vendredi 18 mars 2011
Histoires de chats - légendes familiales
Par Alice, vendredi 18 mars 2011 à 20:45 :: 2011
Mes parents sont arrivés à Inezgane en septembre 1968, comme coopérants. Ils étaient professeurs de mathématiques et physique. Un jour mon père a ramassé un cadavre de chat sur le bord de la route, l'a attaché à un arbre et l'a dépouillé comme un lapin. Les arabes qui passaient le regardaient avec effarement, qu'allait-il faire, manger le chat?
En réalité il était tout simplement en train de se procurer une peau de chat pour ses cours sur l'électricité statique.
(Je n'ai pas vu cela, ce n'est pas un souvenir. Ce dont je me souviens, c'est mon père en train de raconter cette histoire avec son petit sourire embarrassé d'être le point de mire de la conversation).
L'été nous rentrions en France. La chatte et la chienne restaient à Inezgane, nourries par la fatime (la bonne). Une année, quand nous sommes revenus, la chatte Minouche, une angora de gouttière blanche et noire, souffrait d'une profonde blessure au cou. Après plusieurs semaines à tenter de la soigner, mes parents ont abandonné tout espoir. Leur éducation paysanne les poussait à achever la chatte: on ne laisse pas souffrir un animal.
Mon père a mis la chatte en joue avec la carabine, la chatte l'a regardé droit dans les yeux, mon père n'a pas pu tirer.
Dans la semaine qui a suivi, elle a commencé à guérir.
Hiver 1997. Ma chatte Framboise a un terrible abcès à la joue. Le vétérinaire le crève en trois endroits, fait couler le pus, me confie la bétadine.
Tous les matins je me lève une demi-heure plus tôt. Je prends la chatte, je rouvre les entailles, je fais couler la bétadine dans l'entaille du haut en soulevant la peau afin qu'elle s'évacue par les entailles du bas en entraînant le pus et en nettoyant la plaie. Le vétérinaire m'a dit que certains préféraient laisser mourir leur animal plutôt que faire eux-mêmes ce genre de soins (mais je ne vois pas bien où je prendrais le temps ou l'argent d'emmener la chatte tous les jours chez le vétérinaire).
Ça dure. Au bout d'un mois je n'en peux plus de ce soin à jeun le matin, de l'odeur écœurante de la bétadine, de mon chat qui ne guérit pas, de cette demi-heure prise sur mon sommeil. Je me souviens de Minouche.
Je mets Framboise sur la table, je la regarde dans les yeux: «Je n'arrive plus à te soigner. Maintenant il faut que tu guérisses, je n'y arrive plus.»
Elle a guéri.
En réalité il était tout simplement en train de se procurer une peau de chat pour ses cours sur l'électricité statique.
(Je n'ai pas vu cela, ce n'est pas un souvenir. Ce dont je me souviens, c'est mon père en train de raconter cette histoire avec son petit sourire embarrassé d'être le point de mire de la conversation).
L'été nous rentrions en France. La chatte et la chienne restaient à Inezgane, nourries par la fatime (la bonne). Une année, quand nous sommes revenus, la chatte Minouche, une angora de gouttière blanche et noire, souffrait d'une profonde blessure au cou. Après plusieurs semaines à tenter de la soigner, mes parents ont abandonné tout espoir. Leur éducation paysanne les poussait à achever la chatte: on ne laisse pas souffrir un animal.
Mon père a mis la chatte en joue avec la carabine, la chatte l'a regardé droit dans les yeux, mon père n'a pas pu tirer.
Dans la semaine qui a suivi, elle a commencé à guérir.
Hiver 1997. Ma chatte Framboise a un terrible abcès à la joue. Le vétérinaire le crève en trois endroits, fait couler le pus, me confie la bétadine.
Tous les matins je me lève une demi-heure plus tôt. Je prends la chatte, je rouvre les entailles, je fais couler la bétadine dans l'entaille du haut en soulevant la peau afin qu'elle s'évacue par les entailles du bas en entraînant le pus et en nettoyant la plaie. Le vétérinaire m'a dit que certains préféraient laisser mourir leur animal plutôt que faire eux-mêmes ce genre de soins (mais je ne vois pas bien où je prendrais le temps ou l'argent d'emmener la chatte tous les jours chez le vétérinaire).
Ça dure. Au bout d'un mois je n'en peux plus de ce soin à jeun le matin, de l'odeur écœurante de la bétadine, de mon chat qui ne guérit pas, de cette demi-heure prise sur mon sommeil. Je me souviens de Minouche.
Je mets Framboise sur la table, je la regarde dans les yeux: «Je n'arrive plus à te soigner. Maintenant il faut que tu guérisses, je n'y arrive plus.»
Elle a guéri.