Billets qui ont 'école primaire' comme autre lieu.

Roxane

Roxanne en musique d'ambiance quand je descends du RER à la gare de Lyon.

J'ai connu une fille qui s'appelait Roxane, c'était au CE2, elle devait avoir huit ans. Plus tard quand j'ai découvert que ce que j'entendais "Rock scène" s'écrivait "Roxanne" j'ai pensé que son prénom devait provenir de là : mais je viens de vérifier, elle était née dix à onze ans avant la chanson (une légende s'écroule), il faut donc supposer des parents amoureux de Cyrano...

Je n'aimais pas beaucoup cette fille, elle était grande à cheveux lisses, un peu bécasse, j'imaginais qu'elle aurait joué une version châtaine de Ficelle dans Fantômette tout à fait acceptable.
Au CE2, et peut-être déjà au CE1, je remplissais un album d'images d'animaux sur le modèle des albums de joueurs de foot. Nous avions tous notre album, il contenait trois cent deux ou trois cent six images, nous passions nos récréations en négociations et trocs, nous fanstamions sur les cartes les plus rares, dont la dernière, une panthère noire.
Tout mon argent de poche y passait — un dirham par semaine.
Un jour, j'ai découpé et mis à la poubelle la dernière page qui permettait, en ultime recours, de commander à la maison-mère les images manquantes. Je ne voulais pas tricher. J'aurais toutes les images par achats et échanges — sans tricher.
En découvrant que je m'étais fermée cette porte, ma mère m'a grondée.

Je me souviens du jour où j'ai trouvé la dernière image qui me manquait — pas la plus rare, un guépard.
Rituel, chacun arrive avec son paquet de cartes, le tend à l'autre, chacun regarde le paquet de l'autre, sélectionne les cartes qu'il voudrait récupérer... puis nous passons à l'échange, quelles cartes pour quelles cartes, et celles que nous refusons, arbitrairement, sans raison ou pour des raisons perverses, d'échanger.
Poker-face en apercevant cette dernière carte qui me manquait, cœur battant, que personne ne remarque à quel point je la voulais, à quel point il me la fallait... Déjà je savais que montrer un trop grand désir était un moyen assez sûr de ne pas obtenir satisfaction (et quand je lis Proust, le narrateur désirant si fort être présenté à Mme Swann et le montrant, grave erreur, à M. de Norpois — c'est ce moment qui affleure aussitôt).

Et voilà, elle était à moi, j'avais fini mon album — et la dernière carte, bien sûr, m'était venue de Roxane.

Les parents

J'ai assisté hier a ce qui était sans doute ma dernière réunion de parents en primaire — sans nostalgie aucune.

Préparation de classe de mer, j'ai déjà vu le numéro deux fois. J'admire l'instituteur impavide qui prévient les mêmes questions, les éternelles inquiétudes sans objet :

— Aucun médicament ne sera administré sans ordonnance, inutile de fournir une valise de médicaments. Si vous bénéficier d'un protocole P.A.I. (ou A.P.I? de mémoire: autorisation administrative de dispenser un traitement sur les lieux scolaires pour une maladie chronique, le plus souvent l'asthme), tout se passera comme d'habitude. Quelle que soit la maladie nous appelons un médecin, et si nous appelons un médecin, nous vous prévenons. Donc ne vous EVANOUISSEZ PAS si nous appelons, ce n'est pas forcément grave.
Une mère : — Et vous appelerez si vous administrez de la Ventoline ?
L'instituteur : — Je ne vous appelle pas quand je le fais à l'école, pourquoi voulez-vous que je vous appelle de classe de mer ?

— Prévenez-nous en cas d'allergie ou si vous respectez des interdits alimentaire. Le cuisinier est à notre disposition et fait de son mieux, alors merci de ne pas noter que votre enfant n'aime pas les épinards s'il n'aime pas les épinards: nous ferons des épinards quand même.

— A l'aller, la valise est remplie de vêtements soigneusement repassés par la maman — ou le papa (je ne veux pas être sexiste) — au retour, non ! Alors prévoyez des sacs plutôt que des valises, et des sacs plutôt trop grands.

— Nous les nourrissons, il est inutile de leur envoyer des colis de nourriture.

— Ecrivez au moins deux fois (en dix jours). Le téléphone est interdit (et nous trouverons les portables !)
— Mais pourquoi ?
— Parce que cela déstabilise trop les enfants. Ils vous écriront deux fois durant le séjour, mais la correspondance est libre. Donc ne venez pas vous plaindre si vous recevez « je vais bien; tout va bien » (et je songe avec présomption que je recevrai mieux que ça, mon plus jeune a un brin de plume et a compris les principes).

— En cas de décès dans la famille, ne prévenez pas les enfants par courrier, téléphonez au centre et demandez un responsable (non, je ne donne pas mon portable !)
Et je reste ahurie que des parents puissent envisager de prévenir leur enfant de dix ans en classe de mer de la mort d'un être cher par une lettre.

Etc, etc.
J'admire l'humour et le dévouement de cet instituteur plutôt mal vu (il aime la discipline). Ses élèves ne grandissent pas (puisqu'il a année après année des CM2), il est plus surprenant que les parents ne grandissent pas non plus.


Les parents ne cessent de m'étonner par leurs inquiétudes multiples, on dirait qu'ils ne peuvent survivre loin de leurs enfants (et ils imaginent clairement que l'inverse est vrai, quelle prétention). Comment ont-ils fait pour ne jamais se séparer de leurs enfants avant que ceux-ci n'aient dix ans ? Ont-ils donc tous de la famille sur place ou des mères au foyer pour les garder pendant les vacances ?
L'instituteur rappelle cette vérité de base: Point de nouvelle, bonne nouvelle.

Qui avais-je donc choqué ainsi ? Mes parents partis à l'autre bout du monde, je-ne-sais-qui me demanda s'ils étaient bien arrivés :
— A priori oui, puisque la radio n'a annoncé aucun crash.
On m'avait regardé avec horreur.


J'en ai parlé à midi à Paul. Il m'a raconté que dans les années 30 au collège Sainte-Croix du Mans, une mère d'élève en 6e était venue se plaindre de ce que la professeur d'anglais parlait… en anglais.

J'ai ri de bon cœur. Je me souviens de cette mère, lors d'une préparation de première communion, qui s'était émue de la violence de la mort sur la Croix : ne pouvait-on éviter cela aux enfants ?
Le prêtre, avec un fin sourire: — Il est tout de même difficile de faire l'économie de la Passion.

Un seul mensonge

Guillaume relance la chaîne… Il s'agit donc de trouver le mensonge parmi dix affirmations. (Les instigateurs paraissent en être Roxane et Honey).
Pfou, je dois avouer que je n'ai pas beaucoup d'idées. Ne soyez donc pas surpris si certaines affirmations vous rappellent d'autres listes, ce n'est pas un hasard.

1) J'ai vendu par téléphone des abonnements au Figaro. Désormais j'ai peur du téléphone.

2) J'ai lu La Montagne magique à cause d'un ami qui m'en disait le plus grand bien. Il ne l'avait pas lu.

3) J'ai eu droit à un contrôle d'identité aux Halles. Comme j'en demandais la cause, le flic a insinué que je faisais le trottoir.

4) J'ai fait régulièrement le mur à l'envers, non pour sortir de l'internat, mais pour y entrer.

5) À dix-huit ans, je me levais spécialement le dimanche pour regarder Candy.

6) Je n'ai pas lu À la recherche du temps perdu. J'espère que cela ne se voit pas.

7) J'ai pris l'ascenseur avec Raymond Barre mais je ne l'ai pas reconnu.

8) Depuis mon retour du Maroc à huit ans, je n'ai jamais quitté le territoire français. J'évite de parler voyages.

9) Cela doit faire dix ans que je n'ai pas vu une exposition. J'évite de parler peinture.

10) J'ai redoublé mon CP. J'écrivais très mal.



Je passe le relais à writ, Mir, et Rose (mais verra-t-elle cet appel?), et puis à Jean Ruaud, qui à ma connaissance a été le premier blogueur que je ne connaissais pas à me linker (Merci. j'ai décidé de figer ma liste de liens par flemme diplomatique, mais je n'oublie pas).

Jules, tu ne voudrais pas jouer dans les commentaires, où m'envoyer une liste à mettre en ligne, par hasard? Tu fais partie des blogs évaporés que j'ai lus si peu de temps, en arrivant trop tard dans leur histoire.

Dilemme

Je suppose qu'il est normal de se demander de temps en temps à quoi bon bloguer, comme à quoi bon tout, finalement.

Lorsque j'étais au CE2, nous devions faire un résumé de chaque livre que nous empruntions à la bibliothèque de la classe. J'avais horreur de ça. En plus, j'étais désavantagée, car j'aimais lire, je lisais vite, je pouvais lire beaucoup de livres pendant que les autres n'en lisaient qu'un, ce qui me faisait beaucoup de résumés à rédiger. C'était pénible, car bien entendu, pendant que j'écrivais ces résumés, je ne lisais pas, et franchement, raconter ce que je savais déjà me paraissait sans intérêt.
J'avais résolu le problème en empruntant les livres en cachette pendant les récréations. Je les lisais puis les remettais en place, ni vue ni connue.

Pour le blog, c'est un petit peu plus compliqué : si je lis au lieu d'écrire, cela va se voir. Et si j'écris, quand lire?
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