Billets qui ont 'Mahler, Gustave' comme nom propre.

3e de Mahler

Ce soir concert à la Philharmonie. J'ai donc commencé la journée en garant la voiture porte de Pantin, après avoir suivi le parcours sinueux de Waze qui m'a fait traversé la Seine deux fois pour éviter la A4. Puis deux croissants et un crème, tramway, ligne 1 et RER A.

A midi, sept des huit rameuses de dimanche prochain était là. Belle sortie avec Anne à la nage (est-elle allée se plaindre après la sortie du week-end dernier?).

Le concert (la 3e de Mahler) commençait à 20H30. J'avais donné rendez-vous à Jérémy — que je n'avais pas revu depuis deux ans ou plus — à 19h30 au café des Concerts. CityMapper me proposait plusieurs trajets, j'ai choisi de varier un peu: RER A puis ligne 9 jusqu'à mairie de Montreuil.
Dix minutes annoncées entre chaque rame. Nous attendons sous une pluie glacée, sous l'abri de la station. Un Algérien beurré comme un petit Lu est surveillé par des congénères, la conversation s'engage, c'est jour d'élections en Algérie. Nous attendons. Un tramway passe en face, deux stations le sépare de nous. Nous attendons. Je twitte, je lis Twitter. Nous attendons. Des gens commencent à s'impatienter, certains partent. Nous attendons. Une rame arrive, vide, ralentit, nous nous approchons, elle ne s'arrête pas et repart, vide. Cela fait plus d'une heure que nous sommes là, j'aurais dû surveiller l'heure, la triste réalité est qu'il n'y a plus de tramway.
Je préviens Jérémy de dîner de son côté et commence à marcher sous la pluie, porte de Montreuil-porte de Pantin combien de kilomètres combien de temps?
Pour une raison que j'ignore une dame a commencé à engager la conversation avec moi et m'accompagne, elle voudrait prendre un taxi en commun, elle va aussi à la Philharmonie. Pas de taxi, nous marchons, nous voyons passer d'autres rames vides qui ne s'arrêtent pas. Si ma voiture n'avait pas été à Pantin, je serais rentrée chez moi. Je toque à la vitre des voitures arrêtées aux feux rouges, mais à ma grande surprise les conducteurs ne sont prêts à faire aucun effort. Un homme finit par accepter de nous avancer de quelques portes, nous bavardons, il est d'Europe de l'est, éberlué par le bordel actuel.
— Ça va s'arrêter quand ?
— Oh, ça va continuer la semaine prochaine, ça ne va pas s'arrêter avant les vacances. Après les profs seront en vacances, ce ne sera plus pareil.
Il est effaré : — Ah, c'est bien d'être prévenu, répond-il, paraissant réellement soulagé.

Nous marchons, trouvons un taxi, j'arrive quelques minutes avant le concert. Je suis déçue de ne pas avoir pu discuter avec Jérémy. 3e de Mahler dirigée par Esa-Pekka Salonen devant une salle clairsemée. Quand les chanteurs entrent sur scène lors du quatrième mouvement, je me souviens de Gv expliquant les choix différents selon les chefs d'orchestre (chanteurs présents durant tout le concert ou entrants sur scène, assis ou debouts).

Je ramène Jérémy chez lui. A onze heures passées il y a encore énormément de voitures dans les rues. Nous parlons traductions (les logiciels de traduction automatique utilisés dans des cadres professionnels malgré leurs failles), GPA (les femmes indiennes qui paient ainsi les dettes de leur mari, les Américaines qui s'offrent un tracteur), adoption… Je suis contente de l'avoir revu.

Thomas Hampson chante les Kindertotenlieder

— Tu ne vas pas faire la bise à Thomas Hampson? me demande Gv, taquin.
— Hum, ce n'est pas mon genre.
(Et au moment où j'entends ces mots, je me rends compte de leur possible ambiguïté).

Vincent, j'ai été très heureuse d'avoir été présentée à HLG. Même s'il m'a déjà oubliée à l'heure qu'il est, cela m'a fait très plaisir, bien plus que ne l'aurait fait une bise à ou de Thomas Hampson.

André Tubeuf

A midi, je suis allée écouter une conférence de Tubeuf sur Mahler à l'opéra Bastille.














Et je n'ai rien osé mettre en ligne à l'époque car j'étais intimidée par mes potentiels lecteurs. J'écris et mets en ligne le 13 janvier 2018, sept ans plus tard.

Mahler à Berlin

Virée express à Berlin invitée par Gvgvsse à la deuxième Symphonie de Mahler par Simon Rattle. (Très) heureuse d'être là, à cause de l'invitation impromptue, miraculeuse, à cause de la grisaille secouée, à cause du bel automne, de la couleur des feuilles, de la douceur de l'air, de la Philharmonie bouton d'or, de Gv qui m'explique: «Quand Karajan a choisi cet endroit on lui a dit qu'il était fou, que c'était loin de tout; il a répondu: "un jour, ce sera au centre"». Interloquée, j'objecte que c'était un sacré pari malgré tout, qui aurait pu prédire cela? Réponse catégorique, royale: «Il ne savait pas que cela surviendrait si vite, mais c'était inéluctable: quel empire a vécu mille ans?»

Gv me donne quelques indications: l'œuvre de Schönberg jouée tout d'abord, la Seconde Symphonie directement enchaînée, le chœur déjà présent dans la salle, les fanfares jouées dans le lointain, des coulisses...
Je n'ose pas vraiment parler de musique, je me sens empêtrée dans les mots, un vocabulaire que je ne maîtrise pas. Je parlerais d'une atmosphère intime, la grande salle close comme une enclave protégée tandis que mon manque d'habitude me fait perdre régulièrement la musique que je cherche des yeux tandis qu'elle voyage d'instruments en instruments. Peut-être qu'il serait plus sage de carrément fermer les yeux, mais ce serait tout de même dommage, il n'en est pas question. Plaisir et surprise des contrastes de volumes et de timbres, de la musique infime à tonitruante, du son qui enfle et se tait, douceur du chant de la fin.
Ovation, standing ovation, Simon Rattle, les solistes Magdalena Kožená et Kate Royal et le récitant de Schönberg Hanns Zischler reviennent saluer. Devant moi, un vieux monsieur en tricot gris et une vieille dame en rouge descendent laborieusement les marches un bouquet de roses blanches à la main. Je pense qu'ils souhaitaient l'offrir à Magdalena Kožená mais ils sont trop âgés, ils marchent trop lentement, elle a quitté la scène quand ils arrivent devant. Ils attendent, elle ne revient pas, ils confient leurs fleurs à Simon Rattle.
La salle continue d'applaudir, les musiciens quittent leurs places, Simon Rattle revient, salue, se retourne vers les chaises vides et les associe aux applaudissements d'un geste de la main, tout le monde rit.
C'est fini.

Tandis que je balbutie quelques mots d'admiration, Gv commente sobrement : «Ce n'est jamais que le meilleur orchestre du monde... je me suis dis que si c'était ton premier concert Mahler, autant que ce ne soit pas par un orchestre de second ordre.» En moi quelque chose sourit d'une oreille à l'autre, amusée et gaie: oui évidemment, vu comme ça...

Dehors, Gv m'explique comment sont dirigés les musiciens des fanfares en coulisse. Il me raconte une anecdote survenue lors de la Seconde Symphonie donnée par Pierre Boulez pour ses 80 ans (anecdote que je viens de retrouver dans son blog) et le lien Mahler-Klemperer. Je pense que je ne l'oublierai plus.

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