En toute rigueur, ce texte n'a rien à faire là. Je le reprends parce que ça me fait plaisir.

Vous trouverez ça et là dans le site de Matoo des tarlouzes, des dèpes, des tapioles (peut-être le mot le plus utilisé), des tapettes, des "garçons sensibles" (j'adore cette expression), des pétasses dans le sens de pédés, des cœurs de midinettes,... S'il y a un monde dont Matoo se moque, c'est bien celui des homos, enfin, d'un certain type, celui qu'il connaît le mieux, tout en en catégorisant d'autres, les homos bobos, les folles de la gay pride, etc. Si l'on voulait lui reprocher quelque chose, ce serait peut-être d'en rajouter dans le cliché concernant les dèpes. Sur le thème, il force le trait, c'est certain, sans que je sois toujours sûre que ce ne soit qu'un jeu (serait-ce parfois une défense?) Comment vous dire, tout cela n'a pas grande importance, ces mots qui seraient violents ou méprisants ailleurs sont ici employés avec tendresse.

Je me demande souvent ce qui me retient sur son site et dans son écriture, dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle est plutôt étrangère à ce que je lis par ailleurs. Je pense que c'est un rapport à l'enfance, à l'émerveillement, à la capacité intacte de regarder autour de soi et à être heureux (ce qu'il appelle son optimisme fataliste), également à un bonheur des mots (pas de doute, j'ai acquis du vocabulaire, même si je serais à peu près incapable de m'en servir.(lol))
Aussi étrange que cela puisse (me) paraître, il m'évoque des livres d'enfance, des choses comme La gloire de mon père, des textes sans cynisme, sans humour noir, sans rien finalement de ce que je cherche aujourd'hui, c'est-à-dire le rire qui permet de tenir à distance un monde comme il va qu'on n'est pas très sûr d'apprécier. Matoo, c'est la possibilité d'aimer à nouveau le monde comme il va, malgré ses imperfections (mais quelle époque a jamais été parfaite?)

Et puis Matoo, mon phoenix, est parfaitement conscient de ne pas toujours utiliser les bons mots aux bons moments (voir les commentaires). Il reconnaît qu'il utilise parfois un mot au sens inapproprié simplement parce qu'il le trouve joli (je sais, quelle hérésie), il sait qu'il fait de "vraies" fautes (celles qu'on ne fait pas par étourderie). Il me surprend par sa maîtrise de la retranscription du langage parlé (j'avais commencé à donner un lien vers un post récent, mais finalement, j'ai eu peur de vous choquer (parce que là, le discours (hétéro) qu'il rapporte dépasse nettement le mysogine)). Il écrit sérieusement sans se prendre au sérieux. Il cherche. Il lit. Il va à des expositions. Il est conscient de ce qui lui manque dans les domaines "culturels"; non seulement il cherche à combler le manque, mais en plus il influence les lecteurs de son blog.

Il aime lire, et je veux croire qu'il fait lire, aussi bien le dernier polar américain que Marc-Aurèle. Il y a deux façons pour la littérature de mourir: qu'il n'y ait plus d'écrivains (dignes de ce nom), et qu'il n'y ait plus de lecteurs (dignes de ce nom). Et je suis toute étonnée de me rendre compte que, sans vraiment pouvoir le rationaliser, aussi loin que Matoo puisse paraître du lecteur idéal tel qu'on l'imagine sur ce site, c'est sur lui (et ses pairs, ceux qui ont la même joie, la même curiosité) que je parierais pour faire survivre le goût des livres et de la littérature encore quelques années, parce que si je crois que la littérature classique telle qu'on la conçoit ici survivra dans les universités, je crois que c'est par des lecteurs fous et curieux que la littérature en général a une petite chance d'être sauvée.