Billets qui ont 'Cusset, François' comme nom propre.

Les années 80

Porto m'a amené à lire La décennie de François Cusset. Cela me rend triste et m'écœure, même si je sais déjà tout cela.

Ce que le Centre d'étude des Revenus et des Coûts (CERC) nomme dans son rapport de 1990 «le tournant des années 80» se résume alors aisément: c'est le creusement brutal des inégalités de revenus, les «fruits de la croissance» allant pour les deux tiers aux revenus du capital au détriment des revenus du travail (l'année-charnière ici encore est 1983), si bien que «le nombre des ménages les plus pauvres s'accroît deux fois plus vite que la population».

François Cusset, La décennie - Le grand cauchemar des années 1980, p.169
- mai 1981. Jour de régate (compétition d'aviron). C'est le soir, j'attends mes parents dans le hangar à bateaux, je suis assise sur un seau. Castor arrive, m'annonce hilare: «la gauche a gagné». Je reste de bois, j'ai quatorze ans, on ne parle jamais de politique à la maison, j'ai le vague sentiment que mes parents ne seront pas ravis. Castor dégrisé me lance avec mépris: «Tu es de droite?»

- septembre 1984. J'arrive en hypokhâgne à Versailles. Sur les trottoirs, les premiers SDF font leur apparition. Moi qui m'étais demandé en 1975 ce qu'on faisait des mendiants en France… (étaient-ils parqués dans des hospices?)
(Ils n'ont jamais disparu.)

- 1996. Je travaille au Gan, mon amie à l'UAP. Ces deux entreprises sont en vente. Elles vont donc disparaître, mathématiquement. L'Etat était actionnaire majoritaire depuis leur création en 1968 par fusion de sociétés d'assurance nationalisées en 1946.

- 2012. Après que le Gan a été au cours des années coupé en trois (Gan assurance, Gan eurocourtage, Groupama Gan Vie), une partie (Gan eurocourtage) est vendue à Allianz par son racheteur de 1996 qui manque de fonds propres. (En 2008, c'est AGF, une autre nationalisée de 1982, qui a été fondue dans Allianz)1.

D'autres chemins auraient peut-être mené aux mêmes résultats, ou à des résultats voisins, ou pires. Mais j'ai une pensée pour tous ces salariés balottés d'une boîte à l'autre, en silence, dans la peur d'être virés, les moins qualifiés restant les plus fragiles, bien entendu.
(Mais bon, travailler dans l'assurance, cela fait moins pleurer que dans l'industrie automobile (et dans un sens, c'est normal, un bureau c'est moins fatiguant que la chaîne, no contest (Mais… (bref, je suis écœurée.))))



1: mise à jour en décembre 2012: Gan eurocourtage est partagé en trois, entre GGVie, Allianz et Helvétia. Dépeçage.

Les années 80 à Porto

Passé une partie de la nuit à finir mon intervention de la journée. Beaucoup coupé, c'est beaucoup trop long, et je ne suis pas sûre de réellement répondre à la question.
Il y a toujours cette impression un peu étrange d'être en train de mentir parce qu'on ne dit pas tout.

Comme toujours, les personnes bilingues me remplissent d'admiration. Et il s'agit de littérature, ce qui signifie que nous ne pouvons être dans l'à-peu-près en ce qui concerne la langue.

Noémie nous raconte un colloque en Iran («Mais qu'est-ce que je fais là?»), la peur, mais aussi l'étonnement, le voile comme parfait vêtement pour ne pas être touriste, pour être libérée des regards, la loudeur du manteau, les gestes empêchés,…
Une Chinoise docteur en littérature française en ayant travaillé sur l'ironie (y a-t-il quelque chose de plus culturel que l'ironie?), un Espagnol doctorant travaillant sur Romain Rolland (détail curieux: Romain Rolland n'est pas réédité en France mais disponible en Allemagne), une professeur qui nous parle de Jean Muno (mais qui est-ce?), Noémie préparant sa thèse sur Hervé Guibert.
A lire aussi sans doute, François Cusset: La décennie - le cauchemar des années 80.

(Je suis un peu embêtée, parce que j'ai eu le malheur de parler de ce blog et que je ne voudrais pas vexer ceux que je ne vais pas citer alors que j'écris sans désir d'exhaustivité (sinon je reprendrai le programme). Mais enfin, l'expérience prouve qu'il n'y a pas à s'inquiéter, au final, bien peu lisent.)

Les organisateurs ont vraiment bien fait les choses et au déjeuner José était très gai en bout de table. (Mais de quoi parlait-il? En tout cas la bouteille était vide.)
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