Alice du fromage

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Billets qui ont 'Bovino' comme ville.

vendredi 30 juillet 2010

Deuxième journée

Mise en forme de 5 à 7 heures, toujours dans la salle de bain. Je dors une heure. H. intervient pour diverses sauvegardes.
Mon intervention est la première de la journée. Je ne crois pas que je trouverai un jour une plus jolie salle de colloque. Je suis le petit VRP de la camusie. Je ressens de la gêne à donner, via le filtre de l'objet du colloque (fatum et téléologie) une image aussi biaisée des journaux de RC. Le regard est partiel, orienté.

Puis Médée, Dante, Michel Leiris.

(Plus tard un intervenant, le seul qui ait connu Camus, me demandera: «Mais pourquoi les Eglogues?» La réponse condensée qui me vint fut «Ça me fait rêver».)

L'après-midi est projeté un film formidable (La vie autrement) d'une réalisatrice belge Loredana Bianconi: interview de quatre femmes d'origine maghrébine ayant choisi de se couper de leurs racines pour vivre la vie dont elles rêvaient et racontant le prix de ce choix. Au-delà du sujet, ce sont quatre personnalités qui se dessinent, c'est très émouvant, d'une grande force de vérité, chaque femme réussissant sans en être consciente à être totalement des individus, uniques, et des archétypes.

H. et N. sont fatigués et viennent me chercher. J'ai le regret de "sécher" la fin de journée. Je trouve impoli de quitter la salle alors que des intervenants n'ont pas encore parlé (ou plus radicalement partir, quitter la ville, dès qu'on a parlé. Mais il faut dire que si mon but est prosélyte, il est aussi de m'instruire, d'apprendre le plus vite possible auprès des meilleurs (ou tout au moins des passionnés, ceux qui préparent des interventions pendant leurs vacances?)). Ce n'est pas forcément le cas des autresparticipants, souvent professeurs.

jeudi 29 juillet 2010

Première journée

Désormais je ne peux plus travailler dans le patio. Entre cinq et sept je travaille assise sur le carrelage de la salle de bain, l'ordinateur sur les genoux. C'est stupide mais ça m'amuse, inexplicablement ces bizarreires m'aident à me concentrer.
Je laisse mon ordinateur à H. avant de partir pour la journée afin qu'il mette en forme les citations sur keynote.

A 9h30 le programme prévoyait le discours d'accueil de "l'échevin de la culture", sans que je sache si c'était le terme italien ou une impropriété belge (patrie d'adoption de l'organisatrice). L'échevin est un grand italien barbu décontracté en jean et chemise à carreaux...

Interventions en français: Yourcenar, Léautaud, Morand et Nérimovsky.
Le film de Sophie Calle, Prenez soin de vous. Nous ne voyons que vingt minutes choisies de son film, c'est très drôle (les passages sont très bien choisis), mais son idée de faire lire publiquement une lettre de rupture pour s'en moquer me révulse. Guérir une blessure par l'humiliation publique de l'autre, mais quelle horreur. Le comble est qu'elle sera sans doute surprise si le suivant la quitte sans un mot.

Je me fais intercepter par H. au cours du dernier film de la journée que je ne peux donc voir en entier. Entretemps, en écoutant les interventions sur Yourcenar et Léautaud, j'ai eu une illumination sur la façon de terminer mon propre papier (les rapports entre destin et hérédité, mais c'est bien sûr!).

Sortis très tard de table après que H. ait obligé X. à venir dîner comme il s'y était engagé.

Je travaille jusqu'à avoir terminé (une heure du matin). Je remets au lendemain tôt (5 h du matin) le fait de tout copier sur Keynote puisque je n'ai pas d'imprimante: il faudra lire directement sur écran. J'espère malgré tout réussir à lever les yeux de mon texte... (Le problème est un problème de niveau de langage. Dès que je n'ai plus le soutien de l'écran, j'ai l'impression de parler atrocement mal, de façon très relâchée. L'écrit me rassure, non contre d'éventuels trous de mémoire (je pourrais parler sans avoir rien préparé), mais contre cette langue qui m'échappe et que je ne maîtrise pas. N. à qui j'explique mes craintes rit: «Oh oui, moi j'attends toujours les questions: on voit les gens qui lisaient un texte parfait, très léché, se mettre à parler naturellement, le décalage est souvent amusant.»
Voilà qui n'est pas rassurant.)

Repas du midi dans un restaurant que nous n'aurions jamais trouvé seuls. Buffet. Le restaurateur produit ses fromages. Je me damnerais (c'est peut-être ce que j'ai fait) pour cette ricotta.
Terra e Sapori
di Agata d'Alessandro
Via Martiri di marzabotto, 5
Bovino

mercredi 28 juillet 2010

Insomnie

Nuit de mardi à mercredi, de nouveau réveillée, un peu moins longtemps. Décidé de tout recommencer. Repartie de zéro.[1]
Je travaille, j'avance lentement.

Quand j'étais étudiante, les échéances me paraissaient des murs. J'avais l'impression que j'allais me fracasser contre, que le monde n'existerait plus, cesserait de tourner, au moment où l'échéance cherrait.
L'âge et l'expérience venant, j'ai pris l'habitude de m'imaginer après, une heure après ou le lendemain, afin de maîtriser la panique, de me convaincre de l'écoulement inéluctable du temps, de relativiser tout cela (il faut dire que cela me rendait réellement malade de terreur; c'est ainsi qu'à vingt-deux ans j'ai interrompu mes études en dernière année tant l'idée du grand O me terrifiait (je les ai achevées plus tard, après avoir appris à relativiser (au moins un peu) en entreprise (à l'approche de 2000, un chef me disait encore : «Tu prends tout au tragique».)).
L'inconvénient de cette méthode, c'est que j'ai le plus grand mal à me mettre à travailler: après tout, puisque quoi qu'il arrive le temps va passer, puisque tout cela n'a pas d'importance...
Tentation de laisser tout tomber, d'abandonner. Je me retiens de le dire, de le formuler; je sais que si je prononce ces mots, la machine se mettra en route, pour accomplir ce que je désire et ne désire pas.

Seule dans la journée. H. est parti à Bovino, à la recherche du wifi (succès sur toute la ligne: wifi gratuit pour le prix d'un capuccino dans l'après-midi, 80 centimes).

18h30. Début officiel du colloque, accueil dans la cour, nous attendons des Français en retard (!), Béatrice est très inquiète que nous puissions être mécontents, nous la rassurons comme nous pouvons, il fait un temps magnifique dans un cadre superbe.

Le soir, nous dînons comme les soirs précédents à Panni, auprès de nos hôtes qui tiennent également un restaurant, La Locandia di Pan. Pas de carte, à peine un menu, on s'obstine à nous demander ce que nous voulons, barrière de la langue, nous nous efforçons de faire comprendre que nous mangerons ce qu'on nous donnera: nous ne prenons pas grand risque, tout est excellent, les produits très frais (légumes, fromage, pâtes, fruits) cuisinés le plus simplement du monde, c'est délicieux. Je me souviens avoir lu que l'essor de la cuisine bourgeoise en France, terreau indispensable à une tradition gastronomique, date du mariage de Henri II avec Catherine de Médicis qui amena ses cuisiniers d'Italie.

Notes

[1] Ça me paraît tellement incroyable une semaine plus tard que j'ai vérifié la date sur le fichier: créé le 28 juillet à 2 heures 39, pour une intervention le 30 juillet à 10 heures, sachant que le 29 était entièrement occupé par des conférences. Visiblement je n'avais plus aucune notion du temps.

lundi 26 juillet 2010

Panni désert

Naples – Panni – Bovino – Foggia – Panni
Location d'une voiture: Naples (Floride) nous promettait une corvette, dans la même catégorie Naples (Italie) nous octroit une Fiat 500 rouge vif, superbe, à la direction d'auto-tamponneuse, se faufilant partout (et heureusement. Je ne compte plus le nombre de demi-tours sur routes ou reculs dans des rues trop étroites paraissant finir dans des cours privées). Il me semble de plus en plus évident qu'il existe un rapport étroit entre les voitures fabriquées par un pays et sa topographie, la topographie de ses villes. Je suis trop française pour comprendre ce que disent de la France les voitures françaises (avoir inventé le monospace: qu'est-ce que ça veut dire?) mais je serais curieuse de comprendre le rapport des voitures japonaises au Japon.

Atteindre Panni n'est pas de tout repos. Personne à la chambre d'hôte que nous avons réservée, il est quinze heures, tout semble désert.[1]
Panni- Bovino, route improbable, je repasse en première dans les virages en épingle, à un endroit la chaussée s'est effondrée dans le ravin.
— Eh ben dis donc, j'espère qu'il ne passait personne quand ça s'est effondré!
— Si ça s'est effondré, c'est qu'il passait quelqu'un.

Bovino, palais ducal (ou diocésain). Francesco est très serviable, il téléphone à Béatrice B., nous démêlons la situation. A huit ou neuf heures du soir, nous serons attendus à Panni pour dîner et retrouver notre chambre, Béatrice est navrée du contretemps.

Foggia. Pas de parcmètre, mais un homme qui délivre des tickets quand il vous voit arriver (est-ce que c'est rentable? Plus besoin de gérer des contractuelles et un suivi des contraventions, en cas de dépassement de temps de stationnement il vient réclamer le supplément, accessoirement il surveille et donc protège les voitures. Un euro ving les deux heures, à combien est l'heure de Smic chargée, combien faut-il qu'il facture de voitures pour que son embauche soit rentable?) Un café, nous n'arrivons pas à nous faire comprendre, glaces, wifi, les magasins commencent à ouvrir (il est 17 heures, je vérifie les horaires d'ouvertures, 17- 21 heures, mais que cela doit être pratique quand on travaille dans un bureau), nous visitons le jardin. Je pousserais bien jusqu'à la mer mais nous sommes fatigués.

Le soir je vois un épisode de Lost pour la première fois. C'est au restaurant, la télévision gueule, c'est en italien et je n'y comprends rien.

Notes

[1] Dans les jours qui suivront, nous apprendrons qu'il faut s'arrêter au café, en bas dans le village, devant la poste, pour demander les clés.

samedi 24 juillet 2010

Bovino

— Bovino, Bovino, mais qu'est-ce que vous allez faire à Bovino? Il n'y a rien à faire à Bovino!

Le stress peut-il se traduire de façon ligamentaire? Coude gauche en mauvais état.
Réalisé tard le soir que si je voulais avoir une version papier à emmener, j'avais vingt-quatre heure pour terminer, et non trois jours comme je le pensais.
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