Alice du fromage

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samedi 30 décembre 2006

Mon pismo prend sa retraite

Ce billet N'est PAS de la publicité pour Apple. :-)


Je n'arrive pas à me souvenir du moment où j'ai hérité du pismo. Je l'utilisais déjà en septembre 2002, j'en suis sûre. C'était un ordinateur de récup: à partir du moment où nous sommes sortis des perpétuelles fins de mois difficiles, H. a acheté un nouvel ordinateur (un nouveau Mac) quasiment tous les ans en trouvant à chaque fois un prétexte (s'il me lit il va être furieux), des gens prêts à lui racheter le précédent, quelqu'un de la famille intéressé par un ordinateur gratuit (assez rarement, en fait, car la famille est anti-Apple), la nécessité d'acheter un portable, etc.
En 2002, je fus donc la personne qui héritai du pismo, avec un clavier et une souris extérieurs pour m'en servir en ordinateur fixe (je ne m'en suis pratiquement jamais servi comme d'ordinateur portable).

Je n'arrive plus à démêler les années. Il y eut la fois où je provoquai un court-circuit en tirant sur le câble d'alimentation: une carte grilla, je me retrouvai sans ordinateur. Une carte fut commandée, installée, l'ordinateur démarrait mais le son ne fonctionnait plus. Quelques bidouilles plus tard, le son sortait à nouveau, mais uniquement sur des hauts-parleurs externes qu'il fallait brancher sur le portable.
Le pismo avait été promis à C.; entretemps était sorti l'iMac, le coma de mon pismo avait été l'occasion de se procurer cette bête de course: un ordinateur neuf rien que pour moi (septembre ou octobre 2004, puisque par la même occasion H. m'offrit un iPod, le dernier joujou à la mode. Je n'en voulais pas (mon snobisme consiste à mépriser ce qui est à la mode), je m'y habituai très vite. J'espère qu'il va vivre encore longtemps.)
Je ne me suis jamais vraiment entendu avec mon iMac, je ne sais pas pourquoi. Trop beau, trop neuf, le syndrome de «C'est beaucoup trop beau pour un chien». En tout cas, nous n'étions pas destinés à vieillir ensemble. Pour une raison inexplicable, il a grillé sous mes doigts en janvier ou février 2006. Il paraît que c'est rarissime. Est-ce parce que j'ai éternué du thé sur le clavier? J'ai un don avec les ordinateurs et les programmes. Je trouve toujours le défaut.

Chance pour H., cela correspondait à la sortie du Mac mini. Il m'avait déjà annoncé qu'il fallait absolument que nous en eussions un à la maison, qu'il fallait qu'il le teste, que l'idée était géniale (et c'est vrai que...), que c'était destiné aux gens qui avaient déjà un écran et un portable, etc. Je ne voulais pas, toujours pas, de quelque chose bien trop beau (trop grand, trop puisssant, disproportionné par rapport à mes besoins) pour moi. Le Mac mini fut installé dans le salon pour les enfants et je récupérai mon pismo chéri, qu'il fallut faire passer sous Tiger ou Leopard ou Panter, je ne sais. C'était un peu lourd pour lui, mais toujours compatible.

Il y a quelques mois, H. s'est offert le plus grand écran que propose Apple, un 30 pouces (taquinerie à part, il faut tout de même que j'écrive ici que vu ce qu'il programme, c'est justifié). J'ai alors hérité de son 23 pouces. Le pismo a eu du mal. Il a fallu lui rajouter une carte vidéo. Il mettait plusieurs secondes pour passer en veille, il en sortait en affichant un voile rouge. Il fallait le ménager, je pris l'habitude de ne jamais laisser plus de trois applications ouvertes à la fois (le mail, internet, et une troisième). C'était une contrainte. Peu à peu j'avais l'impression de voir vieillir une personne âgée, une personne pouvant de moins en moins se permettre de bouger. Son état se dégradait.
Le pismo est devenu muet. La dernière vidéo que j'ai vue et entendue, c'est celle de la quinte juste. Je n'ai jamais osé avouer à Zvezdo que je n'avais pas écouté les illustrations de ses billets que je lis avec beaucoup d'attention et de plaisir (et maintenant, je vais aller écouter le billet sur Peter Grimes. C'était frustrant, tout de même.).
Mais pas simplement muet, aveugle, aussi. Impossible depuis l'été de regarder les vidéos de Tlön ou de Matoo.
Mon pismo était également asmathique, et j'aimais bien. Je l'entendais souffler quand je lui demandais quelque chose qui demandait de la ressource. Je n'aime pas abandonner les choses usées qui m'ont beaucoup servie. Il me semble que je leur dois quelque chose (Objets inanimés,...), avec eux disparaît un peu de nous-mêmes, aussi. Je ne disais rien à H., mais je savais que le pismo était en train de mourir.

La prochaine version du système d'exploitation ne sera pas supportée par le pismo. H. a acheté le dernier Mac mini (le premier a été vendu pour être évidemment remplacé par le dernier iMac Core duo, vous vous en seriez douté) et a remplacé mon pismo jeudi, sans rien me dire. Le plus étrange est que je ne m'en suis pas aperçue (je dois expliquer que le pismo était invisible, posé sous le bureau). Il m'a envoyé une vidéo, m'a demandé de la regarder. J'ai protesté qu'il y avait longtemps que je ne pouvais plus regarder de vidéo. Puis j'ai essayé. Ça a marché, je me suis réjouie, sans m'étonner. Je ne me suis pas étonnée non plus de ne plus entendre le bruit de l'ordinateur, pas étonnée que la carte-son fonctionne à nouveau. Je me suis dit que j'avais de la chance. Je suis absolument disposée à croire aux miracles, aux fées et aux trois vœux.
Je n'aurais toujours rien vu si H. n'avait pas fini par me le dire.
Cet aveuglement, lui, m'étonne à chaque fois, cette inaptitude à voir ce qu'on ne veut pas voir, cette aptitude à considérer le réel comme figé tant que rien n'indique formellement qu'il a été modifié...

Je suis soulagée. J'avais peur que mon portable s'éteigne un jour, un jour sans sauvegarde bien entendu. J'étais arrivée aux limites de l'exercice, même si je ne voulais pas l'avouer.
Je suis contente de pouvoir aller regarder les vidéos chez les uns et les autres, de pouvoir faire des recherches sur Youtube comme tout le monde, de lancer les radioblogs de Zvezdo. Je vais pouvoir rapatrier ma bibliothèque iTunes qui était sur un autre ordinateur car trop lourde pour le pismo.
J'espère que cet ordinateur-là me durera plus longtemps que l'iMac.


Ça fait un peu étalage, tant pis, ou plutôt tant mieux, ce billet était un billet d'adieu, mais aussi une recension. Je sais que nous avons toujours les derniers produits Apple à la maison, H. dit que c'est faux, en écrivant ce billet j'ai réalisé à quel point c'était vrai (et je n'ai pas parlé de l'ordinateur qui supporte le réseau, ni des deux titanium successifs, ni des iPod mini, nano, shuffle, offerts aux anniversaires et Noëls des uns et des autres, je n'ai parlé que de ce qui me concerne directement.)

jeudi 28 décembre 2006

Le Chevalier à la rose

J'avais pris des billets pour cet opéra un peu par hasard, pour la valse et pour Richard Strauss. J'ai lu avec curiosité les billets des blogueurs musiciens m'ayant précédée.

J'ai été un peu déçue par les voix, souvent couvertes par l'orchestre. En lisant le billet de Laurent, je me dis que je suis sans doute sévère. Mais tout de même... il me semble que les voix ont mis longtemps à se chauffer. Cependant elles étaient à leur meilleur dans les moments les plus émouvants ou les plus dramatiques, comme si les chanteurs portés par leur rôle trouvaient alors de nouvelles ressources. L'aspect liquide des miroirs, la salle renvoyée à elle-même en ouverture et à la fin, la qualité labyrinthique des plis du décor, m'ont énormément plu.

A regarder évoluer la noblesse inaltérable face à la noblesse décadente, la bourgeoisie plus digne que celle-ci mais la confondant avec celle-là, il m'a semblé assister à l'illustration de certains des chapitres de Mensonge romantique, vérité romanesque que je suis enfin en train de terminer.

La Maréchale m'a fait penser à une réflexion de Tlön (ou à Tlön rapportant les propos d'un autre blogueur, plus exactement) concernant les photos de Zohiloff : «Il a une façon très émouvante de photographier les femmes entre deux âges.»

Défaite et dignité, fragilité, sensation intime du temps qui passe.

mercredi 27 décembre 2006

Regrets et projet

A midi, Paul me racontait qu'enfant, il avait gagné un baptême de l'air. Le lot était convertible en argent liquide: un baptême de l'air ou cinquante francs. Comme il n'avait pas un sou vaillant, il avait choisi l'argent et le regrettait amèrement aujourd'hui.
J'ai un souvenir du même genre. Au début des années 70, mes parents faisaient chaque année en juillet le trajet Agadir-Vierzon en voiture avec deux petites filles: pour eux trois jours et trois nuits de conduite en se relayant, pratiquant sans dormir, pour nous un ennui mortel que seules les disputes venaient égayer. C'est ainsi qu'ils décidèrent une année de me renvoyer en France seule, en voyage accompagné. J'avais six ans, l'hôtesse de l'air me proposa d'aller visiter la cabine de pilotage de la Caravelle. J'étais intimidée, j'eus peur de déranger, je refusai. Je le regrette beaucoup.

Après la guerre, Paul passa son brevet de pilote. C'était plus amusant qu'aujourd'hui dans la mesure où il n'y avait pas de contact radio avec le sol: la première fois qu'on s'élançait, on était réellement seul, d'où quelques émotions fortes au moment de l'atterrissage.
Il y a deux ou trois ans, il m'avait proposé de faire un tour en planeur avec lui. J'avais refusé par peur de faire de la peine à H., qui lui aussi aimerait faire du planeur. Aujourd'hui, j'ai changé d'avis. Le temps se fait court, si je dois faire du planeur avec Paul, c'est au plus vite, dès cette année. Lâchement, je l'ai chargé de l'intendance et des détails pratiques.
A suivre.

mardi 26 décembre 2006

Triste vérité

Lorsque je croise des publicités pour des crèmes anti-rides ou amincissantes, je pense à ma s?ur qui travailla quelques années dans les laboratoires de Lancôme.

— C'est vraiment efficace, ces crèmes ?
— Si c'était efficace, nous n'aurions pas le droit de les vendre !



Ici se situe la frontière entre la parapharmacie et la pharmacie, à ce que j'ai compris.

mercredi 20 décembre 2006

Les voeux les plus veules

transmis par un ami. Je le copie ici à toutes fins utiles.

Please accept with no obligation, implied or implicit, my best wishes for an environmentally conscious, socially responsible, low-stress, non-addictive, gender-neutral celebration of the winter solstice holiday, practiced within the most enjoyable traditions of the religious persuasion of your choice, or secular practices of your choice, with respect for the religious/secular persuasion and/or traditions of others, or their choice not to practice religious or secular traditions at all. I also wish you a fiscally successful, personally fulfilling and medically uncomplicated recognition of the onset of the generally accepted calendar year 2007, but not without due respect for the calendars of choice of other cultures whose contributions to society have helped. And without regard to the race, creed, colour, age, physical ability, religious faith or sexual preference of the wishee.

(By accepting these greetings you are accepting these terms. This greeting is subject to clarification or withdrawal. It is freely transferable with no alteration to the original greeting. It implies no promise by the wisher to actually implement any of the wishes for herself or himself or others, and is void where prohibited by law and is revocable at the sole discretion of the wisher. This wish is warranted to perform as expected within the usual application of good tidings for a period of one year or until the issuance of a subsequent holiday greeting, whichever comes first, and warranty is limited to replacement of this wish or issuance of a new wish at the sole discretion of the wisher.)

dimanche 17 décembre 2006

Règle de vie

— Mais pourquoi m'as-tu demandé de descendre ?
— Parce que pipe.
— Parce que quoi ?
— Pas d'initiatives, pas d'emmerdes.

mardi 12 décembre 2006

Précision technique

Après étude d'Agatha Christie et de Columbo, Tlön et moi-même sommes parvenus à la même conclusion : lorsque nous réaliserons nos meurtres parfaits, nous ne nous justifierons pas, nous tirerons d'abord.



Note de bas de page dix ans plus tard (septembre 2016):
C'était le début de nos rendez-vous hebdomadaires au Collège de France pour écouter Antoine Compagnon.

lundi 11 décembre 2006

L'âge du (départ à la retraite du) capitaine

lettre retrouvée dans les archives de mon entreprise.

à Monsieur Unvois
Société Commerciale des Potasses et de l'Azote
2, Place du Général de Gaulle
68100 Mulhouse (Ht-Rhin) France

Taipei, le 2 Juin 1973
P.0. Box 68-986

Cher Monsieur Unvois,

En réponse à votre lettre du 22 Mai 1978, je vous signale que cette différence de ma date de naissance provient du fait d'un chevauchement de la dernière année de l'Empire sur la première année de la République d'où une réduction d'une année lors du calcul de ma date de naissance chiffrée en calendrier grégorien. Pour le mois il y a un décalage entre le calendrier lunaire et le calendrier solaire.

Du temps de mon père qui vivait sous le régime impérial, la date de ma naissance a bien été inscrite comme étant l'année 1902 et ce sont les autorités de la République qui ont confondu la dernière année de l'Empire avec la première année de la République faisant ainsi avancer ma date de naissance d'une année en 1903. Comme preuve officielle de mon explication, je vous adresse ci-joint mon Permis de Conduire (Carte rose) délivré par le Préfet du Nord le 23 Novembre 1927 que j'ai retrouvé parmi mes vieux papiers pendant leur rangement.

Pensez-vous que cette pièce pourrait convaincre la compagnie d'assurances à m'éviter la diminution de rente dont vous me parlez ou bien faudrait-il absolument que j'entreprenne des démarches auprès de nos autorités en vue de faire corriger cette erreur dans le calcul de ma date de naissance en année grégorienne, à moins que cette diminution de rente ne soit que vraiment très minime.

A mon âge cette différence d'un an devient négligeable et ne devrait plus compter mais il est probable que mon âge se place justement dans une coupure de l'échelle de la rente et c'est bien dommage. Je regrette que je sois obligé de vous causer tout ce dérangement. Comme demandé, ci-joint photocopie du passeport de ma femme indiquant bien la date du 1er mai 1907 quoiqu'en réalite cette date devrait être celle de 1906.

En ce qui concerne la future représentation de Producteurs à Taiwan, j'ai demandé à X* à Vienne si une décision était intervenue et il m'est répondu que la proposition que j'avais faite par ma lettre du 14 Février 1973 et dont vous avez copie sera remise sur l'agenda de la prochaine réunion du 14 Juin 1973. Je vais arrêter tous les comptes au 20 Juin 1973 et vous envoyer mes états comptables immédiatement après cette date, ce qui me permettra de quitter Taipei le 25 Juin 1973; en passant par San Francisco et Vancouver pour rendre visite a nos deux filles, j'arriverai à Paris le 13 Juillet 1973 et je me mettrai tout de suite en rapport avec vous.

En attendant, je vous prie d'agréer, cher Monsieur Unvois, l'expression de mes sentiments dévoués.

Dr. Txxx
PJ. Photocopie de Passeport

dimanche 10 décembre 2006

Tabac

moi : Depuis que j'ai arrêté de fumer…
H : Tu as arrêté de fumer, toi ?
moi : Oui, depuis jeudi.
C : Tu veux dire que tu n'a pas fumé trois jours.

Ils sont méchants. Ils ont raison. J'ai tendance à ne pas fumer trois jours toutes les trois semaines, trois semaines tous les six mois. La dernière fois que j'ai "arrêté" ainsi, c'était cet été. Il a suffi que j'apprenne la crise cardiaque de JM pour en rallumer une aussi sec.
Le dialogue ci-dessus avait lieu le 10 novembre. Je n'ai pas fumé depuis.

En fait, pour moi, ce n'est pas très difficile, car je n'aime pas ça. Ça me donne envie de vomir. «Mais alors, pourquoi fumes-tu?» s'exclame le chœur, dépassé par tant d'illogisme.
Je ne sais pas. Par ennui, parce que, au moins à court terme, cela présente moins d'effets secondaires que l'alcool, parce que la fumée de cigarette, c'est joli et que j'espérais (raté!) apprendre à faire des ronds, par esprit de contradiction, parce qu'arrêter en ce moment, ça donne vraiment trop l'impression de céder à une pression que je considère inacceptable.
Mais lorsque le chirurgien qui doit vous opérer murmure dans sa barbe, sans même lever les yeux: «Cigarettes… ça augmente le risque de nécrose des tissus…» et passe à autre chose sans insister, vous vous dites que ça ne vaut peut-être pas la peine de s'obstiner pour quelque chose à laquelle vous ne tenez pas.

Alors je bois du café, beaucoup de café. Je crois qu'on conseille à ceux qui arrête de fumer d'éviter les excitants. En réfléchissant, je me rends compte que j'ai besoin de mon point au cœur. Cigarettes ou cafés, qu'importe, du moment que j'obtiens cette présence. En réfléchissant un peu plus, je me dis que j'effectue un transfert: je transforme un malaise mental en malaise physique, je détourne mon attention de mon esprit vers ma poitrine.
Ce n'est ni rationnel ni raisonnable.

M'observer m'intéresse. Je trouve très pratique de s'avoir sous la main pour faire des expériences.
Je regrette que Ben ex-Machinchose ait fermé son blog. Il avait annoncé en mai dernier une série de mesures qui m'impressionnait: arrêter de fumer, arrêter le café, arrêter de boire, manger moins. J'aurais aimé avoir des compte-rendus d'expérience et connaître les résultats: est-ce vraiment possible, et vraiment souhaitable, de se convertir ainsi à l'ascétisme brutalement? Est-ce que cela vaut la peine?
Lorsque j'ai arrêté de fumer (à chaque fois que j'arrête), j'ai été malade : gorge, poumons, sinus. Il a fallu trois semaines pour que ça aille mieux. J'ai également arrêté de manger du chocolat et de boire de la bière depuis septembre: résultat, un gramme de moins toutes les quarante-cinq minutes, ce qui est beaucoup moins impressionnant que les résultats de Gvgvsse (mais je ne cherchais rien d'impressionnant, je voulais juste inverser la spirale).
Je sais que l'intérêt principal pour moi, c'est de gagner en heures de sommeil: par expérience, je sais que la cigarette et les kilos en trop exigent que je dorme davantage. Pour moi, ça vaut vraiment la peine de se priver un peu pour gagner une heure de sommeil.

lundi 4 décembre 2006

Perdue

Dans la vie de la plupart des femmes, tout, même le plus grand chagrin, aboutit à une question d'essayage.

Le côté de Guermantes, Pléiade t.2 (1957) p.335
J'ai détesté Proust d'avoir écrit cela. J'en ai parlé à un ami, qui m'a répondu que la remarque s'appliquait également aux hommes. Piètre consolation.

Lorsque j'ai rencontré H. il y a vingt ans, nous réunissions à nous deux sept grands-parents. Nous avons enterré le sixième aujourd'hui, la grand-mère maternelle de H. Il ne reste que ma grand-mère maternelle.
Je suppose que nous sommes censés nous résigner. C'est l'inverse qui se produit, la colère, la frustration, est plus grande à chaque fois. Ce n'est pas tant la mort que la fin de ces vies qui me révolte, ces vies dures, honnêtes, courageuses, terminées dans la souffrance ou l'ennui ou la folie pendant quelques semaines ou quelques années, et la mort à l'hôpital loin chez soi. J'ai l'impression d'une promesse trahie — comme s'il nous avait jamais été promis la justice en ce monde.
Nous eûmes par la suite une conversation que je n'ai jamais oubliée. Nous passions la soirée chez elle, Lore et moi, avec Marie McCarthy et une amie à elle qui vivait à Rome, catholique croyante comme il apparut bientôt. Elle s'intéressait vivement à moi et me provoqua en me demandant à brûle-pourpoint: «Croyez-vous en dieu?» On ne m'avait jamais posé la question de manière aussi directe — et cela venant d'une presque étrangère! Je la considérai d'abord perplexe, je réfléchis puis dis — à ma propre surprise: «Oui!» Hannah [Arendt] sursauta — je me souviens de son regard presque épouvanté sur moi. «Vraiment?» Et je répliquai: «Oui. Finalement oui. Quel qu'en soit le sens, la réponse "oui" se rapproche plus de la vérité que le "non".» Peu de temps après je me trouvais seul avec Hannah. La conversation revint sur dieu et elle déclara: «Je n'ai jamais douté d'un dieu personnel.» Sur quoi je dis: «Mais Hannah, je ne le savais pas du tout! Et je ne comprends pas pourquoi, l'autre soir, tu as eu l'air tellement stupéfaite.» Elle répondit: «J'étais très ébranlée d'entendre cela de ta bouche, car je ne l'aurais jamais pensé.» Ainsi nous nous étions surpris l'un l'autre par cet aveu.

Hans Jonas, Souvenirs, p.259

samedi 2 décembre 2006

Devinettes

Je connais ces devinettes depuis si longtemps que j'espère que personne ne s'en souvient:

M. et Mme Froid ont trois fils et trois filles : quels sont leurs prénoms?

Inversement:
Quel est le nom de famille des trois sœurs Anne, Justine et Corinne?

La dernière, ma préférée du moment (et beaucoup plus récente):
M. et Mme Liguili ont un fils. Quel est son prénom?
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