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Janssens, suite

Rendez-vous ce matin pour le suivi de l'expérimentation.

Apparemment le Janssens augmente les risques cardio-vasculaires dans les semaines qui suivent l'injection. En conséquence j'ai une liasse de documents à signer pour prouver que j'en ai été informée (sachant que j'ai été vaccinée il y a un an, ça m'est indifférent (quoi qu'il en soit, cela m'aurait été indifférent, sinon je n'aurais pas accepté de participer à une étude)). «Cela signifie sans doute que ce vaccin va être abandonné» me dit ma doctoresse préférée.

Nous papotons. La conversation tombe sur le débat d'hier:
— Je l'ai regardé par intermittence. Il y a une phrase que j'ai beaucoup aimée: Marine Le Pen en train de dire qu'elle réintègrerait les quinze mille infirmières. D'abord elles ne sont pas quinze mille. Ensuite beaucoup sont déjà revenues. Beaucoup ont touché leur salaire, elles ont trouvé des médecins pour des certificats de complaisance et se sont mises en maladie. Et puis surtout j'adore quand elle a dit qu'elle leur verserait le rappel de leur salaire pendant leur absence: et nous alors? je me suis dit que j'avais vraiment été con de venir bosser toutes ces semaines!

Je lui raconte ce qui a circulé sur Twitter quand les antivax ont été virés de l'hôpital, les photos de banderolles «Bon débarras» ou «Enfin!»: est-ce que c'était vrai?
— Dans le principe oui. Cela générait beaucoup de tension. Les personnes non-vaccinées étaient sur la défensive et donc agressives. C'était pénible.

Elle me raconte que la règle a été de ne pas réintégrer les non-vaccinés dans leur service d'origine: trop de tensions.
— On avait un infirmier dans les étages qui avait demandé à passer en ambulatoire. Ça arrive souvent: dans les étages on fait des gardes jour/nuit, en ambulatoire on revient sur des horaires normaux. Le poste s'était libéré, tout était prévu. Il y a une non-vaccinée qui est revenue, c'est elle qui l'a eu.
Elle soupire.

Je parle des profs, de ce milieu dans lequel j'ai grandi, de la façon dont dans un établissement chacun sait très bien qui tire au flanc, qui n'est jamais malade, qui "consomme" ses jours d'enfant malade sans égard pour les élèves à qui ça supprime des heures de cours, etc. Mais si on leur parle de rémunération au mérite… (sachant que "mérite" n'est pas le bon mot.)
— En même temps, je comprends qu'ils aient peur de dépendre d'un chef d'établissement. Mais ce n'est pas pire que le fonctionnement actuel où ils dépendent d'une hypothétique visite d'inspection, où ils sont jugés sur une heure de cours tous les trois ou quatre ans.


Puis prise de sang avec l'infirmière.
Elle trouve la veine mais le sang ne coule pas. Elle bouge un peu l'aiguille, ne comprend pas. Je ne sens absolument rien, c'en est pertubant: comme si l'aiguille était plantée dans un bras en mousse. Je suggère que l'aiguille à un défaut. «Mais non, ça n'arrive jamais.»

Elle finit par changer d'aiguille. Là encore nous papotons. Elle a entre vingt et trente ans. Nous en venons au report de voix, elle est très surprise d'apprendre que des électeurs de Mélenchon sont susceptibles de voter Le Pen.

Puisque désormais j'enregistre énormément de copies d'écran dans mon téléphone afin de conserver un maximum de documents sous la main, je lui montre le schéma de gauche dont les pourcentages sont obsolètes (je n'ai plus la date et la source de cette image) mais le principe exact.

25 avril : mise à jour. Le schéma de droite représente le report réel.

Report des voix potentiel entre les deux tours de l'élection présidentielle 2022 Report des voix au deuxième tour de l'élection présidentielle 2022


Rappel : il est possible d'ouvrir la photo dans un onglet à part en faisant un clic droit dessus. Cela permet de l'agrandir.

Encore un dimanche




Très bonne sortie ce matin. Yolette Lifa. A la nage, Virginie, Florence, Vincent, Magali.
Dormi tout l'après-midi en sentant mes muscles récupérer.


Elections régionales: je n'ai pas écouté de près, pas trop envie, mais j'ai cru comprendre que le FN était à 27%. Comment expliquer que je suis embarrassée d'être blanche dans le RER tard le soir. Pas effrayée, non1, gênée, comme quelqu'un qui aurait toutes les chances parmi des gens qui en ont moins.





Photo prise à 23 heures 16.


1 : j'ai cru m'étrangler en voyant une gourde ex-députée sur la liste de Dupont-Aignan dire (écrire) qu'«elle n'osait plus sortir le soir, prendre les transports en commun».
Viens avec moi ma poule, accompagne-moi une semaine et tu verras que ça se passe très bien, c'est même une expérience humaine curieusement chaleureuse et paisible: nous sommes ensemble dans notre fatigue et nous rentrons chez nous ensemble dans la nuit.
Arrête de circuler en voiture avec chauffeur.

Printemps

Matinée en yolette de pointe. Elle n'est pas sortie depuis longtemps et quand nous la posons sur l'eau, elle commence par se remplir par une fissure… Elle embarquera environ deux litres d'eau, le temps que le bois commence à gonfler.
Belle sortie, un peu hésitante, nous n'avons pas l'habitude de ramer en pointe. Je n'ai pas ramé de la semaine, diverses réunions et urgences m'en ont empêchée, cela ajouté au geste inhabituel de la pointe me laisse courbaturée pour l'après-midi, des courbatures qui vont devenir de plus en plus présentes au fur à mesure de la soirée.

Pruniers en fleurs et saules pleureurs. (C'est la tache verte claire au dessus de la péniche la plus éloignée, vers le centre de la photo.) Ciel changeant, dès qu'il se découvre il fait chaud.





Taille des hortensias (une tâche jardinière par semaine, je ne peux faire plus). Vote. La relecture de ce blog me montre qu'il y a un an, je passais ma journée dans un bureau de vote. Cela ne me manque pas.

Votez le 25 mai

- pour lutter contre la montée de l'extrême-droite dans toute l'Europe ;
- pour élire pour la première fois au suffrage indirect le président de la Commission qui représentera l'Union européenne pour cinq ans (jusqu'ici, le président de la Commission était nommé par les chefs d’Etat européens).

Procédure :
- Regardez cette vidéo pour vous faire une idée des candidats au poste de président.
- Accédez aux listes de votre région et tâchez de trouver pour quel candidat chaque liste s'est engagée (ce n'est pas toujours le plus facile).
- Votez.

Un dernier conseil : votez efficace. Les petites listes, c'est amusant, mais les problèmes actuels, c'est l'énergie, le réchauffement climatique et le terrorisme. Amusons-nous ailleurs que dans les urnes.

Tout est perdu, fors l'honneur

Maire réélu au premier tour avec 77% (mieux que Balkany), sans doute un siège pour "notre" tête de liste.

Je vous donne une idée de l'ambiance dans le bureau de vote (où toutes les règles ont été scrupuleusement respectées: le résultat n'a rien de frauduleux, il correspond réellement à ce que veulent les habitants): conversation entre l'un des assesseurs titulaires (l'autre c'était moi) et la présidente du bureau :
— Il va y avoir de l'abstention, c'est sûr. Un ami (un très bon ami, c'était mon témoin à mon mariage) m'a dit qu'il ne voterait pas parce qu'il n'y avait pas de liste FN.

(Plus tard, cet homme m'a accusée de froideur: il n'y avait aucune discussion possible avec moi (remarquant Les Fables de La Fontaine à portée de ma main, il m'a dit tout à trac (tellement à trac que je n'ai pas compris tout de suite qu'il me parlait): «moi ce que je préfère, c'est "Le Laboureur et ses enfants"». Je lui ai lancé un regard vide et étonné: euh… oui, pourquoi pas, je suis censée répondre quelque chose à ça? (pensant que je n'avais pas de fable préférée, que ma préférée était celle que je lisais pour la première fois).
Mais de quoi voulait-il que l'on parle, franchement? (En revanche, je peux vous écrire les grandes lignes de sa vie, il nous a raconté ses études, ses enfants, ses lectures (que de la littérature contemporaine, Rouaud,…, mais c'est bien, la lecture, ça détend), son (absence de) régime (mais il a de la chance il ne grossit pas) et sa détestation du sport.))


Toutes les villes alentour semblent connaître le même sort, une droitisation inquiétante (quand on n'est pas d'accord: sinon, une merveilleuse unanimité, bien entendu).


J'ai eu très froid et je n'arrive pas à me réchauffer.

Journée

- 6h : je continue le §56 et suivants des Prolégomènes. Plus facile ce matin qu'hier soir, trop épuisée. En fait, c'est même plutôt exaltant.

- 8h : je prends la voiture. 8h10 je m'arrête dans une station essence, achète un bidon d'huile et le vide aussitôt dans le réservoir (d'huile).

- 9h : trois heures sur Kant. Très intéressant, mais pour une raison que j'ignore le prof ne fait pas de pause et je ne tiens plus la dernière demi-heure. Ce qui est rassurant dans ces textes, ce qui me donne l'impression d'atterrir, toucher le sol, retrouver le sol, c'est que j'y retrouve des intuitions, des choses que j'avais déjà pensées et que je retrouve formalisées, au sens propre: non plus informes et vagues, mais ayant pris une forme.

- 13h : chez les voisins pour un repas de fin de campagne et la préparation de l'entre-deux tours (s'il y a un deuxième tour: le maire sortant a été élu au premier tour trois mandats de suite). Interruption pour emmener O. au solfège à 13h30, puis aux scouts à 16h (week-end sous la tente, j'espère qu'il ne pleuvra pas trop).

- 17h30 : fête du printemps au club de ping-pong. Et fête du jubilé du président: cinquante ans de ping.

- 20h30 : deux épisodes de Killing. C'est lent mais pas désagréable. Ça change des Américains, pas le même style.


Demain, je suis assesseur titulaire : une journée entière en bureau de vote de 7 heures trente à 23 heures. Ça ne me réjouit pas.

Coups bas : apprentissage

H. est sur la liste des municipales. C'est la deuxième fois. Le but serait d'obtenir qu'il y ait un second tour, notre maire étant élu au premier tour en réalisant le deuxième meilleur score de France après Balkany (je ne sais plus si ce classement est celui de 2009 ou de 2004). (Mais l'abstention est grande: élu au premier tour, mais avec 48% des personnes inscrites sur les listes, et non 75%, comme aime à le dire le maire).

Petit à petit nous apprenons les trucs et astuces.

Première démarche à accomplir: aller au commissariat déclarer un vol d'un lot d'affiches électorales. En effet, certains adversaires s'amusent à décoller des affiches adverses pour les coller ailleurs qu'aux endroits prévus par la loi pour ensuite se plaindre du non respect de la loi électorale (avec des conséquences différentes au cas par cas, visiblement).

Ensuite, il faut posséder à fond le code électoral, soit afin de faire commettre un faux pas à l'adversaire, soit reconnaître ses faux pas.

Exemple du premier cas : faire commettre un faux pas à l'adversaire.
Ceci est un extrait d'un mail que nous a envoyé vendredi dernier "notre" chef de liste:
«Ces derniers jours ont été focalisés sur le fait de finir de compléter notre liste *** pour la déposer en Préfecture cet après-midi. Nous avons évité 2 personnes, employés de mairie (qui le cachaient), envoyés par le maire en place afin de rendre nulle notre liste. Car un employé de la ville du lieu de l'élection n'a pas le droit d'être candidat sous peine de faire invalider la liste!»

(Citons pour mémoire les intimidations du maire en place pour éviter que certaines personnes nous rejoignent, la non-reconduite d'un entraîneur de foot en CDD, etc.)

Exemple du second cas : repérer les faux pas de l'adversaire.
Extrait de mail reçu ce matin:
«Le maire a organisé une conférence à la salle de spectacle du *** demain soir à 18h sur l'exposition ***. Or, en période pré-électorale, soit dans l'année qui précède l'élection (et les 6 mois), le maire de peut communiquer que sur les évènements habituels de la mairie. Il a interdiction de parler d'évènement exceptionnel. Or l'exposition "internationale" est "exceptionnelle" au sens du code électorale. J'ai donc porté réclamation à la Commission nationale des comptes de campagne avec un risque pour lui d'invalidation de ses comptes et même une annulation de l'élection en cas de score serré. En parallèle, j'ai également informé la Préfecture qui est garante du bon fonctionnement des élections. Un huissier est prévu d'intervenir demain soir afin d'en faire le constat. […] J'ai également écrit au Maire afin de l'informer de mes démarches et de lui signifier notre présence avec un huissier.»

Ambiance… On se demande comment les deux équipes pourront ensuite travailler ensemble au conseil municipal.

Divers

- Dépouillé toute la journée des bulletins dans le cadre d'un scrutin de liste (fastidieux).
- K. vient de comprendre que je m'en vais. Le premier juillet.
- Vincent m'a accordé mon aviron d'argent en me faisant remarquer que je n'avais pas assez travaillé. J'ai honte.

Le rasta émacié qui a croisé mon regard sur le quai du RER gare de Lyon m'a saluée d'un «Ça va ma sœur?» J'ai souri: «Oui ça va, merci.» (Je crois que j'avais l'air bien partie après l'aviron.)

Une journée de perdue en perspective

(Je ne suis pas très sûre du "e" à "perdue".)

Assesseur, titulaire et suppléant (c'est bizarre mais c'est comme ça). Tout ça pour payer notre remords de n'avoir pas aidé D. dans sa campagne. Seule consolation, je vais boire beaucoup de mauvais café aujourd'hui (je n'en bois presque plus au bureau). Et peut-être tricoter, ça dépendra de l'abstention. Je n'ose pas emmener cet ordinateur, je ne voudrais pas être cause que les élections soient annulées dans un bureau. (Je ne suis pas tout à fait sûre de pouvoir lire RC après ses prises de positions officielles. Quoi qu'il en soit, je vais couvrir le livre que j'emmène.)

8h-22h, au mieux.


commentaire du soir
Il est 22 heures 10, je suis rentrée depuis vingt minutes, nous avons fait vite.
J'étais assesseur, donc, et j'avais demandé à l'être dans le même bureau que celui de 2008, car j'avais remarqué que le bureau où je vote est bien moins intéressant: tout le monde semble né dans la commune d'à côté. Or ce que j'aime, ce sont les lieux de naissance qui me font rêver, la variété d'une page à l'autre.
Malheureusement, j'ai découvert que le bureau auquel j'avais été affectée à ma demande avait été divisé en deux, et que la population que j'aime dépendait du nouveau bureau.
Il restait dans le mien la rue habitée par mon maire, candidat aux présidentielles, d'où le plaisir relatif de voir le bureau envahi par des caméras une demi-heure en fin de matinée. Flux et reflux. (Pour tout dire, et peut-être à tort, j'ai pensé à Tlön. Je me suis dit que c'était le genre de chose qui lui plairait (pas forcément de passer à la télé, mais au moins de m'y voir: ça le ferait rire). (Ah, et j'ai aussi pensé que si l'abominable homme des blogs l'apprenait, il allait se f** de ma gueule, et qu'il serait intéressant de voir la forme que cela prendrait cette fois-ci). Et je me suis dit que je n'avais pas la télé. Mais qu'il y avait Youtube. Mais que c'était assez vain.
J'avais oublié FB.

Si vous êtes geek, votez Bayrou

J'allais voter tranquillement Bayrou sans faire suer personne, parce que c'est celui qui m'agace le moins; celui qui me paraît le plus raisonnable et le plus sensé.

Et puis mon fils a trouvé ça (enfin, je ne sais qui lui a dit que) : allez sur le site http://bayrou.fr/. Avec les flèches de déplacement, tapez deux fois la flèche haut, deux fois la fèche bas, puis gauche droite gauche droite, puis les touches b puis a.
Attendre quelques secondes.

Et donc la raison n'empêche pas le farfelu (si tant est que Bayrou soit au courant). En tout cas, avec un entourage pareil, il est probable qu'il ne conconctera pas un Hadopi 3 ou 4.
Bref, si vous êtes geek, que vous croyez en 42, votez Bayrou !

Statistiques électorales

J'ai passé la journée de dimanche (8h-23h) dans un bureau de vote en tant qu'assesseur.

1710 inscrits (le deuxième plus gros bureau de la commune), 995 votants. Une question théorique: quel est le nombre maximal de personnes qui peuvent être inscrites dans un même bureau? Autrement dit, combien de personnes peuvent au maximum passer en une heure? Cent vingt (trente secondes par personne), peut-être, ce qui veut dire que nous n'aurions pu faire voter tous les inscrits s'ils s'étaient tous présentés: est-ce légal? Ou faut-il admettre ce calcul pragmatique qui veut qu'on compte sur un certain pourcentage d'abstentionnistes? On doit pouvoir descendre à vingt secondes, voire quinze. Le plus long, c'est de trouver les noms dans le registre et de faire signer les gens.

Au début, je contrôlais la carte d'identité et la carte d'électeur. Pour que le contrôle reste valable et non qu'il devienne un coup d'œil vague qui regarde sans voir, il faut s'intéresser à ce qu'on lit: nom, et surtout prénom, date de naissance, et surtout lieu. Je regarde les photos, quand les têtes ont trop changé je regarde la date de la carte d'identité, parfois très récente: les gens ont dû fouiller dans leurs tiroirs pour en extirper une photo datant d'il y a dix ans.
Chaque fois que je me trouve dans une assemblée, je songe au bal des Têtes. J'ai une impression de théâtralité, de représentation. Je m'aperçois qu'il y a deux tranches d'âge qui n'ont jamais le visage (les rides, l'empâtement, une certaine dureté ou une certaine mollesse) que j'attends: la tranche d'âge de mes parents et la mienne... Il y a toute une catégorie de personnes qui a la tête des films noirs des années 60. Il n'y a pas grande différence entre les vingt et les trente ans, c'est vrai que les filles pas trop maigres sont plus jolies, au moins de visage: leur sourire s'épanouit mieux (plus exactement, les autres ne sourient pas). Je regarde, je regarde, les barbes, les cheveux, les moustaches, les échanges de regard sont gênés car on perd vite contenance à rester planter devant la table à attendre que le précédent avance.
J'en étais à reconstituer les signes astrologiques et à faire des paris avec moi-même (quand verrai-je passer quelqu'un dont c'était l'anniversaire?) quand on m'a relayée à l'heure du déjeuner.
Le plus jeune votant était né le 13 janvier 1990, la surprise a été qu'ils furent deux à être nés à cette date à se présenter dans la matinée.

L'après-midi, quelqu'un a eu le malheur de me confier le registre des noms. Je ne l'ai plus lâché. Onze noms par page, onze dates, onze lieux. Pondichéry, Ventiane, Oran, Shanghaï. L'Italie en tête des lieux de naissance à l'étranger. Quelques Portugais, pas d'Espagnols (d'origine, je veux dire: je fais partie du bureau des cantonnales, il faut être français, contrairement aux municipales, où l'on peut être étranger). Quel pourcentage de chances de voir deux gauchers se présenter à la suite? Et deux personnes ne se connaissant pas dont les numéros se suivent sur le registre?
J'appelle les noms. Je m'aperçois que si je prononce correctement un nom difficile, je trébuche généralement sur le prénom facile. Je suis un peu surprise de connaître tant de monde. Même en vivant en sauvage on finit par croiser des gens.
Le père et les enfants ont le même nom, ils se suivent sur une page. La mère est inscrite à son nom de jeune fille, il faut tourner les pages. Je maudis les familles qui séparent le père des enfants en intercalant la mère: feuilletage, recherche, aller-retour.
J'ai l'impression de jouer au bingo. Combien de pages remplies? (une), combien de pages vides? (aucune), et une page comportant une seule signature.

En fin d'après-midi se présente une femme au prénom de Bathilde.

Dépouiller

La première fois que j'ai participé à un dépouillement, c'était à Aubervilliers, en 1991 ou 1992 (pour les européennes? je ne sais plus).

H. était un vieil habitué de la chose, ses parents, militants socialistes dans une mairie de droite, ont toujours activement participé à l'ensemble des opérations qui entourent une élection.
Pour moi c'était nouveau.

J'adore ça. Je crois que c'est le moment où je me sens le plus appartenir à une nation, le moment le plus solennel d'une vie en république. Et cela prend une forme si simple, si humble: compter les enveloppes, faire des tas de cent, recompter les tas de cent, les attribuer chacun à une table de trois ou quatre personnes, une pour ouvrir les enveloppes, une pour annoncer le nom à voix haute, une ou deux pour faire un bâton en face du nom annoncé… Puis compter les bâtons, recompter les enveloppes, recompter les bulletins, à chaque table; faire les additions, signer le procès-verbal... Tout se déroule dans un silence religieux, au début de la séance lecture a été faite du Code électoral, tout rire, toute exclamation sont proscrits, la lecture d'un bulletin nul comportant des commentaires peut faire invalider l'élection dans la circonscription. De loin en loin un émissaire de la mairie vient prendre des nouvelles, savoir si nous avons bientôt fini, car il faut ensuite additionner les résultats au niveau de la commune puis les communiquer au préfet.
Les résultats du bureau tombent, chacun reste impassible, les habitués savent que cela ne représente ni le vote de la commune ni le vote du pays. Puis les chips, le rosé, le retour dans les rues désertées, les "autres" sont devant la télé, ils en savent déjà plus que vous.

A Aubervilliers, j'ai compris que si la banlieue votait "rouge", c'était peut-être parce qu'elle était ouvrière, c'était surtout parce qu'elle était habitée par d'anciens résistants: inéluctablement, cet électorat était en train de disparaître.
A Aubervilliers, un ami américain a assisté au dépouillement en se moquant de nous, il était atterré par tant d'archaïsme: comment, le vote n'était pas électronique? J'ai beaucoup pensé à lui en novembre 2000. Je suis résolument contre le vote électronique, pour des raisons pratiques et affectives.

Ce soir, à huit heures moins cinq, je serai présente pour le dépouillement (pour ceux que cela intéresse, il suffit de se porter volontaire quand on va voter, il est rare qu'il y ait trop de volontaires).
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