J'avais prévu d'inviter A-C à la Table du Loup, mais le restaurant ferme: contrôle sanitaire, pas aux normes, il faut refaire toute la cuisine, trop d'investissements. Où vais-je acheter mon gin désormais?

J'ai donc changé pour le restaurant tibétain. Il s'avèrera qu'A-C n'aimera pas. (Mais comment aurait-elle fait au Tibet, son voyage annulé il y a deux ans pour cause de pandémie?)

Elle ne va pas bien, elle a perdu sa mère en octobre, elle est en deuil, à la limite des larmes à tout instant, sur tous les sujets. Je suis toujours effarée par la violence de la société qui s'imagine qu'il suffit d'un mois pour surmonter un deuil. Mon estimation, pour quelqu'un de très cher, est de deux à cinq ans. (J'appelle «surmonter» le moment où il reste le manque et le regret, mais plus la douleur. Pendant si longtemps (peut-être toujours?) on se dit: «ah tiens, il faudra que je lui raconte cela»).

Elle va prendre le train pour Romans, son fils aîné nous rejoint gare de Lyon. Il finit des études en montage vidéo et cinéma. Vingt-deux ans. Comme cela a passé vite.