Des tombeaux
Par Alice, dimanche 19 août 2012 à 23:59 :: 2012
Pour compenser le petit déjeune d'hier, nous avons trouvé un Denny's. D'est au sud, nous avons traversé des quartiers résidentiels de petites maisons en bois ou brique rouge. Que des noirs dans les voitures, et nous serons les seuls blancs dans le Denny's. J'arrive à faire sourire la serveuse en m'extasiant sur le chocolat au lait, qui est un chocolat viennois selon les normes françaises (mais ordinaire selon les normes allemandes, d'après Déborah).
Mount Vernon. Le charme de cette maison réside entièrement dans sa situation, qui domine un coude du Potomac. Rien en face, rien autour, je songe à la Seine aux environs d'Héricy, une Seine deux ou trois fois plus large.
Une terrasse le long de la façade ouest regarde le fleuve. Des chaises y ont été installées; leur dos délimitent un couloir le long des portes de la maison pour les visites organisées.
La maison est très simple, avec cinq chambres d'amis destinées à accueillir la multitude d'invités qui venaient rendre visite à Washington.
Tombeau, ponton sur le Potomac, film sur la guerre d'Indépendance. Les différentes entrées de musées sont généralement gratuites pour les enfants de moins de douze ans, et nous ne voyons aucun adolescent. Tous ces musées et reconstitutions historiques forment les enfants à l'histoire et à la fierté nationale, il y a dans tout cela un léger parfum de propagande qui finit par nous faire sourire au bout de deux semaines d'endoctrinement.
Il pleut. Retour à Washington. Mémorial Roosevelt (Franklin Delano) intégré au paysage, blocs de pierre comme jetés, cascades, évocation de la crise et du New Deal puis de la seconde guerre mondiale (WW II), une statue de Madame et, plus inattendue, une de son chien (il paraît qu'il est très connu: pas de moi).
Mémorial Martin Luther King. J'ai la surprise de voir 2010 sur la statue. Nulle part la phrase «I have a dream», peut-être que nous ne l'avons pas vue. Ou qu'elle n'y est pas. La statue est taillée dans une tranche de bloc rocheux poussée en avant, laissant plusieurs mètres derrière elle les deux autres parties de blocs ainsi créées. Le tout est monumental, je songe à RC expliquant que nous, Français, ne savons plus faire de monument car nous n'avons plus la fierté de notre pays.
Mémorial Lincoln, un peu plus loin. (Problème de parking: nous nous sommes garés innocemment devant une bouche d'incendie, il faut laisser 10' de part et d'autre, dit not contravention de cinquante dollars (10': quelle unité? des pieds? Il me semble qu'en pieds, c'était OK.) Dire de Lincoln qu'il a «sauvé l'union» me semble exagéré, il a forcé l'union serait plus exact (dans cette remarque sudiste, il y a l'influence de Ruth sur moi, je le sais). D'ailleurs c'est assez étonnant de réussir à obliger des gens à rester ensemble. Comment est-ce possible?
Voiture. Je conduis, O. pilote, nous nous perdons (les indications me parviennent tard et je les comprends encore plus tard), nous suivons un torrent vers l'ouest, nous atteignons ce qui doit être un centre nautique (je vois des kayaks), je prends la première à droite. Quartier des ambassades, je prends vers l'est. Nous mangeons au Pain quotidien (comme à New York), les enfants préfèrent le Subway en face. C'est très bon, avec le même défaut qu'en France: la musique trop forte, et donc des clients qui haussent la voix. (C'est ce que j'aime ici: le silence des restaurants).
Arlington. Deux petites plaques autour des époux Kennedy, un garçon mort après quelques jours, et une fille sans nom, "daughter": mais qui sont-ils?
Il est presque sept heures. Nous renonçons à voir le Mémorial Theodore Roosevelt. Direction Baltimore en traversant Washington vers de nord-est. La ville se délite, immeubles bas, maisons, espacés, de plus en plus espacés, et très vite la forêt.
Baltimore est à une heure, la circulation assez serrée, une marmote suicidaire grignote debout sur la bande d'arrêt d'urgence.
Baltimore, il fait nuit, je roule tout droit. La chaussée fait des vagues, je n'ai jamais vu ça. La voiture roule et tangue, ça me fait rire mais les passagers protestent. Je n'y peux rien. Quartiers chauds, port, je prends à droite quand j'aurais dû prendre à gauche à un carrefour en Y, Fayette street devient de plus en plus en plus étroite, jusqu'à arriver à un stop, dans mes phares des tombes, à quelques mètres de l'autre côtés du grillage. La rue ne continue qu'à gauche, il y a juste la place pour la voiture.
A droite le cimetière, à gauche perpendiculairement des rangées de maisons mitoyennes, presque des cabanes. Elles sont placées dos à dos, une allée miteuse sépare les jardins qui permettent juste de garer une voiture (mais comment arrivent-elles jusque là ? Tout est si étroit). Un chat maigre erre dans l'allée.
Je propose de dîner dans un Longhorn, cela remonte le moral des troupes toujours bas dès que la fatigue tombe. Dix miles de Baltimore, à Rosedale. Gâteau au chocolat. Tout va mieux.