Alice du fromage

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Billets qui ont 'Bellecin' comme autre lieu.

dimanche 20 mars 2016

Retour

J’ai été trop légère sur la pharmacie. Liste pour la prochaine fois :
- Casquette quelle que soit la saison
- Crème solaire (idem)
- Lunettes (idem)
- Dafalgan codéïné
- Doliprane
- Lotion de Foucaud (pour détendre les muscles, désinfecter les ampoules, vivifier par son odeur)
- Synthol en crème
- Emplâtre Voltaren 1% autocollant
- Homéoplasmine (pour les ampoules et petits bobos)
- Sparadrah micropore (idem)
- Vicks et boule quiès (de base)

Et donc je n’ai pas ramé ce matin. Je pense que j’aurais pu faire la moitié de la distance, mais il faut ensuite rentrer et nous sommes quatre dans un bateau. Je n’ai pas pris le risque de ne plus pouvoir ramer. (D’ailleurs ça n’existe pas de ne plus pouvoir ramer. On rame, on rentre. Ensuite on paie. C’est ce que j’ai voulu éviter.)

Je passe la matinée entre le ponton à donner un coup de mains aux uns et aux autres et la terrasse au soleil.
J’apprends que la vice-présidente du club, une femme de cinq ou dix ans de moins que moi à la silhouette juvénile, est à l’hôpital. rupture d'anévrisme? Personne ne sait exactement, la phrase est : «elle va mieux, on peut l’appeler, elle recommence à parler».
J’apprendrai que son ami en voyage à l’autre bout du monde avait trouvé qu’elle « disait des choses bizarres » au téléphone. Quelques heures plus tard, comme elle ne lui répondait pas, il a téléphoné aux pompiers qui ont défoncé la porte et l’ont trouvée recroquevillée en fœtus dans un coin de l’appartement.
Je ne parle pas de Jacqueline. Je ne dis rien. Je fais le vide, je me chauffe au soleil.

Repas, valise. Démontage des bateaux, amarrage sur la remorque.

Comme la camionnette et la remorque vont plus lentement que nous, nous arrivons à Dole les premiers et partons à la recherche d’un café ouvert. Il y en a deux, au-delà de la cathédrale.
Fête foraine au bord du Doubs. Il doit y avoir un club d'amateurs de Terre-Neuves, nous en voyons passer une dizaine, une quinzaine, au loin. C’est très impressionnant.

Remontage des bateaux, rangement de la remorque. Jacky nous offre un café au club qui utilise des tasses en porcelaine (don de rameurs qui se débarrassent de vieux services) : c’est joli. Achat de casquette. Retour en voiture.

Dans l'obscurité de la voiture je fais discrètement une attaque de chagrin: la nouvelle de l'anévrisme de L. liée au fait que j'ai ramé en double deux jours de suite… Et ces trois jours qui m'ont tant rappelé le stage à Cholet pour préparer la coupe de France, logées à quatre en caravane et cette horrible entraîneur… Je sais que j'espère voir Nathalie en allant ramer à Marseille en septembre, je sais aussi que je le redoute. Cette peur de me mettre à pleurer en disant: «Elle me manque tant» (ce qui est idiot: que signifie «manquer tant» alors que je ne la voyais jamais? j'ai parfois l'impression de faire du sur-place dans l'enfance. Qu'attends-je?)

J’ai presque mis autant de temps à faire Neuilly-Yerres que Dole-Paris (j'exagère, mais pas tant que ça): les RER ne s'arrêtaient pas entre Villeneuve-St-Georges et Melun mais ce n'était pas annoncé (et donc au lieu de prendre le premier train pour Villeneuve j'ai attendu le troisième qui allait à Melun…); j'ai réussi à prévenir Hervé alors que je n'avais quasi plus de batterie et lui a été bloqué par une intervention de pompiers sur la route entre Yerres et Villeneuve.

samedi 19 mars 2016

Lac de Vouglans

Nous avons interverti l’ordre des sorties : ceux qui sont sortis à huit heures et demie hier sortiront à dix heures et demie aujourd’hui.
Je regarde partir Luc et Nicolas dans le brouillard avec inquiétude : ils ne sont pas très aguerris et la « sécu » (le bateau moteur) est loin, il a suivi les quatre. (Luc est condamné à ramer en double… à cause de ses grands pieds : les chaussures intégrées ne dépassent pas le 44 dans les bateaux longs. Voilà un problème qui ne se pose pas à Neuilly ou Melun). S’ils se retournent, nous les regarderons sans rien pouvoir faire. L’eau est très froide, tiendront-ils, tiendraient-ils ?

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En double avec Franck. Quelques bons moments.
Les compliments reçus au cours des mois passés ont cicatrisé mes complexes qui me rendaient si difficile de ramer en double; je ne me dis plus à chaque déséquilibre: «c’est de ma faute, je n’y arriverai jamais, pourquoi je continue, qu’est-ce qu’il doit penser de moi (etc.)» Les compliments, mais aussi la découverte que des personnes moins entraînées que moi avaient bien moins de scrupules et ne se remettaient jamais en cause (à l’aviron et ailleurs): ça suffit! (du sans-gêne et de la prétention comme outil pédagogique).

Après-midi à la nage du quatre. Cela ne se passe très bien, Franck m’a laissé cette place parce que nous avons bien ramé ce matin, mais le bateau ne me fait pas confiance. C’est très heurté.
Jacky corrige mon défaut (« Voilà pourquoi tu te tortilles. Tu ne le fais pas en double, il n’y a pas de raison de le faire en quatre » (si, il y a une raison : la peur des autres. Une timidité dévorante. Et c’est exactement cela: je me tortille): donc le pouce gauche au bout de la pelle gauche, la main droite bien descendue au dégagé.
Sans doute suis-je trop exigeante. Impossible de faire une manœuvre coordonnée, chacun n’en fait qu’à sa tête sous prétexte qu’il est inutile de se donner cette peine, il y a de place et pas de courant. Suis-je donc la seule à penser que c’est justement dans ces conditions-là qu’il faut s’entraîner pour être efficace dans les moments difficiles? (Question rhétorique: je sais que la réponse est oui. Je sais que je suis quasi la seule à aspirer à quelque chose davantage de l’ordre de la perfection que du loisir. Il est probable que j’ai tort, que je sois ridicule. Tant pis. Je sais aussi que je suis à la poursuite d’un rêve intérieur et qu’il ne faut pas abandonner trop tôt. J’ai souvent abandonné trop tôt.)
Jacky tient que le quatre est le bateau est le plus technique et le double le meilleur pour faire des progrès.

J’ai rattrapé mon sommeil en retard et ce soir je reste pour visionner les vidéos. En toute honnêteté, je ne vois pas les défauts, sauf les défauts de posture, et personne n’en a franchement. Se voir ramer est sans doute aussi désagréable que d’entendre sa voix. Se voir est désagréable (quel étrange métier qu’acteur). Dieu que je suis raide, on dirait que j’ai avalé un parapluie. Soudain je comprends ce que voulais dire Fred par « Détends-toi ».

J’ai mal au genou droit. Tendon ou ligament. Cela a commencé pendant que je ramais cet après-midi. Si je descends accroupie sur mes talons, ça ne me fait pas mal, mais si debout j’amène le talon à la fesse, c’est insupportable. Pourrai-je ramer demain ?

vendredi 18 mars 2016

Vannée

Ramé dormi. C'est le tout de ma journée.

Soleil. Bassin superbe, sur lequel nous sommes absolument seuls.

Quatre un peu brutal le matin. L'entraîneur est sans pitié pour ma façon de compenser avec le corps la gîte à bâbord. Nous ramons un peu trop vite, "un peu brouillon" comme dirait Régis.

Nous sortons de l'eau à dix heures et demie pour laisser la deuxième équipe s'entraîner avant le déjeuner. Je n'ai aucun souvenir de ce que j'ai fait durant ces heures. J'ai pris une douche, lu, écrit un billet. Ai-je dormi? Impossible de m'en souvenir.

Tous les gens du groupe à part trois (nous sommes vingt-et-un) sont des rameurs du samedi; nous ne sommes que trois à ramer le midi. En tant que minorité je subis un interrogatoire en règle qui me fait sourire (c'est un progrès).

L'après-midi je demande à monter en double avec Olivier. Ce fut chaotique mais pas déplaisant. Le retour fut très dur, avec vent contre. Dès que le soleil est moins haut il commence à faire froid, mais j'ai ramé en tee-shirt cet après-midi. Je suis toute rouge, surtout sur l'arcade du nez, je n'ai pas pensé à prendre de la crème solaire (et nous sommes loin de tout).

Aujourd’hui 25 mars, j’ajoute: j’ai enfin compris l’impression ressentie sur le bateau alors que nous avancions entre les falaises sur le lac silencieux, une impression de fin du monde, d’oppression et de liberté: c’était l’impression ressentie dans le tunnel de La maison des feuilles, cette impression de temps ralenti et éternel dans un espace illimité et pourtant bordé de murs. Et le silence.

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Vingt minutes de sieste après le déjeuner, une demi-heure après la sortie en attendant la seconde équipe. Il est 21h04 et je tape dans mon lit, j'ai abandonné les autres qui ont acheté de l'alcool et improvisent une soirée: je récupère mal quand je bois et j'ai trop de sommeil en retard.

Si j'avais mon ordinateur j'essaierais sans doute d'écrire quelques billets en retard, mais je suis sur iPad et je ne tape pas avec tous les doigts sur un écran tactile. Je vais simplement lire — m'endormir — et me coucher.

jeudi 17 mars 2016

Arrivée

Rendez-vous place Péreire. Nous sommes quatre, dont deux qui étaient à Berlin. Trajet sans histoire et sans intérêt (autoroute), je dors pratiquement tout du long.

Passage par Dole pour démonter les quatre et les mettre sur la remorque. Arrivée à la base de Bellecin à la tombée de la nuit, nous entrapercevons à peine le lac et ses rives blanches. Centre de colonie de vacances, chambrées de deux.
Le repas est une surprise: à la cantine, au milieu d'enfants de huit à dix ans qui paraissent beaucoup moins étonnés de nous voir que l'inverse.

Je fais mon lit en hauteur (je n'ai jamais eu de lit superposé, je prends toujours les lits ou les couchettes du haut); je fais le lit de ma voisine qui arrivera très tard, mi par gentillesse, mi pour éviter qu'elle ne fasse trop de bruit.

Je m'endors d'un bloc, sans m'en apercevoir, tandis que je lis Poésie du gérondif. Je suis contente d'avoir emprunté l'ostrich pillow d'Olivier dont je me sers comme d'un banal oreiller (à la place de l'infâme polochon en kapok).
J'ai oublié de prendre la lampe frontale.

Aujourd'hui ma filleule a seize ans. Incroyable.
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