Billets pour la catégorie 2008 :

2008 : année mémorable.

Grande cuvée, la meilleure depuis 1995, meilleure encore.

Des rencontres, la perspective d'une porte sur le mur de la cage.

A l'année prochaine.

Belote et chocolats

Je passe mes journées à dormir, jouer aux cartes, manger du chocolat, lire, écrire.
Ayant trouvé à qui parler sur FB, l'intérêt du blog s'amenuise à disparaître.

L'une des dernières conversations en cours m'a rappelé cette vieille blague:
à vingt ans, l'amour, c'est MMS : matin, midi et soir;
à quarante, c'est MMS : mardi, mercredi, samedi;
à soixante-quinze, c'est MMS : mars, mai, septembre;
à quatre-vingt, c'est MMS : mes meilleurs souvenirs.

Nostalgie de Noël

Finalement, ce que je regrette le plus des Noëls de mon enfance, c'est la pénombre de l'église et les rues désertes et éteintes du village à la sortie de la messe.

Aujourd'hui il y a trop de bruit et trop de lumière. Tandis que j'aspire à un certain recueillement, on n'attend de nous toujours plus d'expansivité.
Cela ne me convient pas.

Contractions du temps

Mettons que tout soit urgent jusqu'à 18 heures, demain.
Tout ce qui n'aura pas été terminé à ce moment-là n'aura plus de raison d'être dès le surlendemain.
Nulle accumulation de tâches, évaporation.

Déjeuner dominical

Chuck Norris et Superman ont fait un bras de fer.

Celui qui perdait devait porter son slip par-dessus son pantalon.

Aucune idée de titre

- Mardi soir : explication de texte en groupe autour de L'Amour l'Automne. Ça commence à décoller, l'intérêt est que chacun a des centres d'intérêt différents (théâtre, musique, littérature, people) et que les discussions divergent avant de revenir au texte. Je crois que ce genre de livre est fait exactement pour ça: être lu à plusieurs voix, sucister autant de discussions qu'il contient de pistes (de la page 17 à 22 en une heure et demi: le livre fait plus de quatre cents pages). Il y a une tentative d'épuisement du monde, non par description exhaustive, mais par mots-clé permettant les associations.

- Mercredi : journée minutée quart d'heure par quart d'heure. J'ai quand même réussi à dormir entre neuf et onze heures du matin (bénédiction). Camomille, mais il n'y a plus de miel.
Le soir, écrit bien trop avant dans la nuit.

- Jeudi : soirée (et nuit) idem.
L'écriture saoûle, elle me laisse d'abord l' ubris, puis la gueule de bois, l'envie de ne jamais plus retourner sur les lieux du crime, une honte à me relire, un aquoibonisme généralisé.

- Vendredi : Je cherche La Légende du grand inquisiteur et trouve ce que je ne cherche pas.

Qu'a-t-on à bloguer quand on écrit? Ecrire qu'on écrit? Me voilà fraîche.

Affaire Madoff : les fondamentaux

Je me souviens, lors de ce colloque sur les finances publiques, du discours de Pierre Joxe. Il venait d'obtenir un poste ou une mission à l'ONU, nous avouant en riant que c'était le dernier examen (en date) qu'il avait eu à passer (un examen d'anglais, il me semble).

«En survolant en hélicoptère une livraison de jeeps pour une mission de l'ONU en Afrique, nous nous sommes aperçus qu'au centre parfait de ce carré de centaines de voitures, extérieurement lisse et sans faille, il manquait des dizaines de véhicules. On ne pouvait s'en apercevoir à pied. Il faut revenir aux fondamentaux, à l'inventaire physique.»

Je me souviens d'une de mes profs de comptabilité, expert-comptable, au physique à la Simone Signoret de la fin, qui proclamait «Un comptable, c'est un con derrière une table», qui nous racontait les inventaires à quatre heures du matin dans les usines de BTP sur les quais de la Seine, déroulant les câbles pour les mesurer avant valorisation.
Je me souviens de la fraude de ce poissonnier d'Auchan qui, lors des inventaires de fin d'année, valorisait habilement la lotte au prix du merlan ou vice-versa, tandis que nous n'y voyions que du feu, incapables que nous étions de faire la différence d'un seul coup d'œil entre deux filets de poisson.

J'ai appris à H. quand il a commencé à tenir sa comptabilité de société ce principe simple: à une écriture doit correspondre un justificatif, au justificatif doit correspondre un mouvement dans la sphère "réelle", un achat ou une vente, d'un bien ou d'un service (même les provisions pour risque ou les dotations aux amortissements ont pour origine un événement ou un bien réel (vient ensuite le calcul des encours de production et le début des ennuis. Passons.)).

Mais qu'est-ce que la sphère réelle en finances? Où est l'argent? Existe-t-il? Ne s'agit-il que de manque à gagner, de gains potentiels qui ne seront pas réalisés? De quoi parle-t-on exactement?
Quelqu'un le sait-il?
Et au fur à mesure que se découvrent les crashs et les fraudes, j'ai l'impression que la réponse est non.

Burn after reading, des frères Coen

Attention, spoiler.

Les frères Coen traitent toujours l'un des deux sujets suivants: la bêtise ou le mal, les deux se rejoignant parfois. (On peut noter un cas où ils ont plutôt traité de l'intelligence: dans Intolérable Cruauté et peut-être dans Miller's Crossing (sans doute leur film le plus indécidable).)

Le dernier n'échappe pas à la règle: il s'agit d'une sorte de remake de Fargo plus absurde encore (car faisant bien plus de morts pour une raison bien plus futile (mais quelle raison? même cela est difficile à définir)).
C'est un film dont l'avancée totalement cahoteuse (difficile d'imaginer moins rigoureusement tragique) n'a pas grande importance. Tout est tellement sous-déterminé, déterminé à la seconde qui passe et non par un mécanisme implacable remonté dès le début du film, qu'on s'intéresse à peine à la trajectoire du film.
L'intérêt n'est pas là, il est dans ses dimensions horizontales. Chaque image ou presque renvoie vers des références. C'est un pastiche précis des films d'espionnage américains contemporains (The Good Sheperd: les chefs, les réunions d'anciens, le père, la voix du maître-chanteur au téléphone qui imite les films qu'il a vus (imitation de fictions dans la fiction, stéréotype reconnaissable en ce que nous, spectacteurs, partageons les mêmes références que le personnage), etc) tant et si bien que je doute qu'aucun réalisateur sérieux n'ose en tourner un dans la même veine désormais. C'est également le catalogue habituel des références aux propres films des frère Coen, les portes, les murs, les enfilades de couloirs, la vision à claire-voie dans le placard, les têtes en gros plan, les boucles d'oreille qu'on rajuste, les mêmes phrases, les mêmes gestes, les jeux de miroirs. Tout le monde ment.
C'est un film totalement immoral : les hommes, bons ou méchants, meurent, les femmes, menteuses ou avides, survivent, il n'y a aucune raison à cela.

J'aime beaucoup la fin, le fatalisme du ponte de la CIA, qui n'y est pour rien, qui n'a rien décidé, n'est pas intervenu, a juste demandé d'être tenu au courant "quand tout cela prendrait sens", qui constate les dégâts, les éponge, les oublie, et demande:
— Qu'avons-nous appris?
— Rien.

C'est si proche des conclusions tellement plus ampoulées de Bodie of lies ou The Good Sheperd.


edit

A la réflexion, cela me rappelle mon père quand j'avais huit ans:
Papa, pourquoi il y a des guerres?
Pourquoi te disputes-tu avec ta sœur?

Les frères Coen ont décidé d'illustrer la dispute avec la sœur plutôt que la guerre.


edit bis

Un blog (trouvant le film mauvais) à explorer.

Scandale Madoff : Audiard avait raison

Antoine de la Foy : — Vous avez l'air exceptionnellement détendu, Oncle Fernand, heureux de vivre !
Monsieur Fernand : — Ah oui, ça, vous pouvez le dire. Maintenant que ma mission de tuteur est terminée, et croyez moi ... Et puis quant aux diverses affaires constituant la dote de notre petite Patricia, votre cher papa a accepté de les prendre en charge. Elles sont sans doute un peu particulières mais enfin, avec un vice-président du fond monétaire à leurs têtes, ben moi je pense que tout ira bien !

dans les dernières répliques des Tontons flingueurs, avant le départ à la distillerie et à l'église.

Le devoir de math

— Et les courbes, tu les as tracées?
— Euh... oui...
— Et qu'est-ce que tu constates? Tu as regardé où elles se coupaient?
— C'est que... j'ai un problème, j'ai mal choisi l'échelle, le point d'intersection est hors de la feuille.
[??!!?]
— ?!! Et tu n'as pas recommencé ton dessin?
— Euh... non...

Quelques temps plus tard, l'ensemble du devoir (à rendre pour le lendemain) est terminé.
— Je peux aller sur l'ordinateur?
Nous avons été si échaudés de tant de façons que désormais l'ordinateur des enfants est coincé à portée de regard de nos deux bureaux: plus question de jouer à n'importe quoi jusqu'à n'importe quelle heure.
— Si tu as terminé, bien sûr.

Deux heures plus tard, pris d'un doute soudain (nous avons vraiment été échaudés), H. demande:
— Et ce devoir, je peux le voir?
— C'est que... j'ai pas terminé de le recopier.

Et c'est ainsi que jeudi soir, lorsque je rentrai à minuit et demie, il y avait de la lumière derrière les volets de C.: il recopiait son devoir qui aurait dû être fini deux heures plus tôt.

Quatre jours


- Samedi soir : concert du RSO (et du LGSO). J'aime ces gens que les contraintes d'une vie d'adulte n'ont pas fait abandonner leur passion. Comme d'habitude, des compositeurs totalement inconnus de moi au programme (Gustav Holst, Hamish MacCunn, Coates), c'est l'un des charmes de ces concerts (je lis très consciencieusement le programme). Ces musiques du tournant du siècle m'évoquent de la musique de films ou de dessins animés.

- Lundi soir : Mensonges d'Etat. Un beau film, pas manichéen, composé par fragments. Je me demande si les intégristes musulmans regardent cela (de même que je me demande ce que les soviétiques (avertis) pensaient de Docteur Folamour).
Le héros se fait mordre par des chiens enragés : série de piqûres antirabiques. C'était arrivé à mon père quand j'avais six ans: douze, vingt piqûres dans le ventre, réputées très douloureuses. Toutes mes poupées avaient le ventre percé de coups d'épingle.

-Mardi soir: soirée de dédicace à la librairie Art et littérature. On boit, on rit, on chante sur fond de piano et de violon, Marc Lapprand et Nicole Bertolt rédigent des dédicaces dans leur livre Boris Vian, le swing et le verbe tandis que François Roulmann, le troisième auteur, avec sa cravatte Harry Potter, chante «Si j'avais un franc cinquante», on se dispute pour des esperluettes [1]. Jacinto est passé, Camille aussi, Roland (venu de Troyes!), toujours les mêmes, ça fait plaisir.
Dans la librairie trône la porte du Tabou, le cabaret où jouait Boris Vian. François Roulmann l'a récupérée alors qu'elle partait pour la déchetterie. En temps normal, on peut la voir 10 rue de la grande Chaumière, adresse de sa librairie, spécialisée dans la musique du XXe siècle.
Je rachète La Conjuration des imbéciles dans une version de Folio à couverture rigide. J'aime bien les expériences de Folio, les couvertures en fourrure ou en papier bonbon.
A minuit et demie dans notre lointaine banlieue, C. et moi nous demandons si nous allons réussir à ouvrir les portières de la voiture enneigée et gelée.

- Mercredi soir: je dois corriger de toute urgence un document écrit sur une vieille version de Word sous Mac, annoté sous une version récente de Word sous PC, rouvert sous Openoffice sous Mac. Voilà trois fois que le logiciel plante. J'abandonne. Je déteste l'informatique.


Notes

[1] merci à Kozlika

Avant Noël

Après-midi dans les gradins d'un dojo, à regarder des enfants passer leurs grades de karaté. J'ai mon Mac, mes Doc Martens, je suis plongée dans la reconstitution compliquée de certaines journées estivales.

Un petit garçon de sept ans environ se précipite hors d'haleine vers ses sœurs à côté de moi, adolescentes arabes au visage triste, patient, d'un ennui silencieux.
Le petit garçon suffoque, ravagé par l'information qu'il apporte:
— Y en a qui... y en a qui... y en a qui disent que le Père Noël n'existe pas!


Et je suis si triste de n'avoir rien à dire pour le consoler.


(Ce matin, O. m'a dit avec réalisme: «Il fallait lui dire qu'il passera quand même»).


Hier soir, Z. passant à côté d'un parc contenant des sapins à vendre, en face de Saint-Eustache :
— Ça sent le sapin !

Et je pense aux métaphores réanimées de RC (mais personne ne reconnaît jamais mes citations (d'autant plus que je ne me souviens plus de la citation)).

11/01/2009

Si voilà: «Je le remercie de "réinsuffler du sens dans les métaphores éculées"». Journal de Travers, p.634

Se noyer dans un verre d'eau

Le webmestre et la documentation de my dear beloved compagny se font taper sur les doigts pour avoir mis en ligne sur l'intranet un document de la CNIL.
Apparemment, des DRH de différentes entités du groupe ont téléphoné au siège parce que le-dit document contredit une synthèse diffusée par la direction juridique.
L'auteur de la synthèse est en vacances (le plus probable est qu'il manque une ou deux phrases explicatives pour faire le lien entre le document brut et la synthèse adaptée à notre cas).
C'est le branle-bas de combat, c'est terrible, c'est épouvantable, il faut retirer ce document de l'intranet, qui a eu l'idée folle et dangereuse de proposer en accès direct un document de la CNIL destiné aux employeurs et aux salariés?
Ma collègue très émotive en est malade, c'est tout juste si elle ne vomit pas d'anxiété.

Toutes ces bêtises me fatiguent.
D'un autre côté, c'est curieux à observer.

Infime geekerie

Les deux trains qui me ramènent chez moi s'appellent Zyck ou Zuck.
Les Zyck viennent de la gare du Nord ou de plus loin, il sont déjà bondés quand ils arrivent gare de Lyon, c'est pourquoi je préfère prendre un Zuck. Les Zuck partent de la gare de Lyon. Ils sont mis à quai vides, dix minutes avant de partir, ce qui permet de monter, de s'asseoir, de choisir sa place — près d'une fenêtre, pour pouvoir dormir, sous un néon lumineux, pour pouvoir lire —, d'attendre au chaud, et non sur les quais.

Quand j'arrive sur le quai du Zuck, le train entre en gare, il vient vers moi à petite vitesse avant de s'arrêter, à quinze mètres environ. Je lève les yeux pour vérifier qu'il s'agit bien du Zuck attendu. Je lis en lettres lumineuses : Yoda.
Yoda.
Je baisse les yeux, je croise le regard du conducteur. Il m'a vue voir. Il a vu mon incrédulité et mon amusement. Nous échangeons un sourire complice, je dépasse la machine, je monte dans un wagon.

Ce week-end, j'ai pris deux kilos.

Nous avons acheté une balance électronique.

Renée

Ma grand-mère est née en 1916. A huit ans, elle fut placée comme fille de ferme.
De place en place, elle arriva au service d'une famille avec laquelle elle sympathisa suffisamment pour que la fille de ses patrons devienne la marraine de ma mère.

Cette fille est née en décembre 1923. Elle boîte et est bossue. Quand j'étais petite, nous allions chez elle une fois par an pour le nouvel an. C'était de longs après-midis d'ennui, on nous recommandait d'être bien sages. Les meubles étaient en formica, il y avait un baromètre en forme de maison avec un homme et un parapluie, une femme et une jupe printanière, qui étaient montés sur un axe obligeant l'un à être dedans quand l'autre était dehors, cela m'intriguait beaucoup mais on n'avait pas le droit de toucher, il y avait des cactus sur du sable coloré dans une coupe profonde, des napperons, cela sentait la cire, chez Renée, c'était exactement comme dans la chanson de Renaud: «Sur la tabl' du salon / Qui brille comme un soulier / Y'a un joli napp'ron / Et une huitr'-cendrier / Y'a des fruits en plastique».

Renée vivait avec sa mère. Elle m'a offert trois ans de suite Les cavaliers de Joseph Kessel dans la collection "1000 soleils". J'imagine la conversation avec la libraire: «C'est pour une fille qui lit beaucoup et qui aime beaucoup les chevaux». Je remerciais poliment, je ne disais rien, on allait l'échanger le lendemain dans une librairie qui n'existe plus. Les conversations se composaient exclusivement de commérages et encore de commérages, j'apprenais à détester les commérages. Il y eut des histoires étranges, comme celle du tablier pleins d'écus amené dans la vacherie [l'étable] où ma grand-mère trayait les vaches (je regrette de ne pas avoir mieux écouté), ou mesquines, comme celle du réveil offert à une voisine: la voisine mourut, et comme Renée détestait l'héritier, elle profita d'une visite des pompes funèbres pour aller récupérer le réveil — «Il était tout neuf», précisait-elle.
Et ma mère et ma grand-mère de hocher la tête autour de la table pour approuver.

Un jour ma mère en mal de confidence, ou trouvant le secret trop lourd je ne sais, me raconta l'histoire de Renée.
A dix-sept ans elle avait été engrossée par un garçon d'écurie. Celui-ci avait été bien sûr renvoyé, et l'enfant abandonné.

Avec sa bosse et son pied-bot, Renée ne se maria pas. Quand sa mère fut veuve, elle vendit la ferme et acheta une minuscule maison à X. Elles y vécurent ensemble de longues années, trente ans au moins. Puis sa mère mourut. Renée resta seule dans la maison.
Aujourd'hui, Renée est à son tour en train de mourir, seule, à l'hôpital. Elle ne peut plus se nourrir mais son cœur est solide. Ma mère et quelques amies lui rendent visite.


Maupassant m'est beaucoup plus proche que Flaubert pour des raisons qui ne sont pas littéraires.

Blues (artificiel)

Je savais que prendre ce médicament me déprimerait et ça n'a pas raté (on ne me croit jamais).
Y a plus qu'à attendre que l'équilibre se rétablisse, mais ça m'agace d'avoir le moral dans les chaussettes pour une raison aussi facilement évitable.


En attendant la maison se transforme en tripot, tout le monde sait jouer à la belote. J'ai découvert un blog qui me paraît faire écho au Doigt coupé de la rue du bison.
Cet été nous passerons au tarot (à cinq).

Hommage à François Caradec

Raté l'anniversaire d'Agnès. Pourtant la carte était sur mon bureau depuis une semaine.

C'est drôle, ces gens qui ne veulent pas aller sur FB sous prétexte que leurs enfants y sont. Comme si on ne pouvait pas ne jamais se croiser.

Ai-je convaincu Sophie de commencer par Twitter plutôt que FB, "parce que c'est plus facile"? (mais ça ne sert pas à la même chose). De toute façon, tout cela est très lent quand on ne dispose pas de nombreux amis inscrits sur FB au moment de s'y inscrire soi-même: il faut se faire accepter par de purs contacts internautiques, il faut commenter, être discret, cela dure des semaines voire des mois.

Rencontré Saint_Glinglin, que j'avais découvert cette après-midi sur Twitter. Sans doute l'écart le plus court entre une rencontre internautique et une rencontre IRL.

Soirée Oulipo à la TGB. Je suis la dernière à entrer, la salle est pleine. Hommage à François Caradec. Beaucoup de tendresse, beaucoup de retenue. Je suis émue de voir ces gens, ses amis, venir ainsi rendre hommage à un homme par des lectures, des poèmes, des chansons, du rire. J'éprouve le manque qu'ils n'évoquent pas. La grande affaire de la soirée est que le parler chien supérieur (Jacques Roubaud in La princesse Hoppy), indéchiffré à ce jour, sera révélé la prochaine fois ? dans deux semaines.

La chair nous pèse au père Lachaise.

Soirée pizzeria. Trop parlé, beaucoup ri, un peu bu. Le fontainebleau est le meilleur des desserts que je connaisse.

Rentrée. C. nous a encore fait un sale coup aujourd'hui ? le jeudi ne lui réussit pas.

Cerisy, la campagne de France

La perspective d'aller à Cerisy avec ceux qui sont peut-être, après tout, "mes pairs", me paraissait parfaitement fastidieuse. Tout envie de voyage s'estompe — des villes et encore des villes : je me suis rendu compte que, désormais, j'aimais mieux draguer que de visiter quoi que ce soit; les villes ce sont avant tout des corps, pour moi, des visages, des poils, des peaux, des lèvres, des voix, des caresses, des draps sous la lampe (on verra après...).
RC, Journal de Travers, p.1518

Il faut avouer que draguer dans les profondeurs de la campagne normande... à moins de trouver son bonheur parmi les participants du colloque, c'est assez compliqué. (M'a fait rire cet Australien qui m'a confié, tandis que le car négociait comme il pouvait les routes du bocage: «J'ai l'impression que le terriroire français est beaucoup plus ouvert, beaucoup plus accessible, qu'il y a beaucoup plus de routes qu'en Australie.» (Well... yes.))

Je suis rentrée de Cerisy reposée, avec une envie de déménager. Pour la première fois depuis une éternité (depuis combien d'années, en fait? avant la construction de l'autoroute passant par Vierzon), j'avais dormi une semaine dans des nuits silencieuses et noires. Point de routes, point de lampadaires. Le froid lui-même, que j'avais redouté, était accueillant, le corps s'adaptait sans effort à l'air frais mais propre.
Et moi qui m'étonnais il n'y a pas si longtemps d'être devenue si citadine, je me suis aperçue que c'était faux: ce dont je n'ai pas envie, c'est de la demie-ville, la ville avec tous les inconvénients de la ville sans ses avantages, ses cinémas, ses expositions, ses conférences, ses concerts, ses bibliothèques...
Mais j'appartiens à la vraie campagne, à la solitude, sans voiture et sans lampadaire.
J'ai envie d'y retourner. Quand et où? (La Sologne? Les bords de Loire? Le Nivernais? Le plateau de Langres?)

Dimanche, en sortant de la voiture à l'orée d'un bois, l'odeur et la nuit m'ont brutalement rappelé la ferme de ma grand-mère. Sept ans qu'elle est morte et ça ne passe pas. Pire, cela semble revenir. Dieu qu'elle me manque, mes souvenirs sont si vivants qu'il me semble les ressentir physiquement.

Rien

Grève. Malade. Pas lavé les cheveux. Oublié d'aller au Louvre. Pas le temps de passer à la librairie. Lu un passage amusant de Journal de Travers dans lequel un commerçant italien (en 1976) rend la monnaie avec des bonbons à la menthe. Un rien m'amuse.

Depuis samedi une grosse mouche bourdonne le soir. C'est agaçant. J'ouvrirais bien le velux pour la faire sortir, mais ça m'embête qu'elle meurt de froid sur le coup (La mort saisit le vif). «De toute façon, elle a déjà pondu ses quatre-vingts œufs» me dit C.
Ah.

J'ai froid, il fait froid.


complément le 27/11/2008

(Comme quoi on a tous les mêmes problèmes: bzz.)

Je suis comme ça, moi ?

Demain, l'un des enfants participe à une compétition de karaté pour la première fois. Nous ne savons pas encore qui l'accompagnera.

— Prends maman, elle est très forte pour repérer les faiblesses de l'adversaire: «Tu vois lui? Il boîte, vas-y, frappe dans la jambe!»
Ils éclatent tous de rire (ils sont méchants).
— Ben dis donc, j'espère que tu ne suivras pas de psychanalyse, ça serait joli!

Une floppée d'Albert, quelques Pascal

— Tu penses quelque chose, tu passes sous la douche, tu penses autre chose...
— Oui, ça c'est Pascal.
— ...??
— Mais non! Pas toi, Blaise!

Musée haut musée bas

Je n'y serais pas allée spontanément, mais je n'ai pas regretté. Curieusement le film m'a bien plu, présentant à peu près tous les clichés sur l'art et les musées, de la part aussi bien des détracteurs de l'art moderne que de ses adorateurs.
Tous les acteurs vivants français de plus de quarante ans sont présents dans ce film. C'est impressionnant.
Belles photos de bites.
Emouvantes Vierges.
C'est reposant de voir la nature présentée comme une menace à une époque où elle est plutôt considérée comme menacée. «Ça change», comme dirait un ami.

Le jeune homme qui est sorti derrière moi n'a pas du tout aimé. Il préfère la pièce, dit-il. Le principe des sketchs fonctionne au théâtre, pas au cinéma, soutient-il. Et il ne supporte plus Dussolier, «Pitié!»

Je ne peux voir la publicité pour l'Armée de terre en début de séance sans penser qu'il y manque la «cellule de soutien psychologique» qui aidera la famille quand le beau jeune homme aux yeux clairs aura explosé sur une mine anti-personnelle (qu'on ne me prenne pas pour une anti-militarisme primaire: j'apprécie un minimum de cohérence et je déteste que nous soyons pris pour des cons).

Toutes ces années de synchise sans le savoir

Dimanche : rien.

Lundi : soirée chez Rémi. Tout le monde a été très sage. J'ai trouvé le moyen de me disputer avec Flatters sur la théorie de la critique (enfin, lui n'envisageait sans doute pas les choses de ce point de vue). Je me rends compte qu'il devient urgent que je réorganise VS jusqu'au bout, car moi-même je n'y retrouve plus rien. Tout est en chantier, il n'y a plus de logique dans le classement des billets.
J'ai l'impression que mon mail freesurf est grave dans les choux.
Une collègue a perdu sa mère samedi. Sa tante était morte mardi dernier. Elle les enterre respectivement jeudi et vendredi prochains. Son mari a fait un AVC il y a trois semaines environ (il est rentré chez lui, il n'est pas paralysé mais garde des troubles du langage. Il n'a pas conscience de ce qu'il lui est arrivé).
Pourquoi écrire ça ici? Parce qu'il faut que je m'en débarrasse.
Ah oui : dimanche, appris par un faire-part sur la porte de la boulangerie que le boucher de mon ancien village est mort.
Cette mort me hante.
J'apprends que la manie des parenthèses emboîtées jusqu'à l'inintelligible s'appelle la synchise (voir commentaire 83).
Pas écrit sur les blogs, pas répondu aux messages FB, encore moins aux messages freesurf, et pour cause.

Mardi : pas envie de me lever. Depuis que je dors moins bien j'ai besoin de dormir davantage.
J'ai acheté trois livres, j'ai failli, je m'étais promis de ne plus en acheter avant d'avoir lu tous ceux achetés lors de la fermeture de ma librairie.

Décision

L'un des intérêts des (vestiaires des) salles de sport, c'est qu'on y voit de vrais gens avec de vrais corps, pas des images maquillées ou retouchées.
Au total, presque tous les corps sont imparfaits, c'est plutôt rassurant. (Je suppose que je pourrais arriver à la même conclusion sur une plage, mais je ne vais jamais à la plage.)

Deux constats : le gras est plus joli bronzé, la jeunesse fait oublier toutes les imperfections.

C'est décidé, au printemps, j'essaie les UV.

Les événements palpitants de ce jour

Matin : Pris un RER plus tôt (ça n'a l'air de rien, mais c'est la première fois que cela arrive depuis la rentrée).

14 heures: rencontré Claire B. Plus pince-sans-rire que je ne l'aurais cru(e), et encourageante. Elle m'a donné plusieurs noms et un mot d'ordre: oser.

?? : à partir d'un twitt de Kozlika, je suis arrivée dans un blog au nom rigolo : sauvons la terre au lieu de manger des chips (Ce n'est pas incompatible (mais personne ne reconnaît jamais mes citations)). Et là catastrophe, je lis des jérémiades sur les chaussettes et l'esclavage des femmes.
Je crois que je vais faire ma Didier Goux: je vais râler en expliquant qu'elle a tort et que j'ai raison. Se plaindre d'esclavage en France, quand on tient un blog... Faut pas avoir honte.

* Mode d'emploi féministe :
Plier les chaussettes n'est pas obligatoire. Ni les mettre à l'endroit, ni les apparier. La chaussette sur le sol dans le passage peut y rester. La chaussette qui n'a pas atteint le bac à linge sale ne sera pas lavée. (S'il n'y a plus de chaussettes propres un matin: ah ben ça alors, ça c'est dommage...) Les moutons sous le canapé peuvent galoper: qui oblige qui que ce soit à y faire quelque chose? Ne font quelque chose que ceux et celles qui le veulent bien, pour des raisons qui leur appartiennent. Mais qu'ils ne viennent pas se plaindre en accusant la société (pas en France, pas dans nos sphères sociales (qu'on devine à travers nos blogs): un peu de pudeur, de grâce). 19h02: le Zuck est supprimé. Attendre celui de 19h17.

20h30. Je cuis les crêpes préparées par A. Sirop d'érable et poudre de noisette.

Soupçon

Je crois que ce jeune homme-ci



est le même que ce jeune homme-là.



Avec ça, j'ai de quoi commencer un roman. (Et je viens de me rendre compte qu'il tient un œillet sur les deux tableaux.)

Cadeau

Gvgvsse m'a offert des cigarettes américaines de toutes les couleurs achetées à Moscou en souvenir de celles que fumait sa grand-mère.
Elles sont si jolies et si inattendues que je n'oserai pas les fumer.


Rangement macabre

Tandis que je trie les papiers contenus dans l'armoire à dossiers suspendus afin d'archiver les dossiers les plus anciens que nous ne consult(er)ons jamais ("accidents du travail 2003", "naissances" (faire-parts, lettres de félicitations, quelques dessins), "nourrice 2000"), je me dis en étiquetant les boîtes qu'elles ne seront sans doute jamais rouvertes, sans doute jetées telles quelles après nous — qu'il serait sans doute aussi sage de les jeter tout de suite mais que je n'en ai pas le courage —, et que ce sera très bien ainsi.

Quatre nuits avec Anna, de Jerzy Skolimowski

Comme je n'ai pas pu voir Kanal qui passait à la cinémathèque, je me suis rabattue sur un autre Polonais.

J'ai toujours la même avidité des paysages polonais, de la terre et des ciels. Ici, c'est un hôpital, des briques rouges, un clocher qui sonne, un mélange de modernité (hélicoptère) et d'intérieurs pauvres tels que devaient être les fermes françaises dans les années 50.

Ce pourrait être un film muet. C'est pratiquement un film muet.

C'est le film d'une passion violente et respectueuse d'un homme pour une femme.

Il m'a semblé voir un film de Kaurimaski qui aurait choisi une veine baroque.

C'est lent. Le récit est monté en mosaïque. On ne comprend que très lentement, il reste quelques hésitations sur la chronologie. Il faudrait sans doute le voir une deuxième fois, pour repérer les éléments qui indiquent la flèche du temps. Quelques personnes ont quitté la salle. Je regardai les arbres, la boue, le bouton, la boîte à musique. Les couleurs sont inégalement réparties, quasiment monochromes autour de l'homme. Ce sont les couleurs de la nature en hiver et des murs non peints. Autour d'Anna vivent les fleurs, les cartes postales, le vernis à ongles.

La réussite du film est dans le contraste entre le peu d'événements représentés et la violence des sentiments ressentis.

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