Matin, midi, soir

Matin : cartographie, tout ce que je déteste. La norme ISO 31000 est en accès libre en ce moment, à cause du Covid.

J'ai découvert cette chose admirable, une norme pour écrire les normes. 95 pages. J'ai une certaine admiration pour les personnes capables d'écrire cela. Nous sommes au cœur des boulots à la con.

Midi et après-midi : conseil d'administration.

Soir : reconfinés. Nous n'en sortirons pas. Beaucoup trop laxistes dans le suivi des cas contacts.
La fille obsessionnelle : «est-ce que je peux continuer à ramer?»

De Men in Black à Pride

Il y a une dizaine d'années, on parlait de LAB-LAT: lutte-antiblanchiment, lutte antiterrorisme.

Aujourd'hui c'est devenu LBCFT.

Fascinant

Ce tweet date d'un an.

(Pour le coup, Matoo, ça ça me fait rire un max. Enfin ça me fait rire aujourd'hui, ça ne m'aurait pas fait rire il y a un an).

S'il n'y a pas de solution, la masturbation !

C'est ce que chantaient les rameurs du quatre blésois dans les années quatre-vingt.

Souvenir remonté en entendant ce matin sur RTL (qui fournit jour après jour un admirable travail pédagogique pro-vaccination): «il n'y a qu'une solution, la vaccination».

(Non, je ne soigne pas mes stats avec ce genre de titre: je n'ai plus de stats depuis plusieurs années, j'ai dû casser un module à un moment donné).

Un coup de téléphone

Je sors de réunion, je regarde mon téléphone, je n'en crois pas mes yeux: René a appelé et m'a laissé un message audio. Je le rappelle. En janvier, quand je l'avais eu au téléphone, il m'avait dit qu'il tombait, qu'il perdait l'équilibre. Il devait faire des examens.
Verdict: tumeur au cerveau. Il est resté un mois à l'hôpital et il sort dans quelques jours.

Il est toujours aussi extraordinaire: «Je vois la mort, toute la perspective est transformée. C'est merveilleux, je comprends des choses que je n'avais jamais comprises.»
Avec sa voix, enjouée, énergique.

Chaque dimanche soir

Chaque dimanche soir, je me dis qu'il me faudrait une journée de plus pour faire tout ce que je n'ai pas fait le week-end — c'est-à-dire tout puisque je n'ai rien fait.

Routine

Ramer le samedi matin, commander du japonais en descendant de bateau (trouvé par hasard un jour que j'étais chargée de rapporter le déjeuner et que j'étais en retard. Un peu cher mais excellent). Je passe prendre la commande en rentrant à la maison. Puis bulle tout l'après-midi (en me disant que je devrais repasser).

Le dimanche, H. marche de Moret à Saint-Mammès où je le rejoins. Un dimanche sur deux, galettes de blé noir au bord de la Seine.

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Le bassin prend beaucoup le vent, et quand il souffle du nord, ramer est vraiment difficile. Mais ça va mieux, je retrouve mes repères.

Chic

Le club d'aviron est pile-poil à dix kilomètres de la maison et les dirigeants ont décidé de ne pas fermer en attendant les recommandations de la fédération.

carte Waze montrant 10km


Pour les lecteurs du futur : depuis hier soir, seize départements sont reconfinés. Cette fois-ci, sortie sans limitation de durée, à dix kilomètres de chez soi.

Shakespeare en chaussettes

J'ai pris la photo à l'arrache, au moment de descendre, donc elle n'est pas cadrée.

Richard III, Roméo et Juliette, Hamlet

un voyageur a enlevé ses chaussures et mis ses pieds sur la banquette à côté d'un livre de Shakespeare. La couverture orange est assorti au siège

Massage thaï

Comme il n'y a pas d'espace de rangement dans le loft, comme nous avons beaucoup donné pour nous alléger, comme je suis effrayée par ma quantité de vêtements, nous n'achetons plus rien d'autre que de la nourriture.

Ça me met mal à l'aise, j'ai l'impression de ne pas soutenir l'économie. (Je plaisante, mais pas tant que ça, en fait.) C'est pourquoi j'ai peu hésité avant de prendre rendez-vous dans un salon de massage thaï à trente secondes de mon bureau, surtout qu'il a de très bons commentaires sur Google.

Massage des pieds, mais aussi des mollets avec excursion jusqu'aux cuisses. Je suis allongée sur un matelas au sol. La masseuse a des mains puissantes, ça doit être épuisant de masser ainsi au ras du plancher. Je ne sais pas si c'est la séance Tabata d'hier ou l'aviron de ce week-end ou une tension générale, mais certains endroits étaient bigrement douloureux.
J'ai réservé une séance pour la semaine prochaine.

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Un an de Covid. Nous n'en voyons pas la fin.

Parmentier le retour

A 7h sur RTL nous apprenons que les livraisons AstraZeneca ont du retard; douze heures plus tard nous apprenons que le vaccin est suspendu.

Parfait parfait: alors que plus personne ne voulait de ce vaccin, les Français vont se mettre à le réclamer tout en laissant le temps de reconstituer les stocks. Ça me rappelle décembre.


Voilà que je tourne complotiste.


NB: j'ai bien noté que l'affaire Parmentier serait une légende, mais puisque tout le monde la connaît, je l'utilise.

Billet technique (qui n'intéressera que ceux que ça intéresse)

Je me replonge dans la conformité (qui consiste à mettre en place des garde-fous pour ne pas être celui sur qui on tapera quand quelque chose tournera mal1) et je découvre les versions ultérieures des textes que j'ai connus dans leur enfance circa 2010.

Découvrez la liste nominative des personnes dont les avoirs sont gelés (lire cela c'est comme lire un roman d'espionnage) et plus mystérieux, la non-liste des PPE, les personnes politiquement exposées. Les banques et les assurances et les notaires et les agents immobiliers (etc) sont obligées de les surveiller, mais sans liste officielle: entre lutte contre le blanchiment et invasion de la vie privée.
On notera au passage cette fantastique reconnaissance implicite: que les personnes politiques sont davantage susceptibles de céder à la tentation du blanchiment et de la corruption. Nous sommes loin de «Noblesse oblige».

Par ailleurs vous trouverez ici une réflexion sur les complémentaires santé et leur possible avenir avec un tableau comparatif des situations selon votre contrat de travail (ou chômage ou retraite) p.27.



Note
1: en langage juridique : organiser la chaîne des délégations de responsabilité et mettre en place les contrôles légaux obligatoires.

Une dangereuse activité

Je suis arrivée trop tard pour avoir un skiff, j'ai donc fait du simulateur de pointe avec Jean-Marie et Bernadette.

B: — Et comment va ton dos?
JM: — Ça va. (Il m'explique.) J'ai une lombaire qui se balade. Jeudi dernier je n'ai pas eu de problème en skiff, mais j'ai peut-être fait un faux mouvement en sortant de bateau. En tout cas, l'après-midi j'étais sur mon canapé quand… crack!!
B: — Mais aussi, quelle idée de faire du canapé!

A la recherche de Dany

Je recherchais un titre dont je ne me souvenais plus, d'un auteur dont je ne me souvenais plus. Mais je savais qu'il avait écrit Comment faire l'amour avec un nègre.
J'ai donc googlé.

réponses à la requête Google


Et là, je me suis dit que certaines personnes avaient un problème.
(J'ai commandé à la librairie de Moret L'énigme du retour.)


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Vent et pluie ce matin, au point que j'ai failli ne pas aller ramer. J'aurais eu tort: la pluie s'est arrêtée, le bassin était un miroir, nous n'étions que quatre et ce fut une belle sortie.

Emotion

Une semaine, cinq jours d'affilée, sans problème de transport (ligne R, RER A), ni à l'aller ni au retour.

Je ne sais pas depuis combien d'années cela ne m'était pas arrivé. 2015, avant? (Je prends pour point de repère l'année 2017, quand j'ai tenté de noter mes déplacements tous les jours: cette décision était le signe d'une exaspération en passe de devenir incontrôlable.)

Formation accélérée

J'ai pu écourter ma période de préavis sous réserve de revenir une ou deux journées pour fiabiliser la clôture des comptes.

J'ai donc passé la journée à Nanterre pour former J. sur certains tableaux et revoir les traitements fiscaux.

J'ai des remords de ne pas lui avoir montré tout cela il y a des siècles.
Il faut que je me souvienne que cela ne fait que cinq semaines que nous (H. et moi) avons décidé de pousser sa candidature pour qu'elle me succède. (Oui, c'est un complot mené de notre salle à manger. J'ai poussé des pions avant de partir, je continue maintenant).

Le trésorier est passé devant le bureau pendant que J. et moi travaillions ensemble (hasard incroyable quand on considère qu'il n'est venu dans ce bureau qu'une fois en quinze mois). Ce qui m'a étonnée c'est qu'il ne m'a posé aucune question sur mon nouveau poste. Avait-il oublié que je ne travaillais plus là? Ou avait-il peur de ce que je pouvais répondre? Ou s'en fiche-t-il totalement? (pourtant il est d'un naturel curieux).

J'en discute avec H.:
— Tu crois qu'il est timide? Mais même timide, il aurait pu me demander si tout se passait bien. Ou c'est moi qui m'étonne pour rien?
— Tu es quand même tombé sur des drôles de zozos.

A la fin de la journée j'étais pleine de courbatures tant je m'étais concentrée et crispée devant les tableaux Excel en accumulant les détails et les recommandations, de plus en plus effondrée intérieurement de tout ce que j'aurais dû transmettre plus tôt.

Je m'en fais trop. J. est solide et va très bien s'en sortir.

L'artiste des boîtes aux lettres

Deux boîtes aux lettres de Vincennes (il y en a peut-être d'autres: Rosa Parks est sur l'esplanade du RER, Mercredi Addams devant un tabac avenue de Paris).

portrait de Mercredi Addams portrait de Rosa Parks


Je vois disparaître une certaine France

La semaine dernière, deux personnes de mon équipe étaient en vacances et en télétravail hier. Je les ai donc rencontrées aujourd'hui. Ils sont mari et femme, fonctionnaires tous les deux, «agents», comme on dit ici.

— Ça fait trente-et-un an que je suis ici. Je vais partir en retraite en décembre. Avant, j'ai commencé à l'Imprimerie nationale, pendant dix ans. J'y suis rentrée par mon oncle. C'était plus facile que maintenant. Y avait mon frère et mon père, aussi. On m'a fait passer un petit test et puis voilà, j'étais embauchée. C'était souvent comme ça, une tante qui travaillait, y avait pas tous ces concours, on était en famille.

Je la regarde, à la fois éberluée et envieuse: ainsi, il en reste quelques-uns en activité, de ces gens qui ont connu le plein-emploi des Trente Glorieuses, où il suffisait de frapper pour être embauché. On me l'avait déjà raconté, mais les narrateurs avaient vingt ans de plus. Je suis devant les derniers témoins, nés en 1955 environ, qui ont commencé à travailler avant le premier choc pétrolier et ne sont pas partis en retraite malgré une carrière longue.
Je vois disparaître la France de San-Antonio.

Bio

Depuis que nous sommes à Moret nous mangeons bio.
Ce n'est pas vraiment volontaire (je veux dire: une volonté), c'est plutôt une opportunité ou une coïncidence, kairos, le magasin de fruits & légumes le plus proche est bio, il n'est pas cher (pas plus cher que du pas bio), les produits sont bons et parfois surprenants (les chips frites à l'huile de coco ou les brosses à dents à tête jetable).

Il y a quelques semaines une affichette proposait de réserver de la sève de bouleau.
What? Qu'est-ce que c'est?
Toujours curieuse, j'ai réservé une poche de trois litres. (Il faut dire aussi que le bouleau est l'arbre emblématique de mon enfance, l'arbre de la Sologne.)
Jeudi on m'a appelé pour me dire que je pouvais passer la chercher.
Depuis, j'en bois cent cinquante millilitres chaque matin. C'est censé durer trois semaines, il est très important de ne pas le garder plus d'un mois (pourquoi? mystère).
C'est très étonnant, transparent, insipide. On dirait une eau à peine parfumée.

Beau temps

Autant le bassin était démonté hier, autant il était magnifique ce matin.

J'ai suivi les conseils qu'Alain m'a prodigués hier.
J'ai pris conscience d'un défaut que je connaissais, mais sans jamais l'avoir nommé: j'ai soudain compris que je ne baissais pas «simplement» ma main gauche à l'attaque, la réalité c'est que ma main gauche passe sous le niveau de ma main droite, ce qui est une hérésie absolue (je n'en reviens pas d'avoir fait cela toutes ces années).
Maintenant que c'est nommé, je vais pouvoir me corriger.

la Seine vue du ponton de l'ANFA


J'ai ensuite rejoint H. à St-Mammès pour notre crêpe en bord de la Seine (le marchand de crêpe vient une semaine sur deux).

Fantôme

Les baies vitrées du dernier étage ne s'ouvrent pas, et comme elles sont situées à sept ou huit mètres de hauteur, elles ne sont pas lavées souvent.

Cet après-midi contre la lumière j'ai vu apparaître sur la vitre la trace d'un ancien drame. (Cela ne se voit que si l'on regarde vers les tuiles en face, contre le ciel on ne voit rien.)

trace d'un pigeon écrasé sur la vitre


Turning point

Le 18 février a été publiée au Journal officiel une ordonnance qui réforme la protection sociale complémentaire (PSC) des fonctionnaires (des trois fonctions publiques: Etat, collectivités territoriales, hôpital). Elle prévoit une participation des employeurs à hauteur de 50% de leur cotisation de complémentaire santé.

L'idée est de copier ce qui existe dans le privé. Cela pose de nombreuses questions, à commencer par la définition d'"employeur" (est-ce qu'un ministère est un employeur, par exemple?).
Une chose est sûre: s'il s'agit de contrat collectif obligatoire (ce qui est flou dans la lettre du texte, mais me semble dans son esprit), il est possible que je sois entrée dans une petite structure condamnée à être absorbée par une plus grosse d'ici un à deux ans.
Fatalité?


Je pense beaucoup à Conrad en ce moment. J'ai l'impression d'avoir abandonné un paquebot paresseux qui amortissait la houle et où l'on s'ennuyait à mourir pour un petit navire à voile au moment de la conversion vers la vapeur.

Bonne pour le service

Médecine du travail, infirmière et non médecin, pas d'auscultation ni de bandelette dans un gobelet d'urine mais du dialogue. Elle m'a demandé de parler, l'inconsciente. Elle a eu droit à un mini-cours sur le mutualisme, sur le rêve utopique né à Dachau entre les résistants qui deviendraient ministres, «plus jamais ça» mais surtout «nous allons construire une société meilleure». Bref.

Au mur, une affiche pour la vaccination a fait court-circuit avec les ratiocinations de mon coiffeur, «tout ça pour une maladie qu'on sait soigner» (sous-entendu la chloroquine).
Il n'est peut-être pas assez clair, pas dit assez clairement, qu'il y a un nombre impressionnant de maladies que la médecine ne soigne pas. La coqueluche, la grippe, la rougeole, toutes les maladies à virus. La médecine soulage quelques symptômes, fièvre, mal à la tête, toux; mais c'est le malade qui combat, c'est lui qui guérit — ou pas, c'est-à-dire qui détruit le virus — ou pas.

Les vaccins ne soignent pas, ils permettent de ne pas tomber malades.
Mais si on tombe malade, il faut lutter seul. En l'état actuel des connaissances, la médecine est impuissante.

Visio-conférences

Le terrible avec les visio-conférences, c'est que je vois mon cou en gros plan et il faut admettre que j'ai pris un sacré coup (haha) de vieux.

Et mon visage est blafard, il faudrait me maquiller, mais se maquiller, c'est laisser des traces degusting dans les masques. Donc donc donc… la vie est dure en ce moment.

C'est la rentrée

La même impression que les jours de rentrée au collège. Tout est à découvrir, les autres élèves, les profs, l'emploi du temps. Après, ce sera la routine.

J'ai créé la surprise en souhaitant rencontrer individuellement chaque personne de mon équipe. Cela me paraissait pourtant aller de soi.

Ils sont détendus, ils rient beaucoup. Il a fallu leur imposer le télétravail deux jours par semaine: ils souhaitent venir, ils n'en peuvent plus de ne voir personne. Les six fonctionnaires (détachés de la fonction publique) sont à quelques années de la retraite, mais ils ne sont pas pressés d'arrêter, visant soixante-cinq et même soixante-sept ans, avec la pêche et le sourire. Quelle différence avec le lieu d'où je viens, où tous sont amorphes dès cinquante-huit ans, espérant une mise en invalidité pour quitter les murs mortifères.

Je ne m'étais pas rendu compte à quel point c'était minuscule. C'est étonnant. Il y a quelques années cela m'aurait effrayée. Aujourd'hui cela attise ma curiosité: est-ce que cette structure va pouvoir survivre, être suffisamment vive et inventive pour survivre?
Sinon elle sera absorbée par un concurrent. Cela va se décider dans les cinq à dix années à venir. C'est étrange d'avoir l'impression que je peux faire pencher la balance dans un sens ou dans l'autre.
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