciement n'est plus évident pour tout le monde.

Je reprends mon souffle. Je les regarde, juste les yeux au-dessus des masques. Je parle trop mais ça me paraît si important s'ils regardent la télé et tombent sur les manifs pro-Traoré.
— C'est devenu compliqué en France, il faut faire attention. Quand vous voyez des manifs pour un noir mort pendant une arrestation, vous pensez quoi?
— Que c'est une manif contre le racisme?
— Oui. Mais dans la même manif, il peut y avoir des pancartes contre les juifs. Donc c'est de l'antiracisme sélectif, pas universel. Donc il faut faire très attention quand on veut soutenir une cause en France. Il faut bien regarder qui soutient qui.

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Repas avec ma collaboratrice. Nous ne nous sommes pas vues depuis mars. Je lui ai donné rendez-vous au restaurant pour papoter également de sujets perso, famille, vacances, etc. Team time. Je ne lui dis pas que je vais déménager. Je n'y crois pas encore complètement.

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La pipelette de ce soir-là est agente immobilière. Elle est passée faire une estimation de la maison. L'intérieur lui a beaucoup plu, sauf le salon qu'elle trouve étriqué.
Il va falloir repeindre la façade. Moi qui ai toujours détesté la couleur jaune de ma maison, je vais la quitter quand elle sera blanche.
Nous mettrons en vente dès qu'elle sera repeinte. L'agente pense pouvoir vendre rapidement. Il paraît que depuis le confinement les Parisiens fuient Paris.

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Le soir je prends le train pour Moret. C'est un test. C'est un peu plus long mais c'est CLIMATISÉ. Et propre. Et vide. Sacrées différences par rapport au RER D. Reste à savoir si les rames sont à l'heure. Le pari, c'est aussi la poursuite du télé-travail, et surtout le changement de boulot. Adieu Nanterre Préfecture.

Je rejoins H. et les deux enfants venus prendre les mesures de l'appartement pour commencer à imaginer où placer nos meubles (et savoir de quoi il nous faut nous débarrasser). H. a également apporté une promesse d'achat. L'idée de laisser un chèque d'engagement nous a fait traiter de fous par l'agente immobilière: «vous lui avez demandé sa carte d'identité? Vous êtes sûrs qu'il est propriétaire? L'argent doit toujours passer par un notaire!»
Bon, bon. (J'ai repensé au type qui avait vendu la Tour Eiffel).

Le "propriétaire" (noté SB par la suite) nous a recommandé le restaurant des Lys à Moret. (Nous lui avions demandé des adresses, que ce soit pour une cantine de tous les jours ou un événement à fêter.) C'est délicieux. Nous en profitons pour fêter l'anniversaire de H. qui est tombé en avril.



Note
1 : La société russe serait-elle plus ouverte que la société française? J'ai posé la question à H. qui met cela sur le compte de la disparition des classes populaires: «Les gens de la classe moyenne restent chez eux ou restent entre eux, ils ne vont pas papoter au café.»

Dernier samedi de printemps

Skiff à huit heures. Arnaud m'a corrigé un défaut tellement évident que je me souviens maintenant que j'avais acquis le mouvement peu avant le confinement (plus de "en" dans une phrase tu meurs). Il fait très beau et déjà chaud.

Puis Itteville. Belle maison. J'ai mangé la moitié de la côte de bœuf à moi toute seule, paraît-il.
(La tombe du père du maire de la ville a été graffitée à quelques jours du second tour des élections municipales. Dupont-Aignan et Tron, hommes politiques de l'Essonne, ont refusé de signer une déclaration condamnant cette action, Dupont-Aignan parce qu'il ne veut pas signer avec les quarante-deux autres signataires, Tron parce que la rédactrice de la déclaration a témoigné contre lui dans son procès pour harcèlement sexuel.)

Ayant besoin de repos mental, j'écris devant Hunger Game 4 (après avoir regardé les deux premiers hier tard dans la nuit). Souvent les gens n'aiment pas la fin, et pourtant, elle est bien vue. Le film aurait pu s'arrêter avant, mais c'est mieux ainsi.

A la mémoire de George Floyd et tant d'autres

Ce qui plonge dans la stupéfaction en ce moment au point d'en faire oublier le virus en décroissance (sauf en Suède où ils paient un non-confinement), ce sont les émeutes aux Etats-Unis après la mort de George Floyd, noir mort étouffé par le genou d'un policier blanc devant ses collègues qui ne sont pas intervenus.
Cela a duré huit minutes. Le passé du policier en cause est impressionnant. Il a fallu une semaine d'émeutes pour que qu'il soit accusé de meurtre et les trois autres de complicité.

Sans proportion mais préoccupant, on vient de découvrir en France un groupe privé sur FB qui rassemble des policiers qui échangent des propos racistes, homophobes, sexistes. Cela rappelle par analogie la ligue du Lol qui harcelaient les femmes journalistes dans les années 2010.


Arte rediffuse Je ne suis pas votre nègre que j'avais raté la fois précédente. Il paraît qu'il est absolument à voir.

Un monde qui m'échappe

Interloquée par un tweet de l'UNEF: «En tant que femme transgenre racisée je suis intersectionnelle. Mais ma racisation fait de moi une personne plus privilégiée qu'une afro descente et c'est à cause du colorisme qui crée un privilège entre les personnes racisées.» Clémence Zamora-Cruz


2019-0420-UNEF-racisee.png


tandis que ce genre de dessin circule (dessinateur inconnu pour le moment)


2019-0420-racise-dominant.jpg


alimentant les insultes d'une gauche qui ne sait plus prendre de recul.


(En fait ce ne sont pas les revendications que je rejette, c'est le vocabulaire1. Les mêmes idées exprimées de façon compréhensible remporteraient peut-être mon adhésion, ou au moins ma sympathie. Dans le cas d'espèce, il y a trop de mots dont je ne comprends pas le sens exact. Le lecteur (ou auditeur) est arrêté par le langage qui fait barrage aux faits. (Il essaie de démêler le sens des mots plutôt qu'accéder directement à la revendication.))

La fin doit vouloir dire : «il y a une hiérarchie2 dans le racisme subi en fonction de la couleur de peau. J'ai conscience d'avoir davantage de chances qu'une Africaine à peau très noire.» ("descente": est-ce une faute de frappe pour descendante ou pour décente? (mais dans le second cas, qu'est-ce que ça veut dire?))
Et le début : «je suis une femme latinos trangenre: je fais donc miennes les revendications des femmes, des personnes de couleur et des LGBT» (est-ce cela que veut dire «intersectionnelle3»? je n'en suis pas sûre car je ne sais pas exactement ce que désigne "sections" (pour moi une section était quelque chose de l'ordre d'une cellule du parti communiste).

Que ceci soit considéré comme une première contribution à un LTI contemporain (LFV, Langue française du XXIe siècle ?)



Notes :
1 : Ce doit être une preuve de mépris de classe blanc élitiste.
2 : On remarquera le choix de "privilège" plutôt que "hiérarchie": une tendance à s'excuser par avance, ce qui est certes sympathique, mais sans doute inutile pour un état de fait que l'on subit et dont on n'est pas responsable.
Hiérarchie des couleurs de peau (ce que veut dire colorisme?): c'est un fait connu; par exemple la société du Brésil est connue pour hiérarchiser subtilement le métissage. En France la hiérarchie me paraît moins subtile (euphémisme) et tenir davantage à la beauté (oui, personne ne le dit, mais oui) et aux vêtements qu'à la simple couleur de peau. Evidemment, ce genre d'intuition serait à mesurer.
3 : Je me suis renseignée: à l'intersection du racisme et de la mysoginie.

Six mois

Ce qui m'étonne, c'est que les journalistes sont capables de tartiner sur les traumatisés du Bataclan "qui sursautent à chaque bruit inattendu" sans jamais en profiter pour faire un peu de pédagogie à propos des réfugiés: eux, ce sont les bombes qu'ils fuient.

Anecdote zemmourienne au petit déjeuner

(Le titre fait référence à cet article.)

Voyage Tours-Mulhouse, à cinq, trois garçons, deux filles. Arrêt dans une station-service. Récit :

— Donc on est allé pisser. Quand on est entré dans les toilettes, il y avait un noir à quarante-cinq centimètres des pissotières en train de défaire la boucle d'un gros ceinturon. Il a descendu sa braguette, fourragé dans son slip et a sorti un sexe,… (Il regarde autour de lui, saisi la baguette de pain entamée dont il reste vingt-cinq à trente centimètres, s'en empare, la brandit) …J'vous mens pas, grand comme ça… (Il contemple la baguette pensivement, encore effaré à ce souvenir.) Il a pissé en visant la pissotière puis il a commencé à se rhabiller, c'était compliqué, ranger un engin pareil (dit-il en essayant de nous faire partager la sensation de difficulté). A ce moment-là Steve est entré, il a vu ce black au milieu de la salle en train de fourrager dans son pantalon… T'aurais vu sa tête… Le black est parti et on a tous éclaté de rire.
Ensuite, quand on est revenu à la cafèt, on a raconté aux filles et Aline a demandé: «Pourquoi ça ne nous arrive jamais, à nous ?». Alors je lui ai indiqué le black qui prenait un café: «Be my guest».
On a discuté, on est parvenu à la conclusion qu'il ne devait jamais bander très dur, parce que tu te rends compte, si ce type remplit ça (brandissage de la baguette de pain) de sang, il ne lui en reste plus au cœur, il s'évanouit (et Steve a dit que ce n'était pas grave puisqu'il était dans un lit).
— Ce que c'est qu'être entre scientifiques…


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Agenda:
Acheté un sapin. Retour dans la décapotable décapotée, le sapin sur les sièges arrières. Tête des passants.
Le soir un épisode de Star Treck. Docteur Jekill et Mister Hyde. Incroyable dimension schmittienne: est le chef celui qui décide et prend la responsabilité de la décision.

Tour d'horizon, pas très sérieux et un peu triste

La fiscalité de l'artisan pêcheur: en fait il faut être pêcheur ET fiscaliste.

Les bras musclés de la prof de grec: je pensais qu'elle faisait du violoncelle, mais cela doit être à force de porter de gros dictionnaires.

Nous avons quitté Kant pour Nietzsche.

Boîter. Plus tu avances moins tu sais.


Maitre Eolas, série de twitts (140 caractères)
A une audience 35bis, une grand mère rom de Serbie placée en rétention disait que ces baraques avec barbelés…
…lui faisait penser aux camps nazis. Protestation du représentants du préfet, colère du président.
Jusqu'à ce que son avocat lui demande de relever sa manche. 6 chiffres tatoués sur l'avant bras.

Washington - la bibliothèque et le Congrès

Tout est dans le titre.

Nous sommes à l'hôtel près du terminus de la ligne orange, à New Carrolton. Nous mettons quelques minutes à déterminer s'il nous faut des billets ou un forfait journée, pour finalement opter pour des billets qui ne sont pas des billets, mais plutôt des sortes de Monéo que l'on charge du montant que l'on souhaite, et qui se décharge à chaque passage dans les portillons.
En effet, il n'y a pas de prix fixe de billet, il varie en fonction des jours de la semaine et des heures creuses ou de pointe. (Une autre façon de gérer les heures de pointe est à l'œuvre sur certaines highway: la file la plus à gauche est réservée aux voitures contenant deux personnes ou plus. Il s'agit de favoriser le covoiturage.)

Bibliothèque du Congrès. En arrivant je suis amusée par les sacs transparents longs comme des sacs à pain destinés aux parapluies mouillés.





L'intérieur est splendide, nous repérons côte à côte dans des cartouches mitoyens Poe et Whitman, ce qui nous fait deux sur deux, les enfants sont ravis (il faut encourager les troupes). Nous déambulons. Nous sommes très fiers de nous être entendus répondre qu'en tant que Français, nous n'avions pas besoin de participer à un tour (visite guidée), qu'il nous suffisait de nous promener, notre culture générale suffirait (n'empêche que je n'ai reconnu Estienne que parce que Dolet était à ses côtés) et que certains noms (Petit, il me semble, par exemple: qui est Petit?) ne me disent rien.

En exposition, LA une Bible de Gutemberg. 1455. Je n'en reviens pas. Elle se compose de trois tomes, exposés tour à tour (tous les six mois) pour ne pas exposer les mêmes pages à la lumière trop longtemps. Température contrôlée, lumière basse fréquence, photos strictement interdites, lutrin absorbant également le poids du livre pour ne pas abîmer la reliure. Vendue en 1930 par l'Autriche.
— Mais comment peut-on vendre ça? Tu crois que c'est la crise des années 30 qui les y a obligés?
— Je ne sais pas, mais tant mieux, ça lui a permis d'éviter la guerre et les bombardements.

Nous voyons la salle de lecture de la galerie surplombante, entièrement vitrée pour ne pas déranger les chercheurs (la salle est pratiquement vide).

Nous voyons deux expositions, une sur l'exploration des Amériques et ses conséquences avec des cartes magnifiques.
Je reste interloquée devant trois globes successifs, le premier aux environs de 1507, le suivant vingt ans plus tard: sur le premier l'Amérique est une longue bande de terre, sur le deuxième, la forme générale du Nord et du Sud est donnée, leur rattachement par un isthme, le décalage selon la longitude (l'Amérique du Sud plus proche de l'Europe ou de l'Afrique), la baie du Saint Laurent bien dessinée. Travail extraordinaire en si peu de temps avec les moyens de l'époque.%%% — En vingt ans les Espagnols ont cartographié le monde.

L'autre exposition concerne les livres qui ont donné forme à l'Amérique ou qui ont formé l'image de l'Amérique aux yeux du monde extérieur. Jusqu'au aux années 1920 je connais pratiquement tout et j'en ai lu un tiers ou la moitié, ensuite cela devient plus difficile. Je constate avec amusement que certains me sont connus grâce au blog de tatouages que j'aime bien.

La dernière salle expose les livres vendus par Jefferson à la bibliothèque après sa destruction par les Anglais. Un tiers sont d'origine, un tiers sont des dons de la BNF, un tiers provient de divers achats et donations (la bibliothèque a de nouveau brûlé dans les années 1850).

Pas d'accès à la salle de lecture, mais on peut la contempler d'en haut, à partir d'un balcon, sans faire de bruit. Je n'arrive pas à reconnaître le décor de Quand l'esprit vient aux femmes. Je lis le nom des bustes tout en haut sous la coupole mais je les ai oubliés (Moïse, il y avait sans doute Moïse, ce serait trouvable sur internet).

Un tunnel relie la bibliothèque au Congrès. Pas le temps de finir. Je mets cela en ligne en attendant, parce que je finis par douter de pouvoir rattrapper mon retard. Il faudrait d'autres vacances pour tenir mon blog.
Je reprends le 7 avril 2013. Les anecdotes vont être moins précises, tant pis.


Je me souviens qu'il fallait jeter tout liquide contenu dans les sacs à dos entre la bibliothèque et le Congrès. Finalement, il n'y aura qu e dans les monuments officiels de Washington que nous aurons droit à des mesures de sécurité telles qu'on les connaît à Paris.
Nous déjeunons au sous-sol dans un self qui ressemble beaucoup à celui du Met. En catastrophe au milieu du repas nous allons acheter un tee-shirt souveuniir à O. qui a aspergé son tee-shirt blanc de sauce bolognaise. Comme toujours nous avons froid, la clim est insupportable.

Tout est gratuit, il suffit de s'inscrire, de prendre un ticket, d'attendre le guide qui se chargera de notre groupe. C'est très bien organisé, à la fois efficace et bon enfant, sans nervosité.
Nous attendons dans un vaste hall, je regarde les statues, hommes politiques, Américains célèbres, Indiens. Je contemple avec plaisir la statue d'Anne Keller (j'ai songé à Matoo (moi je connais le livre depuis mes années de collège — pas le film (plus tard notre guide nous dira que cette statue constituait deux premières: la première statue d'enfant au Congrès, et la première statue d'handicapée)) et celle de Sacagawea dont j'avais entendue parler quelques jours auparavant par Ruth: c'est l'Indienne qui accompagna l'expédition de Lewis et Clark; Ruth avait émis l'idée que nous allions voir la statue à eux dédiée, mais le projet n'avait pas abouti.





La visite commence par un film qui raconte l'histoire du Capitole, la décision de le construire, les incendies qui l'on détruit, la construction de la coupole ininterrompue par Lincoln pendant les années de la guerre de Sécession. Comme le résumera O. en sortant (ce n'est pas si facile pour lui, il n'a qu'un an d'anglais derrière lui): «Si je comprends bien, ils employaient des esclaves pour construire le Capitole pendant qu'ils faisaient la guerre contre l'esclavage».
Oui, il a bien compris.

Nous montons dans les étages, passons près d'une étoile blanche dans le sol qui porte bonheur si l'on met le pied dessus.
Nous visitons la salle aux statues dans laquelle je repère Webster. Six mois plus tard je me souviens surtout de deux choses: notre guide ne pouvait concevoir la vie sans la climatisation et bénissait chaque jour le sénateur ou le représentant (j'ai oublié son nom) qui avait décidé de climatiser le Congrès («Vous imaginez! Travailler ici sans clim!» Et l'on sentait que toute son admiration allait à ces vaillants pionniers, ou encore «Vous pouvez visiter la coupole et monter dans la galerie (tout là-haut sous le plafond), il suffit de s'inscrire quelques semaines à l'avance, mais attention, il n'y a pas d'ascenseur ET PAS DE CLIM». Et l'on sentait qu'il en transpirait rien que d'y penser); et deuxièmement, il vouait une admiration sans borne aux films patriotiques de Clint Easwood.

Il nous indique qu'il faut écrire à son député pour visiter la salle des représentants. Nous sommes désappointés, mais H. décide de ne pas se laisser décourager et aborde le bureau des visites: si les Américains doivent écrire à leur représentant, que doivent faire les étrangers?
Réponse: rien, ils peuvent entrer immédiatement (!!!)

Pour entrer dans la salle des représentants, il faut de se débarasser de tous ses objets, téléphone, appareil photo, mais aussi portefeuille, papier d'identité, sac à mains, tout ce dont on ne se sépare pas volontiers aux mains d'inconnus. Les objets sont recueillis dans des sortes de grandes boîtes à chaussures en échange de ticket de vestiaire (cela m'a marqué, d'une part parce que le sentiment de nudité est assez étrange, d'autre part parce qu'un homme sortira paniqué de la salle des représentants: ticket perdu, aucun moyen de prouver son identité, et la perspective que toutes ses affaires aient été récupérées par un autre).
La salle est plongée dans la pénombre. Au ras du plafond des portraits, parfois surprenants (Moïse, Napoléon 1er, Hammurabi, Saint Louis, Maïmonide). Nous nous asseyons sur des sièges et écoutons des explications qui ne m'ont guère marquées.

Je ne sais plus où nous avons dîné le soir. Mais je me souviens m'être dit à un moment: «Mais nous sommes dans un hôtel pour Noirs!», non seulement parce qu'il n'y avait que des Noirs, ce que je n'aurais sans doute pas spécialement remarqué, mais à cause de leurs réactions: ils avaient l'air surpris et très heureux, l'un d'entre eux dans l'ascenseur m'a demandé d'où nous venions.
Je me suis dit qu'il devait y avoir des codes non écrits qui devaient désigner ces hôtels, codes et signes auxquels nous étions ou serions totalement imperméables en tant que non initiés.
Mais il s'agit d'une supposition gratuite.

Illumination

Dédié à Guillaume.

Mon amie Agnès est professeur d'histoire en lycée technologique. Lors d'un voyage à Berlin, elle fait visiter je ne sais plus quel musée à ses élèves et explique devant la photo de Jesse Owens que Hitler aurait refusé de lui serrer la main.

C'est alors que les yeux de Jennifer se dessillèrent et qu'elle dénonça outrée:
— Mais Madame, c'est pas bien, Hitler, il était raciste!

Interdit aux stagiaires

C'est ce que je découvre ce matin sur l'une des portes des toilettes des femmes.

Evidemment, qu'il n'y ait actuellement qu'une seule stagiaire dans les bureaux et que cette stagiaire soit noire ne peut être que coïncidence.
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