Billets qui ont 'cuisine' comme mot-clé.

Equilibré

Grasse matinée, raclette le midi, crêpes le soir.

A notre décharge, il continue de faire froid.
En même temps, c'est l'hiver, donc pas tout à fait anormal (ces quelques mots ironiques parce que depuis une semaine les médias parlent d'une vague de froid pour un malheureux -2. Serge Zaka s'arrache les cheveux devant la désinformation).

Je fais du pointage de liste toute l'après-midi en regardant vaguement Starsky et Hutch. En réalité ça ne se prête pas au binge watching car chaque épisode est autonome, sans lien avec le précédent. La seule mesure du temps serait le vieillissement des acteurs, mais chez des adultes de cet âge, quatre ou sept ans sont imperceptibles.

Par ailleurs je regarde L'extraordinaire attorney Woo, sur le système juridique de la Corée et sur l'autisme. C'est informatif et attendrissant. Cependant il est difficile de faire autre chose en même temps car au mieux c'est en anglais — un anglais très clair qui ne nécessite pas de sous-titre, mais à mon niveau, il faut malgré tout que je sois attentive.

Le thé

J’ai invité Jean et Jérôme, mes acolytes de la campagne il y a un an, à venir prendre le thé (cela sonne vieille dame anglaise, mais comment dire quand ce n’est ni le café postprandial, ni l’apéritif préprandial, mais bel et bien la pause du milieu d’après-midi?), et comme j’ai décidé brusquement de faire des petits gâteaux, je passe ma matinée à feuilleter des livres de recettes. Comme d’habitude je consulte un peu gay dans les coings, mais il y a trop d’ingrédients inconnus ou de recettes dont on se dit qu’il faudrait les tester avant de les présenter à des invités.

Je cuisine en écoutant un podcast sur le studio Ghibli. Je découvre l'importance de Paul Grimault et du Roi et l'oiseau dans leur inspiration.

Mes petits gâteaux seront plutôt réussis, ouf (je me souviens de précédents sablés incassables). Discussion à bâtons rompus sur la situation politique et l’organisation du parti. Classiquement, depuis que Jean est à la retraite, il est insaisissable, et Jérôme doit encore passer une floppée de partiels. Pas facile de planifier de futures réunions.

Jean part à six heures s’occuper de sa mère (cette contrainte a toujours rythmé nos sorties, cela me permettait de savoir que je ne serais pas en retard à la maison), Jérôme s’attarde, tant et si bien qu’H. propose: «Tu veux dîner à la maison?»
Jérôme a vingt-deux ans, il est en vacances depuis deux jours, il décompresse de ses examens, il a le temps. Il répond oui, nous papotons. A dix heures je finis par m’excuser: «je suis désolée, j’ai un compte-rendu à finir, je vous laisse». J’entends H. et lui débattre des réformes institutionnelles, des regroupements de communes, ils ne sont pas d’accord, ça compare le Portugal, les Etats-Unis, ça parle de Tocqueville.
Jérôme partira vers minuit.

Mais bien sûr

— Il n'a aucun goût, ce poulet.
— De toute façon, le poulet, ça n'a pas vraiment de goût. C'est surtout une affaire de consistance.
— Mais pas du tout. Tu le fais un peu revenir à la poêle, et grâce à la réaction de Maillard, tu obtiens un goût de caramel.
(Je ne sais absolument pas de quoi il parle.))
— Mais oui, bien sûr, j'aurais dû y penser !
— Fallait pas me faire lire Hervé This.


Et donc, pour ceux que ça intéresse, la réaction de Maillard.

Malade

Suffisamment malade pour ne pas aller ramer. Réveillée à sept heures, puis huit heures, puis neuf heures. Difficultés à respirer, pile d'oreillers pour ne pas être à plat et éviter l'étouffement. Rendormie et levée à dix heures.

Tarte aux pommes, vaisselle et réunion politique… à cela près que ce n'était pas une bonne idée de la fixer le jour de France-Pologne (3-1).

Il faut que je reprenne ce blog. Je finis par l'oublier. Ce n'est pas parce que j'ai une vie passionnante, c'est juste que je suis fatiguée le soir. Il faut que je blogue à un autre moment.
Il me reste à reconstituer les jours à partir des traces laissées, les photos prises, les sms reçus et envoyés, les tweets likés ou sauvegardés en signet. J'aime bien faire cela, l'écoulement du temps n'est jamais celui qu'on pense.

L'automne enfin

Première gelée ce matin. En une semaine la forêt a changé de couleur.

Huit un peu étrange : chaque fois qu'un équipage commence à se stabiliser, comme notre équipage de filles, Sibylle invente quelque chose. Donc elle a décidé de monter un mixte. Le premier problème, c'est qu'il y a des rameuses en commun entre les deux bateaux, donc il faut choisir quel équipage s'entraîne.
Bref c'est le bordel.
Mais bon. Très belle sortie, équilibrée.


Déjeuner avec A. et son amie Laure. Elles repartent après le repas.

Rempotage des mini-cyclamen et coings confits. Je fais également confire un potimaron en suivant un peu gay dans les coings. Pas encore goûté.

Dead to mee saison 2 : «Parfois on a plus besoin d'un bon ami que de connaître la vérité».

Les détestations alimentaires (végétariens s'abstenir)

Repas marrant offert par un fournisseur. Bonne adresse: les Zygomates rue de Capri dans le 12e.

La commerciale en face de moi a mangé du cochon d'Inde en Amérique du sud «avec la tête dans l'assiette». Mouvement d'horreur du commercial.
— Les autres ont goûté du ver blanc. Il paraît que c'est bon, sucré. Moi je n'ai pas pu.

D'où cela est-il parti? Des écrevisses américaines dans le marais poitevin? (la commerciale est niortaise).
— Ils font du pâté de ragondin, aussi.
— Vous vous rendez compte de ce que vous dites? Vous mangez du rat?
— Mais ce n'est pas du rat d'égoût, ce n'est pas pareil.
— Vous connaissez Demolition man, le rat-burger?

— Et vous, qu'est-ce que vous ne mangez pas?
Je réfléchis.
— Déjà, si vous êtes obligée de réfléchir…
— La cervelle. Avant, j'aurais dit les choux de Bruxelles, mais depuis que j'en ai mangé avec du gibier à Strasbourg…
— Ah oui, moi c'est pareil, je n'aimais pas […], mais depuis […]

— Pas les insectes.
— Ma petite-fille elle adore ça.
— Mais qui donne des insectes à son enfant?

— J'adore les oreilles de porc.
— Mais c'est plein de cartilages! Pourquoi manger ça?!
— Et les groins? On nous a apporté une soupe de groins, les groins fottaient à la surface, j'adore ça.

Etc, etc. Si bruyants que nous avons gêné la table derrière nous, j'en ai peur.

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Oulipo le soir. Plus nombreux que souvent. Il fait chaud. Nous montons à l'étage du French Eyes.

Deux points marquants:
Information par Nicolas : l'écart social accepté socialement en France entre les membres d'un couple est son âge divisé par deux plus 7 (exemple: si vous avez 60 ans, vous pouvez prendre un conjoint de 37 ans). L'intéressant de cette règle est qu'elle n'est pas purement proportionnelle.

Information de GEF : X est de venu millionnaire grâce aux bitcoins. C'est un musicien doué, maladivement jaloux. A la suite d'une rupture amoureuse, il s'est réfugié dans une ferme (près de Saint-Etienne?) en mangeant peu et ne se chauffant pas. Soudain il s'est mis à rechercher dans ses disques durs des traces des bitcoins qu'il avait acheté des années auparavant. Bref, il se retrouve millionnaire, sans rien changer à sa vie, mais en aidant des amis.

Noël

Beaucoup de champagne, un essai de klouskis (c'est le nom de mon enfance, mais la recette correspond aux kopytkas dont je n'ai jamais entendu parler), du saumon fumé, des magrets de canard, un macaron géant à la mandarine et la tendance à préparer le repas suivant à peine sorti du précédent. Il y a longtemps que je n'avais pas autant mangé.

Ambiance détendue dans l'ensemble. Le teckel à poils durs (Kaninchen) de trois ans tend à être insupportable, mais ce n'est pas bien grave.

Comme chaque année désormais, je m'en veux de ne pas avoir la fermeté d'imposer la messe de Noël.

Soirée pro

Test négatif dans l'après-midi.
Cocktail pro avec des élèves de grande école dans la soirée.
Conclusion : ils sont épais comme des crevettes et ne mangent rien. Mais boivent un peu.

A un moment je tends un plateau de canapés au foie gras en plaisantant:
— Tenez, pendant que c'est encore autorisé!
Un garçon s'empare d'un canapé: «Ah oui, c'est vrai!» tandis que les deux filles me lancent un regard noir quelque peu méprisant. J'ai eu envie de rire tout en me sentant embarrassée. Je me suis demandée dans quelle mesure les garçons ne mangeaient pas à cause de la présence des filles (et j'ai pensé à Proust: «l'influence civilisatrice des femmes». Sauf que je ne sais pas s'il s'agit de civilisation. Sans doute que oui, malgré tout).

Ils étaient heureux de se retrouver et ça m'a fait plaisir de les voir rire et papoter.

Place Colette-Paris


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En sortant vers 23 heures, j'ai fait l'erreur de vouloir prendre la ligne 14: de l'autre côté du portillon, les escalators sont barrés d'un ruban de chantier. J'interroge un ouvrier: plus de ligne 14 à partir de 22h30.
Je ressors et vais prendre la 1. Il est 23h12, impossible que j'attrappe le train de 23h16.
Train de 23h42 au départ de gare de Lyon.
Surprise : il ne s'arrête pas à Melun, il poursuit jusqu'à Champagne, ce qui est bien plus court pour H. qui vient me chercher.

Champagne à 00h32, église de Moret dans la lumière, à la maison à 00h50. Je suis crevée et j'ai mal aux pieds.

Une charlotte à la kriek

Télétravail. H. est à Paris, ce qui me permet de travailler efficacement (!)
Je déconnecte tôt en prenant le prétexte de ma fièvre légère. Doliprane.

Je sors faire les courses et prépare une charlotte à la kriek, dessert que je n'ai pas réalisé depuis 1996 (j'ai un point de repère).

La mystérieuse affaire des toasts

Ce matin, après mon essai convaincant au petit déjeuner hier, je reprends des petites barquettes de pâté de foie (comme des marquettes de confiture) et m'apprête à me faire griller des toasts dans le grille-pain laissé à notre disposition.

Las, deux toasts sont déjà en train de griller.
J'attends, debout devant le grille-pain, dans un angle de la salle du petit déjeuner, pas exposée puisque dans un angle mais cependant visible puisque debout.
J'attends, c'est un peu embarrassant.
Les toasts sautent. Personne ne vient les chercher.
J'attends.
J'attends.

Que faire? Les mettre de côté sur une petite assiette et m'en mettre à griller?
Mais ils vont refroidir.
Les prendre et les remplacer par d'autres dans le grille-pain?
J'attends.
Personne ne vient les chercher.

Je les prends et en mets d'autres à griller. Je vais me rassoir et commence à ouvrir mon pâté de foie.
Un client de l'hôtel, un jeune Asiatique, s'approche du grille-pain, constate que ses toasts sont encore en train de griller et, perplexe, retourne s'assoir.
H. revient: «Je vais te dire quelque chose, j'ai un peu honte, ne te moque pas». Je raconte.
— Quoi, tu lui as volé son pain ?
— Mais non, je l'ai remplacé !
— Mais pourquoi tu n'as pas mis les toasts sur le côté ?
— Mais ils auraient été froids, je lui ai rendu service !

Il me regarde entre désespoir et fou rire. Entretemps le deuxième jeu de toasts saute du grille-pain.
— Qu'est-ce que je fais maintenant? Je les lui apporte?
— Mange tes toasts et arrête tes bêtises.
Je mange. Le client ne vient pas. Il est plus loin, en train d'éventrer un croissant pour le beurrer. Il me faut d'autres toasts, j'ai fini les deux premiers. Les mêmes questions se reposent, prendre les grillés pour les manger ou les mettre sur le côté? — à cela près que je sais désormais qui attend les toasts.

Il me faut des toasts. Je ne vais pas attendre que le client vienne chercher ceux-là et libère le grille-pain pour que je puisse en mettre d'autres à griller. Tant pis, je mets les deux toasts chauds sur une assiette et les apporte à l'Asiatique.
Il relève la tête, surpris, fait signe que non, ce n'est pas pour lui, il n'en veut pas.
Il se remet à son croissant.
Je regagne ma place en me demandant ce qui vient de se passer.

Je prends H. à témoin: «tu l'as bien vu tout à l'heure venir vérifier si les toasts étaient sortis du grille-pain?
— Oui, et surtout, quand je suis arrivé avant toi, je l'ai vu mettre les premiers toasts dans le grille-pain.

Que s'est-il passé? A-t-il oublié, l'ai-je intimidé?

J'ai mangé le deuxième jeu de toasts.

Régime alimentaire

A la Table du loup j'ai commandé des accras, des frites de patate douce et des pommes de terre à l'ail. Et un gin anisé et du pain perdu.

— Y en a qui mangent du pain avec leurs pâtes, toi tu manges des frites avec tes patates.

Ce matin je suis en indigestion et j'ai une haleine de chacal.





PS: Au même moment, à 21h, QuandMarcelTweete, le bot (robot) qui recherche les phrases courtes dans La Recherche, a tweeté «Je n'ai plus faim».

Un cake au roquefort

Si je suis passée faire des courses lundi, c'était pour acheter du roquefort afin de confectionner un cake au roquefort pour le dîner hebdomadaire des rameurs. (Je n'allais tout de même pas faire faire à H. les courses pour mon aviron).

Oyez oyez bonnes gens, après près de vingt ans, je me remets à la cuisine! Il aura bien fallu ça. (Autre preuve de mon intégration: pour la première fois de ma vie, j'achète un numéro de PQR (presse quotidienne régionale), il me semble que c'est Le Républicain.)

Huit cahotique, en partie sous la pluie, course contre une péniche et dîner à l'intérieur du club: il fait froid et la pluie menace. L'Europe brûle et nous sommes sous une «goute froide» (la France entière connaît désormais l'expression).


carte météo de la France en juillet 2021 sous la goutte froide


Organisation des vacances

Très tôt le matin je réserve un hôtel pour Vienne et deux billets d'avion.

Je découvre avec ahurissement le choix des menus possibles:

choix des menus proposés par austrian air line


Je fais une recherche Google: le «Jain menu» est un menu pour la communauté Jaïn, strictement végétalien (vegan, rien d'origine animale), sans oignon ni ail ni aucune racine végétale.
Surprenant que ces gens-là prennent l'avion, mais pourquoi pas.

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Je reçois un mail de Sybille, le genre de rameuse dont je n'imaginais pas qu'elle connaissait mon existence (fierté). Elle organise un stage de perfectionnement au Creusot du 12 au 15 août, soit deux jours avant mes billets d'avion.
C'est chaud.

Je pose la question à H.
Refus catégorique.

Bio

Depuis que nous sommes à Moret nous mangeons bio.
Ce n'est pas vraiment volontaire (je veux dire: une volonté), c'est plutôt une opportunité ou une coïncidence, kairos, le magasin de fruits & légumes le plus proche est bio, il n'est pas cher (pas plus cher que du pas bio), les produits sont bons et parfois surprenants (les chips frites à l'huile de coco ou les brosses à dents à tête jetable).

Il y a quelques semaines une affichette proposait de réserver de la sève de bouleau.
What? Qu'est-ce que c'est?
Toujours curieuse, j'ai réservé une poche de trois litres. (Il faut dire aussi que le bouleau est l'arbre emblématique de mon enfance, l'arbre de la Sologne.)
Jeudi on m'a appelé pour me dire que je pouvais passer la chercher.
Depuis, j'en bois cent cinquante millilitres chaque matin. C'est censé durer trois semaines, il est très important de ne pas le garder plus d'un mois (pourquoi? mystère).
C'est très étonnant, transparent, insipide. On dirait une eau à peine parfumée.

Indigestion

Je n'ai rien fait de ce que j'avais prévu, c'est-à-dire quelques actions pour mon ancien boulot, et surtout lire de la doc pour le futur (les statuts, le site, les plaquettes commerciales).
A la place, j'ai fait une crise de boulimie en mangeant des rice krispies devant Crazy Ex-Girlfriend, et comme je l'ai caché à H. j'ai dû manger normalement le soir (galette et crèpes). Je suis en pleine indigestion.

Récap

- Sortie en skiff. Vent du nord qui ébouriffe les cygnes. Jamais vu autant de péniches. Seine en tôle ondulée. J'ai l'impression d'avoir beaucoup perdu en technique.

- Parce que je suis censée ramener le repas, je m'arrête à Fontainebleau pour prendre un plat japonais à emporter. En attendant la préparation de ma commande j'ai appelé Monique. Je ne sais pas depuis quand on ne s'était pas parlé. Parce que je ne la contactais pas, elle pensait que j'étais froissée. Il ne lui est pas venu à l'idée de m'appeler, elle. Je lui ai appris la règle KISS (Keep it simple, stupid).

- Maintenant, devant une recommandation de Matoo, je zone devant The crazy ex-girlfriend. J'aime bien. «Je me méfie des choux-fleurs, on dirait des brocolis albinos.»
Le cœur a ses raisons me met mal à l'aise et The office m'ennuie. Comme je n'ai pas suivi les analyses Twitter, je ne sais pas ce que cela signifie.

Chou-fleur et vin des sorcières

Ce fut le repas de midi, et comme j'ai trop bu, j'ai somnolé tout l'après-midi en regardant vaguement Coup sur coup (Les favoris de Midas), attrayant au début, mais trop décousu pour moi.

Chou-fleur d'Un peu gay dans les coings: très simple et très bon. Et donc vin des sorcières. Le caviste de Moret commence à comprendre nos goûts.

Désormais nous savons quel est le fromage

A la fromagerie, H. a trouvé ça. C'était irrésistible. Je vous dirai si c'est bon quand on l'ouvrira.

boîte de gâteaux apéro Alice au pays des maroilles


De l'utilité du saucisson. Ou de la poutre.

Le problème du dernier étage, c'est qu'il est facile de se cogner la tête dans la poutre en métal qui barre l'espace en diagonale.
Nous avons envisagé de mettre le ficus en dessous pour être obligé de la contourner et donc de passer à l'endroit où la poutre est la plus haute.
Mais nous venons de découvrir que le charcutier fait un saucisson qu'il faut faire sécher environ deux semaines.

Cookies

Ce blog va reprendre pour un soir son rôle premier: celui de carte postale destinée à mes amis, et donc ce soir à un ami: paquet bien reçu, j'adore la confiture de tomates vertes, et les cookies…

Les cookies sont incroyables. Imaginez un fondant au chocolat qu'on aurait réussi à solidifier en une fermeté craquante. Ils sont si bons qu'il est bien possible qu'ils aient décidé H. à rencontrer l'expéditeur — alors que chaque été je ne parvenais pas à le convaincre de faire le voyage.

Lettre suivra, mais pour l'instant j'annonce : paquet bien reçu.

Crêpes

A Yerres de nouveau. H. fait essayer la voiture bleue (la berline, la voiture «raisonnable») au beau-frère d'une amie: vendue. Mi-mars la voiture partira en Pologne.

J'ai eu le temps de tailler les hortensias pendant l'essai. C'est plus facile de tailler à quelques semaines du printemps: les bourgeons sont là, il suffit de couper au ras.

O. et Y. toujours aussi charmants. Ils nous avaient préparé des crêpes, à charge pour nous d'apporter les confitures. Y. aime les fleurs et le rhum. Elle paraît même avoir une sacrée descente.

— Je reprends l'école le premier mars, le jour de mon anniversaire. Je vais le dire aux enfants: «c'est mon anniversaire».
— Tu le dis aux enfants?
— Bien sûr, pourquoi pas? Eux ils le font, ils arrivent à l'école en disant «c'est mon anniversaire». Et ils apportent un gâteau… Il faut que j'apporte un gâteau.

O. commence à travailler demain.

Les tisanes ne sont pas ce que vous croyez

Je suis fan des tisanes Les 2 Marmottes, le fenouil, le thym et leurs noms délirants, 7e Ciel ou Peace Mémé.


Mais tout de même, avoir pour slogan d'un coffret de tisanes «Eveillez votre instinct aventurier !»… Tu pousses le bouchon un peu trop loin, Maurice.

Cuisine et dépendances

Gilda a émis la thèse intéressante que quarante jours étaient une durée biologique ou anthropologique. Une chose est sûre, c'est que quelque chose est en train de changer: je fais la cuisine!
Aujourd'hui, pintade au raisin, recette trouvée dans un superbe livre, La cuisine des châteaux.

Cela a donné lieu à un échange avec ma fille:



Sinon, spécialement pour Matoo, ce lien d'où est tirée cette photo (merci à Philippe pour la recommandation de ce cours que j'écoute en faisant la cuisine):

Adieu au système impérial

C'était un cadeau de mes amis américains en 1984, un petit verre mesureur en plastique, gradué en ounces, tasses et millilitres.
Cela n'a l'air de rien, mais c'était difficile à trouver en France à l'époque.

L'anse était cassée, le fond était étoilé mais retenait encore les liquides.

Je l'ai achevé ce soir en y mettant des amandes grillées dans l'huile: sous l'effet de la chaleur, le plastique du fond s'est retourné suivant les lignes de fêlure. Le verre est passé à la poubelle.


Cuisine

Aujourd'hui j'ai eu le droit de cuisiner. (Allusion à cette citation que j'adore: «Jour de Dieu! que je voie des femmes faire la cuisine chez moi!»).

J'ai donc mis le poulet à mariner et préparé un bourguignon de champignons en regardant la vie de Marie-Thérèse d'Autriche sur Arte (déçue qu'on ne parle pas davantage de ses enfants, mais cela m'a permis de nouer des liens entre les châteaux de Schönbrunn, Charlottenburg et Nancy).

La purée de céleri accompagnée des champignons était très réussie.

J'ai inversé les ordinateurs: installé le professionnel dans la chambre qui donne sur le jardin et le personnel sous les toits, à la lumière. J'aime être plus près du ciel. Avouons-le, je procrastine par peur de me remettre à mon mémoire. J'ai trouvé cela que je trouve très bien vu:




Névrosyne et autophlagèle.

Incompréhension

— Quoi ? Mais comment pouvez-vous vivre sans passoire ?

Allers et venues

Comme il y a grève, je passe chercher Caroline à huit heures pour être au club à neuf. Dans la nuit illuminée par les décorations de Noël les conducteurs sont très prudents. Sortie en huit puis AG du club.

Je passe chez O. lui apporter une lampe et des cintres puis je l'emmène à Villejuif où il doit tester le vélo de C. qui a proposé de le lui donner.
Voyage dans Paris en grève, à circuler dans les petites rues.

Je m'écroule chez C. et dors dix minutes. Thé. O. est enchanté par le vélo. Comme il parle d'acheter des chaises pliantes, C. lui propose les siennes. Problème: comment les transporter dans la Mazda?
O. trouve la solution en les coinçant derrière le siège conducteur. Nous repartons dans la nuit et les bouchons.



Retour chez O. près de Denfert, puis dîner à deux pas chez une rameuse: soirée post-Bellecin. Les invitées venues du quartier de l'Opéra mettent une heure et demie à traverser Paris, samedi de grève et gilets jaunes oblige. Nous commençons sans elles. Eclats de rire, bouteilles de vin et foie gras.

Vintage

H. a ramené des objets dont ses parents se débarassaient, des casseroles émaillées par le grand-père, le poste à galène de sa grand-mère (réparé, il fonctionne), un volume de L'Illustration (gigantesque), des 33 tours. Je regarde:
— Oh, un Thriller de l'époque!
— J'avais fais la queue pour l'avoir.
Il a collé de chaque côté de la photo de la pochette des photos plus petites, sans doute découpées dans Télépoche vu la qualité du papier. Je ne le savais pas un tel fan.

Par ailleurs, nous avons comme point commun sociologique d'avoir chacun un grand-père bouilleur de cru. Ceci est de l'eau-de-vie de prune.




Journée si régressive que j'ose à peine l'écrire ici: Monaco (les biscuits apéritifs) et TBBT au lit toute la journée. La version bière/canapé en pire.

Junk food

K. a un problème très particulier : sa bru (future bru, pseudo-bru) n'accepte de manger que de la junk food, de la vraie, la moins diététique possible. Il ne sait pas où les inviter, elle et son fils, pour un dîner. (Je rappelle qu'il habite Boston et ne voit pas souvent ses enfants.)

— Tout de même, à Paris, dans n'importe quel restaurant ou presque, tu as des hamburgers à la carte. Au Carpe Diem, par exemple. Et toi tu pourras en profiter pour manger autre chose.
— Malheureuse! Ce n'est pas assez trash, ça rique d'être trop bon. Elle s'est déjà mise à pleurer à Boston dans un fast-food inconnu.
— Mais c'est quoi son problème? Elle a peur de quoi?
— Je ne sais pas. De ne pas savoir ce qu'il y a dedans, de manger sans le savoir quelque chose qu'elle n'aime pas…

J'ai intérieurement froncé les sourcils d'incompréhension: si en le mangeant, elle ne trouve pas que c'est mauvais, c'est qu'elle trouve ça bon (elle ne trouve pas ça pas bon), donc où est le problème?
Aurait-elle peur de se mettre à aimer des aliments qu'elle a décrété de ne pas aimer à priori, sans les avoir goûtés?

Volos

Pas travaillé ce matin car je devais lire un article que j'ai téléchargé sur Cairn : donc comme j'étais sur mon ordinateur, j'ai surfé. Damné wifi.

Un peu d'hésitation, que faire ? Finalement ce sera Volos (avec un bêta prononcé vé), porte d'accès au Pélion, région montagneuse dans laquelle se cacha Jason. Le guide bleu nous promet un circuit d'une beauté extraordinaire, deux cent trente kilomètres sans dépasser le trente à l'heure… Nous savons aussitôt que nous n'irons pas bien loin, il est midi passé quand nous atteignons Volos.

Nous cherchons la rue "du bazar". Même si trente ans après l'écriture du guide elle a disparu, son emplacement se reconnaît à une animation certaine. Comme toujours, tous les Grecs sont en train de prendre du café (un frappe) en terrasse à l'heure de l'apéro. Ils ont sorti les pulls et les doudounes, il fait froid (18°). J'achète des collants pour éviter d'acheter un pull (si, c'est logique: en couvrant les jambes j'arrête la sensation de froid).

Nous mangeons trop, encore, dans un restaurant choisi d'après sa clientèle (des groupes de Grecs en tous genre, jeunes et vieux. Est-ce qu'ils ne travaillent jamais?) et son nom : Ouzo therapy.
Je pense avoir compris ce qu'il faut faire ici : les plats sont conçus pour que tous y pioche, il faut en commander un ou deux qui intéressent tout le monde, puis en recommander au fur à mesure, et non commander comme en France, entrée, plat, dessert. Sinon on se retrouve avec des quantités bien trop importantes que l'on n'ose pas laisser, pour ne pas gaspiller, pour ne pas vexer, et parce que c'est bon. Et lorsqu'on nous avons réussi au bord de l'épuisement à achever les plats commandés, le restaurateur grec vous achève : à l'orientale, il vous apporte, en cadeau, gratuitement, un dessert… qu'il faut manger puisque c'est un cadeau (du moins nous ne pouvons imaginer qu'il en soit autrement).
Nous commandons un café, nous le choisissons grec, bien sûr, et nous voyons notre hôte, qui a acquiescé à notre bon goût, sortir chercher deux tasses au bar à côté.

Nous grimpons quelques kilomètres du Pélion. La végétation change selon le versant des collines, verdoyante ou râpée. Nous surplombons la mer. La route est très étroite et très raide, bordée de maisons de place en place (mais pourquoi habiter là? C'est joli mais pas pratique, en hiver ce doit être terriblement dangereux quand il gèle). Le Grec reste grec et se gare en double file absolument n'importe où, à l'entrée ou à la sortie des virages, il traverse de même, et il arrive qu'il double (ce qui est plus étrange car la conduite ici est nonchalante, ce n'est pas l'Italie pressée) dans des endroits impossibles.
Je crois qu'une petite voiture jaune qui montait a dû avoir la peur de sa vie quand à l'entrée d'un virage elle s'est trouvée nez à nez avec un car ukrainien qui descendait la montagne, debout sur le frein (H. le suivait, en seconde).

Nous rentrons. Arrêt à Larissa que nous aimons beaucoup, retour dans "notre" restaurant, The Alley. Mes magasins sont fermés. Après étude, il apparaît que les magasins privés ouvrent à peu près de 9 à 14 heures. Les lundi, mercredi et vendredi, ils rouvrent entre 18 et 21 heures (c'est ce qui donne des rues si animées). Les édifices publiques ne rouvrent pas. Quelques musées ouvrent jusqu'à 17 heures mais c'est plutôt rare. Cela ressemble à Venise, la culture exige de se lever tôt. Voilà qui rend les musées quasi inaccessibles à des gens comme nous, surtout s'il y a d'abord une ou deux heures de route.
Séance de cartes postales au restaurant, en buvant un Coca pour digérer (difficile de trouver des cartes, des timbres. A Volos, j'ai photographié la queue à la poste : il y a des chaises et des tickets pour les ordres de passage).

Le soir bagages en regardant d'un œil Le surfer d'argent. C'est insupportable de nullité, même sous-titré en grec.

Piments

Télétravail. Indien à midi (pakistanais, nous dira demain le charcutier qui a son laboratoire en face et nous a vus entrer).

H. et le serveur parlent épices. Explication surprenante du serveur: «Je suis ici depuis 2003, je ne peux plus manger des piments comme chez moi, ça me rend malade. Ici, il ne fait pas assez chaud, on ne transpire pas assez.»

Je retiens qu'il ne peut pas manger aussi épicé sous nos latitudes mais je me demande si son explication est la bonne.



Nous rachetons des cigarettes. Assis sur un banc, H. regarde mon début de site sur son téléphone: «Mais il n'est pas full responsive!» s'exclame-t-il.
Dans l'après-midi je télécharge Divi d'Elegantthemes et je transforme l'ensemble. (Ce n'est pas difficile, c'est tout de même magique cette dissociation de la forme et du fond.)

J+1 Que les vegans apportent leur tupperware

Mes parents avaient prévu à l'origine de fêter leurs noces d'or avec leurs enfants (donc ma sœur et moi) et leurs petits-enfants. Nous sommes donc allés au restaurant et j'ai fait l'erreur de m'assoir en face de l'aînée de mes nièces.

J'avais déjà été agacée par ma sœur hier soir quand elle avait déclaré qu'elle était végétarienne comme sa benjamine et que l'aînée était vegan: elles n'ont donc pas mangé grand-chose. Il ne lui est jamais venu à l'idée en un an de me prévenir? J'aurais dû lui faire payer les trois repas!

Au restaurant, ça a été un festival. En résumé, elle mange vegan (donc ni lait ni beurre ni œuf ni miel, que du végétal), mais elle ne mange pas non plus cru et n'aime pas les tomates. Et elle est intolérante au gluten.
D'autre part elle est impolie, murmurant entre ses dents au serveur qui propose de lui apporter de la tarte Tatin : — comme vous voulez mais je n'y toucherai pas. (Ça lui aurait écorché la gueule (je deviens vulgaire) de sourire et dire merci et de partager autour d'elle?)

Apothéose le soir quand ma mère lui fait un plat aimé, des courgettes au riz (mais sans fromage):
— Qu'est-ce que t'as changé dans la recette mamie?
— Rien. Mais j'ai mis un bouillon cube entier alors que les proportions étaient plus petites. C'est peut-être ça… ce n'est pas bon?
— Ça va… mais il ne faudra pas recommencer.

Cerise sur le gâteau, sa sœur n'aime pas le riz. Mais quelles emmerdeuses. Ma sœur m'a ennuyée toute mon enfance avec ses lubies alimentaires, les femmes de la famille se mettaient en quatre pour répondre à ses caprices, elle a réussi à transmettre ça puissance mille à la génération suivante!

H. était scandalisé. Pour ma part, j'ai compris que lorsque ma sœur divorcée disait d'un air pénétré à propos de sa fille: «elle ne veut plus aller chez son père», c'est peut-être que lui traite ces caprices par le mépris et le rire.


Une chose est sûre : si elle vient chez moi, c'est elle qui fait les courses et la cuisine. Moi, je mangerai ce qu'elle aura préparé. Et je veux bien faire la vaisselle.

Journée interminable

Marché à Yerres. Peu de commerçants, peu de clients. Une part de bûche à la crème au beurre au café (je dois être la seule personne à aimer cela).

Tempête sur la France à partir des côtes, la deuxième (Eleanor) en deux jours (après Carmen). Nous avons convaincu A. de partir tard ce soir ou tôt demain car j'imagine mal sa voiture lutter contre des vents de cent dix kilomètres-heure.

Un convoyeur (un chauffeur payé pour cela) est venu chercher la Lexus le 29 décembre (c'était une voiture de société, H. aurait dû la rendre le 20 mais son hospitalisation l'en a empêché), nous n'avons donc plus qu'une voiture deux places à la maison. (Je n'aurai jamais autant parlé de voitures que depuis six mois. Regret de la Lexus, la meilleure voiture que nous ayons jamais eue, la plus luxueuse, la plus puissante, la plus silencieuse, la plus douce, la plus sécurisée ou sécurisante, aussi).
Dans l'après-midi, nous allons essayer et acheter une Citroën C4 d'occasion à Corbeil-Essonnes. C'est un achat raisonnable de personnes raisonnables, un achat qui me rassure en attendant de savoir ce que va donner l'entreprise d'H.

Préparation d'un repas sans gluten et sans lactose pour nos amis de Franche-Comté (c'est à cela qu'on mesure l'amitié !). Curry d'agneau, taillage de bâtonnets de légume, brocciu et roquefort pour l'apéritif.
Discussions tard dans la nuit (bien trop tard, interminable, deux heures du matin, je ne tiens plus assise, je me lève et marche de long en large, je suis la seule à travailler le lendemain) et deux bouteilles de rouge à trois, nous parlons hôpital (« ils ne communiquent pas du tout entre spécialisations ») et opérations et opération râtée et douleur (« la morphine c'est bien la première heure puis pendant trois heures tu dégustes ; ces pics deviennent intolérables ; à la fin je préférais ne pas en prendre du tout ») et consultation privée ou publique (« je lui ai demandé de m'expliquer la différence : gratuit et six mois d'attente ou cent cinquante euros dans deux semaines »). Pas de doute, nous vieillissons (« je lui ai dit "jusqu'à ce que vous m'opériez j'allais très bien", il n'a pas aimé. Mais c'était lui-même qui m'avait dit que j'étais en pleine forme »).
Architecture et aménagement du territoire, aussi : vingt millions de mètres cube de terre déblayés lors du creusement des tunnels de RER autour du grand Paris : qu'en faire ? et comment la déplacer, par camions (de vingt mètres cube), péniches, trains ?
Je propose de la donner (parce qu'ils sont pauvres) à la Biélorussie (Tchernobyl) s'ils viennent la chercher ou de la vendre (parce qu'ils sont riches) aux Pays-Bas contre la montée des eaux.

Dernier samedi de l'année

— Il n'y a plus d'anthropophage ?
— Non, on vient de manger le dernier.




Et sinon, une recette de vin chaud.
750 ml de vin rouge (Graves 2015)
50 ml de brandy (j'ai utilisé du cognac)
100g de miel
4 graines de cardamone
3 clous de girofle
2 bâtons de cannelle
le zeste d'une orange.
Amenez l'ensemble à ébullition puis filtrer. Versez sur des amandes et raisins.

Le soir encore Red en enregistrant des livres dans LibraryThing.

Noël

Et de nouveau dans la cuisine : un chapon farci aux pommes et poires poêlées (le secret c'est l'humidité de la poire).

O. me confie tandis que nous essuyons les verres (car la jolie vaisselle ne passe pas au lave-vaisselle) : « j'ai l'impression d'avoir passé les vacances dans la cuisine».
Et en effet, s'il n'y a pas plus de travaux que d'habitude, il y a nettement moins de participants. (J'aime beaucoup les scouts qui appellent « services » ce que je nomme « corvées ».)

C. repart avec mon iPad : il me le rendra en juin, après la remise de ma dissertation d'anthropologie chrétienne (à moins que je ne choisisse un oral ? Mais la professeur m'impressionne tant que je pense choisir un écrit.)

Dans la cuisine

Marché. Un chapon et deux poulardes. Le fermier (un charmant jeune homme ressemblant à Di Caprio, tandis que Juliette, la vendeuse, ressemble à Emmanuelle Béart : à croire que c'est un critère d'embauche) m'a proposé de porter mes paquets à la voiture :
— Inutile, je fais de l'aviron.

Curry d'agneau le midi, bûche au chocolat l'après-midi (pour une fois que j'ai accès à la cuisine, je fais des expériences), poulardes le soir avec des châtaignes cuites dans du miel (celui qui fait la cuisine choisit les recettes et je suis la seule à réellement aimer les châtaignes)).

H. va beaucoup mieux, la fièvre a cédé.

Confitures bis

Quatre pots de confiture :
- fruits rouges / vin chaud
- confiture de Noël
- abricots / pain d'épice
- clémentine / vanille rhum



Offerts par Matoo et Alexandre. Alex a bien compris l'enjeu d'être sur la photo des 50 ans de mariage de mes parents (lol). J'en ai profité pour glaner quelques infos sur l'organisation d'un mariage.

— Je travaille à la SNCF mais je m'occupe des gares, pas des trains. Il pourrait ne pas y avoir de trains que mon travail serait le même.

Dimanche ordinaire

Rendez-vous, donc, à huit heures et quart. Le temps est radieux. Nous sommes tous à l'heure (je le note, car la plaie, ce sont ces rameurs jamais à l'heure, ces demi-heures perdues qui m'étaient indifférentes enfant alors qu'elles exaspéraient mon père). Nous nous entraînons à tourner serré autour des piles, c'est encourageant, nous sommes ensemble. O. comprend vite.

Faulkner en podcast. J'avais décapoté hier en rentrant (seize degrés), aujourd'hui il fait plus froid et il est plus tôt (six degrés), nous ne décapoterons qu'en arrivant à Yerres.

Marché avec H.
C. à déjeuner.
Soufflé au fromage (une spécialité qui supporte mal qu'on soit plus de quatre: il faut que l'appareil puisse gonfler, il n'est pas possible de multiplier les proportions. Il me faudrait des petits moules).

Je commence le premier tome d'Auchwitz et après.

Je ramène C. au terminus du tramway à Athis-Mons. C'est curieux, un avion qui atterrit au-dessus d'un cabriolet. Lévi-Strauss en podcast. Il adoptait tous les animaux qu'il trouvait, son bureau était sale, il fallait trouver des nourritures invraissemblables. Je ne savais pas que Lévi-Strauss avait fini par ramener les structures à celles de la musique occidentale du XVIe et XVIIe siècle, considérant qu'au moment où les mythes quittaient l'Occident, leurs structures s'étaient déposées dans la musique (tout cela très schématique, voir (entendre) le podcast "une vie une œuvre" pour plus d'exactitude dans la façon de l'exprimer).

En carafe

Le petit déjeuner étant servi jusqu’à onze heures, c’est l’heure à laquelle nous quittons l’hôtel.
Détour pour aller voir au bout de la rue le restaurant Troisgros: apparemment la façade a beaucoup changé (n’a plus rien à voir) avec les souvenirs d’H.

Roanne Digoin par les petites routes. Nous arrivons aux Diligences sans avoir tout à fait le temps d’avoir faim.

C’est alors qu’H. flashe sur une bouteille de Nuits-St-Georges de 1971:
— Mais nous ne pourrons pas la boire et reprendre la route, il va en rester.
— A ce prix-là, je l’emmène!
— Mais elle va avoir chaud, dans la voiture.
Nous nous regardons.
Et c’est ainsi que nous décidâmes de prendre une chambre sur place, afin de pouvoir boire tranquillement notre bouteille, laisser s’aérer le vin — et accessoirement dîner ici ce soir.

Après-midi à ne rien faire sur le balcon de la chambre qui donne sur la Loire, au loin. je regarde les clubs d'aviron les plus proches — ils sont loin, Mâcon, Le Creusot. O. a fait remarquer que Digoin est au barycentre de Tours-Mulhouse-St-Rémy…

Au cinéma à sept heures, Coup de tête de Jean-Jacques Annaud, avec Patrick Dewaere malchanceux et charmeur. Revoir la France de 1979, se souvenir que le foot rend fou et entendre le patron d'une grosse entreprise normande qui subventionne le club local dire: «j'entretiens onze imbéciles pour avoir la paix avec huit cents». Un bon film.

Puis fin de la bouteille au dîner.

Arrivée

Petites routes du Vercors. Temps radieux. Que j'aime la France.

O. voulait du nougat, nous nous arrêtons à Montélimar. Un peu par hasard (c'est le lieu qui m'a plu, la place contre l'église) nous déjeunons à la nap'monde tenue par une ancienne Parisienne venue des îles. Elle me plaît, on dirait Bouche dorée.

Nous lui demandons quel est le meilleur nougat de Montélimar. Réponse catégorique: le nougat Soubeyran, un peu en dehors de la ville. Nous y apprendrons que deux choses ont contribué à la renommée de Montélimar: Emile Loubet et les bouchons de la nationale 7. Les fabricants de nougat avaient engagés des vendeurs ambulants qui vendaient du nougat aux automobilistes coincés des heures…

J'avais demandé à voir Grignan. Les appréciations sont partagées. C'est un beau château — de la fin du XIXe siècle, voire du XXe siècle. Mes compagnons de voyage n'ont pas aimé; pour ma part il m'a davantage fait songer à Proust (Castellane, Montesquiou, Noailles,…) qu'à Madame de Sévigné.
A dire vrai, l'extérieur du château suffit: la vue panoramique qu'on a des terrasses, l'isolement, sa domination sur le paysage aujourd'hui encore… Comme cela devait être terrible (au sens de formidable, effrayant) l'hiver au XVIIIe siècle. Madame de Grignan aimait-elle ce lieu? Il me semble que cela devait demander un fort caractère, l'amour des chevaux, des chiens ou des bonnes œuvres (le problème étant toujours de s'occuper).

Nous arrivons à St-Rémy-de-Provence où j'ai loué un gîte (c'était une surprise). Impossible d'y entrer, c'est la féria, tout le centre est bloqué. Impossible de se garer. Nous transportons les valises à dos d'homme. Présentation du gîte, mignon, en plein centre (c'était l'intérêt, dans mon idée). Une fois notre hôtesse partie, nous nous regardons avec désolation: quel bruit, quelles vacances, quelle horreur. Tristes auspices.
Nous allons dîner à Maussane, où le centre est également bloqué pour cinq jours. Consolation: Nice puis St-Etienne-du-Rouvray n'ont pas tout étouffé, les municipalités font la fête en bloquant les accès par des voitures, des camions, des buses de béton. Tant mieux.

Vers le sud

Nous sommes partis à dix heures du matin. L’idée avait été de rejoindre Roanne pour essayer de retrouver un restaurant mémorable de l’été 2001, mais de petites routes en petites routes en essayant vaguement de suivre la Loire, nous sommes arrivés à Digoin. Le premier restaurant croisé, quasi en bord de Loire, s’appelait Les Diligences. H. jure que c'est lui, le restaurant mythique de son souvenir. Je ne sais pas.
Quoi qu'il en soit, nous y avons déjeuné comme des rois. Le temps d’acheter un atlas routier au bureau de tabac (qui propose un point Nickel) sur la place de l’église (sur laquelle nichent des cigognes: leur nid déborde de la tour-clocher) et nous repartons. C’est très joli, Digoin. Sûrement froid l’hiver, mais très joli un après-midi d’été. Et il s'y trouve un cinéma à la programmation admirable, j'y note pour cet été Oncle Bernard et Le Sociologue et l'ourson, ce qui me fait éprouver aussitôt de la confiance envers les Digoinais (une ville de huit mille habitants qui programme ces titres avec succès? Yerres ne l'a pas tenté.)

Lors d’un arrêt à Ste-Catherine d’où la vue s’étend jusqu’aux Alpes (à moins que ce blanc, ce soit des nuages?) nous suivons quelques minutes de reportage sur les usines Maserati: deux mille véhicules par jour sont prévus, mais qui va donc les acheter?

De proche en proche nous avons rejoint l’itinéraire bis Valence-Marseille. Faubourgs de Vienne, nous traversons le Rhône, nous allons vers Hauterives (Facteur Cheval). Le but est de descendre le plus possible en évitant les bouchons. Je ne tiens plus assise tant la route tourne et le siège frotte sur la chair à vif. Tant pis. Je commence la Correspondance d’Hegel. Savoureux et époustouflant: les lettres Schelling-Hegel, 19 et 24 ans; Schelling envisageant d’écrire dans l’année un pendant à L’Ethique de Spinoza. La grande affaire est l’absorption de Kant: comment faire comprendre au reste de la population qu’il s’agit d’une révolution et non d’une sorte de mode déjà banalisée?

La recherche d'un hôtel s'avère compliquée: rien sur Booking qui annonce que les hôtels sont complets à 97%, un hôtel complet à Beaurepaire nous fait comprendre que les hôtels accueillent non seulement les touristes mais aussi des mariages; hôtels et gîtes complets à Hauterives; un hôtel, deux, trois, complets à Romans. L'aimable propriétaire du dernier (L'Orée du Parc) téléphone à des confrères: tous les hôtels de la chaîne Accor sont complets et il commence à être trop tard pour que nous espérions trouver ouverts des hôtels indépendants: faudra-t-il réellement dormir dans la voiture?

C'est alors qu'O. a une idée de génie: il repère sur la carte google un hôtel excentré: peut-être qu'il restera de la place? Oui, mais pas du tout parce qu'il en reste: parce qu'une famille avec trois enfants qui avaient réservé deux chambres a finalement décidé se tasser dans une seule (une suite): nous aurions téléphoné vingt minutes plus tôt, il n'y avait pas de chambre.
C'est ainsi que nous arrivons à la nuit noire à St-Jean-en-Royans. Un plat de ravioles nous attend: la cuisine fermait, la propriétaire l'a fait préparer en prévision de notre arrivée.

Départ

Sept heures : Candycrush en écoutant la radio. Allianz propose 25% de réduction de prime aux automobilistes conduisant des voitures avec système d’aide à la conduite. Le journaliste décrète que les assurances vont s’en mettre plein les poches puisque qu’il y aura moins d’accident (mais non, réfléchis: c’est justement pour cela qu’il propose 25% de réduction: parce que cela provoquera moins d’accidents); puis déplore que cette amélioration de la sécurité va provoquer des pertes d'emploi: moins d'infirmières, moins de garagistes… (je manque de m'étouffer dans mon café); et puis sans doute qu'il y aura moins de propriétaires de voitures et plus de location quand la voiture intelligente pourra venir chez vous uniquement quand vous en aurez besoin: que va devenir l'économie?
Je suis abasourdie et navrée: ainsi, nous en sommes encore là, que des journalistes sur France Inter ou France Culture souhaitent davantage de voitures et d'accidents pour faire fonctionner l'économie?

Repassage du plus urgent avant de fermer les valises. J’écoute Nathalie Sarraute (podcast de France Culture ou France Inter). Elle cite Yourcenar qualifiant le bonheur de "sous-produit". Je comprends bien ce que cela veut dire: non produit de second ordre, mais produit obtenu en outre, effet secondaire désiré et souhaitable à ne pas souhaiter en tant que tel, mais qui survient, advient, alors qu'on l'a presque oublié.

Nous partons si tard que nous déjeunons à Sens.
Il fait beau.

Etape à Bazoches car je voulais visiter le château de Vauban. Demeure habitée donc vivante, qui échappe à la mise en scène des monuments historiques. Le plus impressionnant est sans doute les quatre arbres généalogiques de la galerie où travaillait Vauban avec ses ingénieurs, l'un descendant de Saint-Louis, un autre montrant les liens entre les actuels propriétaires et leurs différents cousins. Je découvre à cette occasion que les propriétaires de ce château possède également celui de Cheverny à quelques kilomètres de chez mes parents (ce qui à la faveur d'une homophonie patronymique occasionne à la maison quelques coups de téléphone mal aiguillés.)

Persuadé (à tort) que l'hôtel du Lion d'or à Vézelay est celui de La Grande Vadrouille, H. insiste pour que nous y dormions, ce qui me convient tout à fait: c'est ainsi que je peux visiter (très vite, très discrètement, c'est l'heure de l'office) la basilique de Vézelay dans la lumière de fin d'après-midi.

Nous dînons à l'hôtel du Cheval blanc (ces noms d'hôtels… de quoi réjouir Nabokov). Surprise en ouvrant la carte: le chef a passé son exaspération en écrivant une page qui nous apprend qu'une directive européenne rend obligatoire de prévenir les clients des produits allergènes contenus dans les plats. Il proteste en faisant remarquer que tout allergique normalement constitué avait auparavant le bon sens de poser la question au garçon…
Voilà qui éclaire un mystère: je me demandais pourquoi tant de gens qui "mangeaient de tout" (selon la terminologie de l'enfance) devenaient soudain intolérants (terme révélateur) à ceci ou cela : cet avertissement m'a fait comprendre que c'est tout simplement qu'on leur fait se poser une question qu'ils ne s'étaient jamais posée.
Pour le reste, le dîner est excellent.

Un témoin du passé

Vu la fille de Philippe F., un collègue de travail de 1998-2001. Elle est passée au bureau me dire bonjour de la part de son père qui avait repéré que je travaillais dans le même immeuble que sa fille et nous avons évoqué des souvenirs. C'est étrange, elle connaît tout le monde alors qu'elle n'avait que douze ans à l'époque. Philippe devait beaucoup parler de la boîte à la maison. Il est vrai que c'était magique. Il est rare que je passe une semaine sans penser à quelqu'un de cette époque, ne serait-ce qu'à cause du célèbre «Connerie!» qu'assénait Jean-Baptiste en réunion devant les consultants qui encadraient le projet… (Il faisait plus d'un mètre quatre-vingt-dix et c'était très impressionnant — et plutôt satisfaisant — de le voir proclamer «Connerie!» de toute sa hauteur.)

Philippe, lui, c'était «Osons!» qu'il prononçait en saisissant son crayon à papier pour noter quelque idée iconoclaste ou décision joyeuse et inattendue, et que je prononce parfois in petto pour me donner du courage. J'en ferais bien une devise — j'en ai peut-être fait une devise.

Nous avons au fond du jardin une Opel qui moisit que Philippe nous avait donné pour que les enfants jouent dedans et avec. Sa fille était venue à la maison lorsque son père nous avait amené la voiture, elle se souvient de mon bœuf aux rognons: elle est donc l'une des dernières témoins de ma cuisine, avant que j'arrête de toucher aux casseroles.

Gourmandise

Une "crêpe au Nutella" à parti d'une galette de sarrasin de la veille et de la pâte à tartiner Vauché.

Dernière visite

Lowell
Bagel banana peanut butter (pure curiosité) - Brewd Awakening Coffeehaus. chaudement recommandé. Le meilleur des ginger apple.
Marketecture : l'art de nommer. Ça marche très bien avec moi. Un sandwich nommé Spicy Capitalist.
Restaurant de jazz.

Journée grise

Matinée à l'hôtel encore (après un petit déjeuner somptueux), H. est en rendez-vous. «Ce matin je vois Happy Potter», m'annonce-t-il au petit déjeuner. Je suis un peu surprise, mais après explication, il s'avère qu'il s'agit d'"un pipoteur". (Finalement non, (ou peut-être, mais il le cache suffisamment pour faire bonne impression), et la réunion sera prolongée).
Même routine qu'hier (après avoir vérifié que je n'ai pas le temps en son absence de monter jusqu'au cimetière du Bronx où est enterré Melville), en son absence je range tout ce que je peux et me remets devant l'ordi (c'est tout de même un grand plaisir de pouvoir écrire et surfer, d'avoir du temps pour cela, même si cela paraît stupide de le faire à New York: autant rester chez soi (mais non, ce n'est pas tout à fait vrai, pensé-je en regardant le mur de briques en face et les cubicles vides à travers les fenêtres (hier les bureaux étaient animés, aujourd'hui personne)). Il pleut, il bruine. Je commence Poésie du gérondif. L'auteur a beaucoup d'humour, et sur le fond, c'est fascinant. «…l'une des leçons qu'on apprend à force de fréquenter Internet, c'est qu'aucun cinglé n'est seul de son espèce» (p.13)1.

Visite du musée du métro et trains de banlieue (ce n'est pas au 130 rue Livingston, mais à l'angle de la place Boerum et de la rue Shermerhorn: l'entrée ressemble à une entrée de métro (signalée par les habituelles boules vertes), normal puisque c'en est une: une ancienne station de métro transformée en musée (mais pourquoi ne change-t-il pas l'adresse sur le site internet? au 130 se trouve les bureau de la MTA (équivalent de la RATP), et ils ont dû être si souvent dérangés que deux petites plaques gravées sont collées sur les vitres indiquant la véritable entrée. Incompréhensible.)

C'est le paradis des enfants et une grande bouffée de nostalgie. Je me demande si un jour quelqu'un trouvera jolis nos wagons, comme nous trouvons jolies les voitures du début du XXe. Possibilité de s'offrir des boutons de manchette frappés du Y des anciens jetons qui servaient de billets d'entrée jusque dans les années 80.

Exposition sur les crises: septembre 2001, bien sûr, août 2003, où les gens étaient si soulagés que ce ne soit qu'une coupure de courant qu'ils sourient tous largement, ouragans Irène et Sandy. En fait le métro vit des situations de crise très régulièrement et accumule de l'expérience: prévoir des camions-batteries surper-puissants (en 2001, l'une des tours qui s'est écroulée fournissait de l'électricité au bas de Mahattan), prévoir un circuit téléphone de secours (des talkies-walkies appelés téléphones aller-retour ou téléphones va-et-vient, je ne sais comment traduire mot à mot), prévoir des lampes-torches pour chaque conducteur (400 000 personnes évacuées en trois heures en 2003. J'ai pensé à l'incident sur le RER A2. Nous ne sommes pas très préparés. H. m'assure qu'il ne peut y avoir de telles coupures d'électricité à Paris, que la structure de nos équipements n'est pas la même.)
Je retiens que le grand ennemi, le monstre qui menace, c'est l'eau: par temps sec, le métro pompe et refoule 93000 gallons d'eau par jour. En août 2003, le plus gros risque fut l'interruption des pompes.

Encore une exposition qui donne envie de devenir ingénieur. Une ode aux héros du quotidien, aussi, à tous ceux qui apprenant la catastrophe mettent leurs chaussures et retournent à leur poste sans attendre d'être appelés.

Paradis des enfants : volants, moteurs, manettes, ils sont invités à manipuler tout ce qui se trouve à leur portée. Avec cette conséquence, qui nous a beaucoup plu:



En sortant, nous décidons d'en profiter pour traverser le pont de Brooklin. Il fait anormalement doux, c'est extraordinaire (trois pieds de neige l'année dernière à la même époque, a dit le taxi à H. ce matin). Une soupe et un sandwich dans un Potbelly (c'est le nom d'une marque de poêle qui a réchauffé des générations de familles américaines). Je suis amenée (tant mieux) à me dire que j'ai écrit n'importe quoi il y a deux jours: on peut manger très bien dans des établissements sans prétention. Le problème de Philadelphie, c'est qu'il s'agissait d'adresses pour "repas d'affaires", donc prétentieuses.
Une affichette en devanture illustre les rapports bien compris entre clients et fournisseurs (le reste de la déco était très plaisante, variation sur des vues de New York enfui).


Entrez manger avant que nous ne mourrions de faim tous les deux.


Traversée du pont. Il bruine. One World Trade Center disparaît dans la brume. Aucun intérêt de monter si haut. Un paquebot au loin, les navettes de touristes qui longent le bas de Manhattan tristement désertées. La statue de la liberté paraît toute petite.
De l'autre côté du pont se trouve le bâtiment le plus laid que j'ai jamais vu: le Manhattan Municipal Building, quelque chose qui évoque Brazil et l'Union soviétique. Au secours! (De façon générale, cette ville est très laide. Très vivante mais très laide).

Retour à l'hôtel où nous avons laissé nos affaires. Nous allons déménager, à partir de maintenant l'hôtel n'est plus payé par l'entreprise d'H., nous allons descendre en gamme (c'est l'agence de voyage de l'entreprise qui a choisi cet hôtel luxueux dans le bas de Manhattan: à partir de maintenant nous ne dépendons plus que de nous). Je photographie une peinture murale à deux pas.



Une bassine de café latte plus tard, nous partons pour notre nouvel hôtel dans la 35th. La chambre est très jolie, mais elle s'avèrera terriblement bruyante.
Dîner au Coréen d'en face (Han Bat 53W, 35th St. W 35th St, c'est la rue des Coréens, c'est à peine si les menus sont traduits en anglais. Pratiquement que des Coréens comme clients). Je mange une marmite en fonte brûlante de riz aux crevettes et à la pieuvre (haemul dolsot bibimbap). Le garçon désespéré me voyant pêcher timidement du bout des baguettes quelques crevettes à la surface de ma marmite intervient: «c'est mon plat préféré» et il me montre comment mélanger le tout avec vigueur avec la cuillère plate qui accompagne les baguettes: la fonte est si chaude qu'elle fait frire le riz qui craque sous la dent. C'est effectivement très bon. Je découvre un goût inconnu, quelque chose entre la rose et la violette. Aucune idée de ce que c'est. H. suggère que c'est l'huile de cuisson qui est parfumée. Mais à quoi?


Notes
1 : Cela me rappelle la triste histoire de la baleine solitaire. J'aimerais tant apprendre qu'elle en a croisé une autre ayant la même anomalie.
2 : 2012… Je n'imaginais pas que c'était si vieux. Je me demande s'il y a un rapport entre la commission d'enquête évoquée en fin d'article et les travaux qui ont commencé cet été et vont durer sept ans.

Jetlag

Cinq heures du matin. Bien réveillée. Aujourd'hui, H. a un rendez-vous à neuf heures à Philadelphie, puis un à trois heures à New York. Mercredi nous rejoindrons Boston.

Je surfe un peu pour trouver des idées. La plus grosse difficulté pour nous est de trouver des endroits qui nous conviennent pour les repas. Nous sommes atrocement difficiles, tout nous paraît trop sirupeux et trop sucré. (H. m'a beaucoup fait rire en me racontant que le deuxième ou troisième soir à l'hôtel, il avait expliqué au serveur comment faire cuire un steak. Le serveur a appelé le cuisinier qui est venu à la table, H. lui a expliqué: du beurre, du sel, du poivre, ET C'EST TOUT. «Parce que tu comprends, un steak Angus, noyé dans la sauce Worcestershire, c'est quand même dommage. (Pauvre bête, Astérix1.)». Je me demande si le chef a essayé pour lui-même, une fois rentré chez lui. Je me demande si ce goût de la chose elle-même est communicable, une fois qu'on a grandi dans les sauces et le sucre.) Ce qui nous fascine, c'est la façon dont ils confondent sophistiqué et bon.
Ça me navre, j'aimerais tant tout aimer, mais leur cuisine, à part le petit déjeuner (pancake, sirop d'érable, œufs brouillés, bacon: je me couche en me réjouissant de petit déjeuner le lendemain), j'ai du mal. Ah si, et les salades, ils ont un art de la salade composée que nous ignorons totalement en France, en rajoutant des ingrédients inattendus (ce qui ne marche pas avec le cuit fonctionne bien avec le cru).

Bref, je surfe. La dernière fois nous n'avons pas visité la statue de la Liberté en travaux, ni le One World Trade Center qui n'était pas terminé. Ça me paraît très cher, mais une fois ici, on ne va pas pinailler.

Deux blogs de Françaises, une à Boston, une à New York: Mathilde et Jane (avec des adresses de resto).

Deux à Philadelphie, mais à part la la Barnes fundation, nous n'avons rien fait. Ce n'est pas très grave. Un jour je ramerai sur la Schuylkill (ou le Delaware).

Et bon anniversaire, Vincent.


Note
1: — Et si vous échouez, je vous livre aux lions, bouillis dans de la sauce à la menthe!
— Pauvres bêtes, Astérix.

Skiff bleu ciel, confiture de tomates vertes et terrine de queue de bœuf

Le skiff a été réglé pour ma morphologie, cela me fait infiniment plaisir. L'aviron me sert de psychanalyse, un peu. Il y a "des choses" qui remontent et qui sont consolées. C'est comme si j'avais droit à une seconde chance, ce qui n'arrive pas souvent. (Par ailleurs j'ai commencé Comment faire rire un paranoïaque, ce qui doit m'influencer. Ce que je lis teinte mes journées.)
Soleil poudré sur la Seine, magnifique.

Sonné chez les voisins à 22h16: pas de carottes pour la queue de bœuf. Heureusement 1/ ils ne dormaient pas encore 2/ ils avaient des carottes.

Confiture en pots. Trop liquide à première vue. Je l'ai faite au citron, d'habitude (avant ce blog, avant 2006!) je la faisais à l'orange: je crois que je préfère. Il faudra que je cherche ma recette. Je ne sais pas si je l'ai encore.
Ce que j'aime dans cette confiture, c'est sa couleur.

Mon autre recette fétiche, c'est la pâte de coings, mais je n'ai plus le courage d'éplucher les coings.

Retours au bercail

Onze heures. Tout le monde dort. J'ai le temps d'aller au marché.

Midi et demi. SMS de C. qui annonce qu'il arrive (après une semaine d'absence). J'ai passé mon temps sur FB, je ne suis pas allée au marché. J'envoie en réponse «Ne te presse pas, il n'y a rien à manger.» O. commente: «Mais enfin, c'est C., il a grandi à la maison, il sait comment c'est. Ne stresse pas comme ça.» (Nous finirons au restaurant. Très bon d'ailleurs, ouvert depuis huit mois, nous n'avions pas testé. Il risque de nous revoir souvent.)

O. reprend la voiture pour la première fois depuis trois semaines. Nous sommes convenus qu'il me décrit ce qu'il voit au fur à mesure afin que je ne passe pas tout mon temps à lui dire de faire attention dans la crainte qu'il n'ait pas anticipé… (je suis déjà une passagère stressée, et ici s'ajoute une dimension de défi: comme H. est contre la conduite accompagnée, si O. abîme la voiture, j'aurais droit à un soupir entendu (si c'est grave) ou un «je t'avais prévenue» (si ce n'est pas grave): je n'en ai pas envie)).

Nous dînons sans attendre A. qui arrive de Lisieux le jour de l'année le plus chargé en terme de trafic routier. Elle arrive à onze heures (entretemps, O. et moi aurons connu une défaite sans appel à la belote, écrasés par les mains insolentes d'H.), bronzée et joyeuse, avec son chat qui mange désormais des croquettes light (WTF?)

La guerre du Nutella

Courses pour la première fois depuis une éternité. Il n’y a plus rien, nous avons même réussi à mettre à sec la réserve de pâtes. (Heureusement, Juliette n’a pas vu mes knackies).

V'là-t-y pas que Ségolène Royal explique qu'il ne faut pas manger de Nutella. Après les voitures qui bipent quand vous ouvrez la portière, les mecs qui pourraient être vos fils qui vous expliquent comment monter dans un RER («veuillez avancer dans les couloirs», «ne marchez pas derrière la ligne»), la ministre qui t'explique ce que tu dois manger.





Ne pas oublier : le Nutella, c'est le mal.
Et moi, inévitablement, de penser comme souvent aux Animaux malades de la peste:
Au dire de chacun, étaient de petits saints.
L'Ane vint à son tour et dit : J'ai souvenance
Qu'en un pré de Moines passant,
La faim, l'occasion, l'herbe tendre, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net.
A ces mots on cria haro sur le baudet.
———————————
Agenda
Train pour Lisieux le soir.

Wörlitz

«On me réveille, on m'emmène, on revient, je me douche, on part à l'opéra, on revient, je me couche, et le lendemain ça recommence.»

En chemin pour Wörlitz, nous nous promenons dans les jardins du château d’Oranienbaum. De grandes serres sont réservées à la culture des orangers et des citroniers. Ces serres sont des granges dont les parois sont composées de petits carreaux vitrés. De grands volets en bois permettent de protéger du froid ou d’un soleil trop fort.

Les jardins de Wörlitz sont des jardins à l’anglaise dont l’art consiste à dérober leurs surprises au promeneur pour les lui présenter au hasard de trouées habilement disposées dans la végétation.
C’est le printemps, il fait frais à l’ombre et chaud au soleil, les rhododendrons et les lilas sont en fleurs (toute la région est couverte de lilas), les couvées des cygnes sont écloses. Des barques passent avec huit ou dix passagers et un seul rameur, musclé. La table est mise, ils déjeunent sur l’eau (apparemment, les participants du colloque Wagner sont en goguette).
Ce paysage serein recélant des trésors est très apaisant, que l’on ait représenté le paradis sous forme de jardin devient une évidence.
(«— Qui eut cru que le paradis se trouvait en Allemagne? — Qui plus est en DDR.»)


Île Rousseau


P. est déçu: les dépliants indiquaient que l’exposition Cranach dans l’une des demeures du château (une demeure de brique ornée d’arêtes blanches soulignant des formes ogivales) commençait aujourd’hui; en fait, l’ouverture (avec cocktail, supposons-nous) a lieu à quatre heures: trop tard, Siegfried commence à cinq heures à trente kilomètres de là.
Nous profitons de la durée ainsi libérée pour déjeuner, le premier vrai repas depuis vingt-quatre heures. La serveuse a l'air enchantée que nous trouvions les plats excellents. Les gens sont généralement très gentils et prévenants, cherchant à comprendre notre sabir qui mélange inconsciemment anglais et allemand (l'allemand me revient plus spontanément que l'anglais, me semble-t-il).

Nous arrivons un peu plus tôt qu'hier pour un Siegfried qui boit des canettes et joue aux jeux vidéos (à Skyrim, nous dit A). Mime joue à Tetris («et il avait du mal», commentaire de la même A.).

Trois Lillets aux fruits des bois.
Nous avons enfin découvert comment dîner après le spectacle: il suffit de descendre sous le théâtre. Saucisse et salade de pommes de terre, un repas plaisant en forme de cliché.

RTFM

(Read the Fucking Manuel)

Soit un siphon pour faire de la crème chantilly (modèle recommandé par un professionnel).
Précision importante :
3. Ne pas remplir la cuve du siphon au-delà de la capacité indiquée sur le fond de la bouteille: pour 0,25 litre 250 ml maximum, pour 0,5 litres 500 ml au maximum et pour 1 litre 1000 ml maximum.

La fabrique des machos — où comment élever des assistés

Séjour de quatre jours (enfin, deux plus deux moitiés) de camping dans la neige pour le plus jeune.

Lever six heures pour rendez-vous à sept heures. Arrivés au local scout, personne. Coup de fil: le rendez-vous a été décalé d'une heure et O. n'a pas vérifié ses mails.

Une heure plus tard, je dépose O. en hésitant un peu à descendre de voiture, je me demande si j'enlève mon chapeau: et puis non, assumons, allons-y. Comme prévu, les autres mères me regardent un peu, mais tant pis.
Nous attendons un bon moment que les enfants aient fini de charger les deux camionnettes et la remorque. Nous discutons. Une fois de plus je suis intérieurement abasourdie de la façon dont les mères élèvent leurs garçons, la façon dont elles les surprotègent et font tout pour eux (il s'agit d'enfants de seize ans).

L'une d'entre elles m'assure que «les filles, c'est plus facile.» — Euh non, différent, mais pas plus facile, réponds-je. Mais je vois bien qu'elle ne me croit pas. La même trouve que l'autonomie du scoutisme ne se transmet pas beaucoup à la maison, «qu'elle a presque davantage confiance dans sa fille de huit ans». Je n'ose répondre que cela dépend aussi de ce qu'on demande aux garçons, je n'ose expliquer que les miens font quatre-vingt pour cent des repas quand leur père n'est pas là (oui, bon, je ne fais pas la cuisine, mais on s'amuse bien. Ça compense, non?).

Repas

— Sans moi vous n'auriez pas eu de dinde.
— Mais avec toi, on était sûr d'en avoir une.

Changement civilisationnel

Se rappeler que c'est à l'automne 2014 que la purée est devenue "écrasé de pommes de terre" (sur tout le territoire puisque Hervé l'a vécu à Mulhouse tandis que je le vivais à Sauternes, et qu'il me semble que ce fut le cas fin septembre au Bouillon Racine.)

Chip, Tom et Bob

Ce sont réellement leurs prénoms, ou du moins ceux que j'ai toujours entendus, même si je suppose que cela doit cacher un Charles et un Robert. Chip est le mari de Ruth, Bob de Jane et Tom de Lucy. Elles sont sœurs, ils sont beaux-frères.

Ils viennent de passer trois semaines en France sur les champs de la bataille de la Grande Guerre. Ils doivent rentrer samedi aux Etats-Unis — si Air France les y autorise (j'ai un peu honte).
Nous devions les voir avant leur départ, nous les avons invités au Bouillon Racine. Inévitablement ils prennent du foie gras. Je n'ai jamais rencontré d'étranger partageant aussi naturellement les valeurs de douceur de vivre et de gastronomie françaises que Chip. C'est un plaisir de lui conseiller de prendre son petit déjeuner en terrasse aux Deux Magots (qu'il voulait absolument voir) à huit heures du matin au mois d'août pour sentir le vrai Paris s'étirer au réveil ou de lui faire prendre "des risques", comme manger du confit de canard, par exemple… (je sais, je sais… il garde un souvenir impérissable de la fois, il y a bien lontemps, où je l'ai convaincu d'essayer une viande autre que le poulet ou le bœuf, soit le fameux confit de canard. Je suis heureuse de les avoir invités, lui et Ruth, au pub Renault du temps où c'était encore le pub Renault, avec compartiments de train et service par un maître d'hôtel (conversation en commentant le décor Art déco du Bouillon Racine: je lui apprends que le pub Renault tel qu'il l'a connu n'existe plus)).
Cette fois-ci je l'entraîne à manger une canette aux griottes, ce qui est plus exotique. Notons au passage que je découvre qu'aucun des trois ne sait que la viande de porc doit toujours être très bien cuite, pour éviter d'attrapper des parasites (ils s'attendaient à ce qu'on leur demande "quelle cuisson?" pour cette viande-là aussi).

Nous discutons presque à bâtons rompus, pas si simple en anglais avec notre accent, la fatigue et le bruit. En quittant le restaurant, détour pour voir la Sorbonne .

La France, son vin, ses fromages, ses grèves (je leur cite Bruce Willis John Malkovich dans Red 2, «Vous venez souvent à Paris à cette époque? — Oui, pour la pluie et les grèves», ils rient). J'espère tout de même qu'ils n'auront pas trop de problèmes pour rentrer chez eux.

Agenda

- encadrement de débutants à midi. Toujours peur d'être considérée trop sèche, j'ai peur de faire peur.

- bu du lait salé turc au Libanais où je mange ensuite. Comme du yaourt bulgare nature très liqueide et très salé. Est-ce cela qui m'a assommée? En tout cas c'est très nourrissant.

- fini de pointer les deux portefeuilles de titres. (Suivi artisanal sur Excel : comme il y a eu des dizaines de ventes et d'achats pour des plus-values de 1,08 euro et des erreurs de la banque, c'est la troisième fois que je m'y attelais.) Quelle galère pour pas grand chose. Mais c'est un peu comme le farming, on est content parce qu'on arrive au bout et que c'est gratifiant.

- C'est la rentrée, les gens sont pleins de bonnes résolutions et ils lisent : Stevenson et son âne le matin (le jour se lève, 7h15), Sanctuaire le soir (grand soleil, 18h30).

De Fra Angelico à la dogmatique

Eglise Saint Marc à deux pas de l'hôtel, tôt le matin. Saint Antonin puis le cloître et le miracle renouvelé des fresques cellule après cellule (mais déjà avant cela les tableaux de Fra Angelico au rez-de-chaussée). Visite calme, peu de public. Contraste de la modestie des bâtiments et les gouttes d'éternité spatiale et temporelle apportées par les fresques, univers mental et passionné qui déjoue l'enfermement entre les murs.
Il fait frais, il y a eu un orage cette nuit. Cellule de Savonarole, cellule de Côme. La cellule de Fra Angelico est la 33 (les numéros se lisent à demi effacés sur les portes).
La boutique se trouve dans l'ancien réfectoire, magnifiquement décoré par une fresque de Fra Angelico représentant la Cène. Je trouve enfin des cartes postales à la mesure du lieu, reprenant pratiquement chaque détail vu (ce voyage à Florence entérine la fin de la correspondance manuscrite: pas de carte postale, pas de carte postale de Côme pour une amie qui a appelé ainsi son fils, pas de carte postale des fresques de San Miniato, et pas de boîte aux lettres non plus, si peu et si peu visibles que je laisse les cartes non encore postées à la réception de l'hôtel).

Déjeuner à Eataly parce que le nom plaisait à H. C'est en fait un supermarché entièrement dédié non pas à la nourriture, mais à la cuisine: légumes, semis, vins, confitures, condiments, viande, fromages, livres de cuisine, instruments de cuisine, (mais aussi produits ménagers bio), bar pour manger rapidement, table pour manger un peu moins vite, un fast-food entièrement dédié à la cuisine italienne, le tout dans un décor très moderne, blanc, bois et verre. Je n'en reviens pas que ce concept ne soit pas déjà présent en France avec la sorte de délire actuel autour de la cuisine depuis les MasterChefs.

Car pour Pise à 14 heures, départ de l'avion à 16h30, spritz à Paris (caffé la Comédia dans le 14e), cours à 20h30. Introduction à la Dogmatique. Je suis un peu ennuyée de ne pas voir mon nom sur la feuille d'émargement, j'espère que ma feuille d'inscription n'est pas perdue car je ne me souviens pas exactement de ce que j'avais choisi comme langues. Nous sommes très nombreux (une quarantaine) puisque nous rejoignons les élèves de cinqième année (Ecclésiologie) en sautant la quatrième année (Christologie) (nous ferons la quatrième l'année prochaine avec les élèves actuellement en troisième année (Nouveau Testament): avantage pour la Catho: elle économise cette année le coût de la quatrième année qui n'a pas lieu).

Zoologie et botanique

J'ai téléphoné à A-C, j'ai téléphoné à ma mère.

Appris à cette occasion que les tortues (terrestres) mangeaient les limaces et les escargots (coquille incluse: «Ça doit être bon pour elles, ça leur apporte du calcium.»
(Elle a deux jeune tortues terrestres — ce qui est illégal, je crois, l'espèce est protégée. Mais protégées par ma mère, elles ne craignent rien, si ce n'est un excès d'équilibre dans leur régime alimentaire.)

Fait des beignets d'acacias pour la deuxième fois depuis les débuts de ce blog. Un peu déçue, ils n'étaient pas très parfumés.

Cuisine

Deux kilos d'oignons et huit poivrons en petits cubes. Cela prend des heures.

Capitaine América: j'ai cru retouver le grand inquisiteur: l'idée que les hommes trouvent la liberté trop lourde à porter et sont prêts à l'abandonner contre la sécurité, mixée aux avertissements de Docteur Folamour.
Cela arrive souvent de retrouver ainsi des transpositions des problématiques de grandes œuvres dans des œuvres grand public. Je suis toujours impressionnée de voir les œuvres américaines poser aussi clairement les questions de fond (manichéen, certes, mais au moins c'est clair): liberté ou terreur? (et ce, sans exposer les avantages de la liberté: en supposant simplement que l'aspiration à la liberté va de soi, ce qui n'est pas faux, mais est-ce si évident pour tous et à tout moment? Pas sûr).
Pour le reste, le film est plaisant, même si Steve Rogers n'est pas mon type.

Anomalies domestiques

Après les journées rangement, j'avais pris une journée pour faire le ménage.

Tant mieux, puisqu'à quatorze heures H. me téléphone de Tours pour me dire qu'il sera là ce soir avec un collègue et que le collègue dormira à la maison parce qu'il n'y a plus une chambre d'hôtel de libre dans la région parisienne.
Dans un monde normal, le collègue (subordonné) aurait pris le train tôt demain matin.
Nous ne sommes pas dans un monde normal.

Bon, je vais de ce pas cuisiner une pintade au chou.

Mercredi

Peu de choses à raconter. Commencé et laissé tomber un billet destiné à démontrer que la nationalisation, c'est le mal. Casino royal encore[1]. Une purée mousseline ratée (pas par moi), c'est vraiment mauvais mais c'est une source de rires inextinguibles.



Dans mon sac, le matin (je pensais passer à la bibliothèque Mouffetard, puis j'ai changé d'avis):

Platon,Le Banquet et Phèdre, GF 1964 (traduction E. Chambry)
Léo Strauss, Sur une nouvelle interprétation de la philosophie de Platon (à rendre rue Mouffetard)
Friedrich Nietzsche, Introduction à la lecture des dialogues de Platon (à rendre rue Mouffetard)
Yves Courrière, Sur la piste du lion (à rendre à la bibliothèque du CE)
Jean Barraqué, Debussy, (à rendre à la bibliothèque du CE)
Aglaïa, autour de Platon. Mélanges offerts à Monique Dixsaut (à rendre)

Le soir:

Platon,Le Banquet et Phèdre, GF 1964 (traduction E. Chambry)
Léo Strauss, Sur une nouvelle interprétation de la philosophie de Platon (parce que j'irai à Mouffetard vendredi)
Friedrich Nietzsche, Introduction à la lecture des dialogues de Platon (parce que j'irai à Mouffetard vendredi)
Jean-Marc Potdevin, Les mots ne peuvent dire ce que j'ai vu (rendu par Patrick)
Leonardo Sciascia, Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel (offert par Patrick)
Aglaïa, autour de Platon. Mélanges offerts à Monique Dixsaut (je voulais le laisser au bureau en attendant de passer à la bibliothèque, mais j'ai prolongé le prêt à distance).

Notes

[1] Bond sort de l'eau comme Bo Derek Ursula Andress. La musique utilisée durant les scènes romantiques de la dernière partie vient d' Out Africa, ce qui pour moi court-circuite le film.

Palpitant

L'événement palpitant de la journée doit être que j'ai fait la sieste.

Et je ne comprends rien aux quelques pages de Rahner que je dois lire.

Ah oui, et nous avons mangé du maïs doux avec les piques achetées au musée de Philadelphie (épi encore dans leurs feuilles (pas trop de feuilles) cinq minutes au micro-ondes).

Cours

Un peu décroché au milieu des atomistes. Il est possible que le feuilleté à la saucisse de Meurteau et l'excellent verre de Bourgogne ingérés avant y aient une part de responsabilité.

Boire ou étudier. Dormir ou bloguer. Fumer ou ramer. Quelques choix parmi d'autres (et pendant ce temps, lire Hadot, la philosophie comme mode de vie (et non comme discours) et la sagesse comme idéal).

De Baltimore à Philadelphie

Première réveillée, je tape sur mon blog le plus longtemps possible. Comme tout le monde se plaint d'être fatigués, je laisse dormir. De toute façon, de moins en moins de choses sont prévues pour la fin du voyage, deux visites à Poe à Baltimore et Philadelphie, et finalement une rencontre avec un vieil "ami" Facebook, de l'époque où Gunther intervenait beaucoup, je pense (aujourd'hui, je n'accepte plus beaucoup d'amis totalement inconnus). Il restera un Australien et Red Shuttleworth à rencontrer.

Hier soir, nous avons donc dépassés Baltimore d'une dizaine de miles. J'insiste pour faire demi-tour et aller sur la tombe de Poe.
La highway est mauvaise, les voitures en mauvais état, tout est miteux et pauvre. Les maisons sont basses, d'un seul étage, mitoyennes, à l'anglaise ou comme dans les corons. Pas de végétation. Nous passons dans un quartier grec (panneau indicateur à l'appui), approchons de la ville.

«This year thousands of men will die from stubbornness.» J'aime bien cette pub sur le bord de la route rencontrée pour la première fois en quittant les chutes du Niagara (c'est en fait le nom de la ville, Niagara Falls).

Parking. Galerie marchande. La première enseigne que nous voyons est un Cheesecake factory:
— Regarde, comme dans Big Bang Theory!
— Quoi? De quoi tu parles?
— Mais si, tu sais bien, c'est l'endroit où travaille Penny.

Et comme il est onze heures et demie, nous déjeunons dans un Cheesecake factory sur le port. En face de nous se trouvent des pédalos, dont de merveilleux pédalos en forme de dragons. Nous déjeunons (très bien) en décidant qui feraient du dragon (quatre places) et qui pédaleraient (deux des quatres places).





Hélas, tous nos plans minutieusement élaborés tomberont à l'eau (ou plutôt pas) car la passerelle d'accès nous sera fermée au nez: le bateau à moteur (celui qui justement aurait dû nous récupérer si nous tombions à l'eau) est en panne. Déception.

Dans notre dos, l'immeuble de The Examiner: — Ah tiens, c'est le journal de la fin du Diable s'habille en Prada.

Nous partons pour la tombe de Poe, guidé par l'iPhone.
— Le cimetière devrait être ici.
Je suis arrêtée à un feu rouge. Hôpital en diagonal à gauche, hauts immeubles massifs (nous sommes en plein centre ville), briques rouges à droite, briques rouges à gauche.
— Mais si regarde, c'est une église, le cimetière est autour!

C'est minuscule, en plein cœur de la ville, exactement l'inverse du cimetière découvert hier soir dans mes phares. Cette situation a elle seule valait le détour. La tombe se situe tout de suite à l'entrée, sorte de monument plutôt vilain. Poe la partage avec sa femme Virginia et sa tante qui l'avait accueilli quand il s'était fait renvoyé de West Point. Mais en avançant dans le minuscule cimetière envahi de lierre (très joli contre la brique rouge), nous découvrons tout au fond la première tombe de Poe, à côté de celle de son grand-père. Celle de l'entrée a sans doute été érigée quand Poe est devenu connu.

Etape suivante, la maison de Poe, ou plutôt celle de sa tante. Maintenant je veux la voir, je veux voir sa situation même si selon internet elle sera fermée (mais après tout, nous ne sommes pas "à l'abri d'un coup de chance"). Ce qui m'intrigue (ou plutôt ce qui me laisse présager de ce que nous allons voir) ce sont les dernières lignes du site donnant des indications de lieu: «Note: Use caution when parking in an urban environment. Common sense dictates that you lock your car and keep any valuables out of sight» (Soyez prudents quand vous vous garez en environnement urbain. Le bon sens recommande de fermer sa voiture et de ne pas laisser d'objets de valeur en vue): c'est évidemment toujours vrai, mais habituellement on ne l'écrit pas.

Effectivement, en s'éloignant de la tombe, nous quittons très vite les hauts buildings administratifs. Maisons basses mitoyennes comme elles sont de règle ici, quartier noir, pauvreté (mais pas de tags ou de vitres cassées, ce n'est ni sale ni délabré; c'est pelé sous la chaleur, personne ou presque dans la rue, pas de végétation sauf de l'herbe trop haute dans les arrières-cours, cela donne un sentiment de solitude, d'éloignement, comme si l'on avait glissé dans une autre réalité. A quoi tient une impression d'opulence? A quelques coup de pinceau, des rideaux aux fenêtres, un air pimpant dont je n'arrive pas à déterminer la cause.)

La maison est à un angle de rues, face à un terrain vague. C'était donc la maison de la tante de Poe, minuscule si l'on compte qu'au moins quatre personnes y vivaient (la tante, sa fille et sa mère, Poe). Personne dans les rues, des voisins bruyants se disputent dans une maison mitoyenne, porte ouverte (il fait très chaud). Briques rouges.
Fermée.

Nous partons pour Philadelphie.
Pour une fois nous arrivons tôt, nous prenons un motel à quatre heures de l'après-midi à Essington, près de l'aéroport. (Deux jours: nous n'aurons pas à faire et défaire les valises demain matin, cela repose). A. et O. préfèrent rester ici, nous partons faire un tour à Philadelphie avec Déborah.

Surprise, Love de Robert Indiana au détour d'un buisson, sur une place.
Nous errons, achetons une carte mémoire pour appareil photo dans un magasin indien dont un mur entier est tapissé de boîtes de bâtons d'encens et un autre de bouteilles d'essence de parfum (la mémoire de l'odeur me prend à la gorge); dans une vitrine des poudres de perlimpimpin pour bander plus longtemps (une corne de rhinocéros sur l'un des paquets qui ressemble à des paquets de tabac à priser).

Voiture. Avant de rentrer, j'émets le vœu de voir le boathouse row signalé par le guide vert (et soudain je comprends que "row" veut également dire "rang" ou "en file", tandis qu'à Mystic Port l'homme des barques avait utilisé "crew" («Oh, you crew»), c'est-à-dire "équipe": very appropriate). Le plan d'eau est magnifique, paisible, serein, des doubles glissent sur l'eau, la route le suit et semble quitter la ville très ville (je veux dire que nous ne sommes plus en milieu urbain, mais que d'un point de vue administratif, ce doit être encore Philadelphie).
Il est temps de faire demi-tour et de rentrer. Mais c'est moi qui guide et H. qui conduit, et cela sera notre perte: je ne suis jamais très inquiète, partant du principe qu'on finira bien par rentrer («We are lost, we are French!» ont appris à crier les enfants en chœur quand je conduis) tandis que H. aime la précision et rentrer directement en suivant les instructions de l'iPhone.
Les gens conduisent vite, plus vite qu'on ne l'a jamais constaté en ville; je n'ai qu'une crainte, c'est de prendre une route qui nous fasse traverser le Delaware sur le Whitman Bridge. Je ne comprends pas ce qu'indique l'iPhone, je donne une indication un quart de seconde trop tard, nous nous retrouvons à rouler vers le nord, de l'autre côté du plan d'eau. C'est très beau, mais étroit, eau d'un côté, roche de l'autre, impossible de faire demi-tour.

Demi-tour malgré tout au niveau du zoo. Errance, visiblement les routes que nous voulons atteindre sont en tunnel dont nous ne trouvons pas les entrées. Nous finissons par croiser un panneau indiquant l'aéroport (ce n'est pas si facile, il n'y a qu'une seule route, puisqu'il faut réussir à monter sur un pont, un autre pont que le Whitman (d'où ma crainte de me tromper). Tant qu'on ne monte pas sur ce pont, l'aéroport est hors de portée). Nous rentrons, il fait nuit.

Il y a un Denny's à côté du motel. Nous nous réjouissions de pouvoir tester les repas après les petits déjeuners.
Grave erreur (ne jamais vendre la peau de l'ours): trois quart d'heure d'attente (ce fut si long que j'étais résolue à aller voir en cuisine et à m'en aller si je découvrais qu'aucun plat n'était en préparation contrairement aux promesses répétées de la serveuse. J'étais en train d'y aller quand les plats sont arrivés) et une nourriture détestable (pour ma part un goût atroce d'huile trop utilisée).
Nous partons dormir, laissant H. faire la peau de l'assistant gérant.

Des chutes du Niagara à New Stanton

Lever neuf heures au lieu de sept heures pour compenser le coucher tardif, et petit déjeuner chez Denny's. («Il y a Denny's à deux pas», nous avait indiqué la jolie rousse comme une promesse de plaisirs inouïs, et comme cet atout était également proclamé sur la pub du coupon, nous étions curieux de voir ce qui faisait rêver cette jeune femme.)
Quand nous poussons la porte vers dix heures (il nous a fallu un peu de temps pour réorganiser les valises (basiquement vider un sac de sport dans les autres pour avoir moins de volumes à tétriser dans le coffre)), nous sommes surpris de découvrir une salle pleine: est-ce comme cela tous les jours, ou un week-end réussi commence-il par un breakfeast chez Denny's?
L'ameublement est celui d'un fast-food, mais ce n'est pas un fast-food: on s'assoit comme au restaurant, on consulte la carte et on commande.

Et ça vaut le détour; nous consommons suffisamment de calories pour tenir la journée (et tant mieux, car c'est à peu près ce qui va nous arriver).
Je laisse tomber le menu "pancakes aux fraises" (aucune envie de manger de la glace à la vanille et de la chantilly avec mes œufs brouillés) et prend le "new" menu "pancakes aux myrtilles". Un peu lourd pour un estomac français normalement constitué, on mange avec la sensation qu'on ne le devrait pas, mais basta, demain (et même aujourd'hui) nous serons loin, profitons.
La preuve que ''Denny's'' est grand, c'est qu'il ne sucre pas les boissons à priori. (Le sucre semble être aux Américains ce qu'est le piment dans d'autres parties du monde.) Je remarque une fois de plus des plats où seuls le blanc d'œuf est utilisé dans l'omelette, le cholestérol semble plus redouté que de diabète.

Nous prenons la route à onze heures, ce qui est bien trop tard pour ce que nous avons prévu de faire. Je viens d'écrire à Ruth que nous arriverons à Charlottesville demain soir, et que ce soir nous serons au-delà de Pittsburgh (avec une "h", précise wikipedia, à ne pas confondre avec Pittsburg).

Routes 219 puis 119, plein sud. Pennsylvanie. Nous entrons dans la forêt des Alleghanys, ou quelque chose comme ça. Pour résumer, nous aurons sur une distance Paris-Poitiers ou Paris-Bordeaux (la vitesse réduite à laquelle nous roulons pertube mon appréhension des distances qui n'est déjà pas excellente) une densité de peuplement qui ressemble à celle entre Lamotte-Beuvron et Vierzon (pour ceux qui connaissent).
Les maisons apparaissent de loin en loin au bord de la route, forêts. Des acres sont à louer, apparemment la région (du moins les particuliers) vit de la vente du bois et des sports d'hiver. Ce n'est que vers la fin de la journée que nous atteindrons davantage de prairies, de vastes étendues gazonnées tondues à la Suisse.

Nous nous arrêtons vers deux heures dans une station-service après Salamanque, presque à la frontière de l'Etat de New York et de la Pennsylvanie. Nous cherchons une carte, mais il n'est pas prévu de souhaiter descendre vers le sud par cette route: les cartes concernent les comtés du nord. L'employée, une dame très ridée, est née à Maastricht (Car dès que nous disons que nous venons de France (en réponse à «Haï gaïs, where d'you come from?», les connexions européennes affluent: j'ai un frère, un oncle, l'année prochaine nous allons, l'année dernière ma fille…)). Ce n'est que bien plus tard que je ferai le lien avec l'occupation américaine en Allemagne.

Les routes du sud de l'état de New York sont mal entretenues, oui, «adopt a highway», car elles sont abandonnées. "Rough road" indique une bretelle d'accès à une quatre voies, et la chaussée est pleine de cicatrices, de pansements de goudron, il y a une fente entre les deux files dans laquelle apparaît de l'herbe ou de la mousse.

Les panneaux me plaisent beaucoup: «Chasseurs de dindes, soyez sûrs de votre cible avant de tirer» (à prendre au premier degré), «Buckle up for the next million miles» (Attachez votre ceinture durant le prochain million de miles) et aussi, plus effrayant «Blessé dans un accident? Appelez le 888-8888», pub pour un avocat.
Ah, et le pictogramme "ours", nous faisant rêver à une traversée de grizzlis devant le pare-choc…

Sept miles avant Punxsutawney, un pictogramme sur un panneau nous enjoint de faire attention aux carrioles tirées par des chevaux (vitesse limitée à 55 miles) et "sur comme la mort" nous arrivons derrière un cheval au grand trot conduit par deux enfants. Ils se garent le plus possible mais je ne suis pas pressée de les doubler, nous les prenons en photo. Amish (malgré tout ils se modernisent car le soir à l'hôtel je trouverai une affichette publicitaire pour leur artisanat.

Punxsutawney. Qui a deviné pourquoi nous avons fait ce détour? La première chose que nous voyons en arrivant est une gigantesque marmotte (qui ressemble à un castor) sur un surpermarché.

Deux déceptions: cela ne ressemble pas du tout au film et tous les magasins de souvenirs (souveuhnirrr) sont fermés (il est quatre heures un samedi). Petit tour sur internet à partir du wifi du McDo local: le film n'a pas du tout été tourné ici, mais dans une ville de la région des grands Lacs.
Oui, nous sommes là à cause du Jour sans fin, et quand les enfants le comprennent enfin, ils sont absolument navrés par tant de bêtises (les ados qui vous expliquent comment vous comporter rationnellement me laissent toujours perplexe).
Deux satisfactions: la caissière du supermarché, après avoir murmuré rêveuse «Je n'ai jamais eu de clients venus d'aussi loin» nous indique l'endroit où trouver la marmotte (nous ne savions pas qu'il y en avait une) près de la bibliothèque municipale (et la pelouse centrale ressemble enfin au film) et au grand désespoir des enfants nous nous photographions près de la statue d'une marmotte géante.

Voir Punxsutawney et mourir (d'ennui). Ce ne doit pas être drôle de grandir ici (6000 habitants, une ville jugée digne de figurer sur la carte Michelin 930 des Etats-Unis comme seule grande ville à des miles à la ronde). Et c'est plutôt laid.

Ensuite le paysage devient plus plat et moins boisé. Les maisons sont entourées de prairies plutôt que de pelouses, et nous croisons régulièrement des animaux écrasés (deux biches ou chevreuils, des ratons-laveurs). A Burrell, nous avons la surprise de voir surgir entre deux lignes de crêtes trois immenses cheminées, plus hautes que les deux tours de refroidissement de la centrale nucléaire qu'elles surplombent («Quatre tranches», dit H.). L'ensemble est inmanquable, installé en hauteur dans le paysage.





Pittsburgh. Notre projet était d'y dormir et de visiter le musée Warhol demain (à l'origine cet après-midi, mais la route a été beaucoup plus longue que prévu), mais tous les hôtels sont complets: convention aéronautique, nous explique une réceptionniste, nous ne trouverons rien à quinze miles à la ronde.
Nous consultons les enfants, seront-ils très déçus de manquer les Warhol? Non, je ne suis même pas sûre qu'ils aient vraiment identifié Marylin au MoMa (ces quelques visites dans les musées me font constater une fois de plus à quel point leurs livres scolaires manquent d'images mythiques, de Monet, de Warhol, de pas de l'homme sur la lune, de visage d'Henri IV ou François Ier, de choses que l'on est tout heureux de découvrir soudain dans la réalité).

Tant pis pour Pittsburgh. Nous devons être à Charlottesville demain soir, je l'ai dit à Ruth, et je veux prendre une section de la skyline drive. Hôtel ou motel à vingt miles à l'est de Pittsburgh, le jeune homme de l'accueil nous fait une réduction «parce que c'est nous», je me demande si c'est vrai car c'est la deuxième ou troisième fois que cela nous arrive (est-ce notre accent français?), j'ai l'impression d'être dans un système SNCF où le prix dépend du remplissage de l'hôtel (bref, la chambre est à soixante-cinq dollars contre cent trente-neuf affichés, soit vingt de plus que le taudis d'hier).

Celui-ci nous plonge dans Barton Fink:





Les filles ne veulent pas manger, je sors avec H. et O. rejoindre à pied (à pied!) le restaurant chinois à cent mètres.
Intriguée, je choisis des "wallnut shrimps" (crevettes aux noix), plat que je n'ai jamais vu en France. (J'aime bien comparer les cuisines étrangères dans les pays étrangers. Naïvement je pensais qu'elles étaient toute pareilles, que manger indien en France ou en Suède était la même chose: et bien non). Le plat est décrit comme crevettes à la mayonnaise avec des noix, mais je me dis que ce doit une autre définition de la mayonnaise.
J'avais tort. Crevettes frites par deux de façon à former un cercle, recouvertes de miel puis de mayonnaise, avec des noix confites qui se décomposent sous la dent.
C'est atroce. Je ris aux larmes. «Pauvres bêtes, Astérix» (Astérix et les Bretons).
— Ils auraient mieux fait de continuer à tenir des blanchisseries!
— «Dès que j'aurai fait assez d'économies j'ouvrirai un restaurant».
— C'est dans quoi, ça?
Le 20e de cavalerie.
Je gratte la mayonnaise et par politesse, je mange les deux tiers du plat.

J'insisterai même pour laisser deux dollars de tip, car je ne voudrais pas qu'ils se doutent d'à quel point c'est mauvais.
Mais j'ai sans doute tort, ils ne doivent pas manger leur cuisine. Ils devraient essayer, une fois.

— «Avec du miel?»
— «Il y a même de la graisse d'urus».
— Ah mais oui, tu as raison, c'était une orgie! (Astérix en Helvétie, pour ceux qui ne connaissent pas.)

Rentrée à l'hôtel, j'écris des cartes postales en regardant Men in Black II. Je n'ai plus de timbres.

Vendredi

Matin: déchetterie puis un bœuf mode à l'ancienne (pied de veau inclus).
Après-midi: un violoncelle pour Félix qui va passer dix semaines à la maison et l'aquarium de Paris. Belleville, rue de la Villette. Quel beau quartier que je ne connais pas. Trocadéro, photo de la tour Eiffel, parfaits touristes, c'est amusant. (J'ai oublié de parler de mon plaisir hier à contempler Paris du haut de Beaubourg. Une voix chante au fond de moi: «Nous n'avons pas été bombardés, nous n'avons pas été bombardés.» Je fais part de mon allégresse à mon compagnon, qui me répond: «Oui, c'est grâce à Pétain, c'est totalement oublié, ce qui est plutôt injuste.» (Et je pense à Rome: qui prendrait la responsabilité de faire bombarder Rome? Rome, la ville indéfendable.))

J'ai mal partout, je suis bien plus mal en point qu'au début de la semaine. Je suis toute courbaturée, et un peu démoralisée par ce que j'explique dans mon précédent billet.


2020 jour pour jour, je raconte : ce jour-là, A et moi avons libéré les blattes dans la déchetterie. J'ai longtemps eu peur qu'elles n'envahissent tout à la façon des écrevisses américaines.

Dimanche

Fini la deuxième manche, retrouvé mes pelotes de laine.

Une terrine de queue de bœuf, des joues de porc aux lentilles, du bortsch.

Une demi-saison de SFU (la 4e).

Cette année le sapin va "passer" janvier.

Papiers peints

A midi : fondue au fromage. Malaaades...

Mudac: musée du design et d'art contemporain.
Amusant.



PS: Le Monde de la Jungle.
Hier : Là-Haut et Le Monde de Nemo

Mixing my references

— C'est le bateau qu'on a pris pour aller à Evian.
— Ah bon? Qu'est-ce que vous avez fait à Evian? Vous avez bu de l'eau?
— Non, on a mangé une pizza.



Vevey par le train. Il fait très froid.

Crudités

Palette à la diable. Sieste. Rangement. Harry Potter VI. Ennui. Cartes postales. Internet n'est pas rétabli.

Chaque fois que je suis seule quand j'épluche des légumes, je songe à ce passage de Vivre avec une étoile (j'avais spontanément pensé qu'il s'agissait d'une danseuse étoile) où le narrateur, juif traqué à Prague, fait pousser des carottes entre les tombes, parce que c'est le lieu où la terre est accessible. C'est avec cette lecture que j'ai réellement compris l'impossibilité de vivre, au sens le plus biologique du terme, sans terre — et ce miracle de la transformation de l'eau, la terre, la lumière, en quelque chose de mangeable.

Insomnie

Nuit de mardi à mercredi, de nouveau réveillée, un peu moins longtemps. Décidé de tout recommencer. Repartie de zéro.[1]
Je travaille, j'avance lentement.

Quand j'étais étudiante, les échéances me paraissaient des murs. J'avais l'impression que j'allais me fracasser contre, que le monde n'existerait plus, cesserait de tourner, au moment où l'échéance cherrait.
L'âge et l'expérience venant, j'ai pris l'habitude de m'imaginer après, une heure après ou le lendemain, afin de maîtriser la panique, de me convaincre de l'écoulement inéluctable du temps, de relativiser tout cela (il faut dire que cela me rendait réellement malade de terreur; c'est ainsi qu'à vingt-deux ans j'ai interrompu mes études en dernière année tant l'idée du grand O me terrifiait (je les ai achevées plus tard, après avoir appris à relativiser (au moins un peu) en entreprise (à l'approche de 2000, un chef me disait encore : «Tu prends tout au tragique».)).
L'inconvénient de cette méthode, c'est que j'ai le plus grand mal à me mettre à travailler: après tout, puisque quoi qu'il arrive le temps va passer, puisque tout cela n'a pas d'importance...
Tentation de laisser tout tomber, d'abandonner. Je me retiens de le dire, de le formuler; je sais que si je prononce ces mots, la machine se mettra en route, pour accomplir ce que je désire et ne désire pas.

Seule dans la journée. H. est parti à Bovino, à la recherche du wifi (succès sur toute la ligne: wifi gratuit pour le prix d'un capuccino dans l'après-midi, 80 centimes).

18h30. Début officiel du colloque, accueil dans la cour, nous attendons des Français en retard (!), Béatrice est très inquiète que nous puissions être mécontents, nous la rassurons comme nous pouvons, il fait un temps magnifique dans un cadre superbe.

Le soir, nous dînons comme les soirs précédents à Panni, auprès de nos hôtes qui tiennent également un restaurant, La Locandia di Pan. Pas de carte, à peine un menu, on s'obstine à nous demander ce que nous voulons, barrière de la langue, nous nous efforçons de faire comprendre que nous mangerons ce qu'on nous donnera: nous ne prenons pas grand risque, tout est excellent, les produits très frais (légumes, fromage, pâtes, fruits) cuisinés le plus simplement du monde, c'est délicieux. Je me souviens avoir lu que l'essor de la cuisine bourgeoise en France, terreau indispensable à une tradition gastronomique, date du mariage de Henri II avec Catherine de Médicis qui amena ses cuisiniers d'Italie.

Notes

[1] Ça me paraît tellement incroyable une semaine plus tard que j'ai vérifié la date sur le fichier: créé le 28 juillet à 2 heures 39, pour une intervention le 30 juillet à 10 heures, sachant que le 29 était entièrement occupé par des conférences. Visiblement je n'avais plus aucune notion du temps.

RER soir de défaite

Il sont cinq blacks sur deux rangées de siège se faisant face, deux filles trois garçons, le plus jeune a douze ou treize ans, du maquillage bleu blanc rouge sur la joue, les autres autour de vingt ans.
Ils parlent parfaitement, c'est-à-dire que je comprends leur vocabulaire et qu'ils n'ont pas d'accent particulier (parfois c'est très dur…).
Ils commentent le match avec humour, l'analysent, ils sont très drôles, dignes des meilleurs moments de bistrot.

Un jeune mec arrive:
— Vous plaignez pas, nous on a été battu par des Suisses !
Eclat de rire général.
— Et les collègues, y se sont foutus d'ma gueule, y m'ont demandé: «Elle était bonne la paëlla?»
— Ah oui, va falloir se mettre à la fondue…
— En tout cas c'est pas ce soir qu'on va manger du cassoulet.
— M'en fous, j'ai l'air mexicain, j'peux dire que j'ai gagné. Et là j'vais chez des potes mexicains, y'a du chili con carne qui m'attend.


J'ai été un peu surprise de cette association naturelle sport-cuisine-fierté nationale. Est-ce que vous auriez pris le cassoulet pour "nous" représenter?



(Coupe du monde, Franc-Mexique, 0-2)

Tradition culinaire

Quand vous faites un "gâteau" au chocolat en faisant fondre quatre plaquettes avec du beurre et de la crème, et que vous faites resolidifier le tout au frigo, vous savez que le livre de recettes était anglais.

Parents indignes

Dimanche soir. Plus rien à manger, frigo vide (évidemment, puisqu'au lieu de faire les courses hier après-midi nous avons réhabillé ce blog).

Parfois je me demande quelles séquelles va laisser sur les enfants le fait de vivre dans une maison pas rangée, sans ménage, le fait de se faire eux-mêmes des pâtes toutes les fois où nous préférons faire autre chose que la cuisine, de nous servir de banque (ie on leur taxe leur tirelire) chaque fois que nous avons un besoin urgent d'argent liquide (car nous avons été trop étourdis pour prévoir nos retraits d'argent...), dans une maison où seuls comptent les livres, les ordinateurs, le ping-pong...

Bon après tout, on n'en est pas encore (quoique, finalement,...ça ne leur déplairait peut-être pas d'en être là.)

Back to basic, je vais aller faire une Floraline.

Deux jours

Hier plombier.
Aujourd'hui marché, soupe au potiron, futur lapin aux pruneaux.
C'est à peu près tout. Même pas eu le temps de faire la sieste.
Il n'y a plus de bière potable au frigo (que de la blanche, une espèce de truc sans corps).
Hier soir, assisté à une représentation de chorale pour faire plaisir à un ancien collègue.
Ce soir, regardé Les choristes, pour faire plaisir à ma fille.
Tout cela présente une certaine cohérence.

Gâteaux

Au fur à mesure que les blogs se font plus silencieux, je passe du temps sur Flickr (de l'art de rêver ou de perdre son temps). Inattendue galerie de gâteaux ce matin.

Les causes économiques de la progression de l'obésité

Le post de Chondre m'a rappelé l'un de mes documents préférés sur l'obésité.
Il s'agit d'un article qui explique l'obésité par la théorie économique, ce qui m'amuse. Cependant, c'est un article très sérieux, qui constitue à lui seul une véritable introduction à la théorie économique classique. D'autre part, il indique mathématiquement la façon de ne conserver le poids moyen que nous aurions eu en 1965 (cela aussi me fait rire: qui utilise cela comme critère de tour de taille?)

En résumé, l'alimentation a connu la même évolution que le reste des produits : industriatisation, production de masse, baisse des prix, consommation de masse. En d'autres termes, il n'y a pas de différence entre l'évolution de notre rapport à la nourriture et celui de notre rapport aux objets. Prenons l'exemple de la montre: c'était un objet symbolique qu'on se transmettait d'une génération à l'autre, qu'on offrait pour les quinze ans ou la communion solennelle, elle est devenue dans les années 80 un objet de consommation jetable.
La nourriture a connu la même banalisation. La différence, c'est qu'on ne mange pas sa montre, alors qu'avoir un comportement de consommation de masse avec la nourriture fait grossir. (C'est cela qui me fait rire: la démonstration scientifique d'une évidence).
Finalement, le problème de l'obésité ne serait pas différent du problème de l'achat compulsif d'objets: la même incapacité à ne pas consommer ce qui est si facilement disponible, même au-delà de ses moyens ou besoins.


L'article s'intitule "Les causes économiques de la progression de l'obésité". Il est paru dans Problèmes économiques n°2.860 d'octobre 2004. Il s'agit de la traduction résumée d'un article originellement publié par David M. Cutler, Edward L. Glaeser et Jesse M.Shapiro dans the American American association (vol.17, n°3, été 2003) sous le titre "Why have American Become more Obese?"
Je vous en livre de larges extraits :

[...]
Notre théorie trouve une bonne illustration dans l'exemple de la pomme de terre. Les Américains en étaient grands amateurs avant la Seconde Guerre mondiale. Ils la consommaient surtout cuite au four, bouillie, ou en purée, et généralement à la maison. Les frites étaient rares dans les foyers et dans les restaurants, du fait du travail d'épluchage, de coupe et de cuisson qu'elles nécessitent. Ces activités sont très consommatrices de temps en l'absence d'équipement coûteux. Un certain nombre d'innovations ont permis après la guerre la centralisation de la production de frites. Quelques sites fonctionnant avec de nouvelles technologies sophistiquées concentrent maintenant l'épluchage, la coupe, et la cuisson des pommes de terre. Les frites sont ensuite congelées à -40° et envoyées sur leur lieu de consomamtion où on les réchauffe rapidement dans une friteuse pour la restauration rapide, et dans un four, voire un four à micro-ondes. Les frites sont devenues actuellement la façon la plus courante de consommer la pomme de terre et le légume préféré des Américains. Cette évolution se traduit dans les chiffres de consommation. La consommation totale de pommes de terre a progressé d'environ 30% de 1977 à 1995, un chiffre dû presque exclusivement à l'augmentation de celle des chips et des frites.
La théorie du progrès technique a plusieurs implications que nous allons tester de façon empirique. En premier l'augmentation de la quantité de calories consommées repose surtout sur celle du nombre des repas plutôt que sur celle du nombre de calories par repas. Ce phénomène concorde avec la baisse des coûts fixes de la préparation des aliments. Ensuite, la consommation de la nourriture produite en masse a connu sa plus forte augmentation durant les vingt dernières années. En troisième lieu, les groupes présentant la prise de poids la plus marquée sont ceux qui se sont trouvés le plus à même de profiter du progrès technique. Les femmes mariés passaient beaucoup de temps à préparer les repas dans les années soixante-dix, ce qui n'était pas le cas des célibataires masculins. L'obésité a progressé bien davantage chez les femmes mariées. Enfin, nous montrerons que l'obésité au sein des différents pays est liée à la diffusion des nouvelles technologies alimentaires et des aliments industriellement transformés. L'alimentation et son système de distribution font partie des domaines les plus réglementés de l'économie. Certaines de ces réglementations sont explicites, comme la position ferme de l'Union européenne contre les aliments génétiquement modifiés ou la loi sur la pureté de la bière appliquée depuis longtemps en Allemagne. D'autres «régulations» sont d'ordre culturel, comme la croisade de José Bové contre McDonald's en France. Les pays dotés d'un degré élevé de réglementation destiné à soutenir une agriculture et un système de distribution traditionnels présentent des taux d'obésité moins importants.
La profession médicale déplore, certes, l'augmentation de l'obésité mais on sait en économie classique que la baisse du prix de tout bien — en termes de coût financier et de temps — augmente l'ensemble du budget et favorise le bien-être général. Le problème de l'autodiscipline des consommateurs vient toutefois compliquer cette interprétation. La baisse du coût en termes de temps de la consommation alimentaire peut exacerber chez certains l'absence de contrôle de leur consommation. Et les 40 à 100 milliards de dollars dépensés annuellement en régimes alimentaires attestent de la présence généralisée de ce problème. [...]
[...]
Technologie, division du travail et obésité
Plusieurs théories pourraient expliquer l'augmentation de la consommation de calories au cours des vingt-cinq dernières années. On pense à l'évolution des prix et des revenus dans la mesure où l'enrichissement de la population permet une alimentation plus abondante. Mais l'évolution des revenus semble impuissante à expliquer nos résultats. Le revenu et l'obésité ont actuellement une corrélation négative, au moins chez les femmes. Par ailleurs, le revenu réel des personnes faisant partie de la tranche de revenus la plus basse a enregistré une faible progression sur la plus grande partie de la période, alors que l'obésité de ce même groupe était en augmentation. L'accroissement de la consommation alimentaire pourrait également s'expliquer par la baisse relative du prix de l'alimentation, mais, de 1970 à 1999, l'indice des prix à la consommation n'a augmenté que de 3% de moins que celui des prix hors alimentation.
Nous rejetons également la théorie expliquant l'obésité par l'augmentation du travail féminin, censée doper la demande de restauration en dehors du domicile — et la demande d'une alimentation moins saine [...]. Il n'est en outre pas établi que la prise de repas en dehors du domicile augmente la consommation de calories. Les restaurants peuvent proposer des repas à faible teneur calorique aussi facilement que l'inverse. Et il semble de fait que la substitution des repas préparés à la maison par des repas pris à l'extérieur n'ait pas augmenté le nombre de calories consommées par repas.
La nouvelle théorie de la croissance de l'obésité que nous proposons ici se fonde sur la diminution du coût en termes de temps de l'alimention. Celle-ci a eu pour effet d'augmenter la fréquence et la diversification alimentaire et, par là même, le poids de la population.

L'avènement de la préparation de masse
La préparation d'aliment consommables s'est traditionnellement effectuée à partir de produits agricoles crus. Cette opération exigeait un laps de temps substantiel. le temps de préparation et de nettoyage a représenté jusqu'aux années soixante la majorité du coût total de l'alimentation. Les familles dépensaient en moyenne 15 dollars (en valeur de 1990) par jour, en 1965, en achats alimentaires, et consacraient quotidiennement 130 minutes environ aux tâches de préparation des repas et de nettoyage (Robinson et Godbey, 1997). Converti en salaire moyen féminin, ce temps représentait peut-être 20 dollars, soit 57% des dépenses alimentaires totales. Or, le temps passé à la préparation des repas a chuté de moitié pendant les trente dernières années.
Il a toujourq été possible de préparer la quasi-totalité des aliments actuellement proposés, à condition de vouloir y mettre le temps. Des cuisinières ambitieuses pouvaient par exemple confectionner des petits gâteaux fourrés à la crème, mais cela représentait une opération très longue. Les innovations techniques intervenues depuis les années soixante-dix permettent maintenant aux restaurants et aux usines de faire ces préparations, en exploitant la technologie et le taux de marge. Les petits gâteaux à la crème sont maintenant vendus moins d'un dollar. [...]
La majorité des innovations importantes a d'abord été le fait des Etats-Unis du fait de l'avance technologique de ce pays et de la taille de son marché. Les autres pays ont souvent limité l'accès de leur territoire aux produits alimentaires ou à leurs distributeurs (comme les établissements de restauration rapide) américains. L'alimentation constitue de surcroît un des domaines les plus réglementés de l'économie et de nombreux pays ont fait obstacle à l'introduction des nouvelles technologies alimentaires.
La diminution du temps passé à la préparation des repas et aux tâches de nettoyage subséquentes constitue peut-être la manifestation la plus parlante de la révolution du coût en termes de temps de la production alimentaire. Le temps de préparation des repas a diminué de près de la moitié à la fois pour les femmes actives et celles au foyer. Cette évolution se fait à statut professionnel constant. Elle reflète la technologie et non l'appartenance à la population active.
Les données sur la répartition des dépenses entrant dans le coût des aliments font également apparaître l'importance croissante de leur préparation commerciale. En 1972, les agriculteurs étaient responsables de 44% du coût de la nourriture. En 1997, seuls 23% du coût de la nourriture proviennent de l'agriculture. Le reste est le fait de la distribution. Cette constatation ne s'applique pas seulement à la restauration. Les dépenses non liées à l'agriculture représentent à l'heure actuelle 80% du coût de la nourriture consommée à la maison. Le travail accompli dans les supermarchés et les usines a remplacé celui effectué à la maison, une évolution ayant pour conséquence des économies de temps considérables pour les foyers.

Les implications du progrès techniques
La préparation des aliments implique des coûts fixes et variables. L'épluchage et la coupe des frites représentent par exemple des coûts marginaux en terme de temps, alors que la friture constitue généralement un coût fixe (dans la mesure où la friteuse est pleine). La préparation de masse implique la répartition de la composante de temps fixe sur un grand nombre de consommateurs. Elle fait en outre baisser le coût marginal de la préparation des aliments en substituant le capital au travail. Enfin, elle exploite la division du travail. La préparation des aliments est maintenant assurée par des professionnels et non plus par les particuliers, ce qui en diminue à la fois les coûts fixes et les coûts marginaux.
La réduction du coût en termes de temps de la préparation des aliments devraient entraîner un accroissement des quantités consommées, en vertu du principe selon lequel la baisse de prix de tout bien en augmente la consommation.[1] D'après un modèle «quantité-qualité» standard de consommation alimentaire, à l'image de celui de Becker et Lewis (1973), cette augmentation peut se produire par différents biais : 1) la diversification de la nourriture consommée; 2) l'accroissement de la fréquence de la consommation; 3) l'adoption d'aliments industriels très caloriques et à forte saveur n'existant pas auparavant; ou 4) l'augmentation de la consommation générale de chaque aliment. Du fait de la baisse des coûts fixes, nous devrions voir attribuer la plus grande partie de l'augmentation des calories à la diversification de l'alimentation et à l'augmentation de la fréquence des consommations plutôt qu'à l'accroissement des quantités consommées par repas. Et, de fait, la réduction des coûts en termes de temps a un effet ambigu sur le nombre de calories par aliment. Si la quantité des repas et de la nourriture absorbée à chaque repas sont des substituts (du fait du rassasiement des consommateurs, par exemple), le nombre de calories absorbées à chaque repas devra diminuer.
[...]

La conclusion : Le temps gagné sur la cuisine doit être passé à marcher ou à courir. Au total, l'industrialisation alimentaire ne nous aura fait gagner que cinq minutes de loisir :

Il y a eu en moyenne aux Etats-Unis une baisse du coût en termes de temps de la préparation des repas d'une vingtaine de minutes par personne et par jour de 1965 à 1995. A cette diminution de temps correspond un gain de 4,5 kg au cours de la période représentant une centaine de calories par jour, ou environ 1,6 km d'exercice quotidien. S'il faut 15 minutes pour marcher ou courir 1,6 km, le coût en termes de temps représenté par les 4,5 kg acquis est d'environ 15 minutes par jour[2] L'individu normal doit bénéficier de la réduction du coût en termes de temps de l'alimentation. Des 20 minutes gagnées sur la préparation des repas, on pourrait en passer 15 à faire de l'exercice et à perdre le poids acquis, et disposer encore de 5 minutes de liberté.
[...]

Finalement, les grands gagnants sont ceux qui considèrent que le sport (et l'endomorphine qu'il libère) est une forme de liberté.


Notes

[1] C'est moi qui souligne.

[2] Le raisonnement économique classique (en mettant de côté l'actualisation hyperbolique) suggère que les individus qui ne font pas de sport estiment probablement que le fait de perdre du poids vaut moins que ces 15 minutes quotidiennes.

Post incomposé

J'en ai marre de Safari, j'ai l'impression que Netvaïbes ("Netvibes", c'est plouc, m'a appris Matoo) le fait planter. Zou, sur Firefox. Il paraît, H. dixit, que c'est tout de même à l'usage (de programmeur) Opéra qui respecte le mieux les normes supposées être suivies (j'adore les posts simili-geek. À propos, ceux qui ont besoin d'être réveillés peuvent aller voir ça).

Je suis en train de mettre de la sauce tomate partout. H. me bourre le frigo de plats micro-ondes avant de partir, parce qu'il sait que dans le cas contraire je vais manger des céréales toute la semaine à tous les repas — c'est gentil à lui d'y penser. Et donc comme il n'y a personne pour me rappeler les règles de la vie en société (il faut beaucoup de formes quand on dîne seul), je peux enfin manger devant mon ordinateur.
Le problème, c'est que ça refroidit vite. Et puis ce n'est pas très pratique.

Enfin bon, ce serait le bonheur si je n'avais pas si mal à la nuque. C'est la faute à Bruce Willis, ses films sont vraiment fatigants. Il faut qu'il arrête de boire, ses yeux se pochent de plus en plus. Ou alors il utilise la chirurgie esthétique à l'envers: il se les fait pocher pour avoir l'air intéressant (au fait, il paraît qu'Indiana Jones IV est en préparation). J'ai changé de portable aujourd'hui (l'ancien, c'était ça, je l'aurais bien gardé encore un peu, j'aime les dinosaures, mais il commençait à bugguer trop souvent. Dommage), et je pense que si j'apprends à me servir du nouveau un jour, je devrais moi aussi pouvoir hacker la Maison blanche.
Je retiens que pour survivre, il faut dans la plupart des cas rester dans sa voiture, et qu'il ne faut pas jeter sa vieille CB. Sinon... rien à faire, les réalisateurs des Die Hard ne croient pas au terrorisme idéologique, la motivation des terroristes, in fine, c'est toujours l'argent.
Les cascades... Argh, quelle chorégraphie, ça me fait vraiment de la peine de me dire que la plupart des scènes avec l'avion de chasse doivent être virtuelles. Autre tristesse, les méchants parlent désormais français (je les préfère arabes ou allemands.)
Et puis, toujours, inévitablement, la fille du héros se fait enlever. Heureusement, celle-ci est moins nunuche que Kim Bauer (difficile de faire pire, remarquez).

A midi, j'ai déjeuné avec Paul. Roland de la Poype a sorti un livre, L'épopée du Normandie Niémen, que Paul m'a offert. Le livre regorge d'anecdotes, et ce n'était pas ses chaussettes que La Poype avait perdues lors d'une cérémonie soviétique officielle, mais sa médaille, 35 grammes d'or. Ce livre s'inscrit parfaitement dans la continuité de celui de Grossman. Paul a tenté de joindre La Poype au téléphone pour le féliciter, mais celui-ci était absent. Il faudrait peut-être que j'avoue à Paul que j'avais écrit (jamais eu de réponse)... Bah, on verra bien.

Hier soir, j'ai vu La Traversée du temps. Je n'y serais pas aller de mon propre chef, car je m'étais un peu ennuyée devavant Mon voisin Totoro et Nausicaa. Le grand soulagement, c'est que pour une fois les voyages dans le temps ne sont pas traités de façon tragique. Là encore, ce film est fatigant, l'héroïne passe son temps à courir et à tomber. Et à bien y regarder, sans voyage dans le temps, le film se terminerait de la même façon — à l'accident près.

Quand je suis trop fatiguée, le monde se dérobe, je passe mon temps à vérifier que lorsque je pose quelque chose sur une table, c'est bien sur la table que je le pose, et non à côté (je tâte la table avant de poser le verre). Je vois des ombres dans le coin de mes yeux, toute ligne verticale, arbre, poteau, montant de portière, devient un fantôme possible. Il faut que je regarde l'objet en face pour qu'il retrouve sa qualité d'objet. Le pire ce sont les reflets dans les vitrines des magasins, qui s'animent au fur à mesure que j'avance.
Le plus drôle (je dois passer pour un peu attardée), c'est le temps de latence entre une question posée et ma réponse: il faut que je réalise que c'est à moi que la question est posée (puis blanc) puis me souvenir, grâce à la mémoire immédiate, de ce qu'était cette question, puis la reformuler en moi-même, faire un effort de cadrage (de concentration) et enfin répondre.
Je vais me coucher. Un peu de coca, peut-être.

Réveillon de la Saint-Sylvestre

Au cours du réveillon, j'ai appris que se tenait à des dates variables une messe de rentrée du barreau dans toutes les grandes villes de France. A Paris, elle a lieu à la Sainte-Chapelle, vers six heures du soir, après le départ des touristes. A Lyon, la chorale qui l'accompagne semble de haute tenue. Je dois avouer que cette tradition me laisse ravie et stupéfaite (j'en connais un que je vais pouvoir taquiner).

L'avocate à table ce soir-là ne connaît que deux occurences d'"irrépétible" dans la langue française. Ne connaissant pas ce mot, je m'en fais expliquer le sens. Je copie/colle la définition trouvée sur internet: «adjectif qui qualifie les frais versés par la partie qui a gagné le procès à son avocat , et qui ne sont pas incluses dans les dépens. A la demande de la partie gagnante, ces frais irrépétibles peuvent faire l'objet d'une appréciation du tribunal et s'ajouter aux condamnations principales et aux dépens mis à la charge de la partie perdante.»

Mon amie ne connaît donc que deux occurrences de ce mot: une dans l'article 700, l'autre dans la dernière phrase de Cent ans de solitude. Comme je connais cette phrase par cœur («aux lignées condamnées à cent ans de solitude, il n'est pas donné de seconde chance»), je me permets de douter. On m'apporte donc le livre. La phrase est beaucoup plus longue que dans mon souvenir, avec je ne sais quoi de borgésien que je ne pouvais percevoir quand je l'ai lue (1985) puisque je ne connaissais pas Borgès :
Mais avant d'arriver au vers final, il avait déjà compris qu'il ne sortirait jamais de cette chambre, car il était dit que la cité des miroirs (ou des mirages) serait rasée par le vent et bannie de la mémoire des hommes à l'instant où Aureliano Babilonia achèverait de déchiffrer les parchemins, et que tout ce qui y était écrit demeurait depuis toujours et resterait à jamais irrépétible, car aux lignées condamnées à cent ans de solitudes, il n'était pas donné sur terre de seconde chance.
Claude et Carmen Durand ont-ils fabriqué un néologisme? Pourquoi avoir choisi irrépétible et non irrépétable?


Trouvé sur les étagères de mes amis un livre de cuisine au Coca-cola. Avec une grande impolitesse, je le feuilletterai tout au long du dîner et leur en ferai une lecture choisie, pour leur plus grande horreur (jusqu'à ce que H. me le confisque). Je vous livre deux ou trois recettes. A mon avis, cela peut se tenter.
Ragoût oublié
500 g de viande maigre à ragoût

2 pommes de terre coupées en quatre
2 carottes coupées en rondelles
2 oignons coupés en quatre
1/2 tasse (120 ml, à peu près 120 g) de julienne de céleri branche
1 cuillère à soupe de tapioca
240 grammes de sauce tomate
1/2 tasse (120 ml) de Coca-cola
Mettez la viande, les pommes de terres, les carottes, les oignons et le céleri dans une casserole. Saupoudrez de tapioca. Mélangez la sauce tomate et le coca-cola et versez par-dessus. Couvrez hermétiquement. Mettez au four à 120°C et ne surveillez pas pendant 4 heures.

œufs crèmeux
3 cuillères à soupe de beurre
3 cuillères à soupe de farine
1/4 de cuillère à soupe de sel
1/8 de cuillère à soupe de poivre
2 fois 1/4 de tasse de Coca-cola
3/4 de tasse de lait en poudre
6 œufs
Dans une poêle, faites fondre le beurre sur feux doux. Mélangez la farine, le sel, le poivre. Laissez cuire en remuant constamment jusqu'à ce que le mélange soit lisse et fasse des bulles (préparez un roux, en d'autres termes). Retirez du feu. Ajoutez le Coca-cola et le lait en poudre (il s'agit d'une béchamel au Coca). Remettez sur le feu et portez à ébullition. Laissez bouillir une minute en remuant constamment. Mélangez doucement les œufs jusqu'à ce qu'ils prennent. Servez sur des toasts chauds, des biscuits ou du riz.

Riz brun pilaf
4 tranches de bacon
1/2 tasse de de julienne de céleri branche
1 tasse de riz brun
1/4 de tasse d'amandes effilées et grillées
1/2 oignon émincé
3 tasses de bouillon de bœuf (bouillon cube)
1/2 tasse de Coca-cola
1/2 cuillère à thé de sel
Cuisez le bacon jusqu'à ce qu'il soit craquant, réservez deux cuillères à thé de la graisse rendue. Réduisez le bacon en miettes et réservez. Faites cuire l'oignon et le céleri dans la graisse du bacon jusqu'à ce qu'ils deviennent tendres sans brunir. Mélangez le bouillon, le riz, le Coca, les amandes, le sel et le bacon, portez à ébullition. Couvrez et faites cuire au four une heure à 160°C.

Soupe à l'oignon française (dans la section micro-onde. H. a failli s'évanouir)
3 cuillères à soupe de beurre
3 gros oignons émincés
3 tasses de bouillons de bœuf
1/2 tasse d'eau
1/2 tasse de Coca-cola
1 cuillère à thé de sauce Worcestershire
sel et poivre à volonté
croûtons (en anglais: «croutons»)
parmesan râpé
Dans un plat à micro-ondes, mélangez le beurre et les oignons et couvrez hermétiquement. Cuissez à puissance maximum pendant 10 minutes jusqu'à ce que les oignons soient tendres. Ajoutez le bouillon, le Coca, la sauce Worcestershire, le sel et le poivre. Faites cuire puissance maximale pendant 10 minutes, puis à puissance moyennes pendant 10 minutes. Laissez reposez 5 minutes avant de servir avec des croûtons et du parmesan.

Enfin, pour ceux qui seront sur la route dans les prochaines heures, cette recommandation que je traduis sans tout exactement comprendre:
La prochaine fois que vous conduirez à travers une pluie battante et que vous peinerez à voir à travers le film gras que la route projette sur votre pare-brise (?? "the build up of road film on your windschield"), essayez un Coca-cola : aspergez votre pare-brise de Coca et passez les essuie-glaces.
Je savais déjà que les ambulanciers aspergeaient de Coca-cola les taches de sang sur les routes afin de les faire disparaître, voilà maintenant le Coca-cola lave-glace. (A utiliser uniquement les jours de pluie, apparemment ce n'est pas bon pour la carosserie, il faut donc qu'il pleuve afin que la pluie lave le Coca qui tomberait sur la peinture).

PS : Harry Potter est en pré-commande sur Amazon : sortie le 31 décembre 2007.

Les traditions se perdent

— C'est un volcan que tu es censé faire dans ta purée, pas une tête de mort !
[…]
— Un peu de sauce dans tes orbites ?

Printemps

C'est l'époque des beignets de fleurs d'acacia, mais tous les arbres ont été élagués si haut que je ne peux atteindre les fleurs.
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