Billets qui ont 'ostéopathie animalière' comme mot-clé.

Mardi

Je me réveille avec un sentiment de soulagement: A. va remettre aujourd'hui son mémoire et son dernier rapport de stage. Nous revenons de loin mais we did it ! Je suis fière de nous.

Il fait très lourd, un temps que je déteste.
Quatre, presque le même que la dernière fois, mais moi à la nage et Marc au un. Toujours aussi cahotique, impression de se battre contre le bateau. Pas de glisse.
Dans les vestaires je parle avec Agathe qui était en yolette. Elle non plus n'a pas fait une très bonne sortie: «à l'intérieur mon cœur pleurait», et c'est aussi mon sentiment, bien que je l'aurais exprimé de façon plus optimiste: «si nous avions été quatre de nous cinq, qu'est-ce que cela aurait donné?»
Deuil de notre équipage de cinq.
J'envoie un mot à mes quatre complices pour organiser un pot ensemble un de ces jours. Je voudrais en profiter pour leur proposer de rajouter trois ou quatre rameuses à notre groupe pour monter un huit (soyons obstinée).

Un pot avec Jean-Marc. Il fait une overdose de Vatican II. «Non mais il y a un pape qui dit blanc, et le suivant dit noir en citant le précédant pour assurer la continuité et tout le monde applaudit. Je n'en peux plus de cette hypocrisie.» (Il me fait peur car il prédit après François un pape très réactionnaire. Or quand on voit l'après-Obama…)
Jean-Marc songe à se convertir au protestantisme. Je lui promets de lui offrir ce jour-là les œuvres de Newman.
«Tu veux te convertir pour beaucoup de raisons "contre", tu devrais en trouver quelques-unes "pour".»
Nous disons beaucoup de bêtises et c'est très satisfaisant. (Un de nos prêtres professeur qui serait un "cuir" façon Foucault… Ça me le rend plutôt sympathique (mais il m'était déjà sympathique).)
Très bon cocktail «St Germain». Presque un Hugo.


Cours, sans doute le dernier, de liturgie. C'est pratiquement une discussion, un partage d'expériences, structurée par l'histoire et la géographie.

Pendant des siècles l'accompagnement liturgique [catholique] de la mort allait de la chambre du mourant au lieu de l'ensevelissement (pas forcément en passant par l'église : car on ne faisait pas entrer un mort dans une église (restes des commandements juifs: un cadavre rend impur). Même si à d'autres moments on enterrait les morts dans les églises. Les deux sont vrais).

Le prof (moine): «Moi je pense que ne pas réfléchir à la mort, c'est un grand danger pour l'équilibre dans la vie. C'est de la vieille sagesse païenne, c'est les Grecs.»

«P. Gy : recension de quinze pages sur le livre de Philippe Ariès, L’Homme devant la mort (alors que P.Gy écrivait généralement dix lignes).»

Le cimetière des capucins de Palerme.
Le corps dont on se débarrasse.
Les urnes dans les maisons qui rendent fous.
Les familles qui se ruinent pour des funérailles (en Afrique, selon le témoignage de séminaristes (laissant les veuves misérables)).

Maternage

A. est en cinquième année d'école d'ostéopathie animale. Elle devrait obtenir son diplôme en juin et s'établir à son compte ensuite. Afin de préparer cette importante transition, elle est habilitée à soigner ("traiter") des animaux (chiens, chats, lapins, chevaux, vaches, etc) dès maintenant, gratuitement1 (puisque non diplômée), en ayant la possibilité d'appeler un professeur en cas de question sur un cas difficile.

Nous nous heurtons à deux séries de problèmes.
D'une part elle doit rendre trois rapports sur les chevaux et un sur les chiens correspondant à trois stages pour les chevaux (dressage, CSO et courses) et à cinq pour les chiens (handicap, agility, jeux et sport, garde ou policier, chasse). Elle avait cinq ans pour effectuer ces stages et rédiger les rapports (il me semble que j'ai déjà raconté cela, sans doute en août). Elle a fait le stage en écurie de course et écrit le rapport correspondant le premier été de ses études, puis plus rien. Chaque fois que je lui posais des questions, elle expliquait pourquoi tel ou tel stage n'était pas trouvé (les handi-chiens, difficile, les instituts ne veulent pas partager leur savoir ; les policiers, impossible depuis les attentats ; etc. etc.) Elle se fâchait quand j'essayais de savoir comment faisaient ses camarades de classe : « Mais je n'en sais rien, on ne parle pas de ça entre nous ! »
(Mais de quoi parlent-ils en ce cas ?)
Bref, nous ne nous sommes pas méfiés tant nous pensions que faisant les études de ses rêves, elle s'organiserait pour faire ses stages et avoir son diplôme.

Cet été nous avons pris la mesure du désastre et nous avons commencé à exiger un planning.
Aujourd'hui les deux rapports manquants concernant les chevaux sont rédigés mais toujours pas rendus (je voulais qu'ils soient envoyés (par mail) pendant les vacances de Noël : impossible, il fallait scanner les conventions de stage restées à Lisieux. Elle le ferait dès qu'elle serait rentrée (soit jeudi dernier). Je pose la question ce matin: alors ils ont été rendus? Non, son imprimante a refusé de scanner, elle a ramené les conventions ici pour le faire ce week-end (mais à l'heure où j'écris ce n'est toujours pas fait)). La rédaction du rapport concernant le stage handi-chien2 n'est pas terminée (j'ai demandé à l'avoir avant qu'elle reparte demain).

Cette partie concerne l'obtention du diplôme. L'autre problème est la constitution d'une clientèle. Cet été H. a pensé l'aider en apportant des solutions techniques : il lui a créé un site, un logo, des affichettes avec coupons détachables à laisser chez les commerçants et les clubs hippiques.
Mais cela ne traite pas le problème de fond : la timidité, la peur et la flemme (le tout s'entre-entretenant) de A. Elle a fini par déposer sa première affichette la dernière semaine de décembre parce que j'avais menacé de venir à Lisieux les déposer avec elle…

(Nous avons posé la question : « Mais enfin, c'est bien le métier que tu voulais faire ? » et la réponse, désarmante de naïveté et d'évidence : « oui, mais je n'avais pas pensé qu'il y aurait des propriétaires. »)

Alors nous définissons des objectifs sur le double front diplôme/installation. La semaine dernière H. a fait le tour des commerçants avec elle pour déposer des affichettes pendant que je relisais le rapport sur le dressage. Aujourd'hui nous avons imposé qu'elle téléphone à tous les clubs d'agility pour trouver le stage suivant :
— Alors tu as appelé ?
— Oui, à trois numéros. La troisième a dit que je pouvais venir le 19. Les deux autres n'ont pas répondu.
— Tu veux dire que la première qui a répondu t'a dit oui ?

Je n'en reviens pas. Elle a une chance insolente. Je me retiens de la morigéner sur le thème « tu aurais quand même pu te remuer avant, regarde comme c'est facile. » Je suis trop soulagée pour cela et surtout je souhaite que cela renforce sa confiance en elle. Tout cela est si fragile.
Le plus difficile pour nous est de tenir dans la durée : trouver des objectifs, les lui donner, s'en souvenir, contrôler qu'elle les a atteints. Ce côté sergent-chef dans le cadre familial m'ennuie, je ne m'y tiens pas. Les enfants le savent et en ont toujours joué : attendre que je me lasse, que j'oublie. J'y reviens par à-coups, je manque de régularité, je ne donne pas l'exemple.


Je dis en riant à H. exaspéré et désolé : «Courage! Le pire c'est que dans trois ans, quand elle aura pris confiance en elle, c'est elle qui viendra nous expliquer comment se constituer une clientèle et nous donnera des cours de marketing!»
Il me regarde épouvanté.



Note
1 : vous pouvez en profiter si vous le souhaitez: zone géographique couverte, du Calvados à l'Essonne
2 : elle a obtenu ce stage difficile à obtenir en envoyant un mail, tout simplement.
Les billets et commentaires du blog Alice du fromage sont utilisables sous licence Creatives Commons : citation de la source, pas d'utilisation commerciale ni de modification.