Matinée à faire du boitage à Fontainebleau. Enfin, petite matinée, une heure à une heure et demie.
Je découvre une huitaine de militants, masqués comme il se doit. Tous les âges, toutes les couleurs, c'est rassurant (rendez-vous à Fontainebleau: j'avoue que j'avais un peu peur du CSP moyen...)

Je suis à cheval entre deux comités et deux départements. Avec l'obligation de se présenter par binôme H/F, le parti manque souvent de femmes volontaires pour se présenter. C'est ainsi que je suis animatrice à Yerres. Lorsque nous avons déménagé, je n'ai pas eu le courage d'abandonner F., car en l'absence de binôme féminin il aurait vu disparaître le comité local, absorbé par le plus proche géographiquement. Or F. fait un très beau travail de veille, et maintenir la LREM présente face à la clique Dupont-Aignan me paraît important.

Cependant je me suis inscrite dans le comité local de Moret dès novembre (réabsorbé par Champagne) et me voilà contactée pour boîter et coller des affiches.

J'ai hésité à en parler ici. Comme la théologie, ce n'est pas bien vu. Il vaut mieux être socialiste laïcard, c'est plus porteur. Ce n'est pas que je cherche à me faire bien voir (de ce point de vue, spontanément, c'est généralement raté), mais je n'ai pas envie de me disputer ou de perdre l'estime de gens que j'estime. Mais l'heure est grave, du point de vue religieux comme politique, il est nécessaire d'exprimer ses convictions1.

Pourquoi LREM? Parce que ni bleu marine ni rouge. Je regrette le temps où nous savions que nous avions à choisir sur un éventail de gauche à droite. Les extrêmes étaient exclues, étaient impensables. A cette époque, je savais que quel que soit le candidat élu, je n'aurais pas d'inquiétude démocratique2. De l'agacement, de l'incompréhension, du désaccord, mais pas d'inquiétude.

Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Avec les gilets jaunes, le concept d'ultradroite et la disparition des socialistes, l'ensemble des partis s'est déplacé vers la droite. Que reste-t-il aujourd'hui à gauche3? Mélenchon, dont le mépris pour les Français4 s'affiche dans son voyage en Amérique latine en pleine pandémie; les verts (les verts sont-ils de gauche? je n'en sais rien) dont les propositions paraissent parfois totalement déconnectées de la réalité. (Je pense que l'écologie ne doit pas être réservée à un parti mais intégrée dans toutes les décisions. Ce doit être une préoccupation de tous, ce ne peut pas être récupéré par un parti qui refuse de faire des ponts pour lutter contre la voiture5 ou veut mettre tout le monde à vélo6.)

Il faut s'y faire, le plus à gauche des partis «normaux» (ie qui ne pose pas d'inquiétude démocratique) reste la LREM. Oui Macron m'a déçue dans sa politique timorée face aux migrants, oui je suis révoltée par rapport à ce qui se passe à Calais, oui je ne comprends pas qu'on n'ait pas annoncé franchement en mars dernier que nous n'avions pas de masque, pas de test; je ne comprends pas qu'on n'ait pas testé à grande échelle et imposé des quarantaines ponctuelles aux cas contacts, oui j'aurais préféré une vaccination par profession plutôt que par âge afin de faire des coupes dans la population et créer des mélanges dans les rues et lieux publiques.
Je suis plus réservée sur les violences policières: il y en a, mais du côté de ceux qui les relèvent, qui admet que les policiers subissent eux aussi des violences? Que les zadistes de Notre-Dame-des-Landes étaient armés de grenades et d'armes de guerre (au moins les plus extrêmes)? Qu'il est devenu dangereux d'être enfant de policier? Est-ce une situation acceptable?
Alors oui, bien sûr, je ne comprends pas les violences contre les manifs de femmes le 8 mars 2020. Mais tandis que moi je reconnais cela, combien d'anti-macronistes pour reconnaître que Macron a pris des mesures positives?
Aucun, je crois. Aucun que je connaisse, en tout cas.
Le temps de la discussion nuancée est si loin qu'on se retrouve tous comme des c** à soutenir l'in-soutenable (qui ne peut pas être soutenu, non l'insupportable).

Bref, je vais faire ma militante de base, non pas ni droite ni gauche mais droite et gauche (des objectifs de gauche (donner à tous une chance de s'en sortir, un toit pour tous, la fin des working poors) avec des méthodes de droite (de l'autorité, des règles, des structures)). Et je vais militer pour la LREM en tant que parti représentant le mieux la raison contre les complotistes de tous poils, mais aussi, j'en suis convaincue, c'est ce que je vois sur le terrain, parce qu'il y a là une vraie attention portée aux gens, à l'encontre de Fillon #rendlargent ou Hollande #lessansdents.







Note
1 : Je l'ai déjà dit : j'ai suffisamment regretté de ne pas avoir davantage affirmé mes convictions au moment du référendum sur la «constitution» (qui n'en était pas une) européenne en 2006.

2 : l'inquiétude démocratique, c'est ne pas être sûr que le leader en place acceptera de laisser le pouvoir s'il est battu aux prochaines élections. Cf Trump.

3 : les leaders des partis "de gauche" se réunissaient aujourd'hui pour se mettre d'accord, au moins sur leurs désaccords. En entendant leurs noms, j'ai découvert (ou redécouvert, j'ai dû le savoir) qu'Anne Hidalgo était socialiste! Si Anne Hidalgo est socialiste, alors je suis d'extrême-gauche. Je ne vois personne incarner si bien le mépris des classes moyennes, l'arrogance de la parvenue. Quand s'est-elle promenée à Paris la dernière fois? Aime-t-elle seulement Paris? («Tout cela manque d'amour», la critique de mon ancien chef bien-aimé, reste ma référence absolue: prendre soin, qu'attendons-nous d'autre d'un dirigeant? Prendre soin, donner une direction).

4: son seul intérêt, c'est lui-même, faire parler de lui. Quand travaille-t-il, que fait-il au sein de ses mandats? Qu'est-il en train de faire à et pour Marseille et le département dont il est député?

5: refus d'un pont sur la Seine en amont de Villeneuve-Saint-Georges alors que le nombre de ponts par habitants est le plus faible d'Ile de France. En réalité cela ne fait qu'augmenter les bouchons, pas diminuer les voitures! Surtout, les prochains ponts n'auront rien à voir, ils pourront être à géométrie variable, changer de nombre de voies dans un sens puis dans l'autre selon le matin ou le soir, sans compter les voitures autonomes, les voitures électriques… Refuser un pont au nom des normes actuelles n'a pas de sens.

6 : Ont-ils des enfants, ces gens-là? Les emmènent-ils à l'école? Savent-ils qu'on transpire à vélo? Ont-ils une idée du prix des logements dans les grandes villes, de l'obligation d'habiter loin, de la longueur des trajets? Ont-ils jamais pris autant les transports en commun que moi avant de me faire la leçon? Qu'ont-ils tiré comme leçon des gilets jaunes et de la taxe carbone? (ça, ça me fait rire: jamais un anti-macroniste ne reconnaîtra que le mouvement des gilets jaunes est la conséquence d'une mesure écologique).