Messe de 8 heures à Notre-Dame (j'ai beaucoup de temps le vendredi en attendant mon cours d'allemand. J'aime Notre-Dame et son éclairage intime, sa chaleur. Etre ici tôt le matin pour une célébration donne l'impression d'être au cœur du monde, non seulement dans l'espace, mais dans le temps).
Nous sommes plus nombreux aujourd'hui, plutôt quarante que vingt, dans le chœur fermé derrière l'autel (nous occupons les stalles sculptées).
Au moment de la lecture, flottement imperceptible, personne ne semble prévu, alors l'homme qui le visage fermé nous donne accès au chœur en s'assurant d'un regard que nos intentions sont pieuses monte la marche devant le pupitre et se met à lire.
Cantique des Cantiques. Il lit avec enthousiasme, il proclame.
Fin du passage. Il enchaîne avec le Livre de Sophonie. Je suis un peu surprise, non seulement nous n'avons souvent droit qu'à une lecture, mais s'il y en a deux, la deuxième devrait être une lecture du Nouveau Testament. Sa voix monte sous la voûte, emplit l'atmosphère.
Je regarde les prêtres. Le plus âgé ne bronche pas, le "nouveau" (je ne l'ai jamais vu) non plus. Le troisième se penche très discrètement sur le côté et demande à un fidèle son missel. Je le vois vérifier les lectures du jour. J'ai envie de rire. Il rend le missel.
L'autre a fini le livre de Sophonie. Il enchaîne avec la lecture du psaume, nous invite à dire le refrain. Je retiens mon souffle, et s'il continuait, s'il lisait la suite du gros livre devant lui, avec la même joie, le même enthousiasme? Il y a comme un vent de folie sous la nef, quelque chose est hors de contrôle.
Le prêtre âgé se lève, s'avance vers le pupitre à pas lents et dignes, il va lire l'Evangile. A regret, l'autre lui cède la place.
Tant pis.