Billets qui ont 'assurance' comme mot-clé.

Convention et protocole, billet technique

Encore une journée passée comme en rêve. Je ne me souviens de rien, sauf que j'ai découvert le protocole PAOS, l'équivalent de l'IDA pour les dommages corporels causés par des accidents de circulation.
Sur ce modèle, pour les accidents de la circulation et les sinistres impliquant des bicyclettes, un protocole a été signé le 24 mai 1983 entre les trois caisses nationales d'assurance maladie (CNAMTS, CANAM et la CCMSA) et les organismes représentatifs des entreprises d'assurance (GEMA et FFSA) avec pour objectif d'accélérer le recouvrement par les caisses de sécurité sociale des créances qu'elles détiennent auprès de l'assureur du responsable de l'accident, de permettre aux assureurs d'indemniser plus rapidement les victimes d'accidents de la circulation et de simplifier les rapports entre les caisses de sécurité sociale et les entreprises d'assurance en éliminant les causes de litiges. (Annexe III)
Bon, tout le monde s'en fiche ici, mais il en ressort que les mutuelles de la code de la Mutualité ne sont pas concernées. Du moins je crois. Si cela se confirme, une méchante assurance à forme mutuelle (ne pas confondre) est en train de nous voler quinze mille euros. (Je suis assez contente de moi d'être parvenue rapidement à cette conclusion sans connaître le sujet une heure plus tôt).

Je suis allée chercher H. gare de Lyon et nous sommes revenus ensemble par la coulée verte au Janissaire dont l'enseigne matin après matin retient mon œil: «gastronomie turque».
Excellente cuisine.

Au retour vers la gare, H. a reconnu la mairie du douzième où il a déclaré O. lors de sa naissance (une aventure que je raconterai un jour). Je n'avais pas pris conscience que c'était ici.

Manifs contre les retraites

Je ne vais pas le dire trop fort, mais ça m'arrange bien: ça me donne un bon prétexte pour rester à la maison.

Je passe la journée à faire ce que je préfère (m'occuper des demandes des adhérents) et à ne pas faire ce que je devrais (gouvernance et conformité, comprendre: rédaction de procédures, ça m'agace de plus en plus. A bas l'ACPR!).

Bref, tard le soir je me retrouve en train de suivre négligemment les quatre derniers modules des quinze heures de formation annuelle obligatoire de la DDA (directive sur la distribution d'assurances).
Je n'en peux plus de la conformité.

Billet technique (qui n'intéressera que ceux que ça intéresse)

Je me replonge dans la conformité (qui consiste à mettre en place des garde-fous pour ne pas être celui sur qui on tapera quand quelque chose tournera mal1) et je découvre les versions ultérieures des textes que j'ai connus dans leur enfance circa 2010.

Découvrez la liste nominative des personnes dont les avoirs sont gelés (lire cela c'est comme lire un roman d'espionnage) et plus mystérieux, la non-liste des PPE, les personnes politiquement exposées. Les banques et les assurances et les notaires et les agents immobiliers (etc) sont obligées de les surveiller, mais sans liste officielle: entre lutte contre le blanchiment et invasion de la vie privée.
On notera au passage cette fantastique reconnaissance implicite: que les personnes politiques sont davantage susceptibles de céder à la tentation du blanchiment et de la corruption. Nous sommes loin de «Noblesse oblige».

Par ailleurs vous trouverez ici une réflexion sur les complémentaires santé et leur possible avenir avec un tableau comparatif des situations selon votre contrat de travail (ou chômage ou retraite) p.27.



Note
1: en langage juridique : organiser la chaîne des délégations de responsabilité et mettre en place les contrôles légaux obligatoires.

Assurance

Je vois passer l'idée d'une assurance épidémie.

Sans commenter la viabilité du dispositif (je suppose que le DG d'Axa est un plus grand professionnel que moi (litote)) je vais en profiter pour faire quelques rappels de bon sens (sachant qu'il est possible ensuite d'organiser des dispositifs qui permettent d'échapper à ce que je vais exposer: mais y échapper consiste à le prendre en compte):

L'assurance est née à Venise: deux ou trois armateurs décidaient de mutualiser les risques: si leurs trois bateaux arrivaient à bon port, chacun profiterait de son bateau, si un ou deux manquaient à l'appel, les armateurs partageraient les gains en trois.
De cet exemple simple, on comprend immédiatement qu'il ne faut pas que tous perdent tout: sinon il n'y a rien à partager.
Même si l'assurance ne fonctionne plus exactement ainsi, le principe reste valable. C'est pour cela que les épidémies, les guerres, les catastrophes nucléaires, etc., tous les événements qui touchent tout le monde, sont exclus des contrats (français).

Je vois certains être sur le point de proposer que les assurances remboursent leur manque à gagner aux PME. Ces personnes se rendent-elles compte que cela revient à supposer que les sociétés d'assurances disposeraient de l'ensemble du chiffre d'affaires des PME?
Par quel miracle?
Cela supposerait que la prime d'assurance versée par chaque PME soit égale à l'intégralité de leur chiffre d'affaire.

————

Rappel: l'assurance et la solidarité sont deux notions différentes mais complémentaires: en assurance vous cotisez selon votre risque (la prime est différente selon que vous roulez en twingo ou en ferrrari); selon le principe de solidarité, vous cotisez en fonction de vos capacités (la sécurité sociale, par exemple).

Les contrats d'assurance français destinés aux particuliers organisent invisiblement la solidarité dans un grand nombre de domaines. Par exemple, depuis 1985 ils prévoient tous une contribution attentat. Sur votre contrat automobile, vous cotisez à un fond destiné aux victimes d'accidents dont le responsable conduisait sans assurance. Votre contrat habitation comprend une contribution à un fond catastrophe naturelle et une garantie tempête obligatoire.
En santé, les contrats de complémentaire santé qui veulent bénéficier d'une fiscalité avantageuse n'ont pas le droit de vous faire remplir un questionnaire de santé. C'est une façon d'organiser la solidarité; dans le cas contraire, les personnes présentant la moins bonne santé devraient payer une cotisation très élevée (sachant qu'ici le calcul est faussé par la sécurité sociale: quelqu'un souffrant d'une affection chronique (diabète, cancer, sclérose en plaque) sera pris à cent pour cent par la sécurité sociale et ne coûtera pas très cher à sa complémentaire santé).

Bref, nous sommes solidaires sans le savoir, nous sommes beaucoup plus solidaires que nous le croyons. C'est dommage d'ailleurs, peut-être devrions-nous en avoir davantage conscience.

Retour karmique

Il y a quelques années existaient les clauses de désignation :
Ce mécanisme est le suivant : les entreprises doivent obligatoirement s’assurer auprès d’un ou plusieurs organismes assureurs choisi(s) par les organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés au sein d’une branche professionnelle. En contrepartie de cette exclusivité, l’organisme est tenu de couvrir tous les salariés du secteur concerné, sur la base d’un tarif unique. Les risques sont ainsi « mutualisés » au sein de la branche, comme si elle constituait une seule et même entreprise, alors que selon les défenseurs de ce système, sans celui-ci, les entreprises se verraient proposer des tarifs très différents, en fonction notamment de leur taille et de l’état de santé actuel ou futur de leurs salariés.
Si la mutualisation sur un grand nombres de têtes permettait de faire baisser les tarifs, en revanche ces clauses rétrécissaient le terrain des assureurs exclus de fait des branches qui ne les avaient pas choisis: chaque assureur avait ainsi sa chasse gardée et ne pouvait empiéter sur celle des autres.
Désireux de gagner des parts de marché, les assureurs ont plaidé pour la fin des clauses de désignation et la possibilité pour chaque entreprise de choisir librement sa couverture prévoyance et santé. Ce fut chose faite en 20131.

C'est alors que les assureurs découvrirent qu'ils avaient eux-mêmes, au niveau de la branche assurance, un système qui s'apparentait à de la désignation, avec l'affiliation obligatoire au RPP (régime de branche) géré par le BCAC (GIE piloté par dix co-assureurs).

Marche arrière toute, recours devant le conseil d'Etat, le conseil constitutionnel,… Rien n'y fait, la fin de la clause de désignation est confirmée, les assureurs sont désormais libres de choisir la complémentaire santé de leurs salariés, ils ne sont plus liés au RPP.
Le BCAC, inquiet que ses affiliés ne le quittent, décide alors de changer de prestataire de service (pour rembourser les soins et verser les rentes d'invalidité): puisque B2V ne donne plus satisfaction (informatique vieillissante), il choisit en décembre 2017 de le remplacer par Cegedim, à la grande colère des organisations syndicales qui s'estiment mises devant le fait accompli.

2018 se passe sans que nous, opérationnels, ne soyons jamais questionnés sur notre métier et les particularités de nos populations: tout juste une question de transco (transcodification) en décembre qui me paraît étrange, mais personne ne creuse (quoi qu'il en soit en décembre pour janvier c'est déjà trop tard).
Le 4 janvier (retour au bureau), les premiers salariés appellent pour se plaindre.
Cela ne s'est pas amélioré depuis lors. Cegedim le preux qui devait faire oublier B2V le minable fait preuve d'une redoutable incompétence. La grogne grandit.

Vouloir empêcher le départ de ses affiliés en remplaçant un prestataire à bout de souffle par un prestataire qui accumule tant de boulettes2 qu'on se demande s'il le fait exprès… epic fail !





Note
1 : Deux ans plus tard offrir une complémentaire santé à ses salariés devenait obligatoire pour toutes les entreprises (obligation effective à partir de 2016), ce qui donnait tout son sens au libre jeu de la concurrence.

2 : aujourd'hui j'ai reçu le fichier des prestations d'une autre entreprise que la mienne (avec noms des salariés et leurs coordonnées, pas très RGPD)… et un mail adressé à toutes les entreprises adhérentes sans mettre les destinataires en copie cachée… C'est le stress qui leur fait accumuler les erreurs, où ils s'en fichent de façon abyssale?

Départ

Sept heures : Candycrush en écoutant la radio. Allianz propose 25% de réduction de prime aux automobilistes conduisant des voitures avec système d’aide à la conduite. Le journaliste décrète que les assurances vont s’en mettre plein les poches puisque qu’il y aura moins d’accident (mais non, réfléchis: c’est justement pour cela qu’il propose 25% de réduction: parce que cela provoquera moins d’accidents); puis déplore que cette amélioration de la sécurité va provoquer des pertes d'emploi: moins d'infirmières, moins de garagistes… (je manque de m'étouffer dans mon café); et puis sans doute qu'il y aura moins de propriétaires de voitures et plus de location quand la voiture intelligente pourra venir chez vous uniquement quand vous en aurez besoin: que va devenir l'économie?
Je suis abasourdie et navrée: ainsi, nous en sommes encore là, que des journalistes sur France Inter ou France Culture souhaitent davantage de voitures et d'accidents pour faire fonctionner l'économie?

Repassage du plus urgent avant de fermer les valises. J’écoute Nathalie Sarraute (podcast de France Culture ou France Inter). Elle cite Yourcenar qualifiant le bonheur de "sous-produit". Je comprends bien ce que cela veut dire: non produit de second ordre, mais produit obtenu en outre, effet secondaire désiré et souhaitable à ne pas souhaiter en tant que tel, mais qui survient, advient, alors qu'on l'a presque oublié.

Nous partons si tard que nous déjeunons à Sens.
Il fait beau.

Etape à Bazoches car je voulais visiter le château de Vauban. Demeure habitée donc vivante, qui échappe à la mise en scène des monuments historiques. Le plus impressionnant est sans doute les quatre arbres généalogiques de la galerie où travaillait Vauban avec ses ingénieurs, l'un descendant de Saint-Louis, un autre montrant les liens entre les actuels propriétaires et leurs différents cousins. Je découvre à cette occasion que les propriétaires de ce château possède également celui de Cheverny à quelques kilomètres de chez mes parents (ce qui à la faveur d'une homophonie patronymique occasionne à la maison quelques coups de téléphone mal aiguillés.)

Persuadé (à tort) que l'hôtel du Lion d'or à Vézelay est celui de La Grande Vadrouille, H. insiste pour que nous y dormions, ce qui me convient tout à fait: c'est ainsi que je peux visiter (très vite, très discrètement, c'est l'heure de l'office) la basilique de Vézelay dans la lumière de fin d'après-midi.

Nous dînons à l'hôtel du Cheval blanc (ces noms d'hôtels… de quoi réjouir Nabokov). Surprise en ouvrant la carte: le chef a passé son exaspération en écrivant une page qui nous apprend qu'une directive européenne rend obligatoire de prévenir les clients des produits allergènes contenus dans les plats. Il proteste en faisant remarquer que tout allergique normalement constitué avait auparavant le bon sens de poser la question au garçon…
Voilà qui éclaire un mystère: je me demandais pourquoi tant de gens qui "mangeaient de tout" (selon la terminologie de l'enfance) devenaient soudain intolérants (terme révélateur) à ceci ou cela : cet avertissement m'a fait comprendre que c'est tout simplement qu'on leur fait se poser une question qu'ils ne s'étaient jamais posée.
Pour le reste, le dîner est excellent.

Les nouvelles technologies et la finance

Réunion des entreprises du groupe cliente de la banque du groupe.

J'ai appris qu'il existait des expériences d'assurance "participative", comme inspeer. Cela m'a éblouie: d'une part je pensais cela impossible vu les obligations posées par l'ACPR, d'autre part c'est revenir aux fondamentaux de l'assurance, quand les armateurs vénitiens partageaient les risques de leurs navires en partance et cela me ravit.
Cela ne concerne que de petites sommes, en l'occurence les franchises non couvertes par les assureurs traditionnels, mais c'est intéressant dans la démarche: cela revient à ressentir à nouveau la mutualisation, la dépendance dans laquelle nous sommes chacun du comportement de tous.


Présence d'un des fondateurs d'Unilend qui prête aux PME et TPE. Quelques commentaires de ce fondateur:

— Nous ne prêtons pas pour des besoins de trésorerie mais pour des projets.

— Embaucher est un projet. 25% des entreprises qui ont emprunté ont embauché. Mais pour une banque, emprunter pour embaucher, ça n'existe pas: vous avez ou pas les moyens d'embaucher. Elles ne prêtent pas pour ça.

— Le dernier défaut de paiement en date d'un prêteur sur la plateforme est un maraîcher de Rambouillet : le centre-ville est devenu piétonnier, des supérettes se sont installées en périphérie, il ne s'est pas payé pendant trois mois puis il a jeté l'éponge. Plus bas, sous son souffle, comme à regret: souvent l'Urssaf y est pour beaucoup et reprenant le sourire, comme ne voulant pas être trop grave après avoir dit une vérité: mais bon, c'est logique, ça leur fait des clients.

— Pour les sommes importantes, nous avons aussi des entreprises dont la banque a atteint sa limite de prêts sur une ligne de crédit donnée: la banque accepte de prêter la moitié de la somme mais demande à son client de trouver l'autre moitié ailleurs. Dans ce cas, les banques sont contentes de nous voir car elles savent que nous prêtons sans arrière-pensée, nous n'essaierons pas de leur prendre leur client.


Le lendemain, je raconte cela à H. qui commente: «En France, les banques prêtent à ceux qui ont déjà. Aux Etats-Unis, c'est une autre conception. La banque et les financiers disposent d'une grosse enveloppe de prêt qu'ils partagent entre deux ou trois cent entreprises. Ils attendent un retour de 40%. Ils ne donnent pas la somme empruntée d'un coup mais la distillent en fonction des résultats. Ils suivent les entreprises mois par mois et arrêtent de les financer dès que les résultats s'éloignent des prévisions. Ils en "tuent" 80%, mais dans celles qui restent, ils en ont une ou deux qui rapportent plus que les 40% globaux attendus.»

L'indemnisation des victimes de catastrophes aériennes

Un ami a publié l'image suivante sur son compte FB:





Bien évidemment, c'est en partie vrai, un peu comme il est en partie vrai que si les médias français (européens?) ont peu parlé du massacre kenyan, c'est parce qu'il s'agit de chrétiens1.

Cependant, la nationalité a une autre conséquence: si la compagnie n'est pas européenne (union européenne), tous les passagers ne sont pas égaux. J'avais été surprise et choquée de l'apprendre par un article de L'Argus de l'assurance paru le 28 août 2009, après la disparition du vol AF 447 reliant Rio de Janeiro à Paris et du vol 626 de Yemenia Airways en juin 2009.
J'avais mis cet article de côté, je vous le livre quasi in extenso.

J'ajoute des sauts de ligne pour faciliter la lecture en ligne.
[…] Il appartient au marché de l'assurance aviation de procéder à l'indemnisation des ayants droit des victimes, voire de la victime elle-même en cas de survie… En pratique, les assureurs aviation sont peu nombreux et spécialisés. La France en compte trois principaux : Axa Corporate Solutions, la Réunion aérienne (GIE regroupant Generali France, Groupama transport, MMA et Scor) et Allianz. Les grandes compagnies aériennes sont assurées par plusieurs marchés (européen, asiatique, nordaméricain).

Les assureurs souscrivant en coassurance, c'est leur chef de file (le leader) qui va négocier les indemnisations pour le compte de tous. En conséquence, ce sont les assureurs de l'opérateur aérien qui feront les premières avances. Il est en effet prévu, par le régime de responsabilité du transporteur aérien (règlement européen n° 2027/97), le versement d'une avance à la victime, laquelle ne peut pas être inférieure à 15000 droits de tirage spéciaux (DTS : panier de monnaies regroupant le dollar US, le yen, l'euro et la livre sterling) aux ayants droit en cas de décès.

Une fois connues les premières hypothèses sur les causes de l'accident, les constructeurs et motoristes vont devoir se défendre avec le soutien de leurs propres assureurs. En pareil cas, un dialogue s'installe souvent entre les deux groupes d'assureurs pour discuter les montants d'indemnisation des victimes ou de leurs ayants droit, voire pour se répartir les responsabilités. Ils vont devoir appliquer un régime de responsabilité complexe, rarement uniforme et, surtout, très différencié selon les victimes.

Si les derniers sinistres ont remis sur le devant de la scène la question de l'indemnisation des victimes et/ou de leurs ayants droit lors d'accidents aériens au cours de vols internationaux, la question de l'indemnisation s'est posée dès les premières heures de l'aviation commerciale. La première pièce de l'édifice a été posée par la convention de Varsovie du 12 octobre 1929 relative à l'unification de certaines règles en matière de transport aérien international (entrée en vigueur le 13 février 1933), qui a été modifiée dès 1955 par le protocole de La Haye du 28 septembre 1955 (entré en vigueur en 1963).

Ces dispositions ont très vite été considérées comme dépassées en raison des faibles plafonds d'indemnisation prévus. Divers mécanismes/régimes d'indemnisation, tant au niveau national qu'international, ont été mis en place afin de pallier les insuffisances de Varsovie-La Haye. Ainsi, selon les accords IATA de 1993 et 1995, les compagnies aériennes renoncent à se prévaloir des plafonds d'indemnisation de Varsovie-La Haye, l'article L. 322-3 du code de l'aviation civile français relevant le plafond à 114336,76 €. Malgré ces mécanismes correctifs, la situation n'était pas satisfaisante et, le 28 mai 1999, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a adopté la convention de Montréal, relative à l'unification de certaines règles en matière de transport aérien international (entrée en vigueur le 4 novembre 2003, 92 Etats parties signataires actuellement), destinée à remplacer Varsovie-La Haye.

La responsabilité du transporteur aérien envers ses passagers, lors d'un vol international, est désormais encadrée de la façon suivante (art. 21):
- jusqu'à 100 000 DTS, le transporteur ne peut pas exclure ou limiter sa responsabilité (sauf faute de la victime) ;
- au-delà de 100000 DTS, le transporteur n'est pas responsable des dommages subis s'il prouve que le dommage n'est pas dû à sa négligence ou à un autre acte ou omission préjudiciable,de sa part, de ses préposés ou de ses mandataires ; que ces dommages résultent uniquement de la négligence ou d'un autre acte ou omission préjudiciable d'un tiers.
[…]
En 2002, l'Union européenne a adopté le règlement n° 889-2002, modifiant le règlement n° 2027-97 en incorporant dans le droit de l'Union européenne toutes les dispositions de la convention de Montréal relative à la responsabilité du transporteur aérien envers les passagers et les bagages.
Désormais, toutes les personnes voyageant sur un vol opéré par un transporteur aérien de l'Union européenne sont indemnisées selon les dispositions de la convention de Montréal, que ce soit directement par l'application de la convention ou par celle du règlement n° 889-2002.

Pour les personnes voyageant avec un transporteur aérien non communautaire, tout dépend si le vol relève ou non de la convention de Montréal.
L'application de ce régime juridique, à l'apparence uniforme, va pourtant aboutir à des indemnisations très différentiées selon la qualité des passagers, d'une part, mais surtout de la compétence juridictionnelle, aléatoire en pratique. Les ayants droit s'efforcent de maximiser l'indemnisation en saisissant le juge le plus généreux, dans les faits le juge américain.

Les indemnisations sont de deux ordres. D'abord le préjudice économique et financier. C'est celui résultant de la perte de revenus en raison du décès ou de la blessure de la victime. […] Ensuite, le préjudice moral, en commençant par le « prix de la douleur », mais aussi les préjudices d'agrément, ou encore les désordres dits «post traumatiques» pris en charge dans certaines juridictions. Les sommes versées au titre de l'indemnisation des dommages liés à un accident aéronautique sont nettement supérieures aux indemnisations d'autres accidents, pour des raisons absolument subjectives liées à l'émotion. Elles se traduisent par une inflation des préjudices moraux, dans des proportions inconnues du droit commun… Aux États-Unis l'indemnisation d'un décès consécutif à un accident aérien peut dépasser 4 M$, dont l'essentiel est constitué de préjudices moraux. Dans un même accident, toutes les victimes n'auront pas nécessairement accès aux mêmes juridictions, d'où des disparités d'indemnisation selon les nationalités. Il s'en suit un profond sentiment d'injustice difficilement explicable par les praticiens de l'assurance. […]

Thibaut de Mallmann, ancien avocat, directeur juridique de la réunion aérienne,
avec la collaboration de Dorothée Cresp, juriste
Et comme d'habitude, murmures dans les couloirs pour savoir qui est l'assureur de l'avion allemand, quels comptes vont être plombés par la catastrophe… (Le premier réflexe des directeurs, c'est de savoir qui est l'assureur, toujours: je me souviens par exemple d'AZT à Toulouse, du soulagement de savoir que nous n'étions pas concernés… C'est assez bizarre.)





Note
1 : Je ne crois pas que ce soit pour des raisons "anti-chrétiennes", mais parce qu'on considère que les chrétiens ne sont pas à plaindre, généralement. Il reste d'eux l'idée qu'ils sont en position dominante, alors que c'est de moins en moins vrai au plan mondial. Surtout, ils n'ont plus rien à voir avec les chrétiens batailleurs et armés des siècles précédents.

Comité d'audit

Semaine de clôture des comptes, comme tous les ans à cette époque (enfin, nous avons trois semaines d'avance cette année). J'hésite à inscrire ces tâches qui reviennent, le jardinage, la clôture des comptes… J'hésite à écrire ces menus détails identiques année après année mais finalement… Finalement j'aime bien ce temps circulaire qui nous fait entrer dans l'éternité.

Comité d'audit l'après-midi, soit la réunion la plus intéressante de l'année: nous sommes six, discussion de spécialistes (cinq, pas moi!), j'essaie de retenir tout ce que je peux. Cela se termine à 18 heures, c'est un peux court pour prendre en compte les modifications décidées (montant des PSAP, reclassement de postes à postes, etc) dans tous les documents à valider pour l'approbation des comptes par le conseil d'administration lundi à 11 heures… Ce calendrier bien trop serré est dû à mes chers syndiqués/syndicalistes (je ne sais pas quel est le terme juste) qui cumulent tant de mandats qu'il est impossible de trouver une date pour les conseils d'administration, ils sont toujours en réunion (CE, CHSCT, DP de six entreprises différentes: allez donc trouver un créneau libre quand en outre il faut prendre en compte les vacances scolaires de toutes les zones…).
Très gentiment la commissaire aux comptes me dit de lui envoyer les rapports à relire ce week-end, à quoi je réponds «jamais le dimanche!»
Mais elle l'a fait si spontanément que je pense déjà à la façon de faire tenir ces documents dans ce week-end, entre la journée sur les Pastorales (épîtres pauliniennes), la soirée pour les vingt ans de G., l'aviron, les hortensias, le plan de dissert à préparer pour jeudi prochain…

Spécialité régionale

J'ai oublié de transmettre l'info quand je l'ai eue: Niort est la ville des cougars (parole de recruteur qui s'en sert comme argument auprès des jeunes hommes pressentis pour travailler dans les mutuelles niortaises).

L'article 235 ter X du CGI (code général des impôts)

Préambule comptable : l'un des principes comptables est le "cut-off", qui prévoit de rattacher les charges et les produits (plus ou moins l'équivalent des dépenses et des recettes, pour ceux qui n'ont aucune notion comptable) à l'exercice de leur survenance. C'est ainsi que si vous recevez une facture annuelle qui court du 1er mai N au 30 avril N+1, vous êtes censé calculer prorata temporis la part qui revient à l'année N et celle qui revient à l'année N+1 (en supposant que votre exercice coïncide avec l'année civile) et utiliser des comptes comme "charges constatées d'avance" ou "produits à recevoir".

Spécificité de l'assurance: en assurance de biens et de santé, l'assureur règle des sinistres et des prestations. Comme à la fin d'un exercice N il n'a pas connaissance de tous les sinistres ou prestations qu'il aura à payer (si vous avez un accident ou une grippe le 31 décembre, l'assureur ne connaîtra le montant qu'il devra débourser qu'en janvier, au mieux) au titre de cet exercice N, il constitue une provision appelée PSAP (provision pour sinistres à payer) qui repose sur une évaluation statistique de ce qu'il devra payer en N+1 pour des sinistres survenus en N.
Evidemment, comme cela vient en charge, cela diminue le résultat, donc la base imposable. La tentation serait donc de gonfler les PSAP afin de diminuer le résultat et payer moins d'impôts.

Le législateur dans sa grand sagesse a donc institué "la taxe sur les boni de liquidation": s'il se trouve à la fin de de l'année N+1 (puis N+2, etc, car certains sinistres graves ne sont "clos" que des années plus tard, après consolidation médicale) que vous avez trop provisionné par rapport aux sinistres que vous avez réellement réglés au titre de l'année N, vous êtes en "boni": il y a eu excédent de provision, vous avez trop diminué votre résultat par rapport à votre besoin réel, vous n'avez pas payé tout l'IS (impôt sur les sociétés) que vous auriez dû, vous devez donc acquitter une taxe sur les boni.

Comme 2012 était la première année où les mutuelles 45 étaient soumises à l'IS, 2013 est la première année où elles sont soumises à la taxe sur les boni — si elles constatent un boni, ce qui est notre cas (pas étonnant vu la tradition "ceinture et bretelles" de la maison, mais passons).

Je retrousse donc mes manches, cherche la méthode de calcul et la lis une première fois:
La taxe est assise sur le montant de l'impôt sur les sociétés qui aurait dû être acquitté l'année de la constitution des provisions en l'absence d'excédent. Pour le calcul de cet impôt, les excédents des provisions réintégrés sont diminués, d'une part, d'une franchise égale, pour chaque excédent, à 3 % du montant de celui-ci et des règlements de sinistres effectués au cours de l'exercice par prélèvement sur la provision correspondante, d'autre part, des dotations complémentaires constituées à la clôture du même exercice en vue de faire face à l'aggravation du coût estimé des sinistres advenus au cours d'autres exercices antérieurs. Chaque excédent de provision, après application de la franchise, et chaque dotation complémentaire sont rattachés à l'exercice au titre duquel la provision initiale a été constituée. La taxe est calculée au taux de 0,40 % par mois écoulé depuis la constitution de la provision en faisant abstraction du nombre d'années correspondant au nombre d'exercices au titre desquels il n'était pas dû d'impôt sur les sociétés.

Article 235 ter X du CGI
Je l'ai relu une deuxième fois, j'ai souri, et effrayée, j'ai éteint mon ordinateur et je suis rentrée chez moi.

Journée pénible

Ça doit être une conjonction astrale, il n'y a pas d'autre explication rationnelle.

Ça a commencé par un coup de fil:
— Allô? Je téléphone pour connaître l'état de mon contrat, parce que vous comprenez, pour la CNAV je suis morte.
— …
— La fille m'a annoncé ça sans ménagement, paf, "Madame vous êtes morte", sous-entendu, je n'allais tout de même pas en plus me plaindre.

(Bon je sais, c'est drôle. Enfin non, mais oui, cette dame a du répondant, elle est affectée, mais pas abattue. Le pénible c'était avant et après.)

Ça s'est terminé par un questionnaire à envoyer à l'ACP.
Rejeté. Motif (je copie-colle): "Nous accusons réception du questionnaire 2012 sur l'application des règles de protection de la clientèle de votre organisme. Nos systèmes informatiques ne peuvent le prendre en compte car la version du logiciel Adobe Acrobate Reader utilisée par vos services semble être inférieure à la version 9.1 telle qu'indiquée dans notre instruction. Nous vous remercions de bien vouloir le remplir de nouveau avec une version logicielle supérieure et procéder à un nouvel envoi."
Bref, j'ai tout transféré à la maison et à dix heures et demie, ouvrant mes mails, je me suis souvenue qu'il y avait encore cela à faire avant de dormir…

L'enterrement des enfants de moins douze ans

Comme je fais des tableaux Excell toute la journée, je n'ai pas grand chose à raconter. Je vais donc reprendre de vieilles amorces de billets que je n'avais pas menés à terme à l'époque.

Celui-ci date de février dernier. Lors d'une formation, j'ai appris qu'une loi remontant au début du XXe siècle interdisait de souscrire une assurance sur la tête d'un enfant de moins de douze ans (article L132-3 de la loi du 13 Juillet 1930).

En pratique, cela signifie que si vous êtes assureur et concevez un contrat obsèques "famille" (destiné à couvrir les frais d'obsèques lors du décès de n'importe quel membre de la famille souscriptrice), vous devez absolument penser à écrire que les enfants de moins de douze ans sont exclus du contrat. (Ce n'est pas un exemple pris au hasard: récemment, une société d'assurance ayant omis, par négligence ou ignorance, de spécifier cette restriction dans ses "conditions générales" (ie. la description du contrat et de ses garanties) a dû payer une énorme amende proportionnelle au nombre de contrats vendus.)

Je vous laisse imaginer la tête des personnes en train de lire cette clause restrictive: d'une part, une famille "normale" prend ce genre de contrat en pensant à la mort des parents et non des enfants, et c'est le genre de phrase qui vous ramène brutalement à la réalité; d'autre part, une fois digérée cette réalité, le bon sens fait s'exclamer: «Mais pourquoi pas les enfants?» (et in petto: «Ces assureurs, il faut toujours qu'il trouve un moyen de vous entuber»).

En réalité, c'est une loi qui a été votée à la suite d'un scandale survenue chez une nourrice qui tuaient les enfants sous sa garde pour toucher les assurances décès.

Anxiété

J'y suis confrontée quotidiennement. Evidemment, ce sont souvent les personnes à la retraite qui appellent, elles ont avant tout envie de parler à quelqu'un, et comme je suis bavarde, elles tombent bien.

Mais parfois les gens m'interloquent: est-il vraiment si important de prendre une mutuelle du 1er janvier au 1er septembre pour le fils de 22 ans afin de ne pas avoir de "trou dans la couverture" entre la fin du précédent contrat et la possibilité de revenir "chez nous"?
— Ecoutez, quelle est la différence entre payer cinq cents euros pour une mutuelle de façon certaine et payer cinq cents euros pour une hospitalisation qui n'aura sans doute pas lieu? Le reste, les six ou sept euros d'une consultation pour une grippe, vous coûtera beaucoup moins cher qu'une mutuelle.

On dirait que plus personne n'envisage de payer directement ses soins de santé (et que plus personne n'envisage de ne pas être malade).

Mais pourquoi les salariés sont-ils si inquiets? Pourquoi ne se réjouissent-ils pas de cette invention merveilleuse qui est la sécurité sociale, et de notre niveau de vie, notre alimentation, l'eau potable au robinet (quel luxe: laver la voiture à l'eau potable)?
Les dents, les lunettes, une chambre seule: une mutuelle sert à ça, essentiellement. Les dents, les lunettes : ça peut bien attendre quelques mois, ça peut bien attendre le 1er septembre.

Ou alors, ou alors… Peut-être que nous sommes dans la superstition: prendre une mutuelle pour ne pas être malade comme on prend un parapluie pour ne pas qu'il pleuve. Cela revient cher de la superstition.







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Ajout le 14 mars 2015 : l'anxiété comme mode de domination politique et sociale.

Résumé

Lire, dormir, travailler. Il ne se passe pas grand chose, je ne vais tout de même pas vous parler de "mes" adhérents (au téléphone: «Je vous parle sans mes dents, vous me comprenez quand même?»).

Allez signer une pétition pour un vieil Arabe au Mali, j'ai l'impression que comme d'hab, c'est parti pour les vengeances personnelles ou de principe (pas de hiérarchie entre les deux).

Lundi: le cours d'AT (sur les prophètes) est donnée par une prof allemande qui prononce très mal (sans doute la comprendrions-nous mieux en anglais, mais tous ne comprennent pas l'anglais (je me comprends)). La révolte gronde parmi les étudiants (deux heures à 20h30 après une journée de boulot et avant une journée de boulot, c'est fatigant; si c'est pour ne rien comprendre…) Je suis embarrassée, ils n'ont pas tort, mais je les souhaiterais plus indulgents.

Mardi: je vois mon responsable hiérarchique le matin (comme il appartient à la holding, nous ne sommes ni dans la même entreprise, ni sur les mêmes lieux. Autant dire que nous ne nous voyons pas souvent.) Il me parle de la clause de désigantion.
Comment expliquer cela? Comme l'Etat est en train de réduire le périmètre couvert par la Sécurité sociale (c'est progressif, mais souvenez-vous de cette phrase dans cinq ou dix ans), il essaie de faire que tout le monde soit couvert par un contrat de santé (tout le monde = les salariés, le reste ne paraît pas exister aux yeux de l'Etat français). Donc les entreprises vont être obligées de proposer un contrat de santé (dit "mutuelle" par abus de langage: ce contrat peut être vendu par une mutuelle ou une société d'assurance, le mot plus exat est "complémentaire") à leurs salariés (c'est déjà partiellement le cas). Cela va être mis en place par des accords interprofessionnels. Les sociétés d'assurances se battent pour que ce marché reste ouvert: obligation de souscrire un contrat de santé, mais possibilité de choisir ce contrat (en d'autres termes, elles défendent la possibilité d'entrer en concurrence et de remporter des marchés).
Or l'accord (ou les accords) qui va être signé prévoit que le contrat de santé soit désigné dans la convention de branche. (Pourquoi bafouer ainsi le jeu de la concurrence? Ces accords sont signés par les syndicats, qui peuvent espérer en échange de sa désignation un financement de la part de l'organisme choisi…)

Mercredi. Je passe rendre un livre à la bibliothèque Beaugrenelle. Elle est hors de mes chemins habituels et je m'étais promis de n'y rien reprendre. Je repars avec un policier grec (plutôt mauvais, d'ailleurs).

Jeudi (hier). Pas le courage d'aller ramer malgré le soleil et la décrue. (Ce matin je découvre dans un mail que les sorties avaient été annulées à cause de cette même décrue — et le vent du nord. Culpabilité apaisée.)
Le soir H. passe me prendre à La Défense. Il me raconte des anecdotes sur le ministère où il a passé la journée, fait une remarque sur la décrépitude des lieux, la peinture qui part en lambeaux.
Dîner "dans un couscous", échanges sur l'absurdité de certaines décisions prises (plus on s'approche du pouvoir, plus on pense qu'on va comprendre qui décide quoi, et surtout pourquoi, et plus c'est l'inverse qui se produit. Je ne comprends pas comment tout cela est en mesure de fonctionner, quelque chose m'échappe, que ce soit en entreprise ou concernant l'Etat.)

Vendredi: 10h28. Je termine ces lignes en bibliothèque. Il me reste une demi-heure pour faire mes exercices d'allemand. Un peu court.

Yes !

- Mardi j'apprends que je reste dans le groupe (vexée je suis).
- Mercredi je repère une annonce dans le site d'annonces internes au groupe.
- Jeudi je téléphone et envoie un CV.
- Vendredi on me téléphone pour me donner rendez-vous;
- lundi je passe un entretien;
- mardi j'ai le poste.

Je suis fière de moi.

(Bon, c'est pour aller travailler dans l'une des formes les plus anciennes d'entreprises, les mutuelles de santé "45" (comprendre: 1945, issues directement des utopies de la Résistance). Que des exceptions, des trucs bizarres, ancrés dans l'histoire1, des logiciels obsolètes, des élus, etc. C'est quand je vois que j'ai envie de ça, de ce foisonnement têtu, que je mesure que je ne supporte plus "la conformité". Rien n'y est plus étranger. Et soyons lucide: le monde normatif d'aujourd'hui va tout faire pour faire disparaître ces dinosaures. Résistons. Et allons y faire un tour avant qu'il ne soit trop tard.)



1 : Le statut du retraités d'avant 2006 n'est pas le même que celui d'après 2006, le groupe a la particularité de dépendre pour partie du régime général de la Sécurité sociale, pour partie de la MSA (la sécu des agriculteurs), donc les poly-pensionnés… etc, etc.

Sujet de maîtrise

Quand K. m'a soumis un sujet dont la problématique revenait à peu près à: «Comment la directive Solvabilité 2, en voulant protéger les assurés d'une éventuelle faillite des sociétés d'assurance, précipite la faillite de celles-ci» (par les charges et contraintes qu'elle fait peser sur elles), je lui ai dit que c'était tout à fait passionnant mais tout de même dangereux.

Après réflexion, une fois que je lui ai eu démontré ce que signifiait ce qu'elle avait écrit (elle ne s'était pas rendu compte de la conclusion logique de son plan), elle a décidé de prendre quelque chose d'un peu plus conventionnel, du type "la régulation des sociétés d'assurance".

(«Avant 2000? Mais c'est beaucoup trop loin!» Je tape rapidement sur Google: «K, il va falloir t'y faire, les premières lois d'encadrement des sociétés d'assurance datent de 1938.») Je lui ai sorti l'un de ces livres que le groupe aime tant, avec des images en noir et blanc de l'après-guerre, les casiers en bois remplis de dossiers, la vie avant l'informatique. Cela l'étonne autant que si je lui montrais une plume et des parchemins. Je l'aime bien parce qu'elle m'écoute raconter ce qu'on m'a raconté (les feuilles de papier carbonne, les papiers pelure jaune et bleu, plus tard les fiches perforées, les pools de secrétaires qui codifiaient les perforations, le bruit infernal des machines à écrire dans les bureaux de vingt ou cinquante (et on se plaint des ''open space'')) sans marquer d'impatience, avec une pointe de scepticisme dans la surprise.

Meilleurs vœux

11h30, je papote dans le bureau de Danielle. K. passe la tête :
— Vous savez la nouvelle ?
— Quoi, on est vendu ? dis-je en boutade.
— Oui, allez voir sur l'intranet.

L'intranet annonce que nous sommes mis en vente.

Déjeuner. Les vœux de l'entreprise sont prévus à 13h. Chacun pense aux directeurs : bel exercice d'équilibre qui les attend.

Ils s'en sortiront honorablement, devant une salle bienveillante.
L'histoire est la suivante: ce que nous appelons "les fondamentaux" (le ratio sinistres à primes, la qualité du portefeuille clients) ne sont pas en cause, ils sont mêmes excellents au niveau de notre entreprise d'assurance, et sains au niveau du groupe.

Les sociétés d'assurance ont l'obligation légale de mettre en face de leurs engagements (le règlement des sinistres en cours et à venir) un portefeuille d'actifs réparti selon des règles très précises. Or le groupe a fait trois choix qui se révèlent tous les trois désastreux avec la crise:
1/ il a acheté au prix fort de nombreuses entreprises à l'étranger: la valeur de ces entreprises s'est beaucoup dépréciée et nous devons prendre en compte cette dépréciation potentielle d'actifs ;
2/ il conserve en portefeuille une quote-part inhabituellement élevée d'actions (dont celles de la Société Générale), et là encore il faut enregistrer une dépréciation (les nouvelles normes prudentielles (qui ne sont pas encore entrées en vigueur) imposent un pourcentage réduit d'actions dans la composition du portefeuille et la prise en compte immédiate des moins-values potentielles$$ce qui prouve une méconnaissance du cycle long de l'activité d'assurance (conséquences: la vente massive d'actions par les entreprises d'assurance a accéléré la chute des cours et favorisé l'arrivée de fonds de pension étrangers dans le capital des sociétés françaises (non que cela me préoccupe, mais j'en connais qui n'aiment pas cela$$);
3/ la dette grecque, bien sûr, et les dettes souveraines en général (notons que ma société ne voulait pas d'obligations grecques, mais que le groupe lui en a affectées d'office malgré son refus répété: c'est le groupe qui choisit nos placements; c'est le groupe qui est noté par les agences de notation et toutes les filiales, dont nous sommes, en subissent les conséquences; et c'est le groupe qui nous met en vente aujourd'hui.)

Tout cela fait que le portefeuille d'actifs, avec ses moins-values potentielles, ne couvre plus (ne couvrait plus avant une intervention en chevau-léger de la CDC) les engagements du groupe, d'où l'obligation de dégager de l'argent frais.

Ajoutons pour faire bonne mesure que ces vœux sont également les premiers qui célèbrent notre fusion avec une autre filiale à qui le groupe a imposé ce "mariage de raison" (au printemps dernier, bien avant ces rumeurs de vente qui datent de fin octobre): les voilà en train de s'adapter à cette fusion en se préparant à une vente…
Je songe à une vente aux esclaves. Nous sommes vendus parce que nous sommes les plus profitables, et pour rendre la société plus attractive encore, notre portefeuille d'actifs a été nettoyé de la dette grecque: autrement dit nous sommes désormais et de loin la plus belle filiale du groupe (résultat technique + portefeuille d'actifs).

Le mot de la fin restera à notre directeur général, qui déclarera devant le représentant du groupe venu nous expliquer ce que je viens d'écrire (et que nous savions déjà): « Pierre L. nous a dit que le groupe regrettait de devoir nous vendre, j'attends de vous que vous travailliez à rendre notre société encore plus rentable pour que dans quelques années il le regrette encore davantage. »
C'est fou ce que l'on souffre toujours de se sentir mal-aimé, même lorsqu'on est une société.


Discours, puis petits fours, piste de danse, etc. A chaque fois c'est l'occasion de constater une certaine solitude. Je n'ai rien à dire, je ressens un certain malaise avec la plupart des gens: mais comment font les autres, de quoi parlent-ils, comment trouvent-ils des sujets de conversation? %%% Je crois que je ne saurai jamais faire et j'évite d'y penser pour ne pas ressentir une certaine panique, une certaine désolation de l'âme.


Je pars tôt et je vais voir The Darkest Hour.
Ce n'est pas tout à fait assez noir pour mon moral bas. Mais j'avais envie de voir Moscou et je vois Moscou. Enfin, un certain aspect de Moscou. Film d'action et d'apprentissage. Les enfants, si vous voulez survivre face aux extra-terrestres, surtout apprenez bien votre physique amusante et feuilletez le manuel des Castors juniors.
Les Russes, le Russe, sont russes à n'en plus pouvoir; tous les clichés de l'Américain décrivant le Russe sont là (pas bien éloignés des clichés français ce me semble puisqu'ils me sont familiers, et cela me fait rire), et ce Russe est encore en train de défendre Stalingrad…
L'important face à l'ennemi est de rejoindre sa terre, son pays: même si l'on doit se battre contre un ennemi commun, il est importun de le faire de chez soi.


Oulipo, Ousonmupo, c'est inégal.
Je récupère en cachette (il n'en reste qu'un que j'avais réservé) la Vida tragique d'En Guilhem de B. de Maurice (Chamontin). A suivre.

Ordre de grandeur

Parole d'assureur:

— Non, mais les incendies de la Saint-Sylvestre, on est à des années-lumières de ce que coûte un retour de week-end !

Nos voisins

A. est partie à Firfol (stage d'équitation) ; H. est revenu de Lausanne après avoir déménagé C.

Apéro chez des voisins que nous ne connaissons pas.

Ils nous racontent leur découverte de O. sur leur paillasson quelques semaines plus tôt:
«J'ouvre la porte, et je vois un garçon que je ne connais pas qui me demande si je peux m'occuper de ses chats pendant trois jours et me tend des clés. Je me dis «Dis donc, ils ont confiance», je lui dis: «Attends», j'abandonne mes amies dans mon salon et je l'accompagne chez lui pour qu'il m'explique où sont rangés les boîtes, etc.»

Oui, c'est ce que nous avions découvert fin juillet tandis que nous roulions vers l'Aveyron: les enfants nous ont appris avec satisfaction que "la mère de Violette", "qui est très gentille", s'occupait des chats.
— Mais on ne la connaît pas !
— Mais si, elle est très gentille, t'inquiète pas maman. (tinkiètpamaman)

Et nous, morts de honte à l'idée de cette dame inconnue que nos enfants avaient enchaîné à nos chats, lui avons ramené quelques souvenirs culinaires du Périgord, et en retour nous avons été invités à prendre l'apéro, ce qui doit se faire chez les gens civilisés je suppose, mais en dix ans nous ne l'avons jamais fait bien qu'entretenant de bons rapports avec tous nos voisins: l'art de l'esquive.

Il est courtier en assurance, et donc ne voit pas la vie exactement par le même bout:

— Oui, et ce qui a fait beaucoup de mal aux garagistes, ce sont les limitations de vitesse et les radars: moins d'accidents, moins de tôle froissée. J'ai vu des réparateurs, sur six bancs, deux d'occupés! Et plus de pièces dans les casses... Et les croque-morts… Ça ne se sait pas, mais la profession a réclamé de l'aide au gouvernement, des compensations… Chute du volume d'activité! [1]




Notes

[1] Une rapide recherche sur internet ne m'a pas permis de trouver confirmation. Il faudrait chercher: si quelqu'un a cette curiosité…

Départ à la retraite d'un directeur

Je n'aime pas les départs, jamais.
Et puis c'était un homme que j'aimais bien. Toute la direction générale va partir dans les années à venir, je me sens déjà orpheline (j'aime qu'on me raconte des histoires, les histoires de l'entreprise. Quand tout le monde sera plus jeune que moi, qui me racontera des histoires?).
Premier discours, niveau groupe; deuxième discours, niveau entreprise; réponse du futur retraité, tout cela si rituel que cela console, avec juste ce qu'il faut d'anecdotes pour mesurer le chemin parcouru (dans l'assurance, notre pain quotidien est le malheur, nous avons donc des souvenirs).

Ce qui m'a fait sourire, c'est le récit des origines: comment cet homme "publiciste" (comprendre " étudiant le droit public) était-il "tombé" dans l'assurance?

«J'avais fini ma maîtrise, je préparais divers concours dont celui de directeur des hôpitaux, je faisais du vélo dans les environs de Marly quand je suis arrivé devant le site de Drouot, absolument magnifique. Alors je suis entré; la secrétaire, très aimable mais un peu dépassée, sans doute une stagiaire d'été, a appelé le DRH, qui a cru que j'avais plus ou moins rendez-vous avec lui… Il était en train de plancher sur un plan de formation de jeunes embauchés, cela m'a intéressé et… […]
Comme dirait mon ami Patrice qui n'a pas pu venir ce soir, on n'est jamais à l'abri d'un coup de pot. J'aurais pu mal tomber, dans la banque, qui sait (rires d'effroi dans la salle), ou dans l'immobilier… (Etc.)»

liens

  • Japon
Semaine Japonaise à l'ENS du 26 au 29 avril 2011. (Attention, certains ateliers nécessitent de s'inscrire au préalable.)




- des bateaux
- une analyse des risques de catastrophes naturelles au Japon publiées en mars 2010. (Traditionnellement quand il s'agit de prospectives je recommande les analyses des sociétés de réassurance (l'assurance cherche à ne pas perdre d'argent, et non à en gagner: elle n'a pas la même vision du risque)).
- la fission.

  • un lien geek
histoire et actualité des jeux vidéos.

  • divers
- un rapport sur la prostitution
- un récapitulatif des meilleurs blogs économiques (anglais)
- Isidore, plateforme des sciences humaines et sociales du CNRS
- des documents sur Lacan
- les Cantos de Pound.

*dessins
œuf dur, la disparition des télécommandes, addict au feutre, fromage bleu, cœur.

Il faut être raisonnable (c'est une citation)

— Et si je trouve du travail, c'est un motif valable pour l'assurance annulation de mon voyage?
— Ecoutez Mademoiselle, je ne connais pas les contrats annulation, je vais vous donner le numéro de notre prestataire spécialisé. Mais tout de même, ça m'étonnerait que ce soit pris en compte. Je vais vous expliquer pourquoi: le principe de l'assurance, c'est de vous couvrir en cas de tuile (si vous me permettez ce mot), en cas de tuile imprévisible: l'assurance ne peut pas jouer si vous êtes à l'origine de l'événement, et de toute façon, trouver du travail n'est pas un événement imprévisible.
— Ah...

Monsieur Indestructible

Vous souvenez-vous du métier de M. Indestructible? Il travaille dans une compagnie d'assurance, dans un box tel que nous les montrent les téléfilms américains, box dont sa musculature déborde de toutes parts, et dans une scène il explique à une petite vieille quels circuits compliqués il faut emprunter pour espérer obtenir une réponse de la compagnie.
(Et son patron de remarquer: «C'est curieux, comment font-ils, on dirait qu'ils ont compris le fonctionnement de notre maison», jusqu'à ce que le manège de M.Indestructible soit découvert et qu'il se fasse licencier.)

Je suis en train de me transformer en M. Indestructible.

Urgence

Imaginez que votre fiscaliste est à l'hôpital pour deux mois, que son supérieur est absent pour deux semaines, et que vous restez le seul interlocuteur lors d'un contrôle fiscal… sans connaître ni la fiscalité, ni les méthodes de classement du fiscaliste hospitalisé, sinon ce serait tricher.

C'est un peu ce qui m'arrive (j'ai transposé en fiscalité pour que ce soit compréhensible pour tout le monde).

La nuit je rêve d'uniformes de pompiers. Un rapport?

Au téléphone je rappelle quelques principes d'assurance: une assurance est un contrat (lisez au moins les exclusions, même si vous ne lisez pas tout) qui prévoit des conditions d'exécution (il faut des preuves, des justificatifs, toujours).
Et une assurance couvre un aléa: quelque chose de soudain, de non-prévisible. S'il n'y a pas risque mais certitude, ce n'est pas de l'assurance.

Délation institutionnelle

Billet simplificateur (ou simplifié): je donne les principes:

La CNIL interdit à l'Etat de pouvoir identifier ses citoyens sous un numéro unique (comme le numéro de Sécurité sociale, par exemple. D'ailleurs ce numéro de SS est tabou, on se demande pourquoi. Ainsi les entreprises vous donnent un matricule, elles n'ont pas le droit d'utiliser le numéro de SS… indispensable par ailleurs pour gérer les relations avec les différents organismes sociaux).
C'est gentil, ça part d'un bon sentiment. On se demande à quoi cela peut bien servir (le jour où un dirigeant mal intentionné voudra rapprocher les différents fichiers, cela ne lui prendra pas beaucoup de temps, surtout aujourd'hui), mais c'est touchant, cette volonté "de ne pas reconduire les erreurs du passé" (sachant que les listes de juifs en 40 et 41 ont été constituées par appel à la population: obligation d'aller se faire enregistrer. Quelle différence avec déposer un dossier à la préfecture quand on est sans papier? On est dans le déclaratif, la démarche volontaire, pas besoin de fichier préalable pour cela.)

La lutte anti-blanchiment/anti-terrorisme (dite LAB-LAT) fonctionne à contre-courant de cette démarche. Elle impose aux entreprises opérant dans certains secteurs dits sensibles (la banque, l'assurance, etc) de s'informer sur l'origine des fonds déposés (héritage, gain au loto, vente immobilière, honoraires, contrat important, etc)1, mais plus encore, d'avoir une "vision globale" de leurs clients, c'est-à-dire de savoir regrouper les informations qu'elles détiennent sur chacun d'eux à travers leurs différents comptes, contrats et produits de placement, dans différents endroits de France ou de la planète. Ces entreprises doivent déclarer à Tracfin les fonds dont l'origine est inconnue (dont le client refuse de dévoiler la source), mais aussi les comportements louches (le plus souvent des opérations de placement dont le dénouement précipité fait penser à du blanchiment).

Auparavant, cette vigilance constante ne concernait que certains types d'opérations finalement assez rares dans une vie ordinaire de petite banque de province ou de mutuelle niortaise. Mais désormais doit être déclarée toute opération qui, si elle était frauduleuse, serait passible d'au moins un an de prison: cela étend le champ de la vigilance à la fraude fiscale, beaucoup plus courante que le financement du terrorisme…

Cela revient à attendre des banques et des assurances qu'elles se transforment en un vaste réseau de délation organisée.


Note
1 : Ce qui m'agace, c'est que l'Union européenne a refusé de mettre cette mesure en place au moment du passage à l'euro, alors que cela aurait été l'occasion rêvée de mettre la main sur les gros trafiquants… ou tout au moins d'assécher leurs capitaux en les empêchant de les convertir facilement.

Avec assurance

A l'occasion de la sortie de son livre Le goût de vivre et cent autres propos, L'Argus de l'assurance interroge André Comte-Sponville.

Interview qui enfonce quelques portes ouvertes, certes, mais c'est le lieu de sa publication qui me fait sourire: un magazine professionnel dédié à l'assurance.
Et puis même l'évidence mérite d'être rappelée.
[…]

Descartes conseillait de «marcher avec assurance en cette vie». Pensez-vous qu'il faille en toutes circonstances «marcher avec UNE assurance en cette vie»?
Tout dépend de ce qu'on entend par là. Celui qui n'aurait aucune assurance, de nos jours et dans nos pays, c'est soit un miséreux qui n'a ni domicile ni voiture, et pas les moyens de se constituer un patrimoine, soit un irresponsable. Donc avoir une assurance, ou plusieurs, oui, bien sûr, il le faut ! En revanche, celui qui prétendrait s'assurer contre tous les risques serait une espèce de malade.
C'est un peu la dérive de notre époque. Vous savez que beaucoup d'entre nous sommes assurés (notamment via nos cartes de crédit) plusieurs fois contre les mêmes risques. Tant mieux pour les assureurs. Mais est-ce bien raisonnable ? Certains, partant en vacances, prennent une assurance météo : ils veulent se faire indemniser s'il ne fait pas beau! Mais quand on n'est même plus capable d'affronter un risque météorologique mineur (qu'il pleuve en août, ce n'est pas une catastrophe!), c'est un signe de faiblesse davantage que d'intelligence. Et puis rappelons que l'essentiel n'a pas de prix. Vous pouvez prendre une assurance sur la vie, ou sur celle de vos enfants? Ils toucheront de l'argent, ou vous. Très bien. Mais cela n'a jamais empêché personne de mourir, ni tenu lieu de consolation.

[…]

Etendu très largement, ce principe de précaution n'est-il pas un handicap?
Il risque de le devenir. D'autant plus que ce principe, dont tout le monde parle et qu'on ne formule presque jamais, est souvent pris à contresens. Plusieurs de nos concitoyens lui donnent le sens suivant: «Ne faisons rien qui présente un risque, nous ne sommes pas capables de calculer exactement ni certains de pouvoir surmonter.» Bref: «Dans le doute, abstiens-toi!» Le problème, c'est que, comme il y a toujours un doute (le risque zéro n'existe pas), on s'abstiendra toujours !1
C'est ainsi que ce principe de précaution devient un principe d'inhibition, qui risque de bloquer la recherche, de brider les énergies, de faire prendre du retard à notre pays. La bonne formulation de ce principe est à l'opposé: «N'attendons pas qu'un risque soit certain ni calculé exactement pour entreprendre de le réduire et de le surmonter. Bref: «Dans le doute, agis!» Principe non d'inhibition, mais d'action. La seconde formulation est, bien sûr, la plus juste. En pratique, je crains que la première ne l'emporte très souvent!

Propos recueillis par Anne Lavaud, in ''L'Argus de l'assurance'' du 2 avril 2010



Note
1 : Remarque perso: pour les sociétés d'assurance, le problème se pose en termes légèrement différents. La jurisprudence tend à leur demander de payer pour des risques qui n'en étaient pas (officiellement) au moment du paiement de la prime des contrats à l'époque. (exemple : l'amiante). L'idée non avouée mais qui a tout de même donné naissance à une expression, les ''[deep pockets| http://en.wikipedia.org/wiki/Deep_pocket]'' (les poches profondes), est de faire payer les indemnités par ceux qui en ont les moyens, dans le cas présent les assureurs. Mais il ne faut pas se leurrer : les assurances répercutent ces charges inattendues dans leurs primes afin de maintenir leur équilibre financier. Cela revient donc à faire payer les clients d'aujourd'hui pour les clients d'hier. Pourquoi pas, c'est un principe de solidarité. Ce qui me gêne, c'est que cela ne soit pas expliqué. C'est du prélèvement caché, moins sujet à discussion que l'élévation des cotisations de Sécurité sociale (par exemple: ce serait une solution parmi d'autres) pour indemniser les victimes de l'amiante. Quand on dégoûte les assureurs à force de jugements rétroactifs de ce type, en leur faisant payer la réparation de dommages dont ils ne pensaient pas qu'ils rentraient dans la définition des contrats à l'origine, ils finissent par refuser d'assurer: exemple, les gynécologues-obstétriciens. On entre alors dans des cycles légiférants étranges dans lesquel toutes les cotes sont mal taillées.$$

La différence entre assurance et solidarité

Ce soir à 18h30, je serai là.
Je sais, c'est un peu tard pour prévenir, mais je doute que cela intéresse qui que ce soit. Et non, ce n'est pas professionnel, c'est ma façon de gagner du temps, d'apprendre en deux heures (enfin, d'apprendre: d'obtenir une première teinture) ce qui me demanderait des heures de lectures (que je ne ferais pas) et ce que les médias ne m'expliqueront jamais.
Autre curiosité: découvrir la Cour de cassation et les ors de la République... (si vous désirez venir, n'oubliez pas de vous inscrire en ligne: il s'agit de mesures de sécurité).


Cycle Assurance et protection sociale - Les risques marchands et non marchands : quelles clefs de répartition?
Késako?
Il s'agit dans le cadre de la directive européenne sur les services ("ex-Bolkestein", profondément remaniée) de croiser deux axes de réflexion:

1/ Dans le cadre de la directive sur les services, que va devenir le secteur social, qui couvre «l'économie sociale, l'éducation populaire, le soutien aux familles, la politique de la petite enfance», financé par les prélèvements sociaux? Ce secteur devra-t-il être soumis intégralement à la concurrence pour obéir à la directive européenne?

Définition du secteur non marchand : aucune définition n'est donnée à priori au niveau de l'Union européenne, il s'agit d'une appréciation au cas par cas, selon les pays, selon les équilibres nationaux, au fur à mesure des affaires jugées par la Cour de Justice des Communautés européennes. (Rappel en gros: vous payez votre femme de ménage, c'est du secteur marchand, elle est payée par les allocations familiales ou la sécurité sociale, c'est un service non marchand).

Débat entre ceux qui pensent que l'Union européenne participe de la pensée libérale — ce qui est à peu près ce qu'on entend tous les jours dans les discours politiques, relayés et amplifiés par les médias — et ceux qui constatent, de facto, que l'étude de la jurisprudence de la CJCE montre que « la solidarité a progressivement acquis la valeur d'un principe juridique en Droit communautaire» tandis que «les systèmes de solidarité ont fait preuve d'une remarquable robustesse, du moins dans la vieille Europe»1.


2/ Quelle différence entre l'assurance et la solidarité?
Cette différence est fondamentale pour comprendre les choix de société que nous avons à faire, que nous allons devoir faire, mais elle est rarement expliquée.

Je vais faire un détour dans mes explications en développant un exemple.
Il existe en assurance la notion de "zonier". Le zonier pévoit des tarifs différents en fonction des risques que présente chaque zone géographique (la zone peut être la commune, le département, un pays (le risque de terrorisme, le risque politique, etc.),...)
Pour donner un exemple s'appliquant à un particulier, s'il existe un zonier, vous ne paierez pas la même prime d'assurance contre le vol pour la même surface d'appartement protégée par les mêmes serrures à Tulle ou à Paris. Il peut ne pas avoir de zonier, ou sa maille peut-être plus ou moins fine: il s'agit de choix que font les assureurs quand ils construisent leur tarif (algorithme basé sur des statistiques). Par exemple, la Maif, mutuelle des instituteurs et des professeurs, a longtemps tarifé sans zonier, ce qui voulait dire que l'habitant de Tulle payait un peu pour l'habitant de Paris. C'était un système fondé sur la solidarité, typique d'un véritable esprit mutualiste (Juste ou pas juste? On peut considérer que l'habitant de Tulle payait le fait de courir moins de risques, on peut répondre que l'habitant de Paris n'avait qu'à choisir d'habiter Tulle... Etc.)
S'il n'existe pas d'autre mutuelle ou assurance que la Maif, la situation est figée. Mais si le secteur est concurrentiel, l'assuré habitant Tulle choisira peut-être un jour une assurance ayant un tarif basé sur un zonier correspondant au niveau de risque que représente Tulle, c'est-à-dire faible. Il fera le choix de l'assurance contre celui de la solidarité.

Question: jusqu'où peut-on mutualiser, jusqu'à quand peut-on faire payer ceux qui présentent le moins de risques pour ceux qui en présentent davantage?
Réponse: tant que ceux qui présentent le moins de risques acceptent de payer pour les autres, tant qu'ils ne résilient pas leur contrat pour passer à la concurrence.

Problème: la concentration des mauvais risques.
Exemple encore: à la fin des années 90, la Macif avait entrepris de résilier tous les contrats habitation situés en zone inondable dans la vallée du Rhône2. Cela lui permettait de baisser ses primes et devenir très attractive pour les bons risques... tandis que les assureurs qui acceptaient les maisons à risques étaient logiquement obligés d'ajuster leur prime à la hausse et de devenir moins concurrentiels...3.

C'est ce qui se passe dans un secteur de la santé fonctionnant librement: très vite, les meilleurs risques paient de moins en moins chers, tandis que les plus "mauvais" (cigarette, antécédents familiaux, métiers à risque, etc) n'ont plus les moyens de payer leur prime alors que ce sont eux qui en ont le plus besoin.

Or un pays ne peut jamais s'abstenir totalement de soigner les plus démunis, non par humanité, mais par rationalité: car il y aura dans ce cas des risques d'épidémie (cf. la malaria, le sida, etc.). D'autre part, les soigner trop tard n'est pas une solution non plus: il coûte moins cher à la collectivité de soigner une bronchite qu'une pneumonie ou une tuberculose...

Les pays (européens) (l'Allemagne, l'Italie et les Pays-Bas) qui laissent le choix de leur assurance à leurs concitoyens ont dû mettre en place des systèmes de compensation obligeant les sociétés d'assurance attirant les meilleurs risques à reverser une quote-part à ceux prenant en charge les plus mauvais, péréquation compliquée à calculer et à rendre efficace.
En France, la Sécurité sociale obligatoire permet la solidarité entrel les bons et les mauvais risques. Une législation fiscale plus favorable pour les complémentaires de santé qui ne font pas remplir de questionnaires de santé incite également à une répartition équilibrée des "bons" et "mauvais" risques.

Vers quoi va-t-on aujourd'hui? Une privatisation de l'hôpital public (la crainte sous un gouvernement de droite... sachant que du fait d'une gestion défaillante, les hôpitaux publics coûtent bien plus chers que les hôpitaux privés à soins égaux fournis) ou une étatisation de la médecine privée (multiplication des contraintes pour les médecins afin de contrôler les dépenses de santé)? A la lecture des textes, les juristes eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux.

Je vais donc aller écouter quelques interventions sur ces sujets ce soir.


P.S.: Cette présentation est une présentation"d'amateur". Il est possible que j'y expose des partis pris dont je n'ai pas conscience, étant loin de maîtriser toutes les finesses du sujet.
Mes partis pris conscients: je suis pour la Sécurité sociale "à la française" qui organise la solidarité (ce qui n'empêche pas souhaiter de la rendre plus efficace et moins coûteuse) et pour l'Union européenne qui, quoi qu'on en dise, ne l'interdit pas et aurait même tendance à la défendre. (Pourquoi ne dit-on pas davantage que l'Europe est souvent un recours pour les citoyens contre leur propre Etat?)





Notes
1 : Alain Supiot, M. E. Casas, J. de Munck, P. Hanau, Au-delà de l'emploi : transformations du travail et devenir du droit du travail en Europe : rapport pour la Commission des Communautés européennes, Flammarion, coll. «Flammarion Documents et Essais», Paris, 1999. (Notons pour ne pas donner une image contraire de l'opinion d'Alain Supiot par une citation isolée, qu'Alain Supiot pense justement que la CJCE vide le champ social de son contenu.)
2 : Le contrat d'assurance est un contrat; il faut l'accord des deux parties, on ne peut parler d'un refus de vente.
3 : En France, quand une telle situation dégénère, on assiste généralement à l'intervention du législateur. Exemple: la Corse.

Déformation

Lorsque je regarde les films d'action, je me demande toujours comment les personnages vont expliquer les dégâts à leur compagnie d'assurance.

Au début de Terminator 2, comment le routier va-t-il expliquer le quart de sphère manquant dans la carosserie de son camion? Jamais une assurance n'acceptera de rembourser ça. Et le conducteur de taxi moscovite dont Bourne vole le véhicule dans La mort dans la peau, de quoi va-t-il vivre désormais? Est-ce qu'un conducteur de taxi moscovite est assuré?

L'âge du (départ à la retraite du) capitaine

lettre retrouvée dans les archives de mon entreprise.

à Monsieur Unvois
Société Commerciale des Potasses et de l'Azote
2, Place du Général de Gaulle
68100 Mulhouse (Ht-Rhin) France

Taipei, le 2 Juin 1973
P.0. Box 68-986

Cher Monsieur Unvois,

En réponse à votre lettre du 22 Mai 1978, je vous signale que cette différence de ma date de naissance provient du fait d'un chevauchement de la dernière année de l'Empire sur la première année de la République d'où une réduction d'une année lors du calcul de ma date de naissance chiffrée en calendrier grégorien. Pour le mois il y a un décalage entre le calendrier lunaire et le calendrier solaire.

Du temps de mon père qui vivait sous le régime impérial, la date de ma naissance a bien été inscrite comme étant l'année 1902 et ce sont les autorités de la République qui ont confondu la dernière année de l'Empire avec la première année de la République faisant ainsi avancer ma date de naissance d'une année en 1903. Comme preuve officielle de mon explication, je vous adresse ci-joint mon Permis de Conduire (Carte rose) délivré par le Préfet du Nord le 23 Novembre 1927 que j'ai retrouvé parmi mes vieux papiers pendant leur rangement.

Pensez-vous que cette pièce pourrait convaincre la compagnie d'assurances à m'éviter la diminution de rente dont vous me parlez ou bien faudrait-il absolument que j'entreprenne des démarches auprès de nos autorités en vue de faire corriger cette erreur dans le calcul de ma date de naissance en année grégorienne, à moins que cette diminution de rente ne soit que vraiment très minime.

A mon âge cette différence d'un an devient négligeable et ne devrait plus compter mais il est probable que mon âge se place justement dans une coupure de l'échelle de la rente et c'est bien dommage. Je regrette que je sois obligé de vous causer tout ce dérangement. Comme demandé, ci-joint photocopie du passeport de ma femme indiquant bien la date du 1er mai 1907 quoiqu'en réalite cette date devrait être celle de 1906.

En ce qui concerne la future représentation de Producteurs à Taiwan, j'ai demandé à X* à Vienne si une décision était intervenue et il m'est répondu que la proposition que j'avais faite par ma lettre du 14 Février 1973 et dont vous avez copie sera remise sur l'agenda de la prochaine réunion du 14 Juin 1973. Je vais arrêter tous les comptes au 20 Juin 1973 et vous envoyer mes états comptables immédiatement après cette date, ce qui me permettra de quitter Taipei le 25 Juin 1973; en passant par San Francisco et Vancouver pour rendre visite a nos deux filles, j'arriverai à Paris le 13 Juillet 1973 et je me mettrai tout de suite en rapport avec vous.

En attendant, je vous prie d'agréer, cher Monsieur Unvois, l'expression de mes sentiments dévoués.

Dr. Txxx
PJ. Photocopie de Passeport
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