Conversation de femmes libérées
Par Alice, jeudi 10 juillet 2014 à 23:59 :: 2014
J'ai pris la conversation en route, dans le Libanais où j'étais venue me réchauffer après ma sortie en skiff et ma douche froide (c'est déprimant, une douche froide quand il fait froid.)
Elles étaient en train de discuter, une brune en manteau rouge et une blonde maigre aux hanches extrêmement étroites.
— … parce que tu comprends, l'esthéticienne m'a dit qu'il ne fallait pas s'exposer au soleil après l'épilation pendant deux jours…
— Elle exagère peut-être, juste une journée…
— Parce que tu comprends, je pars quatre semaines, et je voudrais être nette. L'année dernière, au bout de deux semaines j'étais dans les bras de Marco et je n'étais pas nette…
In petto, je pensais «tu baises, tu échanges de la salive de la sueur du sperme des glaires, et tu t'inquiètes de poils? C'est quoi ce mec qui s'inquiète de quelques poils?»
Et puis j'ai dû manger, bricoler avec mon iphone, quand j'ai entendu:
— Il ne faut pas compter en euros de l'heure, car on ne compte pas ses heures. Tu commences tôt le matin et tu termines tard la nuit; l'année dernière j'ai terminé à deux heures du matin.
— …
— Je touche cent soixante euros pour la journée, et je suis artificier diplômé, je ne suis pas en bas de l'échelle. On commence le matin vers sept heures, huit heures, on met tout en place, on s'arrête une heure pour manger. Entre dix-sept et vingt-trois heures je peux faire la sieste, me reposer, c'est l'heure où le chef d'équipe fait ses contrôles, l'heure des impondérables, nous on ne sert plus à rien…
— Oui enfin, tu ne peux pas t'éloigner, faire du shopping…
— Non…
La discussion dérive un peu, je suppose qu'elles parlaient du quatorze juillet et du feu d'artifice.
— Tu dois te souvenir d'avril, j'ai fait quelque chose en avril, en Allemagne, au black. On me payait le billet de train et l'hôtel… Enfin tu sais comment c'est, à cinq ou huit dans deux chambres, et encore, tu dors dans le couloir quand un mec ramène une pouffe: «ça y est t'as fini? on peut retourner se coucher?» et tu te recouches dans les draps sales…
L'autre rit, mi-choquée, mi-dégoûtée.
— C'était au Hilton, tu te souviens comment c'était? Au matin on partait en volant les oreillers en plume, ils étaient si doux…
Je mange en riant intérieurement. Moins mijaurée que je ne pensais. (Je n'écoute pas particulièrement, mais nous ne sommes que trois (il est tard) et la salle est petite. Plus tard elles parleront d'un ami à elles travaillant à la Tour d'Argent recruté par je ne sais quel club… Je n'arrive pas à comprendre à quel monde elles appartiennent.)
Elles étaient en train de discuter, une brune en manteau rouge et une blonde maigre aux hanches extrêmement étroites.
— … parce que tu comprends, l'esthéticienne m'a dit qu'il ne fallait pas s'exposer au soleil après l'épilation pendant deux jours…
— Elle exagère peut-être, juste une journée…
— Parce que tu comprends, je pars quatre semaines, et je voudrais être nette. L'année dernière, au bout de deux semaines j'étais dans les bras de Marco et je n'étais pas nette…
In petto, je pensais «tu baises, tu échanges de la salive de la sueur du sperme des glaires, et tu t'inquiètes de poils? C'est quoi ce mec qui s'inquiète de quelques poils?»
Et puis j'ai dû manger, bricoler avec mon iphone, quand j'ai entendu:
— Il ne faut pas compter en euros de l'heure, car on ne compte pas ses heures. Tu commences tôt le matin et tu termines tard la nuit; l'année dernière j'ai terminé à deux heures du matin.
— …
— Je touche cent soixante euros pour la journée, et je suis artificier diplômé, je ne suis pas en bas de l'échelle. On commence le matin vers sept heures, huit heures, on met tout en place, on s'arrête une heure pour manger. Entre dix-sept et vingt-trois heures je peux faire la sieste, me reposer, c'est l'heure où le chef d'équipe fait ses contrôles, l'heure des impondérables, nous on ne sert plus à rien…
— Oui enfin, tu ne peux pas t'éloigner, faire du shopping…
— Non…
La discussion dérive un peu, je suppose qu'elles parlaient du quatorze juillet et du feu d'artifice.
— Tu dois te souvenir d'avril, j'ai fait quelque chose en avril, en Allemagne, au black. On me payait le billet de train et l'hôtel… Enfin tu sais comment c'est, à cinq ou huit dans deux chambres, et encore, tu dors dans le couloir quand un mec ramène une pouffe: «ça y est t'as fini? on peut retourner se coucher?» et tu te recouches dans les draps sales…
L'autre rit, mi-choquée, mi-dégoûtée.
— C'était au Hilton, tu te souviens comment c'était? Au matin on partait en volant les oreillers en plume, ils étaient si doux…
Je mange en riant intérieurement. Moins mijaurée que je ne pensais. (Je n'écoute pas particulièrement, mais nous ne sommes que trois (il est tard) et la salle est petite. Plus tard elles parleront d'un ami à elles travaillant à la Tour d'Argent recruté par je ne sais quel club… Je n'arrive pas à comprendre à quel monde elles appartiennent.)