Une famille a disparu

Donner à des Syriens est toujours un peu délicat (je préfèrerais éviter de financer le terrorisme), j'avais choisi cet organisme parce qu'il permet une déduction fiscale: il m'avait semblé que l'administration fiscale française avait dû faire une enquête, vérifier leur dossier.

J'avais décidé de parrainer des orphelins, j'avais reçu un dossier, des photos, trois enfants privés de père, non scolarisés. Quand j'avais demandé s'il était possible d'envoyer des livres (en arabe, j'aurais demandé conseil à Yara Matta), je n'avais pas eu de réponse.

Aujourd'hui je reçois ce mail et je ne vais pas rouvrir le dossier pour regarder leurs photos.
Vous nous faites confiance en parrainant un orphelin ou une famille et nous vous en remercions.

Afin d'assurer la transparence et l'arrivée de vos dons, nous vous informons que nous ne sommes plus en mesure de suivre la famille ou l'enfant que vous parrainez. La famille à quitté la Syrie ou alors n'a plus donné de nouvelles et nous ne sommes donc plus en mesure de maintenir le parrainage.

Nous vous avons donc attribué un autre dossier que nous avons le plaisir de vous transmettre. Vous pouvez bien entendu toujours suivre votre parrainage sur votre espace donateur. […]
(Et j'ai bizarrement envie de protester: «je ne veux pas d'une autre famille, rendez-moi MA famille, où est-elle? Que lui est-il arrivé? Que puis-je faire?»
et je sais que c'est inutile
puéril
et qu'il ne manque pas d'orphelins.)

Crue

Mail de Vincent à 15h28 :
Bonjour à toutes et tous,

Nous avons impérativement besoin de votre mobilisation pour nous aider à parer l'inondation du club prévue par la préfecture vendredi au plus tard.

Marine, Marin et Tristan orchestrerons les tâches suivantes :
- déplacer le matériel sensible du parc à bateaux et de la salle de musculation ​vers le tank à ramer et les vestiaires (ces derniers seront hors d'eau à priori).
- sangler à leurs râteliers les deux premiers étages de bateaux afin que ces derniers ne se baladent pas dans le hangar quand les eaux monteront.
...

NOUS COMPTONS SUR VOUS !
Une photo montre le club les pieds dans l'eau en 1995 (février?)

(Malgré tout… j'ai honte de l'avouer devant tous ceux qui sont dans la boue (la sœur de ma collègue vivant dans le garage de sa maison en construction: inondé, tout est fichu, matelas, lave-linge, etc) — en tant que "gens du fleuve", j'aime bien.)

-----------------------
Agenda
Pot pour arroser la fin du cours de grec. L'année prochaine je ne poursuivrai que les "lectures" une fois par mois. En revanche j'ai le projet de traduire plus régulièrement et d'apprendre du vocabulaire: encore un vœu pieux?

Pluie

4h38. J'écoute la pluie depuis une heure. Je suis contente que nous ayons réparé le toit en avril. Je suis inquiète, j'écoute les gouttes, je guette celle qui aura réussi à s'infiltrer entre les tuiles, dans l'interstice des velux.
Pour l'instant, rien.
Je pense aux oiseaux, aux réfugiés dans des camps de boue (eux qui viennent de pays désertiques, combien de temps se sont-ils réjouis de la pluie?)

Fête des mères

J'ai eu un cadeau, pour la première fois depuis… dix ans, quinze ans? (Nous ne sommes pas très fête des mères, je crois qu'à la génération suivante ce sera totalement oublié.)
J'ai eu un drapeau français. Honni soit qui mal y pense. (C'est un peu grâce à l'Euro (la compétition de foot, pas la monnaie (je précise pour les lecteurs à venir dans dix ans)): drapeaux en vente dans les supermarchés: «Et si on en prenait un pour maman? C'est suffisamment con pour que ça lui plaise.» (Ces jeunes, plus aucun respect)).


Retour à Melun, pour la première fois depuis fin mars. Pluie fine. Nous ne sommes que cinq. Je suis à la nage de la yolette, Franck barre. (Virginie, Vincent, Cyrille).
Des cascades bondissent dans la Seine, toute l'eau drainée sur les côteaux rejoint le fleuve à grand bruit.

Photo sans autre intérêt que montrer la masse verte des arbres. Il y en avait de plus fantômatiques à faire, des dégradés de gris dans la brume, mais je ne pouvais tout de même pas arrêter le bateau pour prendre une photo (de toute façon cela n'aurait rien rendu avec mon téléphone).



Franck a barré toute la sortie, j'ai donc fait l'aller-retour à la nage. L'après-midi, j'ai dormi très profondément, avec l'impression de ne plus pouvoir bouger quand je me réveillais un instant.

Ce soir il pleut de nouveau, avec obstination. C'est impressionnant.

Pluie

Longue matinée à me demander ce que je vais faire, pour finalement ne rien faire. Mésanges huppées au-dessus de ma tête pendant le petit déjeuner sous l'épicéa. Sortent-elles du nid?

Le Jodie Foster, Money Monster. Le style de Georges Clooney me rappelle celui de Cary Grant (dans La mort aux trousses, dans Arsenic et vieilles dentelles): la façon d'écarquiller les yeux, la mobilité du visage, les gestes trop grands, comme une pantomime. Film moyen, ni bon ni mauvais. Pour se protéger de la pluie.

Déluge à deux heures. Les invités du mariage courent sous la pluie. Orage. Pluie continue, linge trempé.
Tant pis, j'irai le chercher demain. Je songe aux mésanges du matin, comment vont-elles?

Préparation du TG. Sur le sacrifice. Je suis perplexe.

Les nouvelles technologies et la finance

Réunion des entreprises du groupe cliente de la banque du groupe.

J'ai appris qu'il existait des expériences d'assurance "participative", comme inspeer. Cela m'a éblouie: d'une part je pensais cela impossible vu les obligations posées par l'ACPR, d'autre part c'est revenir aux fondamentaux de l'assurance, quand les armateurs vénitiens partageaient les risques de leurs navires en partance et cela me ravit.
Cela ne concerne que de petites sommes, en l'occurence les franchises non couvertes par les assureurs traditionnels, mais c'est intéressant dans la démarche: cela revient à ressentir à nouveau la mutualisation, la dépendance dans laquelle nous sommes chacun du comportement de tous.


Présence d'un des fondateurs d'Unilend qui prête aux PME et TPE. Quelques commentaires de ce fondateur:

— Nous ne prêtons pas pour des besoins de trésorerie mais pour des projets.

— Embaucher est un projet. 25% des entreprises qui ont emprunté ont embauché. Mais pour une banque, emprunter pour embaucher, ça n'existe pas: vous avez ou pas les moyens d'embaucher. Elles ne prêtent pas pour ça.

— Le dernier défaut de paiement en date d'un prêteur sur la plateforme est un maraîcher de Rambouillet : le centre-ville est devenu piétonnier, des supérettes se sont installées en périphérie, il ne s'est pas payé pendant trois mois puis il a jeté l'éponge. Plus bas, sous son souffle, comme à regret: souvent l'Urssaf y est pour beaucoup et reprenant le sourire, comme ne voulant pas être trop grave après avoir dit une vérité: mais bon, c'est logique, ça leur fait des clients.

— Pour les sommes importantes, nous avons aussi des entreprises dont la banque a atteint sa limite de prêts sur une ligne de crédit donnée: la banque accepte de prêter la moitié de la somme mais demande à son client de trouver l'autre moitié ailleurs. Dans ce cas, les banques sont contentes de nous voir car elles savent que nous prêtons sans arrière-pensée, nous n'essaierons pas de leur prendre leur client.


Le lendemain, je raconte cela à H. qui commente: «En France, les banques prêtent à ceux qui ont déjà. Aux Etats-Unis, c'est une autre conception. La banque et les financiers disposent d'une grosse enveloppe de prêt qu'ils partagent entre deux ou trois cent entreprises. Ils attendent un retour de 40%. Ils ne donnent pas la somme empruntée d'un coup mais la distillent en fonction des résultats. Ils suivent les entreprises mois par mois et arrêtent de les financer dès que les résultats s'éloignent des prévisions. Ils en "tuent" 80%, mais dans celles qui restent, ils en ont une ou deux qui rapportent plus que les 40% globaux attendus.»

Comité d'audit

Je me dis que j'avais peut-être exagéré (répondant à la commissaire aux comptes que j'en avais marre de m'assoir autour de tables pour discuter sans que rien ne change jamais (elle toute fière de son "plan d'audit")) quand dans l'ascenseur, à propos d'une confusion de la responsable de communication et tandis que je me proposais d'aller lui expliquer ce qu'il en était en réalité, Sébastien me demanda en souriant: «tu veux lui casser la geule tout de suite ou plus tard?»

Bon bon bon.

Nommer la pluie

Trouvé sur le net, sans doute pour nous faire rire de tout ce qui tombe en ce moment.


2016-05-21-pluie-bretonne.jpg

Documentaires (ou non-fictions)

Depuis le début de l'année, Aymeric propose sur FB et twitter un top 5 par jour, sur un sujet qu'il choisit.

Le 21 mai, il s'agissait du top 5 des non fictions filmées.

Je recopie ici son top 5 ainsi que les suggestions de ses contacts FB, pour mémoire (LAV : liste à voir en parallèle de PAL, pile à lire).
J'ai regroupé les titres selon les auteurs des commentaires (j'en conserve les noms par ailleurs, mais comme il s'agit de pseudos FB qui pour la plupart n'ont pas la moindre idée de mon existence, j'anonymise. J'attribuerai les commentaires à leur auteur sur simple demande de celui-ci).

Top 5 d'Aymeric:
1. Shoah - Claude Lanzmann
2. Sans Soleil - Chris Marker
3. Pourquoi Israël - Claude Lanzmann
4. Veillées d'armes - Marcel Ophuls
5. Agnès de ci de là Varda - Agnès Varda

Citizen 4

L'Ordre
- Jean Daniel Pollet
Une partie de campagne - Raymond Depardon
Heartworn highways - James Szalapski
When We Were Kings - Leon Gast
La Sortie de l'usine Lumière à Lyon - Louis Lumière

The Cramps- Live at Napa State Mental Hospital

Civil war
de Ken Burns.
Les statues meurent aussi de Resnais et Marker
Dead Birds de Garner

The Fog of War
et The Unknown Known d'Errol Morris
Into The Abyss de Werner Herzog

Le Voyage de Primo Levi
La femme aux cinq éléphants

Les frères Taviani - César doit mourir
Dreaming by numbers
Looking for Richard

A la recherche de Vivian Maier

La Reprise du travail aux usines Wonder
Le fond de l’air est rouge
L’Heure des brasiers.

Nanouk
et L’Homme d’Aran

Wiseman

Nick's Movie de Wenders
Trop tôt trop tard des Straub
Hôtel Terminus de Marcel Ophuls
Dziga Vertov (L’Homme à la caméra)

Titicut Follies (Wiseman)
Rencontres au bout du monde (Herzog)
Nanouk l'Esquimau (Flaherty)

The Art of Killing Joshua Oppenheimer


Je crois que les documentaires sont toujours attachants, car ce qui nous est montré, c'est l'attachement du réalisateur à son sujet, quel qu'il soit. Ce que nous aimons, c'est l'attachement, la dévotion, la dédication.

Fatiguée

J'attends au café d'aller en cours. Je me suis endormie sur la grammaire grecque (au café). Je confonds définitivement tous les temps. Trop tard. Encore demain, puis on verra l'année prochaine. Je n'ai pas retrouvé mes cartons de révision rédigés en janvier. On verra cet été. Encore un devoir sur table, une dissert de philo, un travail écrit à rendre parce que j'étais absente un samedi, et ce sera les vacances. Dernière ligne droite.

J'ai terriblement mal aux yeux. Couchée beaucoup trop tard. Vingt-quatre heures et davantage de pluie: le toit ne fuit plus, c'est une certitude.

Décision

Il pleut. J'avais l'intention d'aller ramer, je ne vais pas y aller, même s'il ne pleut peut-être pas à Melun. Je vais compléter quelques journées de ce blog.

Je regrette d'avoir manqué l'arrivée du printemps sur la Seine.


————————
PS le soir : révision de grec pour mardi et Almodovar au cinéma (Julieta. C'est curieux cette fascination pour les liens mère-fille. Ça change des bêtes histoires d'amour. L'épaisseur de la vie dans la filiation, la maladie, la vieillesse et la mort. Tragédie grecque, mer et pythie.)

Récit et dialogue

TG sur la Trinité, avec ce moment étrange où on fait un tour de table en demandant à chacun de s'exprimer sur la Trinité:

- que risque-t-on davantage, le modalisme (trois modalités d'un seul Dieu (et non trois personnes en tant que telles, mais personne au sens antique et non moderne, chargée de conscience et de psychologie (mais qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire? Bien sûr que le ressenti de chacun par chacun a évolué, mais la notion est présente dès l'origine des écrits dont on dispose, non? Platon, Socrate, se considèrent bien comme des personnes, des individus. Le sentiment d'appartenance à la cité de Socrate ne l'empêche pas — au contraire — de mettre en avant sa propre opinion, son individualité)); donc que risque-t-on, le modalisme ou un trithéisme (accusation des musulmans)?

- comment vivons-nous la Trinité dans nos vies?
Euh… J'ai l'impression d'être à confess (nom des rencontres prof-élève en écoles préparatoires, du moins à mon époque) Qu'est-ce qu'une question pareille vient faire en cours? Serions-nous notés sur notre orthodoxie?
Je prends la parole, je raconte l'histoire de cette jeune fille qui me demandait si l'on pouvait s'inscrire au Cycle C sans être croyant, à qui j'avais répondu que c'était possible, mais sans doute non viable, car sans la foi, la motivation manquerait, c'était trop dur (déjà qu'avec la foi ce n'est pas facile tous les jours…) Mais elle n'avait pas entendu la fin de ma réponse, n'avait retenu que mon doute et avait protesté: «Ça me choque qu'on ne puisse pas s'inscrire en théologie sans la foi».
Ce n'était pas ce que j'avais dit, mais bon. Elle était encore étudiante, je n'ai pas insisté: comment expliquer une vie professionnelle et familiale à quelqu'un qui n'a jamais eu ni l'un ni l'autre — et qui n'est pas disposé à écouter? A quoi bon? Qu'elle essaie — ou qu'elle n'essaie pas.

Mais bon, «ce que je voulais dire, c'est que» je suis choquée de cette question sur la "Trinité dans nos vies" (entre guillemets pour souligner ma gêne, c'est vraiment le genre de sujet qui me paraît très privé): nous sommes en cours, pas en retraite spirituelle.

La prof insiste, nous nous soumettons, certains en restant abstrait, d'autres en jouant davantage le jeu, en étant précis, en parlant de prière, d'engagement dans leur travail. Nous dépendons pour une grande part de notre formation initiale, la qualité de l'enseignement reçu au catéchisme. Le mien, je m'en rends compte depuis que je suis ici, a été excellent, à croire que les prêtres de mon enfance passaient leurs nuits dans les commentaires théologiques et les analyses des conséquences de Vatican II. J'en suis rétrospectivement admirative.

Et donc, pour ne pas me dérober ici non plus, j'écris ma réponse: j'ai une foi christocentrée, sans doute parce que c'est l'entrée "naturelle" dans le catholicisme aujourd'hui (les enfants commencent avec l'Annonciation et Noël), sans doute aussi parce que j'ai lu les Evangiles dès qu'on me les a donnés (avant huit ans? après?), Jésus Christ est un compagnon quotidien, permanent1; je ne pense pas souvent à Dieu, dans une approche barthienne (un Dieu inconnaissable, sans mesure avec l'homme), partant du principe que les choses sont dans Ses mains et non les miennes; je vois souvent des signes de l'Esprit, les coïncidences, les coups de pouce dans les moments désespérés, ce que les athées appellent la chance ou le destin (toujours, déformation d'une vie parmi les non croyants, j'essaie de voir à travers leurs yeux). «Et il ne fit pas beaucoup de miracles dans ce lieu, à cause de leur incrédulité» (Mt 13, 58)

La prof ne triche pas et nous apporte son propre témoignage. Elle raconte également une anecdote dont je préciserai le cadre exact dès que je l'aurai retrouvé: comment, par expérience, les premiers moments d'un rapprochement passent par le récit de chacun, et non par la tentative de convaincre: se raconter, c'est accepter de se montrer, c'est le début d'une possibilité de se comprendre.


Note
1 : je me suis rendue compte, avec quelque gêne et un sourire amusé, qu'il y a un groupe sur FB qui peut très bien définir cela pour les non croyants: ce groupe s'intitule "je n'ai pas d'ami imaginaire". Le Christ comme le Hobbes de Calvin? De l'extérieur, c'est cohérent, je pense. De l'intérieur, ça n'a rien à voir, mais je n'ose pas m'expliquer. Ça m'intimide. C'est personnel (c'était déjà difficile en cours "entre nous", alors ici…)

Tarot

Sortie. Emmanuel à la nage, Peter, moi, Pascal. Tant de péniches que nous avons embarqué cinq centimètres d'eau (Emmanuel écopant avec sa chaussure…) Arnaud nous a rattrappés pour nous empêcher de faire un deuxième tour de l'île et nous conseiller de monter vers le barage.

Le soir, tarot à cinq, les garçon, I., H. et moi.
C'est la première fois que nous jouons au tarot à la maison. La dernière fois que j'y ai joué, c'était dans le Tarn, en 2009.
J'ai beaucoup joué au tarot, joué des heures, au lycée, durant les vacances, à Nanterre où j'avais dominé ma timidité pour aborder une table de joueurs à la cafeteria du self, et même au BDE de Sciences-Po. Jusqu'en 2002 je quittais tout pour une soirée de tarot.
Puis j'ai découvert RC et je me suis désintéressée du tarot. J'ai changé d'amis, aussi.

O. réussit une garde contre en s'appelant volontairement lui-même. Je le soupçonne de beaucoup jouer au lycée.


-------------
Agenda
C. vient d'être embauché en CDI. Il commence lundi 30 mai.

Ce trou noir est troublant

Soirée oulipienne et donc éclats de rire. Il est difficile de transcrire autre chose que des éclats, d'ailleurs, autre chose que des laps, aurait dit RC. Comment rendre le décousu des conversations tout en restant compréhensible hors contexte? Je note quelques points pour mémoire.

Les saxophonistes respirent par le nez en même temps qu'ils soufflent, avec les joues comme réservoir intermédiaire. Quand à la cornemuse, c'est un buffer. Ne parlons pas de l'accordéon (à jeter après une utilisation, vrai ou faux?)

— J'avais prédit la voiture jetable: quand le consommable est devenu plus cher que la partie fixe, tu jettes la partie fixe quand le consommable est épuisé: donc en imaginant un immense réservoir, tu jettes la voiture quand tu n'as plus d'essence…
— La cornemuse jetable, que tu jettes quand il n'y a plus d'air…

— Tu dis à des enfants de CE2 qu'ils vont mourir dans soixante dix ans de la grippe, ça ne leur fait rien, mais dans dix millions d'années d'une météorite, ça les inquiète.
— Oui, c'est la blague: "ma mère est morte de la grippe. — La grippe? ah, mais alors, c'est pas grave."

— Je vous invite le 9 juillet, la veille de la finale de l'Euro de foot, donc vous ne manquerez rien.
— Ah oui, d'ailleurs je l'ai noté: le 10, "fin du foot".
Et par dessus le coude de Dominique, je lis dans son agenda au 10 juillet, d'une écriture minuscule, "fin du foot", soigneusement entouré, et à voir ces deux mots dans le dernier jour d'une semaine encore vide, on comprend qu'il s'agit d'un soulagement, d'une libération patiemment attendue.

Demain soir, dernière de Conférence en forme de poire à Arcueil, autour d'Erik Satie (allez-y si vous pouvez, c'est très drôle). Et à propos de Satie, Dominique nous signale une émission d'Arte à venir (évidemment, il faut être insomniaque ou gardien de nuit).

Reprise

Retournée ramer pour la première fois depuis le stage dans le Jura. Le genou va mieux.

Double canoe avec Peter, configuration inédite qui nous laisse tous les deux surpris. Bonne sortie, courant, vent, péniches, mais bonne sortie sous un ciel gris.
Il ne pleuvra que l'après-midi.

Civil War le soir. Antigone revisitée et simplifiée.

La grève est bénigne dans le RER D.
Les policiers manifestent aujourd'hui (sur leur temps de repos), ils sont fatigués des insultes. Le paradoxe est que leurs outils de riposte sont si puissants qu'ils hésitent à s'en servir (émission le matin sur France Inter, O. rentre plus tard en classe cette semaine).
Cependant, ce que je lis sur le net, ce que j'entends, ce que j'ai vu avenue de Breteuil jeudi dernier, me laisse une étrange impression. "Nuit debout" n'était pas un mouvement agressif, et d'ailleurs leur point faible est de ne pas avoir de revendications. Que se passe-t-il? Certains parlent de provocation de policiers d'extrême-droite… D'autres déplorent la disparition des services d'ordre des syndicats, notamment de la CGT, aptes à contenir les excès et isoler les casseurs (que j'appelerais pilleurs).

Pointeuse

En arrivant au bureau, je mets mon minuteur sur sept heures trente (je crois que la durée du travail est de sept heures trente-six dans l'entreprise). Je viens d'inventer le pointage personnel.

J'essaie dans un sens de ne pas voler mon patron, dans l'autre de partir plus tôt du bureau.
Premier constat : j'ai du mal à travailler sept heures de suite sans zapper vers autre chose, blogs ou FB. Quand je pense à toutes les heures à la doc où je me suis occupée du blog véhesse et de la transcription des cours de Compagnon…

Incohérence et gentillesse masculines

Hier, rentrés peu avant minuit :
— Tu ne râleras pas, on a rallumé le chauffage, il faisait super froid.

Aujourd'hui :
— Bon, je vais te faire ton feu, mais c'est vraiment inutile.

(Ce n'est pas inutile puisqu'il fait froid, et si tu n'avais pas rallumé le chauffage, tu t'en rendrais compte. En faisant un feu, nous allons élever la température de la maison, et donc la chaudière va s'arrêter. C'est dommage de devoir écrire cela ici plutôt que s'expliquer IRL, parce que je sais que les explications IRL ne seront ni entendues ni reçues.

Mais c'est gentil de faire le feu. Pour tout dire, je m'appêtais à le faire moi-même, façon la plus sûre d'obtenir ce qu'on veut.)


PS : le titre sexiste est une contrapposée de la phrase "les femmes sont illogiques". Ben si, nous sommes logiques. Mais pas très écoutées.

Six mois

Ce qui m'étonne, c'est que les journalistes sont capables de tartiner sur les traumatisés du Bataclan "qui sursautent à chaque bruit inattendu" sans jamais en profiter pour faire un peu de pédagogie à propos des réfugiés: eux, ce sont les bombes qu'ils fuient.

Quand les changements informatiques courent après les changements réglementaires

J'assiste en ce moment au crash progressif mais régulier du système de santé français. Par système, je n'entends pas "principes", mais "informatique". Nous sommes en pleine régression, terme qui en informatique implique qu'après une mise à jour, les programmes fonctionnent moins bien qu'avant.

Un exemple: la mise en place du décret qui plafonne le remboursement autorisé sur les lunettes en fonction de la correction1.
Avant ce décret, la sécurité sociale vous remboursait entre six et dix euros, transmettait l'information de votre dépense à votre contrat de santé — si vous en aviez un (une "mutuelle", par abus de langage) — et vous étiez remboursé d'un complément selon le barème de votre contrat. Tout cela était automatique2 et prenait une dizaine de jours, ce qui permettait en payant par carte bleue d'être remboursé avant même d'être débité.
Depuis ce décret, les informations télétransmises par la sécurité sociale ne permettent plus de savoir dans quel cas de figure vous êtes (verres simples, complexes, très complexes). Il faut donc attendre le remboursement de la sécurité sociale sur votre compte en banque, puis envoyer facture et ordonnance à sa "mutuelle" (il est important d'attendre: si le gestionnaire de prestations reçoit vos justifs avant d'avoir reçu la notification de remboursement de la sécurité sociale, il risque de vous les renvoyer en vous disant que vos soins ne sont pas remboursés par la sécurité sociale et que donc il ne peut pas vous rembourser… De l'importance de ne pas "stresser le système": ne pas aller plus vite que la musique, attendre que chaque étape ait abouti.)
Cela signifie que l'on revient à un traitement manuel et non plus informatique. Or les entreprises qui gèrent les prestations n'ont pas le personnel suffisant pour gérer cet afflux de papiers, elles sont dimensionnées en comptant sur un fonctionnement normal de l'informatique. Nous assistons donc à une dégradation des durées de remboursement, à du mécontentement, à des cas parfois difficiles en cas de pensions de retraite minimales…
(Tout cela va rentrer dans l'ordre, bien sûr. Cela va prendre deux ou trois ans, le temps que les flux informatiques partant de la sécurité sociale soient mis à jour selon les nouvelles normes de façon à transmettre les données nécessaires.)


Tout ceci n'était qu'un préambule.
«Aujourd'hui […] s'est produit un miracle». L'Urssaf m'a téléphoné spontanément pour m'aider.
Evidemment, il doit lui manquer des milliers d'euros, ça motive. Je m'explique:

En tant que mutuelle, nous payons énormément de taxes, je veux dire des taxes nombreuses et variées (les assurances sont de gros collecteurs d'impôts, enfin, de "contributions indirectes", comme on dit à l'ENA (la différence, ce sont les poches destinatrices: l'Etat pour les impôts, divers organismes pour les contributions)). La taxe de solidarité additionnelle (TSA) est destinée à financer la CMU-C :
A ce titre, vous acquittez la taxe de solidarité additionnelle (TSA). La taxe doit être versée au plus tard le dernier jour du premier mois de chaque trimestre civil via un formulaire spécifique.
Une déclaration récapitulative annuelle doit être transmise avant le 30 juin de chaque année.
Ces documents doivent être transmis à l’Urssaf Ile-de-France avec copie au Fonds CMU.
En début d'année, nous avons été prévenus que cette taxe trimestrielle assise sur le chiffre d'affaires serait à déclarer en ligne (et à payer par virement, ce que nous faisions déjà).
En temps normal, c'est ma colaboratrice qui s'occupe des taxes. Elle n'avait toujours pas réussi à créer un compte en ligne avant que je parte une semaine en Espagne (8 avril). Elle partait ensuite en vacances pour trois semaines et à mon retour j'ai trouvé un mot sur mon bureau me disant que le compte n'était toujours pas créé.
Je n'avais pas envie de m'en occuper. J'ai complété la liasse fiscale et le dossier annuel à remettre à l'ACPR (date limite le 30 avril) sans m'occuper de la TSA, en me disant que nous pleurerions pour qu'on nous remette l'éventuelle pénalité si nous étions en retard par ma faute.
Mardi, j'ai ouvert le courrier en retard pour trouver une lettre de l'Urssaf disant qu'il y avait un report de date: nous avions jusqu'au 2 mai midi pour la déclaration: trop tard, nous étions le 3. Donc j'ai mis cette tâche de côté pour m'occuper des enveloppes T pour l'assemblée générale (et répondre au téléphone!)
Aujourd'hui (mercredi), l'Urssaf m'a appelée. Je résume ce que j'ai déduit de cet appel : personne n'avait réussi à se créer un compte et cette employée de l'Urssaf était en train de contacter une par une toutes les assurances de santé pour récupérer la taxe (pour vous donner une idée des enjeux: nous payons 72.000 euros de taxe trimestrielle pour 4,5 millions d'euros de chiffre d'affaires HT annuels, c'est-à-dire une très petite mutuelle (7500 personnes ouvrant droits)).

La suite est surtout destinée aux informaticiens. Je n'en suis pas une mais je sais que ce qui a été fait indique un gros bord** au niveau de la base de données: ce n'est pas le siret habituel de la mutuelle qui a été utilisé mais un siret particulier créé pour ce besoin précis, le compte utilisateur associé (ie le nom de ma collègue) n'est pas le compte utilisateur habituel, il a été doublonné en "CompteUtilisateur TSA" (ce qui signifie que la base a doublé de volume); bref, tout indique le développement informatique mené à la-va-vite n'importe comment (ce qui implique que nous allons en subir les conséquences pendant des années car l'informatique n'oublie rien et ne pardonne pas: si c'est fait de traviole, les effets pervers s'accumulent).

La dame de l'Urssaf a créé le compte à ma place et m'a donné un mot de passe provisoire à changer à la première connexion. La date limite de déclaration a été repoussée au 12 mai.
J'ai découvert à cette occasion qu'avec les derniers changements bancaires, je pouvais faire des virements de 72.000 euros vers l'extérieur sans les faire valider par personne.


Note
1 : Il est possible de ne pas appliquer ce plafonnement, c'est-à-dire ne pas être "contrat de santé responsable": dans ce cas les taxes s'élèvent à 13% au lieu de 7% (j'arrondis).
2 : Sauf pour certaines mutuelles qui tenaient absolument à avoir la facture: dans ce cas nous étions déjà dans le cas que je décris ci-après.

Le Mémorial de Sainte-Hélène

Ligne 1, 19h05. le cours a commencé depuis cinq minutes. Je suis très en retard, trop en retard même pour rendre les livres à la bibliothèque (impact terroriste: les boîtes à livres sont fermées, impossible de rendre un livre en dehors des heures d'ouverture).

Changement de situation.

Cinquante-et-un appels sur mon répondeur en arrivant au bureau ce matin. Nous avons modifié l'échéancier suite à un recalcul de taxe (dans le sens d'une baisse des cotisations de vingt-huit centimes), mais le courrier qui est parti automatiquement est celui des avenants : "suite à votre changement de situation…"
Mails et coups de fil inquiets toute la journée: «que se passe-t-il? je n'ai pas changé de situation, je n'ai rien demandé…». J'ai essayé de descendre à une minute par coup de fil.

(C'était une erreur d'aller chez le coiffeur un mardi: cela a été bien trop long, j'ai raté le grec. Alors je suis allée boire un mojito.)

Une nouvelle maison

Notre arbre est malade. Dans l'espoir de lui redonner de la force, et contre l'avis de l'élagueur qui nous a dit que c'était inutile, nous avons fait couper ses branches les plus basses.

C'est étonnant. Ce n'est plus le même jardin, il est devenu civilisé. Je me rends compte que j'avais un morceau de Canada dans mon jardin, quelque chose qui me rappelait Maria Chapdelaine ou les livres de Curwood, il était à lui seul toutes les forêts et les grandes plaines. J'ai défendu cet arbre toutes ces années contre H. qui voulait le tailler, qui trouvait que cet if prenait trop de places, mais aujourd'hui j'ai l'impression d'être soulagée, comme libérée d'une crainte primale.




Ahurissement

Ce moment où tu t'aperçois que le premier livre de Hans Urs von Balthasar n'est pas traduit en français (et j'ose à peine le commander, de peur qu'il soit écrit en gothique — il est presque sûrement écrit en gothique): Apokalypse der deutschen Seele.


(Finalement non, sans doute pas : dernière édition en 1998)
Les billets et commentaires du blog Alice du fromage sont utilisables sous licence Creatives Commons : citation de la source, pas d'utilisation commerciale ni de modification.