J'ai passé ma frustration de l'été sur des fringues.
J'ai toujours rêvé d'avoir des cuissardes, les bottes de Barbarella ou de Yoko Tsuno, selon les références.
A vingt ans, je n'en avais pas les moyens. J'avais acheté une pseudo-paire chez Eram, qui dépassait un peu le genou.
Bien entendu, elles descendaient. Pour tenir, des cuissardes doivent être en cuir de très bonne qualité et s'ouvrir avec une fermeture éclair (au moins au niveau des chevilles) ou être composées pour partie de matière élastique.
J'avais cousu quelques centimètres de ruban élastique à l'intérieur des bottes au niveau du genou, qui serraient bien fort la jambe, dans l'espoir d'empêcher la tige de s'affaisser. J'avais juste réussi à me blesser avec les coutures de ces bricolages, j'avais de drôles de cicatrices sur les jambes mais je mettais quand même mes bottes, même si elles tombaient, même si elles me faisaient mal, avec des petites robes en laine de couleur vive.
En 2000, j'ai entrevu de loin chez un marchand de chaussures des cuissardes. Je les ai achetées et portées, même si c'était compliqué: ce n'était pas la mode, et aucun vêtement n'était prévu pour aller avec elles. Je rêvais d'un vaste pull Corto Maltese pouvant me servir de robe... En vain: si le pull était assez long il était trop large, et vice-versa. Je trichais, j'achetais des jupes (trop) courtes, des sur-vestes en soie trop longues, adoptant un look Matrix sans le savoir, tandis que ma collègue me racontait ses années 70, ses shorts en daim et le désespoir de son père.
Je pouvais me le permettre, nous nous connaissions tous très bien, j'avais droit à des regards amusés et complices.
Puis j'ai changé de boîte en conservant la plupart de mes collègues, mais en en gagnant d'autres. Le jour où un très beau métis m'a dit droit dans les yeux d'un air très sincère et très gêné «tes bottes... elle me font un effet...», j'ai arrêté de les porter au bureau.
Depuis j'ai changé de service, je les porte de temps en temps, plutôt rarement, alors que depuis 2004 environ, c'est devenu un article courant dans les devantures des magasins de chaussures.
Et cette année, enfin, joie et bonheur, sept ans plus tard, la mode est adaptée à mes cuissardes: petites robes courtes et rondes, grands pulls enveloppants...
Je regrette un peu les années et les kilos en plus, mais tant pis: je sens que je vais reporter mes cuissardes. Et tant pis si je fais vieille peau, honni soit qui mal y pense. En tout cas, j'ai acheté trois robes, une en laine, une en velours, une en soie.
Et je crois que je suis devenue copine avec la vendeuse, on a beaucoup ri et elle m'a fait promettre de repasser avec mes bottes. De toute façon j'ai l'intention de repasser, il faut que je convainc son collègue de me laisser un manteau (une forme et une matière admirables) à moitié prix, donc il faut que je lui donne envie de me le vendre... j'ai la carte de la vendeuse et le vendeur a ma carte... (finalement Matoo a eu raison de me faire regarder Sex and the City).
I am happy.
Bon, et pour vous récompenser d'avoir lu jusqu'ici et vous prouver que je pense à vous dans toutes les situations, ô lecteurs, une photo d'un détail de la toile de Jouy de la cabine d'essayage. Il paraît qu'il y a la même à Londres.
PS: message personnel pour Jim: je reçois vos messages mais je ne peux pas vous écrire. Depuis mi-août, tous mes mails me reviennent. Mais je confirme que je n'ai pas de nouvelles positives. A suivre.