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Ophtalmo

Mes lunettes actuelles sont si rayées que depuis la rentrée j’utilise une ancienne paire qui date de 2018. Ça n’a pas d’importance, car j'avais mis au rebut la paire fabriquée avec la correction de 2022 (dont je ne voulais pas — mais l'ophtalmo ne m'avait pas écouté) et la paire rayée reprenait une vieille ordonnance proche de la correction de 2018. Elles me servent pour l’écran.

Pour lire je prends une autre paire, elle aussi fabriquée contre mon gré: durant le premier confinement j’avais égarée mes lunettes (oui oui, dans la maison. Fun fact, je les ai retrouvées cet été) et lorsque j’avais voulu la remplacer à la sortie du confinement, l’opticien avait absolument tenu à ce que ma mutuelle intervienne. Il avait donc mesuré ma vue pour prouver qu’elle avait suffisamment baissé pour nécessiter une nouvelle paire (et pour cause: la paire précédente était conçue pour les écrans, elle ne corrigeait pas entièrement la vue de près, c’était volontaire — mais impossible de me faire entendre, l’opticien voulait absolument que je sois remboursée.
Et donc je me servais de celle-ci pour les livres et de l’autre pour les écrans. Je passe mon temps à les mettre et les enlever, je les glisse dans mes poches sans étui (d’où les rayures), ce sont des lunettes qui ont une dure vie de lunettes.

Cependant j’atteins les limites de l’exercice : par exemple, en cours de grec, je dois les enlever et les mettre entre la lecture au tableau (sans lunettes) et l’écriture sur la feuille; idem pour les visio(conférence)s en réunion avec projection sur grand écran. Surtout, cela devient problématique en planeur. Je porte des lunettes de soleil sans correction, je ne peux ni consulter une carte (même si pour l’instant je ne m’éloigne pas du terrain, «finesse 10», 1km d’éloignement pour 100 m d’altitude) et je devine plutôt que je ne lis les chiffres du tableau de bord.

H. est très satisfait des lunettes qu’il s’est fait faire à Moret (il a une grosse correction et une vision compliquée, un vrai casse-tête technique. C’est rare qu’il apprécie ses lunettes) et, ce qui m’intéresse surtout, il a adopté des montures aimantées sur lesquelles se clipent des sur-verres de soleil: «c’est génial, tu n’as pas à t’acclimater à de nouveaux centrages, ce sont les mêmes lunettes — mais de soleil».
Bref, j’ai décidé que c’était ce qu'il me fallait pour le planeur.

Restait à trouver un ophtalmo pour me faire l'ordonnance adaptée. L'oiseau rare fut déniché parmi les pongistes du club d'H.

J'avais rendez-vous aujourd'hui. Il m'a expliqué beaucoup de choses, et en particulier que c'était sans doute une erreur d'avoir autant attendu pour passer aux verres progressifs: il y aura aujourd'hui plus d'écart de correction entre les différentes zones du verre et l'adaptation des yeux et du cerveau sera plus compliquée.


Il m'a reçu entre deux clients. Il fallait que je sois très à l'heure, et donc, chose exceptionnelle, j'étais en avance. J'ai donc pris le temps d'aller voir l'épée de Jean sans Peur dans la collégiale.

Epée de Jean sans peur dans la collégiale de Montereau

Encore des nouvelles lunettes

J'ai craqué. Je n'en peux plus. Ce sera mon cadeau de Noël: je suis retournée chez l'opticien pour me faire fabriquer des lunettes selon mon ordonnance "N", une paire de "proximité" qui me permettra de travailler sur écran.

Mes nouvelles lunettes

Mes lunettes dataient de décembre 2019.
Elles ont été volées fin septembre, avec mon sac. Elles avaient moins de deux ans, donc je ne pouvais légalement me faire rembourser une nouvelle paire.
Sauf si ma correction avait changé.
Les opticiens sont si soucieux que votre paire vous soit remboursée qu'ils m'ont contrôlé la vue, trouvé un changement de correction et m'ont fabriqué des lunettes non selon l'ordonnance que je leur avais amenée mais selon la nouvelle correction.

J'ai récupéré mes nouvelles lunettes aujourd'hui. Pour la première fois depuis des années, j'ai de parfaites lunettes pour lire. Il y a longtemps que les lignes d'un livre ne m'avait pas paru aussi nettes.

Cependant ma paire précédente était une paire de "proximité", réglée pour que je puisse lire à l'écran.
Ce n'est plus vrai avec la nouvelle.
J'ai donc été obligée de reprendre ma vieille paire (la paire N-2 puisque la N a été volée et la N-1 perdue) pour travailler sur l'ordi.

Soupir.

H. tolstoïen

Mark Hamill a twitté le visage des trois présidents Obama, Trump, Biden en reprenant les titres des trois StarWars originaux


Mark Hamill (mauvais acteur mais twittos parfait) a twitté le visage des trois présidents Obama, Trump, Biden, en reprenant les titres des trois StarWars originaux.
Cela enchante H. quand je le lui montre. Je l'interroge :
— Et après, qu'est-ce qui se passe?
— Comment ça, après?
— Il n'y a pas de films qui se passent après, qui racontent la suite?
— Ah oui… Ça se passe mal.
Et comme je fais la moue:
— Qu'est-ce que tu veux, sinon il n'y a pas de film.

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J'ai oublié de noter (c'est sans doute important pour la suite, donc je le note) que mardi Apple a présenté un microprocesseur révolutionnaire (H., ravi et estomaqué: «ils sont revenus aux sources de l'informatique!») qui embarque sa propre mémoire et sa propre carte graphique (si j'ai bien compris). C'est beaucoup plus puissant en consommant trois fois moins.
Il est possible que les expérimentations aient été menés depuis des années à l'intérieur des iPhones dont les puces sont quasi inconnues. En fait, j'en suis à me demander pourquoi on ne se sert pas de nos téléphones comme ordinateurs : on plugguerait un clavier, un écran, une souris, et roule Mimile.

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J'ai craqué : je suis allée me commander de nouvelles lunettes. Suite au vol du 1er octobre, j'utilisais celles d'il y a trois ans mais je fatigue beaucoup trop.
Une semaine d'attente.

Borgne

A un quart d'heure de la fin du cours je m'aperçois qu'il me manque un verre de lunettes — le droit.
Je vide mon cartable avec précaution, je regarde à mes pieds : rien.
L'avais-je au début du cours ? Pas sûr. J'ai dormi dans le métro donc je n'ai pas lu donc je ne l'ai pas perdu là (mettre et enlever mes lunettes, les glisser dans une poche sans l'étui, les insérer plus ou moins en force dans mon sac trop rempli… Dure vie de lunettes). Sera-t-il au bureau demain ?

Ça pouvait difficilement tomber plus mal, avec un pointage urgent à finir d'ici mercredi (des heures à fixer l'écran), du grec à préparer pour jeudi, deux TG pour samedi… J'ai mal aux yeux.

Un opticien

Je passe chez l'opticien. Nous papotons. Il me dit ce que je dis aux gens à propos d'assurance: les chaînes, les grandes enseignes, c'est très bien pour les petites corrections, mais en cas de corrections importantes, de lunettes complexes, il vaut mieux aller chez un indépendant: «d'abord dans les chaînes, vous aurez des commerçants, pas des opticiens. Et puis ils vont vous vendre avant tout les verres de leur marque, qui ne sont pas les meilleurs». (En assurance, le parallèle, c'est: tant que vous n'avez pas de problème particulier, vous pouvez vous assurer en ligne, mais le jour où vous devenez un cas difficile (malus, etc), il faut aller voir un agent ou un courtier).


Pour mémoire:
Un quatre (une éternité que je n'avais pas fait de quatre): Dominique, Gilles, Dominique. Très plaisant, un temps magnifique.

Lunettes

Ophtalmo. Ma vue s'est dégradée mais à peine, toujours (encore) des "verres de proximité", ce qui me convient très bien.
Il va falloir que je trouve le temps de passer chez un opticien, ça m'ennuie.
Je voudrais des lunettes qui se coupent entre les deux verres, réunis par un aimant (lunettes à clipser, me dit google), afin de ne plus déformer mes montures à force de les enlever et les remettre. Mais j'ai peur que cela fasse affreusement ringard. Mais ça me fait rire. Mais je n'ai pas le temps. (A suivre…)


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A midi, j'ai refusé de monter en double avec JP parce que je voulais faire du skiff. Toujours un pang de remords devant les yeux tristes de JP. Impression d'avoir été mufle. Et j'ai à peine pu faire du skiff car Tristan m'a donné un skiff à la barre de pieds inréglable et j'ai dû rentrer après cent mètres. Si rageuse que j'ai rentrée mon skiff toute seule (c'était la première fois que je tentais l'expérience). Enfin bref.

Vendredi

Sortie en double avec Anne-Sophie. Bateau Kokoriko (fierté de se voir attribuer un bateau qui n’est pas les bateaux loisir habituels). Elle aussi me dit de préparer plus tôt (préparer ses pelles). Mentalement épuisée de concentration. Compliment nouveau: bon contrôle du dernier quart de la coulisse (je le note parce que c’est inattendu: c’est la première fois qu’on me dit ça. Ce doit être grâce à Jérôme, et peut-être à mes visionnages Youtube).

Les lunettes de soleil de Clément qui avaient été retrouvées au fond de la cabane ont fini dans la Seine.

J. n’a plus d’ordinateur. J’espère que nous ne venons pas de perdre quatre ans de compta (normalement c’est sauvegardé sur le réseau). Quand J aura son nouveau poste de travail, il va falloir trouver dans le dédale de l’organigramme LA personne habilitée à nous installer le logiciel de compta non répertoriée dans les listes habituelles. Du nawak en perspective.

Chez l'opticien

Quelqu'un s'est fait plaisir il y a bien longtemps en choisissant les textes proposés pour contrôler la vision de près et de loin après avoir chaussé ses (nouvelles ou futures) lunettes (volonté pédagogique, humour voilé?):





On s'est parfois étonné de mon émerveillement devant le monde, il me vient autant de la permanence du rêve que de ma mauvaise mémoire. Tous deux me font aller de surprise en surprise et me forcent encore à m'étonner de tout. «Tiens, il y a des arbres, il y a la mer. Il y a des femmes… Il en est même de fort belles…»
Jules Supervielle


Aussi longtemps que nous sommes en cette vie, nous sommes modèles, pour ainsi dire, en raison de notre corps d'argile, à la façon des vases et modèles soit pour le vice soit pour la vertu... C'est pourquoi, pendant que nous sommes ici-bas et pour ainsi dire entre les mains du potier, même si le vase tombe de ses mains, il peut toujours être réparé et remis à neuf.
Origène


L’ordre qui règne dans les choses matérielles indique assez qu’elles ont été créées par une volonté pleine d’intelligence. Il convenait à celui qui avait créé de mettre en ordre et, dès lors il est contraire à toute bonne philosophie de chercher une autre origine du monde que celle indiquée ici, de prétendre qu'il pouvait être tiré du chaos par les simples lois de la nature, et une fois formé continuer d'exister durant des siècles par la seule vertu de ces mêmes lois.
Isaac Newton


Certaines vertus morales se présentent chez l'homme qui ne se rencontrent pas dans la vie des animaux, sinon de quelques animaux domestiques sur lesquels l'homme marque son empreinte depuis des millénaires. Ces vertus sont la clémence, l'abnégation, l'esprit de sacrifice, la faculté de renoncement. Or il est à noter que ces vertus distinctives, ces vertus qui font les saints, les maîtres et les chefs, ces vertus sont essentiellement individuelles. J'entends que l'homme à l'état de groupe ne les possède pas.
Georges Duhamel


Il n'y a de beautés durables que celles qui sont fondées sur des rapports avec les êtres de la nature. Si l'on imaginait les êtres dans une vicissitude rapide, toute peinture ne représentant qu'un instant qui fuit, toute imagination serait superflue. Les beautés ont dans les arts le même fondement que les vérités dans la philosophie. Qu'est-ce que la vérité? La conformité de nos jugements avec les êtres. Qu'est-ce que la beauté d'imitation? La conformité de l'image avec la chose.
Denis Diderot

Rentrée (bis)

Rendez-vous chez le dentiste, pour moi et pour O. Je ne suis pas venue depuis au moins sept ans, date de l'informatisation du cabinet. Le dentiste sort des morceaux de tartre de mes gencives, j'ai l'impression d'être un vieux lavabo encrassé.

J'accompagne O. qui entre en seconde (mon dernier entre au lycée. Les années heureuses, le lycée, à venir). Nous déjeunons rituellement chez Wajda découvert il y a quelques années grâce à PZ. Je ne sais pas si c'est un effet de crise, mais c'est vide.

J'ai rendez-vous avec lui à la sortie des cours pour qu'il choisisse des lunettes et un chapeau. En attendant, je vais au cinéma, profiter du festival Lino Ventura au Despérado.

Et en attendant le début de la séance, j'explore l'étal du bouquiniste mitoyen.
- Kafka, Le procès
- Kafka, Le Château (il manque des pages à mon poche)
- John Cooper Powys, Autobiographie, parce que c'est un auteur favorie de Patrick
- Esprit, décembre 1962: mort de Louis Massignon, un article sur le mur de Berlin, un article d'Althusser, la crise de Cuba, la guerre d'Algérie, un article sur Char, un autre sur Godard
- Mercure de France, avril 1965, Michel Butor, Denis Roche, "le parti pris des mots" par Genette et et et… "Dix poèmes de Mao Tsö-tong"
- Petite Chronique d'Anna Magdalena Bach
- Albert Simonet, Touchez pas au grisbi (à cause des Tontons flingueurs)
- Limonov, Histoire de son serviteur, parce que cet auteur est étrange, mais pas désagréable.

Dernier domicile connu: Paris des années 70, rue des couronnes, Marlène Jobert qui court, qui volète, derrière Lino Ventura durant tout le film, le malaise d'une société toute entière face aux puissants (la police qui devrait protéger la société n'est elle-même pas à l'abri des puissants), la fin sans espoir, pas d'issue.

Petite digression à propos de la première mission de Marlène Jobert, appât à pervers dans les cinémas. La première fois que j'ai connu ça, c'était dans ces cinémas permanents des boulevards qui n'existent plus (1985?). C'était Il était une fois la Révolution. Je ne sais plus ce que j'ai fait, mais je sais que je n'ai jamais fui (quitté la salle) devant ce genre d'attitude.
Cela m'est arrivé à nouveau lors d'Essential Killing et deux films plus récents. Ça me fait rire, je n'ai plus l'âge, on voit bien que les salles sont obscures. C'est étrange, on comprend tout de suite que l'attitude de notre voisin n'est pas saine, mais cette compréhension est intuitive, instinctive, très difficile à étayer sur des faits matériels. Généralement c'est un homme qui s'assied dans le siège à côté de vous alors qu'il y a de la place ailleurs — en tout cas suffisamment pour laisser une place d'écart, comme il est coutume. Puis le coude prend trop de place. Mais est-ce qu'il prend vraiment trop de place, ou est-ce une illusion, de la paranoïa? Qu'est-ce qu'un coude normal? On ne se souvient plus, on n'a jamais fait attention.
Désormais je simplifie: soit je demande «Pourriez-vous me laisser un peu de place? votre coude me gêne», soit si mon sac le permet (sil est souple), je le mets sur l'accoudoir en tampon et je m'installe. L'homme met entre trente secondes et trois minutes à changer de place. Généralement il quitte la salle, me confortant dans mon diagnostic: je n'étais pas paranoïaque, le film ne l'intéressait pas.

Je récupère O.
Vélib. Choix de lunettes, d'un chapeau, de chaussures. Les deux premières emplettes prennent une heure chacune (confusion devant le choix), la dernière dix minutes (le magasin ferme).

Nous rentrons en restant sur la rive gauche de la Seine. Mon idée était de montrer à O les quartiers que j'aime tant, les friches industrielles que j'ai tant suivis durant les grèves de 2009 avec C. Mais tout s'est beaucoup construit. Pont du Port à l'anglais. Je dis à O: «Tu vois, il y a quelque part un idéal de vie qui consiste à habiter ces maisons [meulières minuscules] en allant prendre son café tous les matins au café», je songe à San-Antonio ou Auguste Pichenet, il répond «je comprends» et je sais que c'est vrai.

Dans les petites rues de Villeneuve-Saint-Georges je manque d'écraser un chat roux. Je pile, je cale. Un Arabe hilare me félicite pouce levé, un autre me dit «fallait l'écraser». A la maison, H est furieux, le camion est chargé, A n'avait pas préparé grand chose.

Image

Six mois plus tard, je ne suis pas bien sûr d'assumer mes lunettes de soleil Guess roses dans un étui panthère. Ça fait un peu pouffe sur le retour.

De New Stanton à Charlottesville

Breakfeast en self-service, cette fois j'essaie le porridge à la cannelle. Acceptable. Le micro-ondes est une pièce de collection.

Sud-Est, Est. Je suis fatiguée d'entendre la voiture peiner, ma boîte de vitesse me manque. 65 miles en descente dans les virages sans rétrograder, je n'y arrive pas, cela m'effraie. Et la direction assistée est trop assistée, le volant n'est pas assez lourd, je n'ai pas l'impression de tenir les roues. Tout cela me démoralise, j'ai l'impression de non assistance à voiture en danger, elle peine et je ne peux pas l'aider. Je laisse le volant (et j'écris: hier j'ai conduit, je n'ai pas écrit).
Les oiseaux ont changé (aux chants: on ne les voit pas), les grillons sont toujours aussi présents. Plus de circulation, plus de Harley, la température s'élève peu à peu.

Traversée du Potomac (fleuve de Washington D.C.). Peut-être parce que nous sommes dimanche, peut-être parce qu'il fait beau, nous croisons beaucoup de bikers en Harley (je ne suis pas sûre que ce ne soit pas un pléonasme), dont une femme ayant derrière elle un chien portant des lunettes de soleil roses.



Pause déjeuner. Martin au McDonald, cheveux blancs, nous écoute patiemment passer commande et nous demande si nous sommes français ou belges. Plus tard, il réussira à s'éclipser de sa caisse pour nous dire qu'il est allé à Paris il y a cinq ans et nous prévenir d'être prudents sur la route: nous allions changer d'Etat et les limitations de vitesse étaient plus strictes en Virginie.

Parc national de Shenandoah, les cent miles les plus au nord de la Skyline drive, rien que le nom fait rêver (mais nous n'irons pas dans les montagnes bleues).



Un ours, trois biches, des chipmunks (Tic-Tic et Tac-Tac), un cerf, des MacMahons (papillons), des fleurs.
Au pied des chutes d'eau d'Hollow creek, à huit cent mètres de la route au bout d'un chemin très escarpé un bel exemple de... De quoi? Tolérance, intégration, melting pot? Indiennes en sari et puritaines en bonnets de tulle.

Virginie, il fait bon, le soir tombe. Nous sortons au bout de cinquante miles et non cent, la randonnée jusqu'aux cascades a pris beaucoup plus de temps que prévu et je ne veux pas arriver trop tard chez Ruth.

Soirée comment dire? Soirée souvenirs. Photos, moi à dix-sept ans à Virginia Beach, moi à trente-et-un an sur la Tour Eiffel (J-179 avant l'an 2000, c'est noté sur la photo (c'est la dernière fois que j'avais vu Ruth)) que je n'avais jamais visitée avant d'y accompagner Ruth... Les enfants sont séduits par sa gentillesse (et O. par le fait qu'elle chasse les écureuils au pistolet à eau (pour protéger ses oiseaux)), et moi je n'en reviens pas d'avoir autant de chance. Tout ça parce qu'à dix-sept ans, quand il a fallu écrire une lettre de présentation pour les familles d'accueil, j'ai écrit quatre pages au lieu d'un quart... Et j'ai été envoyée chez Ruth.

Les lunettes roses

J'ai acheté des lunettes roses.

En récupérant mercredi soir mes lunettes de soleil de vue (nouveaux verres sur vieille monture), j'ai compris que j'avais eu le coup de foudre pour les lunettes roses essayées en riant il y a dix jours (alors que les nouveaux verres sur la vieille monture étaient déjà commandés).

C'est bien les lunettes roses, on voit la vie en rose. Seulement c'est toute une affaire, la monture est courbe, le verre est teinté "modèle" (???): au moins trois semaines de fabrication, je ne serai pas là quand elles seront prêtes, je ne les aurai qu'en septembre, après les vacances.

Tant pis.
J'ai retrouvé ce que ça me rappelle: «Mon âne, mon âne, a bien mal à ses yeux. Madame lui a fait faire une paire de lunettes bleues.»

Saint Denis

J'avais prévu aujourd'hui de visiter Chantilly et Saint Denis, puis lorsque O. m'annonça la bouche en cœur qu'il voulait aller à son cours de flûte à 15h30, place des Vosges et Saint Denis; finalement nous n'aurons eu le temps que de visiter Saint Denis.

Il faut dire que le matin nous avions une heure bloquée par une visite chez l'ophtalmo, O. et moi. La myopie d'O. augmente (l'ophtalmo: «oui, votre vision a un peu bougé, vous verrez mieux ainsi», l'opticien: «dis donc, ça a beaucoup bougé, ça va vous changer la vie!»). Quant à moi, je pensais que cette fois-ci j'aurais une nouvelle correction car je ne peux plus lire sans lunette (ou difficilement et pas longtemps, cela devient difficile par exemple de déchiffrer très rapidement une phrase dans les livres de mes voisins de transport (fondamental pour en identifier au moins le genre)), mais la conclusion de l'ophtalmo, fort logique quand on réfléchi à ce que je viens d'écrire, a été: «vous avez découvert que d'optionnelles, vos lunettes sont devenues indispensables. Mais il est encore trop tôt pour changer.» J'ai réclamé des lunettes de soleil, j'en ai profité pour prendre des verres progressifs, à la fois pour commencer à m'y habituer et parce que c'est indispensable à l'aviron. (L'opticienne aurait bien voulu me vendre des lunettes de vue, arguant que vu ma correction, je ne devais plus voir de loin. Je suis restée impassible. «Bon, alors je vais éviter de me trouver devant vous lorsque vous conduisez!» Cela m'énerve. D'abord je trouve cela impoli, mais surtout, j'ai beaucoup de mal à supporter que quelqu'un conteste par la théorie la réalité de mon expérience: si je le vis, c'est que c'est vrai, au moins pour moi, non? Sans compter que dans ce cas particulier, c'était validé par un ophtalmo.)

Saint Denis. J'aime beaucoup cette basilique, un peu désolée, un peu abandonnée au milieu des immeubles des années 1970 (mais comment a-t-on pu laisser construire de telles horreurs autour de cette église? Il fallait être tombé sur la tête (mais enfin, tout cela est réversible, rasable. L'important est de préserver l'essentiel, toujours). J'aime ce lieu où le mythe se matérialise. Le tombeau de Dagobert. Mais comment peut-il y avoir un tombeau de Dagobert? Et Du Guesclin, si petit, et Frédégonde (pensée pour Robbe-Grillet, ce doit être dans les actes du colloque de Cerisy, et Henri Martin. Enfin peut-être[1]) et ces transis, Louis XII et Anne de Bretagne, les rois nus, morts et mortels, la chair vaincue mais espérante (je n'ai jamais vu de transi ailleurs qu'à Saint-Denis, et l'humilité que représente l'idée-même de ces statues me transporte de surprise.

Et puis la Révolution, le saccage, la violence (s'attaquer à des vivants, à la rigueur, mais à des morts: cela m'est rigoureusement incompréhensible. Tout mort me devient sacré, il n'est pas un squelette exposé, momie ou marin de La Pérouse, qui ne m'emplisse de gêne), la reconstitution tant bien que mal des tombeaux, la réaffectation des restes, le cœur embaumé de Louis XVII, les listes de noms, tout me touche.

Notes

[1] Non, Robbe-Grillet parle de Brunehaut, p.312 du tome 1 des actes du colloque de 1975.

Stable

Quand je suis fatiguée je vais chez l'ophtalmo. Il me dit que ma vue n'a pas changé alors je me dis que je suis fatiguée.

Une existence tragique

A., quinze ans :
— Mais je ne veux pas porter de lunettes !
— Tu pourras peut-être avoir des lentilles, si tes yeux ne sont pas trop secs.
— Ça m'étonnerait, j'ai trop pleuré, il ne me reste plus de larmes.

Mère indigne

— Mais qu'est-ce que t'as sous l'?il ?
— C'est rien, maman, t'inquiète pas, c'est juste un copain, il a pas fait exprès ch't'assure, y m'a donné un coup mais t'inquiète pas, les lunettes n'ont rien.




Pour mémoire, il s'est fait casser ses lunettes en janvier dernier (tombées pendant que l'autre gosse lui mettait la tête entre les genoux «Mais c'est pas de sa faute, il faut rien dire, il a pas de chance en ce moment, déjà il a fêlé la vitre de la porte du conservatoire» (J'ai vu les parents, effectivement, c'est sans doute pas de chance, pas une brute), et mercredi, démonter et vandaliser son vélo sur le stade.

Mes lunettes

Mardi soir dans le métro, je tire mes lunettes de leur étui, j'ai dans la main une branche et un verre, elles se sont cassées au niveau du pont qui réunit les deux verres, la soudure a cédé.
La femme sombre et trop maquillée en face de moi ne peut retenir un sourire, je lui en veux, j'ai cassé mes lunettes.

Ma première paire datait de novembre 99, je m'en souviens très bien, ç'avait coïncidé avec les 35 heures: ayant étourdiment déclaré que lorsque je les mettais, je devenais si concentrée que je n'entendais plus rien (ce qui est toujours vrai, d'ailleurs, mais moins), Philippe avait ri et déclaré que c'était la solution des 35 heures: des lunettes pour la productivité.
Je les ai perdues lors d'une algarade dans le métro, en septembre 2006.

Lorsque je suis retournée chez l'ophtalmo, j'ai eu la fierté de constater que ma vue n'avait pas bougé (je surveille tous les signes du vieillissement, cheveux blancs, empâtement, raidissement, douleur, changement de la vue, avec curiosité et inquiétude: qu'est-ce que ça va donner? Toujours cette vie qu'on est obligé de vivre du premier coup, sans entraînement ni expérience). J'ai choisi des lunettes prune, en titane.

H. m'a dit le soir que s'il y avait tant d'objets en titane qui circulaient actuellement, c'est qu'on démantelait les sous-marins nucléaires russes. Un abîme s'est ouvert, le même que celui qui s'ouvre quand j'essaie d'imaginer un nombre décimal de plus entre deux nombre décimaux, ou les étoiles derrière les étoiles, est-ce que le métal de mes lunettes avait connu les profondeurs de la mer baltique, les grandes pressions, qu'avait-il vu que je ne saurai jamais?

Hier au petit déjeuner C. m'a dit que j'étais un monstre: j'avais grillé un ordinateur (par imposition des mains) et cassé des lunettes en titane.
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