Librairie Tschann

Une razzia chez Tschann, j'avais un peu bu. Ils ont le plus beau rayon de poésie que j'ai vu à ce jour dans la capitale, il faut dire que j'aime les livres aux formats étranges et aux pages non coupées.
  • Gilles Deleuze et Félix Guattari, Mille plateaux, parce que Guillaume m'a recommandé "Rhizome", et que ce livre d'occasion coûte plus cher que Mille plateaux neuf.
  • Mohammed Choukri, Paul Bowles, le reclus de Tanger à cause de la phrase obsessionnelle dans L'Amour, l'Automne, sur Gertrude Stein qui l'a "lancé" (ou pas).
  • Jacques Dupin, Échancré, cité dans L'Amour, l'Automne, mais surtout, du même, je découvre alors qu'il n'en est pas parlé, Écart.
  • Ezra Pound, Les Cantos, en bilingue (un vieux projet oublié jusqu'à ce que je vois ce livre).
  • Michel Foucault, Raymond Roussel
  • Maurice Sachs, Alias
  • Gilbert Lascault, Le Petit Chaperon Rouge, partout, pour ma sÅ“ur
  • René Char, Les Matinaux, pour La parole en archipel




PS : Je précise cinq ans plus tard : invitée par Tlön chez Wajda. Ce restaurant deviendra plus tard le lieu des repas de rentrée avec Claude et Olivier.

Mondes parallèles

Dans l'amphithéâtre sombre je m'endors durant la présentation commerciale de Second Life, bizarre dérivé des nouvelles de Bradbury.
Cauchemar, je crie, m'éveille, panique, m'a-t-on entendue?
Non, je n'ai crié qu'en rêve.

J'évite de me rendormir.

250 tonnes de bidules

La vocation viticole du parc naturel régional de la Montagne de Reims l'a poussé à organiser dès 1983 la collecte des films plastiques d'emballage et, depuis 1998, celle des capsules et des bidules.

Ce « bidule » n'a rien à voir avec son synonyme qui désigne une personne ou un objet par un terme plus général et vague comme « machin », « chose » ou… « bidule ». Car celui-là est en polyéthylène et sert à capter, sous la capsule en aluminium, les dépôts de levure qui interviennent lors de la seconde fermentation du Champagne. En 1998, le parc naturel régional (PNR) de la Montagne de Reims (68 communes, 35 000 habitants, 50000 hectares, dont 9 000 hectares de vignes) lançait à Châtillon-sur-Marne son premier collecteur de bidules et de capsules. Il en récupère désormais environ 250 tonnes par an grâce aux 50 conteneurs répartis sur les communes viticoles du parc naturel régional. « Les viticulteurs jouent le jeu. C'est un succès. 90% des capsules et des bidules sont collectés » se félicite Cyrille Camboulives, l'une des chevilles ouvrières de l'opération. Avant déchets non recyclés promis à la décharge, les capsules et les bidules sont aujourd'hui expédiés vers la Moselle où la société «Recyclage 2000» les broie pour les réinjecter dans les filières de l'aluminium ou de la plasturgie.

Horizons régions, (Les Echos), juin 2007, p.18

Douce et Barbe-bleue

Les CHAM (classes à horaires aménagés musique) de l'Essonne ont chaque année un "projet" qui se termine par une représentation à l'opéra de Massy. La participation des élèves se faisant sur la base du volontariat, j'y avais échappé l'année dernière pour cause de mise en scène avant-gardiste, ai-je cru comprendre: «Souffler devant tout le monde sur une balle de ping-pong, c'est trop la honte!»
Il y a deux ans j'avais vu une représentation de Carmen, agréable mais qui ne m'a pas laissé grand souvenir, il y a trois ans Porggy and Bess.

La représentation d'hier soir fut la meilleure de ces trois expériences. Il s'agissait de la réécriture de l'histoire de Barbe-bleue, Douce et Barbe-Bleue: quelques jeunes filles qui s'ennuient décident d'écrire un conte. Il faudra qu'il commence par «Il était une fois» et se termine par «ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants». Oui ou non? Le chœur n'est pas d'accord. L'histoire se déroule, Douce épouse Barbe-bleue, se montre trop curieuse (et c'est encore une histoire de clé), est condamnée à mort. Sa sœur Anne arrive, puis l'histoire bifurque, j'attendrai en vain ma réplique préférée «je ne vois que le soleil qui poudroie et l'herbe qui verdoie», les frères n'arrivent pas, Anne voit des bergers, des moutons, point de poudroiement ni de verdoiement.

Le chœur-pousse-au-crime présentera successivement des ciseaux, un katana puis une tronçonneuse à Barbe-bleue («mais c'est n'importe quoi», s'exclame Barbe-bleue, et je ne lui donne pas tort), et Douce mourra dans d'atroces tressaillements.





Le chœur chantera alors son regret : «Les histoires à l'eau de rose ont cependant quelque chose qui nous plaît…»


Ce fut une belle représentation. J'ai l'amour particulier des costumes, des rideaux qui se transforment l'un en manteau pour Barbe-bleue, l'autre en robe de soirée puis, retourné, en robe de mariée, le troisième en jupes pour quatre péronnelles avant de devenir des casaques de mousquetaires, sans compter la table du salon qui servira de jupe à panier à la mère de Douce…

Recommandation

Pas le temps ce soir d'écrire, pensais-je.

Et puis si: un post paresseux mais enthousiaste pour recommander une lecture savoureuse (le 19 juin 2007. J'ai retrouvé les archives, le blog n'est plus en ligne).

Un peu de comparatisme économique

Je disais jeudi à une collègue violemment anti sarkozienne que nous allions enfin savoir si oui ou non la baisse des impôts générait de la richesse, car cela n'a jamais été prouvé dans les faits, nous n'en sommes pour l'instant qu'à la théorie.
J'ajoutais que si cela échouait, nous aurions droit à un plan d'austérité type 1983 afin de combler le déficit creusé par cette politique libérale et de respecter les critères imposés par l'Union européenne.

Vendredi je reçois les quelques feuillets d'analyses économiques régulièrement publiés par Natixis dans Flash économie sous la direction de Patrick Artus. L'article du 11 juin 2007 s'intitule "Reagan 1981; Sarkozy 2007: des similitudes ?" Il conclut que la baisse des impôts n'a eu quasi aucun impact sur le marché économique américain et que la politique de dérégulation de la concurrence est sans doute la cause principale de la reprise américaine.

Je n'ai pas assez d'expérience pour en juger (pour commencer, la prémisse est-elle exacte, peut-on comparer la politique économique de Sarkozy à celle de Reagan?), mais je copie ici les récapitulatifs de la politique fiscale et concurentielle de Reagan, parce qu'il peut toujours être utile de pouvoir les retrouver rapidement.


Politique fiscale de Reagan
En 1981, l'administration Reagan présente devant le Congrès son "Economie Recovery Act" : baisse massive des impôts (10% par an sur l'impôt sur le revenu pendant 3 ans), baisse des dépenses publiques (réduction de programmes fédéraux comme les assurances-chômage, les retraites, le Medicaid, les aides familiales, les bourses étudiantes...), rigueur monétaire…
Concernant les baisses d'impôts, principalement:
  • diminution du taux marginal d'imposition de 70% à 50% (pour une fourchette antérieure de 14% à 70%);
  • réduction d'impôts pour les couples mariés;
  • déduction des dons caritatifs;
  • modification et libéralisation de la réglementation concernant la vente de la résidence principale;
  • encouragement à l'ouverture de comptes épargne retraite individuels via l'augmentation des déductions fiscales.
Pour les entreprises :
  • Accelerated Cost Recovery System : déduction d'impôts pour dépréciation des dépenses d'investissement;
  • Réduction d'impôts pour les PME (revenu imposable entre 0 $ et 50 000 $).
En un seul tour de scrutin, les deux chambres ont adopté cette législation qui imposait des réductions massives et générales dans tous les domaines de dépenses, défense exceptée : une réduction totale de 130,6 milliards de dollars au cours des années fiscales 1981-1984.

Déréglementation sous Reagan
Le mécanisme de base de la déréglementation avait été mis en place par J. Carter (compagnies aériennes en 1978 et transports routiers avec la Trucking Act de 1980). Le Fédéral Register de 1980 contenait une grande partie des réglementations adoptées par la suite, Reagan a accéléré le processus.
Transport
La déréglementation américaine de 1980 oblige toutes les entreprises de camionnage public à s'adapter à des régies de jeu plus concurrentielles en ce qu'elle vise essentiellement à réduire considérablement les barrières à l'entrée exigées par l'Interstate Commerce Commission (ICC).
Communications
1981 : le Fédéral Communications Commission (FCC) dérégule les restrictions sur les radios, mettant en place un système simplifié pour renouveler les licences de radio. Il incite le Congrès à rallonger les périodes de licences pour les radios et télévisions et autorise un système de loterie pour l'attribution des nouvelles licences.).
Télécom
Au cours des années 70, la FCC (Fédéral Communications Commission) a développé des mesures de sauvegarde de la concurrence. En 1984, le démantèlement d'AT&T a entraîné la baisse des prix et a élargi le choix des consommateurs sur les marchés des services longue distance et internationaux et l'ouverture des marchés des équipements de réseau.
L'ordonnance antitrust de 1984 a obligé AT&T à abandonner ses filiales d'exploitation locales, créant 7 sociétés régionales (RBOC) qui sauf, dérogation, ne pouvaient fournir de services longue distance, interdiction est faite aux RBOC de fournir des informations. Ce démantèlement reposait sur l'idée que les réseaux de télécom locaux avaient les caractéristiques d'un monopole naturel : il institue la distinction entre services de télécommunications «longue distance» et «locales» via la définition de zones plus petites que les Etats.
L'objectif est de faire en sorte que les sociétés régionales ne fournissent que des services de base soumis à réglementation.
Il en a résulté le développement de la concurrence sur longue distance mais pas dans les services intra-Etats et locaux, les Etats ayant maintenu des restrictions légales d'entrée sur ces marchés jusqu'au début des années 90.
La conclusion des analystes est la suivante : «Le point positif du "reaganisme" n'est donc pas sa politique budgétaire et fiscale, mais sa politique microéconomique qui a déclenché en particulier la modernisation de l'industrie des télécommunications.»

Confiance

— Ne me mens pas. Dis-moi que tu ne veux pas répondre, mais ne me mens pas. J'ai besoin de quelqu'un en qui je puisse avoir aveuglément confiance.
— Ça n'existe pas.
— Je sais.

Mais je me demande s'il est réellement normal que lui le sache. Est-il normal de savoir cela à 15 ans? Je lui ai peut-être trop parlé, trop tôt en tout cas, ou il a compris trop vite.


Le pas suivant, c'est bien entendu que je trouverais anormal qu'il ne me mente pas.
Les parents n'ont pas à tout savoir de leurs enfants; de même que les enfants ne doivent pas tous savoir de leurs parents.


Parmi les mythes destructeurs du XXe siècle, je compte ce mythe d'une transparence de l'être passant par la parole; tout devant ou pouvant être dit à tous à tout moment.
Rien n'est plus faux; pour des raisons de vie sociale, bien sûr, mais plus profondément parce que la dissimulation de l'être est aussi ce qui permet la survie et l'unicité de l'être.

Jean-Claude Brialy

Dédié à un amoureux des potins.

Comme je suppose que "mes" lecteurs ne lisent pas Figaro Madame, je recopie ici l'histoire d'un canular, pas bien épais et bien peu détaillé, dont on trouve un écho plus lointain mais plus personnel sur un blog :
[…] Je voudrais évoquer ici le souvenir d'un canular auquel il fut mêlé, à son insu d'abord, puis avec la bonne grâce qui faisait de Jean-Claude Brialy un esprit de si agréable compagnie. Chaque année ont lieu à Saumur les Journées nationales du livre et du vin. Il y a des signatures, des tables rondes, des animations, d'où les participants ressortent souvent en état de gaieté avancée. Comme Gérard Depardieu, Jean Carmet ou Claude Chabrol, Jean-Claude Brialy en était un adepte invétéré. Tout ce beau monde passait habituellement la nuit à l'hostellerie du Prieuré, dans le village de Chêne-hutte-les-Tuffeaux. Pour la session de 1999, l'écrivain Alain Robbe-Grillet y occupait avec son épouse, Catherine, la chambre 17. Pendant le dîner du samedi soir organisé dans les caves Bouvet-Ladubay, Irène Frain et votre serviteur rédigèrent, en les signant «Robbe-Grillet», plusieurs billets invitant certains convives à se retrouver à minuit dans la chambre 17 de l'hostellerie du Prieuré. Nous les fîmes porter par des serveurs à Claude Brasseur, Jean-Claude Brialy et trois danseuses brésiliennes qui devaient se produire pendant la soirée. L'objet du rendez-vous n'était pas précisé. Mais, eu égard à la réputation sulfureuse du couple Robbe-Grillet, tout était à craindre ou à espérer. Lorsque Brialy et Brasseur montrèrent à Alain Robbe-Grillet ces petits billets prétendument signés de lui, le pape du nouveau roman parut tomber des nues. Mais la fable de la chambre 17 avait pris corps. Lors de l'allocution qu'il prononça à la fin du dîner, Jean-Claude Brialy se livra à des variations virtuoses sur les mystères de la chambre 17, non sans profiter du micro pour y inviter un certain Philippe, qui lui avait probablement tapé dans l'œil.

Personne ne peut dire ce qui se passa finalement dans la chambre 17 au cours de la nuit du 17 au 18 avril 1999. Le plus probable est que le couple Robbe-Grillet y dormit d'un bon sommeil saumurois. Mais on s'en amusa, et cela fit même l'objet d'une plaquette, Le Mystère de la chambre 17, où Denis Tillinac, Jean-Jacques Brochier, Jackie Berroyer et quelques autres donnaient leur version de cette nuit énigmatique. Jean-Claude Brialy, lui aussi, livrait ses réflexions lors d'un entretien : «Que ce soit une femme ou un homme qui l'ait inventé, l'important, c'est que tout le monde a couru après ce rêve. Même hagard, même complètement nase, même ivre mort ou à l'agonie, on aurait couru à la chambre 17, pour voir, pour savoir… À partir de maintenant, c'est de la légende, on y viendra en pèlerinage, on ira y dormir la tête pleine de rêves, on la donnera aux amants comme porte-bonheur, l'hôtelier en profitera pour la louer dix fois plus cher que les autres, c'est un rêve, je vous dis, la chambre 17, une grande leçon d'amour…». Bonne nuit dans la chambre 17, monsieur Brialy.

Marc Lambron, "Souvenir d'un canular" in Le Figaro Madame du 16 juin 2007

Drôle d'occupation

Dans l'ascenseur d'une tour de la Défense appartenant à une grosse société, un groupe visiblement en-déplacement-pour-formation à Paris (valises diverses):

— Ils sont rentrés tard ?
— Je ne sais pas, après nous; ils avaient encore une girafe à finir.

Billet rapide qui n'a peut-être rien à faire là

La radio de l'Institut de France.

Un blog très parisien (je regrette d'avoir raté l'exposition sur Calamity Jane).

Pour Didier, un annuaire de sites économiques et un site "cool tools" sur la veille (un grand classique).

Un institut danois qui tente de prédire l'avenir, avec malheureusement peu de documents accessibles: prospective sur la famille en 2017 et l'égocentrisme (études à visée marketing, bien entendu).

Un site (le site?) américain qui étudie l'impact d'internet, économique et social.

Un document qui me fait toujours rire: l'art de rédiger des polices d'assurance maritimes.

Et quatre pages sur les pandémies de grippe pour faire bonne mesure.

Ajout du 15 juin : Les aventures d'un tee-shirt dans l'économie globalisée est disponible en français.
Le bulletin des bibliothèques de France (je vous propose par exemple un article de Maxime Rodinson sur la translittération).

Anniversaire

Cela fait cinq ans que j'ai découvert RC, cinq ans le premier juin exactement, en écoutant Répliques sur France Culture.

— Tu as changé. Tu es sans doute davantage toi-même parce que tu as trouvé quelque chose qui te ressemble et que tu es plus heureuse, mais je préférais avant.





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Huit ans après (2015), avouons que ces paroles m'ont percé le cœur (ce n'est pas pour rien que je les ai copiées ici, pour les conserver). Qu'est-ce qu'un amour qui ne souhaite pas le bonheur de l'autre, mais la conformité de l'autre à l'idée qu'on se fait de lui?
C'est peut-être à ce moment-là que j'ai commencé à douter de cet amour si souvent proclamé: proclamé, certes, mais qu'en était-il réellement?
Et aujourd'hui, avec la théologie, l'ensemble des questions posées par ce billet se pose de façon encore plus aigüe.

Manque de curiosité

Je suis peu curieuse, je crois que je ne l'ai jamais vraiment été. Lorsque j'étais petite, je pouvais attendre très longtemps avant d'ouvrir les cadeaux de Noël; mes parents louaient cette sagesse qui permettait d'attendre que ma sœur fût levée pour prendre les photos familiales. Cela ne me coûtait pas, je savais déjà que les cadeaux étaient plus beaux non déballés, ils permettaient de rêver, ils contenaient tout tant qu'ils n'était pas ouverts.

Je ne pose pas beaucoup de questions, ou du moins j'essaie, pas de questions personnelles ou trop personnelles, et plus je rencontre de gens, plus j'écoute d'histoires différentes, plus il me semble que le nombre de questions susceptibles d'être posées diminue, que tout finalement peut être l'occasion de gaffes.%%% Je suis très douée pour les gaffes, à ce niveau-là, c'est presque de l'instinct.


Je me souviens de deux occasions de curiosité: vers sept ans, j'ai repéré dans l'armoire de mes parents ce qui devaient être mes cadeaux d'anniversaire, et je les ai lus. Non seulement mes parents furent très peinés, mais en plus je m'aperçus que cela gâchait totalement la fête quelques jours plus tard: il n'y avait plus de surprise, plus de cadeau, plus rien.

La deuxième fois, je devais être au lycée et ma sœur au collège. J'ai lu son journal intime dans lequel elle écrivait qu'elle souhaitait ma mort, que je gâchais toujours tout, qu'elle espérait voler du poison en cours de chimie pour se débarrasser de moi. J'ai refermé son journal (je me souviens de la lumière tamisée, ce devait être le début de l'été) et je suis sortie doucement de sa chambre.

Vous pouvez laisser traîner n'importe quoi devant moi, je ne le lirai pas. Je ne fouillerai ni dans vos poches, ni dans vos sacs, je n'ouvrirai aucun calepin. Ce n'est pas de la discrétion, c'est de la prudence.

Librairie La Madeleine

Impossible de me souvenir pourquoi je suis passée devant la librairie. Je l'évite depuis que le libraire dresse un étal sur le trottoir. J'ai donc trouvé dans les livres d'occasion
  • Jonathan Swift, Récit complet et véridique de la bataille qui se fit vendredi dernier entre les livres anciens et modernes en la bibliothèque Saint-James aux éditions Belles-Lettres : un exemplaire invendable offert à l'origine en cadeau pour l'achat de deux ou trois volumes de la collection.
Et
  • Hector Biancotti, Jorge Luis Borges, 14 juin 1986 (une plaquette minuscule aux éditions Sables) pour Tlön
  • Isaac Metzker , « Estimable rédacteur en chef…» qui paraît si drôle (mais en fait est poignant)

Psalmus Hungaricus

Je mets en ligne la page consacrée au Psalmus Hungaricus dans le programme du concert des Melo'men et Rainbow Symphony Orchestra associés.

« En 1867, le « Compromis austro-hongrois » donne enfin aux Hongrois un gouvernement royal autonome qui décrète à nouveau, en 1873, la fusion des trois villes. Elle sera cette fois définitive. Mais l'histoire hongroise, douloureuse, se poursuit. À l'issue de la Première guerre mondiale, le traité du Trianon du 4 juin 1920 scelle le démantèlement du pays. La Hongrie perd les deux tiers de son territoire et près de 3,3 millions de personnes se retrouvent alors en dehors des frontières de la « Grande Hongrie » d'avant-guerre, avec la nationalité roumaine, yougoslave ou tchécoslovaque.

C'est dans ce contexte qu'en 1923, le « Psalmus Hungaricus » est créé, en même temps que la « Suite de danses » de Béla Bartok. Le texte est une traduction libre du Psaume 55 par le poète hongrois Mihàly Kecskemêti Vég (XVIe siècle). Il raconte l'histoire du roi David qui implore Yahvé de le délivrer de la persécution de ses ennemis comme de la trahison de ses amis. Le sujet avait déjà une résonance particulière pour les contemporains du poète, alors sous domination ottomane. Il est évident qu'il a aussi trouvé un puissant écho trois ans après la signature du traité du Trianon. L'œuvre est ressentie comme une sorte de protestation nationale, dépassant largement la simple célébration du jubilé de Budapest. Pour le compositeur, elle représente plus encore puisqu'il sort d'une épreuve difficile : il a été sanctionné pour avoir exercé des responsabilités lors d'un gouvernement communiste entre-temps déchu.

Un ténor solo tient le rôle de David tandis que le chœur commente. L'œuvre est en forme de rondo avec un thème vocal principal, Mikoron David nogy busultaban, qui revient continuellement, accentuant l'idée de complainte. La violence de l'introduction orchestrale traduit la douleur morale de David, en contraste avec le quasi silence du chœur qui expose le thème mélodique principal : le peuple assiste, muet, au drame de son souverain, puis pleure et gémit à ses côtés. Progressivement, l'espoir en Yahvé renaît, qui s'exprime dans une puissante explosion polyphonique, avant la conclusion apaisée, message de consolation.

Kodàly est issu d'une famille de musiciens. Ses études musicales sont couronnées, à l'âge de 24 ans, par une thèse de doctorat en ethnomusicologie, consacrée au chant traditionnel hongrois. Il ne perdra jamais cet intérêt pour la musique populaire qui l'inspirera fréquemment. Pédagogue émérite, il a inventé une méthode d'enseignement de la musique, la « méthode Kodàly ». Outre une œuvre chorale très importante, il a composé de la musique de chambre et des pièces symphoniques.


Psaume 55 Chœur
Le roi David, accablé de souffrances,
haï et persécuté par ses amis,
le cœur plein d'un amer chagrin,
abattu, s'adressa à Dieu :

Ténor
Père éternel, Seigneur, écoute ma prière,
porte sur moi ton saint regard,
toi mon Sauveur, mon Dieu, aie pitié de moi,
car la peine de mon cœur est trop lourde.
Jour et nuit je pleure et me lamente,
morne est mon âme, mes forces m'ont quitté,
mon cœur est lourd d'amères souffrances
et de colère envers mes ennemis perfides.
Si j'avais les ailes de la colombe,
je m'envolerais et fuirais ce lieu.
Si mon Dieu clément l'avait permis,
je me serais déjà enfui bien loin d'ici.
Je préférerais habiter les déserts,
errer à l'abandon dans les gouffres obscurs
plutôt que de vivre au milieu de ceux
qui n'ont jamais respecté le droit ni la vérité.

Chœur
Le roi David, accablé de souffrances, etc.

Ténor
Nuit et jour ils trament des projets impies,
sèment la discorde et les calomnies,
cherchent à m'attirer dans leurs pièges
afin de se réjouir de mes souffrances.
La ville n'est que haine et courroux,
querelles et violence habitent ces murs,
on pille l'or, c'est le triomphe de la cupidité,
la terre ne connaît rien de tel ailleurs.
Souvent les impies tiennent conseil
pour mieux tromper veuves et orphelins,
ils offensent Dieu dans leurs pensées
et dans leurs actes,
l'orgueil les fait blasphémer son nom.

Chœur
Le roi David, accablé de souffrances, etc.

Ténor
Il serait plus aisé de supporter ces tourments
si j'étais persécuté par des ennemis !
Contre des ennemis, je pourrais me défendre,
je n'aurais pas à boire
la coupe amère de la souffrance.
Mais mon ami, mon compagnon le plus fidèle,
celui en qui mon cœur avait toute confiance,
qui suivait jadis le même chemin que moi,
c'est lui qui s'est révélé mon pire ennemi !
Que la mort cruelle les punisse tous,
que le perfide succombe à la violence.
Maudits soient leurs sarcasmes vils et impies,
maudite leur meute vile et scélérate.

Ténor et Chœur
Entends mes plaintes, ô Dieu, je t'appelle,
je t'implore jour et nuit,
apporte-moi le salut, délivre-moi
de mes ennemis et du mal qu'ils m'infligent.

Ténor
Oh, mon cœur, réjouis-toi, ne tremble point.
Dieu est ton réconfort, ton soleil,
il délivre toutes les âmes de la détresse,
il est ta lumière dans la vie et dans la mort.

Chœur
Toi, notre juge pour l'éternité,
jamais tu ne toléreras
les impies couverts de sang,
jamais tu ne béniras leurs méfaits,
ils ne vivront pas longtemps sur cette terre.
Tu protèges le juste,
toi la forteresse éternelle du fidèle.
Tu relèves celui qui fut bassement humilié,
tu écrases les présomptueux.
Si, sur terre, tu le mets parfois
à l'épreuve du feu ardent,
tu l'élèves ensuite à la gloire éternelle.
La délivrance, l'allégresse,
la lumière sont sa récompense.
Tu lui accordes puissance et magnificence.
Ce sont les paroles de David dans la Bible
au cinquante-cinquième psaume.
Pour le réconfort de tous, un homme pieux,
au cœur triste, en a tiré ce chant.
»

Zvezdo en concert

Samedi soir, j'ai testé le Rainbow Symphony Orchestra.
L'auditoire était bien plus varié, en âge et en sexe, que ne me l'avait laissé entendre Zvezdo (Ah zut, j'ai oublié de lui demandé s'il y avait un rapport entre Zvezdoliki et Zvezda (qui veut dire étoile, ai-je appris grâce à Grossman)). L'orchestre est une surprise, il est en tenue multicolore, c'est très joli. Je cherche une logique, il me semble que les cuivres sont bleus, mais c'est peut-être un hasard. (C'est un hasard, me confirmera à l'entracte Zvezdo en chemise orange (modem oblige), fatigué de l'éternel tee-shirt vert pomme de son voisin tandis que nous déplorerons conjointement que la chemise ne soit pas obligatoire).

Pour le reste, je suis trop intimidée pour parler de musique. J'ai été enchantée d'avoir l'occasion d'entendre le Psalmus Hungaricus de Kodaly avec un excellent ténor (Laurent Doyen). Le programme m'a beaucoup plu, il n'y a guère que l'Adagio de Spartacus d'Aram Khatchaturian que j'ai trouvé sans intérêt (on attend que la musique se réveille, et elle ne se réveille pas. Moi qui m'attendais à quelque chose d'un peu guerrier…)

J'ai été présentée à Gast et son ami (les non-blogueurs vivent dans l'ombre de leurs blogueurs), et Zvezdo m'ayant demandé où l'on pouvait boire une Guinness, je lui ai étourdiment répondu, pensant que c'était un test, un clin d'œil. Nous nous sommes donc retrouvés au pied de Saint-Eustache dans un pub bruyant.
J'ai appris beaucoup de choses, en particulier que certains protestants français s'étaient réfugiés en Lettonie pour fuir les persécutions catholiques, que les offices protestants étaient interdits dans l'enceinte de Paris par l'Edit de Nantes (j'espère ne pas me tromper, j'étais si impressionnée de tant d'érudition sur un sujet si inattendu que je n'ai pas tout enregistré). Les trois hommes ont parlé politique (je n'ai pas suivi (Gast est "Vert")), puis nous avons changé de sujets (j'ai tout oublié à l'heure qu'il est (ah si, au moins cette question: quelle taille, quelle forme, quel fournisseur pour une bibliothèque (le meuble) idéale) (et encore une histoire de fenêtres (et une autre de plombier polonais (Zvezdo est très content du sien, avis aux gens dans le besoin))).
Nous avons également évoqué la façon dont la Russie avait choisi, parmi trois religions (la juive, la catholique, l'orthodoxe) la religion orthodoxe parce qu'elle était la plus flamboyante, et je ne sais lequel des trois a murmuré «Imaginez s'ils avaient choisi la religion juive»… J'ai eu l'impression d'un abîme, cela changeait tout, mais tandis que j'essayais de mesurer les conséquences d'une Russie juive, Gast est parti sur le sujet de l'uchronie.
Nous avons fini sur les livres de SF, enfin surtout Gast et moi, les deux autres un peu effrayés par la quantité de lectures culturellement incorrectes que nous avons ingurgitées au cours de notre vie.

Gast a fini en beauté en nous résumant les aventures de Philémon (via un passage par Valérian (je préfère Laureline mais je ne l'ai pas dit)).

On a retrouvé Linda de Suza

Le 6 juin à l'O'buki (219 rue Saint Maur), soirée voyance avec Irma et Ingrid et visite de Linda de Suza (à partir de 21 heures). J'ai interrogé la patronne, eh non, ce n'est pas une blague.
J'ai alors suggéré qu'il faudrait inviter Jean-Luc Lahaye, mais quelques personnes bien informées m'ont appris qu'il était en prison. Ah bon.

Bien entendu je ne connaissais personne. Donc après avoir fait quelques instants la conversation à Embruns (je me dis que vu son dernier billet (Guy Môquet), mes lectures actuelles et notre point commun spontané et inattendu, nous avons peut-être davantage à nous dire qu'il n'y paraissait… (j'ai essayé de lui faire m'expliquer Twitter, il m'a répondu d'essayer (non, merci))), je me suis cramponnée à Chondre et ses amis dont Dr Nono (une sacrée langue de vipère. Si j'ai bien compris, son chat (11 mois et très possessif et tendre) met son couple en péril) et Franck, qui possède de jolies fossettes et à qui nous devrons bientôt la photo d'une des parties manquantes de Chondre (nous possédons le reste du puzzle, c'est un jeu de patience).

Ce fut une de ces soirées que j'aime, où l'on dit beaucoup de mal de gens que cela fait beaucoup rire (puisqu'ils sont là pour l'entendre (dans la plupart des cas)) même s'ils ont dû se demander qui j'étais et ce que je faisais là (mais ils sont très polis). J'ai même vu Garoo, beau gosse (moi qui croyais qu'il vivait en autarcie entre son frigo et ses ordinateurs) et l'un des membres des Coquecigrues.


Meilleure répartie de la soirée, une fille en couple (de filles) à une vendeuse de roses: non, on est venu sans nos maris.

Anniversaires

Quatre-vingt-un ans de Marylin Monroe.

Quinze ans de C.

Cinq ans que j'ai entendu parler de Renaud Camus pour la première fois.

Et Matoo fête ses 31 ans.
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