Hier, un réfugié a attaqué au couteau de très jeunes enfants dans un parc. J'avais vu passer l'information sur Twitter mais sans chercher à en savoir plus: c'est le genre d'info dont je me passe.

Quand Hervé est rentré du bureau, il m'a demandé:
— Tu as vu ce qui s'est passé à Annecy?
— Vaguement, mais pas plus que ça.
— Un homme a poignardé des enfants dans un square. Ça a tourné au drame dans la boîte: X vient d'Annecy, il n'arrivait pas à joindre sa femme, à un quart d'heure près elle était dans le parc.

6h50 ce matin. Je commande mon café. La télé est allumée dans la buvette, elle diffuse des images de l'homme qui marche de long en large dans le sqare en agitant les bras. C'est un grand gaillard costaud: mais pourquoi une telle armoire à glace est-elle allée attaquer des enfants de trois ans? Qu'a-t-il bien pu se passer dans sa tête? C'est une question que l'on sait sans réponse, car comment expliquer rationnellement la folie? Mais la curiosité, de l'ordre de l'effarement, demeure.

6h50 ce matin. Pour échapper à la télé, je sors en terrasse, du côté des quais vers le sud, peu fréquentés le matin. Il fait doux, le ciel est limpide. Ce pourrait être un moment calme et salutaire de ressaisissement de soi-même avant de s'élancer dans la journée. Trois habitués sont là, des hommes que je connais peu mais que j'aime bien, qui le plus souvent se taquinent sur leurs équipes de foot préférées. Ils sont en train de parler de l'agresseur.
— Moi, je l'enfermerais dans ma cave et matin et soir, j'irais le torturer.
J'interviens, pas sur le fond, simplement parce que j'aimerais qu'ils parlent d'autre chose: — Il faut être sacrément motivé, j'ai autre chose à faire de mes journées.
— Oui. (Il continue, obsessionnel:) C'est facile de torturer. Au Moyen-Âge, ils en connaissaient un rayon.
Un autre renchérit: — Et les Chinois...
— Oui. Par exemple, vous enfoncez un tuyau dans le cul et vous prenez un rat...

Je m'éloigne.