Billets qui ont 'lecteur' comme mot-clé.

Wagon studieux

Mercredi, seule : je pars plus tard.

Dans le RER A debout, une personne lit La garçonne dans une édition de poche récente (je ne savais pas qu'il était réédité).

Je m'assois. Ma voisine lit Le Gai Savoir (j'atrappe au vol une allusion à Epicure, dont Niezsche se dit proche: voilà qui ne m'étonne pas). En face de moi m'intrigue le titre d'un livre : Mathématiques congolaises d'In Koli Jean Bofane. Renseignements pris sur Google, il est possible que ce soit aux mathématiques ce qu'est La faim de Hoffman à Spinoza.


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(Première photo avec l'iphone. Ça va mieux.)

Témoignage d'un bidasse

— Les statistiques veulent qu'un livre rangé dans une bibliothèque a cinq pour cent de chance d'être lu.
— Ça veut dire que les gens stockent sans lire.
— Moi, je stocke pour ma retraite ou le jour où je me casserai la jambe. C'est Sophie qui m'a soufflée: elle stocke pour le jour où elle sera en prison!
— Moi j'ai fait de la prison.
— Moi aussi. Pendant mon service, j'ai fait de la prison pour avoir cabossé une voiture. J'y suis resté une semaine. Les autres demandaient à être deux par cellule pour ne pas s'ennuyer, moi j'ai demandé à être seul. J'ai lu Kawabata, Pays de neige, j'ai commencé Sur la route de Kerouac. Au service, je lisais Genet, Notre Dame-des-Fleurs. Je n'aurais pas eu le droit de lire L'Humanité, mais Genet, oui, personne ne connaissait.

Les lecteurs (ou pas) de ce blog

Il y a ceux qui vous lisent. Vous les rencontrez, vous ne les connaissez pas, ou peu, et ils vous posent des questions sur des sujets dont vous ne leur avez jamais parlé (et pour cause), et soudain la lumière se fait en vous : « Mais ils me lisent ! Vraiment ! avec attention ! et ça les intéresse suffisamment pour qu'ils s'en souviennent ! »
Et là, vous vous sentez infiniment touchée, reconnaissante, (flattée) et embarrassée : vite, vite, vous rembobinez dans votre mémoire tout ce que vous avez écrit pour tenter d'estimer tout ce que vous n'auriez jamais confié avant des mois à un inconnu, parce que vous n'avez pas été élevée comme ça… et vous abandonnez, trop de mots, trop de billets, trop de sincérité, ce mot dont vous avez appris à vous méfier avec RC et Nabokov et contre ou avec lequel il faut vous battre certains soirs.

Il y a ceux que vous connaissez un peu plus, que vous croisez par hasard et qui vous pose une question qui fait qu'il faut bien vous rendre à l'évidence: ils ne vous lisent pas, malgré leur proclamation d'attention. Mais ceux-là, vous les fréquentez depuis si longtemps que, même si le pincement de déception ne s'efface jamais tout à fait, ils vous ont rendue philosophe, ils vous ont appris à sourire de vous-même, de votre prétention, de votre besoin d'attention; et en fait, c'est à les fréquenter que vous avez oublié que certains vous lisaient ou vous liront, cf la première catégorie.

Il y a les autres, ceux qui ne connaissent pas ce blog, à qui vous le donneriez bien à certaines heures, par affection ou par flemme (la paresse de leur raconter votre vie), et vous résistez, parce qu'en vérité, vous avez aussi peur qu'ils fassent partie de la première catégorie (« je ne vais pas raconter ça, il y a X qui me lit ») que de la deuxième (« c'était bien la peine que je raconte cela, X ne l'a pas lu »).

Ce n'est pas ce que vous croyez

1/ "D'apparence musulmane", assise à côté de moi ce matin.


Fier d'être arabe et chrétien


2/ Je m'assois sur le lit d'un inconnu après y avoir déposé quelques billets.


(Je viens de trouver chez un libraire "à domicile" un texte de RC que je ne qualifierai pas de rare mais d'inconnu.)

Dans le TGV

Ma voisine en face finissait Pynchon («Ah? Il y en a qui finissent Pynchon?)






celle à côté de moi lisait Le Crabe aux pinces d'or en chinois, dans un format présentant deux cases côte-à-côte par page (??!):




(J'ai donc pu remarquer que le chinois ne se lisait pas comme les mangas, en partant de la "fin" (ou alors la mise en page d'Hergé est aussi étrange pour un Chinois que celle d'un manga pour un Français).

Thérèse Desqueyroux et le Zéro et l'Infini

Métro ligne 1 vers 18h30. J'étais debout contre le strapontin, tournée vers les sièges. Il s'est trouvé deux lecteurs, un debout à gauche, une assise à droite.


Thérèse Desqueyroux:




Le Zéro et l'Infini :

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