Promenade au bord de la Dordogne avant de partir pour Pau. La ville n'en finit plus de célébrer Cyrano qui apparaît à tous les coins de rue.

Hésitation sur la route à suivre. Je choisis Duras, simplement pour le nom.

Visite du château. Il a ceci d'émouvant que son état actuel est le fruit de la persévérance du village entier, d'abord pour l'acheter, ensuite pour le rénover, enfin pour le faire connaître; tant et si bien qu'il y a cinq ou six ans le prince de Monaco a visité le lieu en lien avec ses ancêtres.
C'est une bâtisse qui par son plan carré et ses quatre niveaux est plus grande qu'il n'y paraît et nous terminons la visite vers une heure de l'après-midi, ce qui est tard pour un diabétique. Repas léger sous les arcades (du type smoothie bio et légumes lait de coco — je me moque, mais aussi du snobisme qui consiste à se moquer, car en réalité ce genre de plats est souvent délicieux et digeste) et achat de tongs de compétition en vente en face — les dernières achetées à Sisteron étant devenues importables à force d'être détendues (mes deux obsessions de l'été: avoir les orteils à l'air et bronzer — des jambes et des bras, sans marque de tee-shirt).

Nous repartons. Traversée des landes dans leur extrémité orientale, déviation et détour, nous sommes seuls, il fait beau. Nous avons recapoté pour nous protéger de la chaleur.
Soudain coup de volant. Je me réveille, H. vient de redresser la voiture qui traversait la route, je me suis endormie en conduisant.
C'est toujours le même phénomène, le glissement de la réalité au rêve avec une puissance du rêve telle qu'il me semble être éveillée. Sommeil profond, je ne me suis rendue compte de rien, je n'ai même pas lutté. H. sera très élégant, il n'en reparlera pas.

Nous voyageons au jugé, attirés par les noms: Casteljaloux, Cazaubon, un diabolo-menthe à Aire-sur-l'Adour. Arènes, publicité pour des courses de taureaux ou de vachettes — est-ce de la vraie corrida? Ici comme à Bergerac, parcours sur la libération de la ville. J'aurais bien visité Nérac, je serais bien passée à l'abbaye de Flaran que j'ai aperçue à l'ouest sur une carte, mais nous avons rendez-vous demain soir dans la vallée d'Aspe et ne sommes pas très sûr des difficultés devant nous: ce n'est pas si loin, mais si cela devient vraiment montagneux, nous n'irons pas vite.

Pau. J'imaginais cette ville dans les premières contreforts des Pyrénées, je suis surprise de la trouver presque dans la plaine. Le Béarn. D'Artagnan et Henri IV. Ça me fait plaisir.
Quality hotel Centre Bosquet. Les deux hôtesses de l'accueil sont charmantes et nous recommandent sans hésiter deux restaurants quand nous leur demandons une adresse.
Nous sortons. Rues piétonnes animées, moustiques voraces, palmiers nombreux. Lundi soir: première adresse (le Gueuleton) fermée, deuxième adresse (Ô petit Pau) fermée. Il est vingt heures, nous reprenons notre ronde. Les terrasses sont pleines, les touristes en déroute (dont nous) se font éconduire, un, deux, trois restaurants, tout est réservé, il n'y a plus de places, ou pas assez de serveurs ou pas assez de cuisiniers: il manque du personnel partout.

Nous finirons par échouer dans un restaurant indien, d'abord à l'extérieur puis à l'intérieur quand la nuit deviendra trop fraîche. A la table d'à côté, un homme entre militaire et garde du corps raconte à sa compagne (est-ce un premier rendez-vous?) le faux attentat organisé par Mitterrand contre lui-même. Il explique que l'attentat contre Trump est tout à fait invraisemblable: «un tireur d'élite atteint sa cible à deux kilomètres, alors à cent cinquante mètres, c'était impossible de le rater».

Quand nous rentrons, j'allume la télé. Delon est mort hier. Nous voyons les dernières minutes de Plein soleil. J'ai lu le livre (Monsieur Ripley) mais jamais vu le film.