Billets qui ont 'Origène' comme nom propre.

Retour de Marseille

Marseille, Neuf-Port

Nous sortons du métro à la Joliette. Le premier bâtiment qui attire le regard est celui de Kengo Kuma pour le FRAC, nouvelle variation sur le motif de la résille, cette fois faite de carrés. L’étroitesse de la parcelle confine quelque peu l’édifice.

Le quai de la Joliette passe entre une série de docks côté ville et ce qui fut le grand port industriel et commercial de Marseille côté mer. Les docks, d’un dessin tout anglais, datent du Second Empire. La longue enfilade alterne façades à pignons de six étages et façades aux toits plats de cinq, le tout en pierre et non en brique comme on pourrait s’y attendre. L’intérieur vient d’être rénové par l’architecte Eric Castaldi ; on traverse entre des boutiques sans grand intérêt (mais non sans prétention), une succession de hautes cours traitées en puits de lumière, très réussies. Une des façades d’entrée dans ce centre commercial fort calme le lundi matin affiche de nombreuses citations littéraires sur Marseille. Il semble que le vachard Suarès, si spirituel pourtant, ait été écarté de cette anthologie métallique (encore une résille). Son « Marsiho » a pourtant fait ces jours-ci les délices de notre petit groupe.

De l’autre côté du quai, face aux anciens docks, donc, se trouve un autre centre commercial, Les Terrasses du port, beaucoup plus fréquenté, cinquante fois plus banal et attendu que son voisin, et dont le seul attrait est la terrasse, justement. On s’y trouve à peu près à mi-hauteur des grand ferries prêts à appareiller pour la Corse, la Sardaigne ou l’Algérie, on y voit fort bien le Pharo, l’archipel du Frioul, l’immanquable château d’If, l’Estaque et la côte Bleue.

Après les docks, le quai aligne du côté de la ville de beaux immeubles haussmanniens qui viennent de retrouver leur cachet. On remarque que leurs portes de bois traditionnelles ont été remplacées par de modernes vantaux ajourés en bronze, d’un assez bel effet, et que leurs combles sont plats ; le modèle parisien a t-il ici été adapté dès le début à des contingences locales, ou bien faut-il voir dans ces attiques étranges un reflet des vicissitudes des temps successifs dans ce quartier on ne peut plus populaire naguère encore ?

La cathédrale de Marseille, la Major, n’est pas ravalée, elle. Retrouverait-elle par la grâce d’un nettoyage extérieur un charme perdu ? J’en doute un peu. C’est pour le coup que la comparaison avec un éléphant, venue à l’esprit de Huysmans devant Fourvière, peut resservir. Et l’intérieur, cette fois, ne fait pas beaucoup pour la sauver. On a l’impression que les entrepôts au-dessus desquels elle fut construite, et qui ont disparu depuis pour faire place à des boutiques pour bobos, lui ont communiqué irrémédiablement quelque chose de leur pénombre, de leur poussière, de leur humidité, de leur trivialité. Car à la fin c’est un monument aussi bête que triste. Pour comble, ce qui reste de l’ancienne Major, la romane, la vénérable, n’est pas (ou plus accessible) et ne peut faire signe que de loin, derrière les grilles d’un chantier peut-être éternel.

Pour retrouver le Vieux port, nous traversons une seconde fois le quartier du Panier, pour un adieu à la coupole de Puget et un salut à sa maison natale, presque en face. Le passage de Lorette nous mène à la rue de la République, anciennement rue Impériale, à travers l’impressionnante cours d’un immeuble de rapport haussmannien, très-longue, très-haute et très-étroite. Le modèle parisien d’adapte-t-il ici aux chaleurs des étés provençaux ?

Un dernier regard au port, à la Canebière, aux grands escaliers de la gare Saint-Charles, qui célèbrent avec faste les colonies, et nous rentrons chez nous.

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Seul dieu est sujet de bara (création). dans la Bible. Berechit barah Elohim.
mâle et femelle (et non homme et femme)

Dieu dit : dix fois : un décalogue

Trois bénédictions (bénédiction : dire du bien)
les animaux
l'humain mâle et femelle (donc animaux)
le septième jour (repos). le temps.

Dieu sépare, dieu organise
Dieu donne. pas n'importe quoi : à manger, ce qui permet de vivre.
Pour les hommes : une nourriture distinguée : graines et fruits.

berechit : pas seulement comme du temps, mais unique principe.
Origène : le principe : c'est le X. unique principe : pas une allusion philosophique mais une allusion christologique.

Col 1 12-23

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Le soir quand je consulte mes mails, j'apprends que la femme d'Antoine est morte. Enterrement jeudi.

Un déjeuner

TG sur Origène, les trois niveaux de lecture. Je l'ai lu il y a un peu trop longtemps et je n'ai pas formalisé mon travail par écrit, ce qui fait que j'ai un peu de mal à suivre.
Et je ne suis pas à l'aise avec le schéma décrit par la chargée de TG, il me semble que l'arbre des lectures ne se déploie pas au bon niveau. Tant pis.

Comme la chargée de TG trouve le dossier "léger", elle nous libère une heure avant la fin et je passe une heure à la Procure. Je craque pour Les Pères grecs et les Les pères latins de Campenhausen et les tomes 1 et 2 de L'histoire des conciles œcuméniques respectivement d'Ortiz de Urbina et Camelot. (Toujours cette illusion que les livres vont résoudre les problèmes. A quoi bon si je ne les lis pas?) Je me donne bonne conscience en me disant que cela ne coûte rien puisque je paie avec les bons cadeau du CE pour Noël.

Déjeuner chez Zvezdo qui a malicieusement invité Thomas, un délégué syndical marseillais de ma boîte (et néanmoins ami!). Nous discutons boutique (j'espère que nous n'avons pas trop ennuyé nos hôtes) et potinons, Thomas est très drôle quand il parle de ses histoires de famille (corse), il nous raconte l'association entre lui et ses frères et sœurs avec les enfants du compagnon de sa mère («On se détestait mais on a fait alliance pour que nos parents se séparent. On a été infernaux». Brrr, en tant que parent, j'en ai froid dans le dos).

La position de Thomas sur le syndicalisme est proche de la mienne: plutôt que toujours se plaindre, agissons. C'est vrai, c'est tout à fait ce que je pense, mais ce qui me retient (de me syndiquer), c'est la perspective d'encore me disputer avec tout le monde et d'encore me faire détester. Je suis fatiguée de cela, je souhaite être tranquille. (Mais il a raison.)

Je vais ensuite voir Merci patron, sur les conseils de Françoise. J'en sors sonnée, avec une envie de rire et de hurler de colère.
Allez-y, mais surtout, ne lisez rien avant, allez-y sans aucune information, découvrez le film dans la salle (un bon film d'espionnage, un mauvais sitcom, une bonne ou une mauvaise farce. Je ne veux pas spoiler et pourtant, il y en aurait des commentaires à faire. Dégoût et rires.)


Plus tard dans la voiture en rentrant, la radio m'apprend que PUF a installé rue Monsieur le Prince une imprimante qui vous "cuit" votre livre en cinq minutes à condition qu'il fasse moins de huit cents pages. Le catalogue PUF et tous les livres libres de droit sont disponibles.
Qu'est-ce que ça va changer? Cela devrait tout changer. Par rapport à une librairie traditionnelle, cela suppose que l'on sache exactement le livre que l'on veut. Comment se faire connaître quand on sera nouvel écrivain?

Origène

«D'après la légende, Origène aurait commenté tous les livres [de la Bible] trois fois1», nous dit le prof. Et in petto, je me dis que c'est mieux que Chuck Norris, qui a compté jusqu'à l'infini deux fois.

Légende, car de l'œuvre monumentale d'Origène il ne reste que des morceaux ou des traductions plus ou moins fidèles (traduction en latin à charge de Jérôme, à décharge de Rufin (la fin d'une amitié).
(Il est possible de retrouver encore des manuscrits. En réalité, rien n'est moins clos que la recherche biblique ou patristique, susceptible d'être relancée à tout moment par une découverte archéologique ou philologique.)

Qui a dit (Strauss, r-Camus, Taubes?), et était-ce à propos d'Origène, qu'il fallait vraiment être hors du commun pour réussir à parvenir à la postérité à travers ses ennemis, quand on voit comment ceux-ci déforment votre pensée? Impossible de remettre la main sur la citation exacte.


Note
1 : par commentaires, par homélies, par scolies.

Grec

Avant-dernier cours de grec (mais nous avons déjà les dates pour l'année prochaine).
Je ne sais plus si j'ai noté ici que l'intérêt de la Vulgate est de traduire — parfois — mais à quels endroits? — d'autres versions du Tanakh (Bible hébreu) que la Septante (LXX). (Jérôme a d'ailleurs caché qu'il faisait appel à des érudits juifs pour son travail car ce n'était pas très bien vu).

Le texte du Tanakh a par ailleurs été révisé trois fois (disons que nous retenons trois révisions majeures) dans le monde juif: par Aquila de Sinope, par Symmaque et par Théodotion, révisions très peu prises en compte par les chrétiens des premiers siècles qui avaient déjà figé (quasiment, il faut toujours rester nuancé) leur version de la Septante.
Origène constitua le premier "synoptique", les Hexaples, mettant côte à côte les différentes versions afin de les comparer. De cet énorme travail, il ne nous reste que quelques pages.

(C'est incroyable comme tout ce qui concerne Origène a disparu: il a écrit une correspondance immense, je ne sais plus exactement ce que nous a dit la prof, que Jérôme aurait parlé de neuf tomes de lettres avec un seul correspondant, l'un de ces tomes faisant plusieurs volumes (première fois que j'entendais qu'un tome pouvait se composer de plusieurs volumes… à cause de l'épaisseur du support, je suppose?)
Je ne désespère pas qu'on retrouve encore des œuvres d'Origène: en effet, comme il était anathème, ses éventuels manuscrits sont anonymes. C'est ainsi que des commentaires des psaumes ont été retrouvés en 2005 dans une bilbiothèque de Munich.)

Toujours est-il que pour la prochaine fois, nous devons traduire Dn 7, 1-13 dans la LXX et le Théodotion. C'est excitant.
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