Billets qui ont '2025-05-26' comme date.

Marcel Ophüls

Mémoires du ghetto de Varsovie est préfacé par Pierre Vidal-Naquet qui évoque Le chagrin et la pitié, mais aussi The Memory of justice dont je n'avais jamais entendu parler.

Un tour sur Wikipedia plus tard, j'apprends que Marcel Ophüls est mort samedi.

Retours

Douche maquillage rasage vingt minutes; petit déj quarante minutes; valise quinze minutes. Direction la salle, démonter et ranger tables et chaises, laver les derniers couverts, les gros plats, organiser les caisses réfrigérées; à l'aller H. avait fait deux voyages, soit deux volumes de voiture, un le week-end précédent et un avant-hier; tout ce qui reste aujourd'hui doit tenir dans la voiture d'A. en un seul voyage. Quelques décisions plus tard tout est chargé. Retour chez Madame mère pour le déjeuner; retour à la salle pour effectuer l'état des lieux et rendre les clés; retour chez Madame qui avait émis le souhait d'aller sur la tombe de beau-papa (il faut en profiter quand nous avons une voiture suffisamment grande pour installer sa jambe raide). Mais finalement non, elle a eu froid hier, elle est enchifrenée, sans doute un peu déprimée en contrecoup de l'agitation de la veille qui a rompu son quotidien monotone, elle ira dans la semaine avec son frère.

Je monte à l'étage dormir vingt minutes; ça la surprend toujours que je puisse dormir ainsi sur commande dans à peu près toutes les situations.

Puis nous partons, autoroute, pluie, A. arrive quasi en même temps, déchargement des voitures, capharnaüm. Deuxième Tétris, tout tiendra-t-il dans le frigo, je vais acheter des sacs congélation chez l'arabe du coin.

Je fais la vaisselle en regardant Sugar sur Apple, série esthétique et lente. Préparation de mon sac et mes vêtements afin de partir vite demain matin. Cela paraît très loin et bien trop proche.

Cousinade

Ça s'est très bien passé et je ne me souviens rien. Sont-ce les rêves de la nuit à la recherche de clés disparues; ai-je bu trop de soupe champenoise, est-ce le récit de Marek Edelman lu par intermittence?

J'ai discuté, j'ai lu, j'ai eu froid, j'ai essuyé des assiettes, j'ai regardé des boulistes. Il y avait une tripotée de petites filles, quatre et deux sœurs, intrépides et trognons, dont une Heidi de carte postale et un bulldozer frisotté de trois ans.
A l'arrivée des cousins j'ai eu un blanc. Les autres années je révise mais cette fois-ci je l'avais négligé et je ne me souvenais plus des prénoms, Carole, Carine, mais qui est ce jeune homme? «le copain de Julie» «non, de Tiffany; moi c'est Christelle, Julie (sa fille) se marie dans trois semaines». Christelle est grand-mère depuis mars. C'est beau-papa qui me tenait au courant des naissances; maintenant je n'ai plus les infos.

Je m'endors sur le terrain de boules; je rentre discuter avec un oncle et une tante («vous n'êtes pas trop isolés?» «ça dépend, comment définis-tu isolés?» ils ont l'air bien dans leur peau dans leur village de cent cinquante âmes); les boulistes et la marmaille rentrent pour dîner; comment cela, ils ont encore faim? incroyable. Mais tant mieux, tant mieux, que va-t-on faire des restes? Distribution, de brioches, de salières, de cubis («j'ai une AG d'assoc la semaine prochaine» «ça tombe bien, tu ne veux pas les cubis?»), de pains, de terrines «attends je te trouve un contenant, il faut que je rende le plat au charcutier».

Les enfants épuisés commencent à pleurer de fatigue, les cousins débarrassent les tables, enlèvent les nappes, nettoient un peu. «Partez, vous avez de la route», mon surmoi d'assureur est vaguement inquiet. J'impose qu'on aille se coucher, nous avons mal partout; non, pas de dernière vaisselle, nous verrons cela demain.

Hôtel. la fête de la bière fait moins de bruit ou il est plus tard. Ce fut une bonne journée.

Préparatifs

Dans la matinée, je récupère Mémoires du ghetto de Varsovie de Marek Edelman et Hanna Krall dans un casier Mondial Relay.

Violente engueulade avec A. qui me reproche de lui reprocher de mettre soixante-dix ans d'efforts familiaux à la poubelle. Mais deux mois plus tard, elle n'a toujours pas de boulot. Nous ne posons plus de question.

— J'ai fait lire la conversation à mes amis pour voir si c'était moi qui étais anormale de trouver que tu exagérais.
— Ah, parce que non seulement tu m'insultes mais tu trouves normal de faire lire ça à tes amis?
— Tu m'as accusée de mettre soixante-dix ans d'efforts à la poubelle.
— Ce n'est pas de ma faute si c'est vrai.
— C'était à propos de soutifs je te rappelle.
— C'est faux.
— C'est vrai.
— C'est facile : c'est écrit. Descends (elle est à l'étage), on va relire la conversation à deux, tu vas voir.
— J'ai autre chose à faire.
— Espèce de lâche. Tu m'insultes devant tes amis, mais tu es incapable de venir lire à côté de moi.

Elle n'est pas descendue. C'est bon, qu'elle se débrouille avec son père. Un fils et une fille en moins, je vais bientôt être tranquille.

On part à deux voitures. Je prends la petite rouge, H et A sont dans la Dacia avec les victuailles. J'écoute les podcasts sur Bouveresse. Il me fait sourire, surtout quand il souligne l'épouvantable sérieux des philosophes français qui rejettent la science tout en en adoptant les tournures de langage pour faire sérieux. J'ai acheté plusieurs de ses livres au cours du temps; il faudrait que je les lise.

Nous récupérons la salle, installons tables et chaises, bourrons les chambres froides. H. a oublié d'emporter nos assiettes, nous en récupérerons chez sa mère, O. viendra avec une douzaine.

Carrefour, dernières courses, nous achetons des compotes déraisonnables (rhum ananas) et de quoi faire des spritz. Le soir, nous soûlons Madame d'un spritz miniature dans un petit verre à cognac.

Hôtel. Fête de la bière à Châlons. Nous sommes sur la cour, c'est bruyant malgré tout. Je lis Edelman. Je connais si bien tout cela; pourtant c'est comme si je le découvrais, comme si je n'avais jamais rien lu.

Une journée ordinaire

Matin: le salarié qui m'avait dit qu'il donnait sa dèm vendredi dernier pour finalement me dire lundi qu'il restait a donné sa lettre ce matin avant que j'arrive pour revenir faire une crise d'angoisse dans le bureau de la RH et reprendre sa dèm…
Nous l'aimons tous beaucoup et c'est un excellent professionnel: deux raisons pour souhaiter qu'il reste, mais ça va devenir compliqué. Il ne supporte pas la période d'incertitude dans laquelle nous sommes entrés pour deux ou trois ans.

Midi : conseil d'administration et coup de théâtre; revirement du président; je ne comprends pas ce qui vient de se passer (ou plutôt pourquoi et comment cela vient d'arriver) mais c'est parfait. Je murmure à mon chef: «vous venez de gagner une cape et un slip par-dessus votre pantalon».

Fin d'après-midi: pilates.

Soirée : H. a cuisiné toute la journée, A. est arrivée vingt minutes avant moi. Elle nous prête sa voiture pour emmener jusqu'en Marne le buffet préparé par notre charcutier local.

Déprime

A. au téléphone me dit qu'elle n'a pas vu les deux semaines qui viennent de s'écouler. Apparemment elle ne sort plus de chez elle et s'installe dans un vide sans repère.

Ça m'inquiète mais je ne réagis pas aussitôt. Ce n'est qu'après avoir raccroché que je me dis qu'elle est en «menace de déprime», comme me l'avait dit un médecin il y a bien longtemps (aujourd'hui ils sont plus catégoriques et plus catastrophistes). Je prends la décision d'aller la voir vendredi plutôt que mes parents. Il s'agit de la secouer de son rêve éveillé, de lui redonner de l'énergie. Elle sort d'une formation, il faut qu'elle trouve du travail. Elle est affligeante et exaspérante: «tu comprends, maintenant que j'ai un diplôme, les agences (d'interim) ne peuvent plus me donner les petits boulots d'avant. C'est pour ça que je ne trouve pas.»

En réalité, elle ne trouve pas parce qu'elle ne cherche pas. Elle attend que Pôle emploi ou les agences d'interim lui trouvent un emploi à sa place. Elle est terrifiée à l'idée de «se vendre» (faire son auto-promotion), à l'idée qu'on lui dise non ou… que plusieurs lui disent oui et qu'elle doive dire non à certains (à quoi nous lui répondons que nous souhaitons que ce soit son seul problème…) Bref, elle a peur, ce qui est normal, mais ne prend pas la décision d'agir malgré la peur. Avoir peur mais l'ignorer et agir, c'est malgré tout la base dans de nombreuses situations. Ça m'agace. Que croit-elle? Que c'est facile pour tout le monde sauf elle?

L'autre solution pour trouver un emploi sans convaincre un recruteur, c'est de passer des concours. A condition de supporter l'oral.
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