Billets qui ont '2021-08-05' comme date.

Anticiper

Je planifie par grosses masses :
- aujourd'hui, H. travaille à Paris, donc nous dînerons à Paris — pas chez Roberta car la ligne 14 est fermée et qu'il ne paraît pas concevoir d'y aller à pied — sans doute à la Table du loup; donc nous allons rentrer tard;
- ce week-end nous sommes chez mes parents;
- mercredi soir je démonte les bateaux;
- du jeudi au dimanche je suis au Creusot;
- lundi 16 lave-linge et valises;
- mardi matin nous partons à Vienne, probablement en couchant à Roissy lundi soir.

Donc je peux repasser vendredi (à cinq heures ce matin j'ai programmé le lave-linge pour tourner à neuf heures ce soir de façon à étendre le linge en rentrant) et si je confie le chat à A., il faut que je l'emmène lundi ou mardi prochain. Si c'est Séverine qui vient faire du cat-sitting il faut qu'elle arrive le 16 après-midi.

Il faut que j'appelle Séverine.

Citizen M

Comme prévu il y a deux jours, nous nous retrouvons au Citizen M de gare de Lyon, dans cette chaîne d'hôtels découverte à Amsterdam il y a quatre ans. La chambre est large de la longueur du lit, elle me donne l'impression d'une cabine de bateau, mais avec un tel parti pris de design que l'on en oublie la taille de la pièce. De vrais livres (Catherine Cusset), une tablette Apple pour commander la télé et la couleur de la lumière de la douche… En un mot c'est amusant.

Nous ressortons chercher un restaurant et errons avant de nous attabler — toujours en terrasse — à La table du Loup rue traversière, taverne spécialisée dans le rhum.
Derrière nous une tablée d'avocats a des conversations d'avocats avec cependant une certaine vulgarité qui nous fait hésiter un moment à accepter l'idée que ce sont des avocats.

Adresse recommandée. Gin anisé et frites de patates douces, pain perdu.

Un arc-en-ciel

Comme souvent quand nous avons la flemme, nous sortons déjeuner ou dîner "en ville", à deux pas de chez nous.

Ce soir, crêperie, dehors, car H. refuse toutes les fois que c'est possible (c'est à dire toujours) de s'enfermer entre quatre murs avec des étrangers. Je n'y pense plus, mais lui pense encore au virus.

Et donc malgré le vent, nous nous installons en terrasse entre deux averses, ce qui nous permet de contempler un arc-en-ciel digne d'une pub pour Moret.

Arc-en-ceil au dessus de la porte de Samois à Moret sur Loing



H. est ennuyé: sa mère vient passer une visite de contrôle à Garches vendredi et son père lui demande de lui rendre visite, sans se rendre compte que c'est cent soixante kilomètres aller-retour dans la circulation parisienne, ou trois heures de transport en commun.

— Tu es à Bois-Colombes la veille? Reste sur place, dors à l'hôtel.
Et c'est ainsi que nous décidons de rester jeudi soir tous les deux à Paris, dans un hôtel gare de Lyon.

Fléchissement

Mail à Sybille, organisatrice du stage au Creusot: «C'est OK, je viens. Si tu veux un virement, envoie un RIB. Sinon chèque.»

Aussitôt les questions en avalanche: «Es-tu babord ou tribord? Es-tu vaccinée? Je viens de t'envoyer le compte rendu de notre dernière réunion.»

J'ai été rajoutée au groupe WhatsApp, preuve ultime de mon intégration au projet.

Aviron de bronze

Les rameurs qui partent en stage au Creusot ont fait un huit, je me suis rabattue sur un skiff.

Comment décrire le bonheur de cette sortie, après une journée entre quatre murs? C'est indicible de liberté.

Seine verte, ciel bleu, tache blanche du château de la Rivière en remontant vers Thomery


Pendant toute ma sortie j'ai attendu que le huit me rattrape, mais cela n'a jamais été le cas: que s'est-il passé? Ont-il fait beaucoup d'exercices? Oui, un peu, mais surtout, ils avaient pris pour barreur un enfant de douze ans non rameur — qui a passé son temps à papoter, à donner des coups de barre et faire des réflexions inquiétantes («comment je fais pour éviter la péniche?»). Bref, les huit rameurs étaient passablement exaspérés en rentrant.

Cela ne m'a pas empêchée de jouer ma Calimero auprès d'H., venu pour la deuxième fois participer au dîner du mercredi:
— Tu n'as pas ramé en huit?
— Non, il se passe ce que je craignais, ils constituent les huits entre rameurs qui partent au Creusot.
H. commence à fléchir:
— Bon, tu peux y aller, je ne veux pas être un obstacle à ta carrière de rameuse.

Nous sommes encore très nombreux. Sylvain ouvre le champagne pour fêter son aviron de bronze (niveau débutant qui se débrouille): c'est de l'amertume teintée d'ironie, il attendait un aviron d'or et une autorisation de sortie en absence de sécu (bateau moteur aui assure la surveillance du bassin), mais il y a du tirage avec la direction du club et visiblement le président lui a fait une mauvaise blague. Sous les dehors très amicaux que j'ai vus jusqu'à présent semble ce cacher une lutte acharnée pour le pouvoir et l'équilibre entre loisirs et compétion.

Après ce dîner, H. me confie: «je ne sais pas si je reviendrai. Ça parle beaucoup d'aviron, quand même.»

Reprise d'une tradition interrompue

Hier, message WattApps dans le groupe aviron :
Bonsoir,
Y a-t-il des candidats pour manger demain soir? Je mets au point mon planning apprentissage culinaire…
Suivent des réponses, «Moi. Je viendrai avec un guacamole», «désolé, j'ai de la famille, je viendrai la semaine prochaine».
Comme je ne suis pas sûre de bien comprendre (c'est «mon planning apprentissage culinaire» que je ne sais pas s'il faut prendre au premier ou au second degré — même si cela n'a pas beaucoup de sens au premier degré — mais justement, c'est pour cela que je ne suis pas sûre de bien comprendre), j'interroge:
— C'est une tradition?
— Oui, hors contraintes sanitaires, bien sûr…
— Et donc on vient au club vers 20h en amenant quelque chose? (La fille qui insiste pour être sûre d'avoir bien compris).
— Oui, un petit plat ou une boisson. Si tu peux viens ramer de 18 à 20h.
— C'est prévu à partir de juillet, juin c'était compliqué.
Je quitte le bureau vers six heures, je descends à Fontainebleau, je fais quelques courses à proximité (des tomates, des cerises), je marche jusqu'au club.
— Mais tu es en civil !
C'est toujours une surprise de voir les gens habillés normalement quand on les a toujours vu en combi ou en short. C'était l'un des points qui m'a sans doute desservie à Neuilly: ceux de la semaine connaissaient mes tenues de boulot, ceux du week-end ne connaissaient que mes nippes — or c'étaient sans doute eux les plus sensibles à l'apparence.

Nous sommes facilement une quinzaine. Les tables sont installées dehors devant les vestiaires, pas loin de la cuisine. H. a accepté de nous rejoindre et ammène du vin.
C'est un festin. Il n'y a pas de concertation, c'est à chaque fois la surprise. «Une fois il n'y avait que des desserts», nous raconte-t-on à plusieurs reprises. La situation a marqué les esprits, mais sans changer l'[e manque d]organisation. C'est vraiment bon enfant, sans complication.
— A l'origine, vers 2003, on buvait un coup. Il s'agissait de motiver les gens qui venaient aider à réparer les bateaux.
— Puis on a mangé…
— Puis on a arrêté de réparer les bateaux.

Eclat de rire général.

Il faut dire que je n'ai jamais vu des bateaux destinés aux loisirs aussi bien entrentenus. Et je viens de Neuilly où c'était déjà très bien, c'est dire.
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