Alice du fromage

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Billets qui ont 'Taubes, Jacob' comme nom propre.

jeudi 15 août 2013

Lude

Je lis Taubes dans le métro, La théologie politique de Paul. La transcription du colloque et la traduction rendent admirablement le ton alerte, caustique, passionné, du professeur.
Quand j'arrive p.74 à «Je pourrais me référer à l'allégorèse alexandrine, étudiée par Jean Pépin», je ferme le livre, j'enlève mes lunettes, et je ferme les yeux pour ne pas me mettre à pleurer.

C'est la même sensation que des années plus tôt à Versailles, le soulagement, la re-connaissance, tout va bien, il ne faut plus avoir peur. Le livre de Jean Pépin, c'est celui que j'avais acheté pour mon anniversaire en 2006, en même temps que les Cahiers de la nuit surveillée consacrés à Rosenzweig. Alors que je savais parfaitement pourquoi j'achetais les Cahiers, je n'avais pris le Pépin que par confiance dans le libraire.
Eh bien voilà. Le livre a trouvé son explication.

samedi 9 mars 2013

Retour à la normale (?)

Pour la première fois depuis des semaines, je me retrouve à mon bureau — rangé et épousseté — pour taper quelques lignes. Depuis que j'ai ce portable, je m'installe le plus souvent dans mon lit ou devant un film — évidemment je n'écris pas les mêmes choses.

Réveillée ce matin sur un mauvais rêve: devoir de grec, tout le monde a fini, je suis seule dans la salle, la feuille du sujet est coupée en deux, il me manque le bas, je ne sais pas ce qu'il faut faire, quelles sont les questions.
(Je ne fais que des mauvais rêves en ce moment, qui font peser une inquiétude sourde sur les journée. Lundi dernier, René.)

J'ouvre Taubes au hasard parce qu'il traîne dans la cuisine (la voix de cet homme, même à travers la traduction, est extraordinairement proche (il faut dire qu'en l'occurence il s'agit de transcription de conférences, ce qui ajoute à la proximité). J'ai hâte de réussir à le déchiffer en allemand: est-ce qu'il en sera de même (ou sera-ce mieux?), ou la langue constituera-t-elle un obstacle? — Je le redoute mais je n'y crois pas):
Je dirais qu'il existe deux modes du philosopher (pardonnez-moi d'être dogmatique, mais la discussion va bientôt se terminer et je m'en sortirai indemne). Il y a tout d'abord le mode antique, qui dit au fond ceci: la vérité peut difficilement être atteinte, elle n'est accessible qu'à quelques-uns, mais elle existe toujours. C'est, en gros, le problème de Platon et d'Aristote. Il existe un autre mode du philosopher, que j'appellerait celui qui est passé par le Christ. Hegel dit que la vérité ne peut être atteint que difficilement et qu'elle doit parcourir toute l'histoire, mais qu'ensuite la vérité est là pour tout le monde.1

O. revient du ski et est proche de la brûlure au second degré sur le menton (ça croûte).
Clément revient de son stage de BAFA, enchanté.
Repas animé ce soir après cette semaine si silencieuse, une histoire de banane dans l'oreille et de pompe à essence (— Oui, ça me rappelle la blague du type qui va tout nu à un bal masqué. "T'es déguisé en quoi?" lui demande un copain. "En pompe à essence").






1 : Jacob Taubes, La théologie politique de Paul, p.119 (Seuil, coll. Traces écrites)

vendredi 6 mai 2011

Inconscience

«Qu'est-ce que la théologie?» Ce matin dans le métro, j'ai été assez embarrassée de me souvenir que j'avais posé cette question (qui me travaillait depuis longtemps) tout à trac en mars 1997 au dominicain Hervé Legrand au cours d'un déjeuner durant un séminaire au centre jésuite des Fontaines.
Mon Dieu… (Et encore plus embarrassée, maintenant que je viens de faire une recherche google sur son nom. Heureux les simples d'esprit…)

(Il a répondu par une boutade et nous sommes passés à autre chose.)



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J'ai rencontré Taubes sur le mur FB de Jean-Yves P., en novembre 2009, à l'occasion de la parution en français d'Escatologie occidentale je suppose. J'ai aussitôt su que c'était un homme pour moi (pourquoi? sans doute à cause des quelques mots d'accompagnement de Jean-Yves), de même qu'entre Benjamin, Strauss, Scholem, il m'a suffi de quelques lignes pour savoir que c'était Scholem qui serait le mien.

Je lis En divergent accord et une fois de plus je suis surprise de me rendre compte que tout aurait pu avoir lieu beaucoup plus tôt: Nolte ou Kosselleck, la querelle des historiens allemands, j'en avais eu connaissance en 1995, mais je n'avais pas compris que c'était là qu'il fallait creuser, que c'était le chemin que je cherchais. Je ne l'avais pas reconnu.
1996, inscription à une série de cours de Paul Corset sur Maïmonide, cours que je n'ai pas pu suivre, raisons familiales. J'aurais rencontré Brague, forcément, dans le parcours. (Il faudrait que je ressorte ce cours: le professeur me l'avait très gentiment envoyé quand je lui avais expliqué pourquoi je ne pouvais pas être présente. Je ne l'ai jamais lu.)

(Comme Hervé Legrand était drôle. J'aurais pu l'écouter des heures, il fait partie de ces gens qui vous emmènent en promenade quand ils parlent et vous font découvrir des paysages ou des contrées. Comme je lui avais fait une remarque quelconque sur son humour, il m'avait répondu que ce n'était pas toujours très bien compris autour de lui, qu'on le prenait parfois trop au sérieux, ce qui m'avait laissé interloquée.)
Je me souviens qu'au cours du même repas avaient été évoqués les problèmes posés par un jeune prêtre présent au colloque, et visiblement assez mal dans sa peau. «Manque de formation», avait diagnostiqué Hervé Legrand (ce prêtre avait interrompu des études). Cela rejoignait le jugement du prêtre sur le fils dans Mamma Roma, film que j'avais vu peu auparavant, et la coïncidence des opinions m'avait impressionnée: il n'y a pas de raccourci, tout le chemin est à parcourir (mais il est élastique ou en accordéon: parfois il s'allonge ou rétrécit brusquement. Cependant le phénomène est totalement imprévisible).

Quinze ans pour trouver une entrée possible du labyrinthe. Combien de temps me reste-t-il pour m'y perdre et cependant ne pas errer?

La lecture de ce tout petit livre me donne envie de rire et pleurer, parce qu'il rallume l'espoir.
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