Noël pas tout à fait fini, Pentecôte en vue

J'ai écrit les dernières cartes de vœux (non qu'il n'en manque encore deux ou trois, mais tant pis), enveloppé les deux derniers cadeaux de Noël (mais je ne les pas envoyés, poste fermée: demain), pas encore démonté le sapin.

J'ai réservé trois nuits d'hôtel à Venise pour la Vogalonga 2011.

Andromaque

Magnifique Andromaque cette après-midi, avec une mention spéciale à Léonie Simaga en Hermione.
Je ne me rends pas exactement compte de la part qui reveint à la mise en scène, à l'interprétation ou au texte, mais il s'agit bien plus des tourments d'Hermione déchirée entre son amour et son amour-propre que de ceux d'Andromaque entre l'amour pour son fils et sa fidélité à Hector.

Fils d'Achille, fils d'Agamemnon, fille d'Hélène, tous disparaîtront, dans la mort ou la folie. Il ne restera, ô paradoxe, que le fils d'Hector.

Ulysses taché

Mon Ulysses porte la date du 11 septembre 1998.
A cette époque-là, le Bouillon Racine servait des tartines de banane écrasée avec du beurre salé.
Je commandais une tartine, une tasse de chocolat, et je lisais.
Ce jour-là, j'ai commencé Ulysses. Et j'ai éternué.
Mon Ulysses est taché de chocolat, une grosse tache sur la tranche, des petites taches sur les pages 4 et 5 .

Décontenancée

Messe à La Défense. Saint Thomas d'Aquin. Prêche: "nous avons un devoir d'intelligence".

Au rez de chaussée sous la nef, le hall d'accueil propose une minuscule librairie. J'erre devant les titres, et finis par choisir Le château intérieur de Thérèse d'Avila.

Une très vieille dame courbée, sans doute bénévole, encaisse et note les références des achats dans un cahier à souche: «Ça y est, vous avez choisi? (Et prenant le livre et l'examinant) Ah oui, ce n'est pas tout jeune, mais on peut toujours s'y plonger.»

Senso

Senso, pour des raisons églogales évidentes. «La saison commence à La Fenice» doit venir de là.

Venise comme je l'ai vue en 1986 et comme elle n'existe plus, maintenant qu'elle est repeinte et pimpante.
Des intérieurs comme des décors d'opéra, des extérieurs dans la même tonalité que les fresques de la villa de campagne.


Je passe à la librairie Compagnie. L'émotion parmi les livres est plus grande qu'autrefois. Elle grandit. D'une certaine façon, lire me devient de plus en plus difficile, car chaque mot sur la page m'étonne. Ce n'est même plus «qu'est-ce qu'un nom?» mais «qu'est-ce qu'un mot?», comment se fait-il que ces signes aient un sens? (Et que je sois de plus en plus attachée aux versions bilingues n'est pas un réflexe de puriste, mais un besoin de rêver.)

J'étais venu chercher le Tristan Storme mais il n'est plus en rayon. Patrick a raison, il faut acheter quand on hésite. Je repars avec
- Parménide de Heidegger
- L'eschatologie occidentale de Jacob Taubes
- La logique sans peine de Lewis Carroll
- Loin de Byzance de Joseph Brodsky
- la querelle des universaux d'Alain de Libera

Un jour je lirai tout cela. Un jour je fermerai les portes et je lirai ma bibliothèque.


ajout le 29/01
J'écoute Sodome et Gomorrhe. Les remarques du narrateur à propos de la lettre de M. de Charlus à Aimé me semblent assez bien résumer Senso, avec la comtesse en M. de Charlus.

[...] il [Aimé] reçut une lettre fermée par un cachet aux armes de Guermantes et dont je citerai ici quelques passages comme exemple de folie unilatérale chez un homme intelligent s’adressant à un imbécile sensé. [...] Elle [la lettre] était, à cause de l’amour antisocial qu’était celui de M. de Charlus, un exemple plus frappant de la force insensible et puissante qu’ont ces courants de la passion et par lesquels l’amoureux, comme un nageur entraîné sans s’en apercevoir, bien vite perd de vue la terre. Sans doute l’amour d’un homme normal peut aussi, quand l’amoureux, par l’intervention successive de ses désirs, de ses regrets, de ses déceptions, de ses projets, construit tout un roman sur une femme qu’il ne connaît pas, permettre de mesurer un assez notable écartement de deux branches de compas. Tout de même un tel écartement était singulièrement élargi par le caractère d’une passion qui n’est pas généralement partagée et par la différence des conditions de M. de Charlus et d’Aimé.

Service minimum

Ce blog vit dangereusement en ce moment. Rien à écrire, rien envie d'écrire, rien de court surtout, et pas envie d'y consacrer le temps de quelque chose de long.

- Lundi : Le fou, de et par Benoît Lepecq. Emerveillée par ce travail.

- Mardi : il suffit que je m'intéresse à quelque chose pour qu'elle disparaisse, m'étais-je dit un jour en voyant que les blogs que je me mettais à lire régulièrement devenaient aussitôt silencieux. Hier, j'ai constaté le même phénomène à propos d'Helena Rubinstein dont je cherchais les produits depuis quelques jours: ils ne sont plus (ou très mal) commercialisés en France.

Soir : Les réunions de préparation aux séances de catéchisme me glacent le sang (et cela me glace le sang: quelle prétention de ma part). Surtout ne pas faire lire les Ecritures, pas la moindre parabole, «ça va ennuyer les gamins», préférer les résumés, voir une seule phrase «ah tiens, c'est une bonne antisèche». Qu'est-ce que les enfants auront appris? il faut vraiment croire que l'Esprit souffle où il veut. (Non je ne suis pas en train de dire que la foi est pure affaire de raison et d'éducation. Mais oui, c'est indispensable malgré tout.)

Nous avons évoqué «L'ouvrier de la onzième heure», parabole qui me fait rire (à cause de la tête de ceux qui veulent absolument une justice divine à l'image de la justice humaine: il y a un os. Rassurant d'ailleurs, que les textes aient pu traverser les siècles sans être caviardés malgré tout ce qu'ils contiennent d'humainement choquant. Enfin, cela ne fait pas si longtemps que tout le monde sait lire).

Histoire contemporaine

A l'occasion de la soirée organisée pour fêter les quarante ans de Marie-Mère, j'apprends que Régis Debray a été otage trois ans en Bolivie. Comme Ingrid Betancourt en Colombie alors? Ah bon.

Au-delà

Film lent mais rythmé, impressionnantes images du début (et vraissemblance de la bande-son, du grondement sourd de la terre ou de l'océan en colère), belles images de Mélanie (Bryce Dallas Howard) qui quelques secondes rappellent Audrey Hepburn... ou Carla Bruni..., cette idée géniale des confidences quand le regard est tu, etc.
Le sujet joue sur une corde trop sensible pour que j'ai envie d'en parler (Qui dans la salle n'a pas perdu un être cher? Prédominance des cheveux blancs à la séance de 16h30), mais il faut reconnaître une grande maîtrise, une immense maîtrise, qui évite tout sentimentalisme. Deux sujets se chevauchent, la question lancinante de la vie après la mort (y a-t-il oui ou non quelque chose après la mort, et si oui, quoi?), et celle plus quotidienne de la vie, comment vivre quand on est différent, ou seul, ou malheureux? Comment faire, vers qui se tourner?

Liste des références à Dickens.

La mélancolie de l'abstème

— Tu ne bois que de l'eau ? Tu sais que tu ne feras jamais carrière dans le groupe ?
— Je sais oui. Aucun espoir d'évolution. Un jour j'ai bu un verre de Salvétat, j'ai été augmenté d'un pouyem…

Il avait les yeux bleus et lisait Kerouac.

— Tiens, j'ai encore photographié un jeune homme ce matin.
— Toi, tu vas mal finir !



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Finalement

Trois pintes de Guinness plus tard, une seule certitude : le cœur ne vieillit pas.

Elégance footballistique

Ce matin dans le RER L'Equipe déployée par mon vis-à-vis me permet de contempler le pull bleu négligemment jeté sur les épaules de Waldemar Kita. Je songe aux cravates calamiteuses de Raymond Domenech et je me demande si cela influence les résultats d'une équipe.

Grande vérité

Huit heures du matin dans le RER, elle doit avoir seize ans :

— Plus tu fous rien et moins t'as envie de faire quelque chose.

Thomas Hampson chante les Kindertotenlieder

— Tu ne vas pas faire la bise à Thomas Hampson? me demande Gv, taquin.
— Hum, ce n'est pas mon genre.
(Et au moment où j'entends ces mots, je me rends compte de leur possible ambiguïté).

Vincent, j'ai été très heureuse d'avoir été présentée à HLG. Même s'il m'a déjà oubliée à l'heure qu'il est, cela m'a fait très plaisir, bien plus que ne l'aurait fait une bise à ou de Thomas Hampson.

Le choix du carrelage

Nous avions sélectionné sur internet des carreaux de station de métro (blancs, biseautés, avec une frise noire) ou quelque chose de provençal qui m'évoquait un peu l'affiche de l'exposition Willy Ronis de cet été.

Finalement ce sera de minuscules nœuds bleus sur fond blanc, très Petite maison dans la prairie.

Le pilier de Paul Claudel

Notre-Dame de Paris, huit heures du matin. L'éclairage entre les piliers est diffus, parfait, sans rien de la dureté des spots utilisés parfois dans les églises (je n'aime pas que les églises soient trop lumineuses. Ni trop sombres.) La cathédrale devient intime, resserrée.
Ma récente lecture de Claude Mauriac me pousse à rechercher "le pilier de Paul Claudel" (c'est en fait "Notre-Dame du Pilier" qu'il aurait fallu chercher, mais je ne le savais pas). Spontanément je le cherche au même endroit que "le pilier de Péguy" à Chartres (le pilier comportant une plaque commémorant son pèlerinage), mais celui de Claudel est de l'autre côté, à droite du chœur à la croisée des transepts. Le lieu est signalé par un pavé gravé]. Ce pavé se trouve au pied d'un pilier sur lequel est aujourd'hui clouée une plaque à la mémoire de Mgr Lustiger. Le texte en commence ainsi: «Je suis né juif et je porte le prénom de mon grand-père Aron»…


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Agenda (ajouté en 2018) :
Furieuse contre la bibliothèque de Sciences-Po qui veut un justificatif de domicile alors que je paie ma cotisation d'ancienne élève par prélèvement depuis des années. J'y ai oublié mes gants rouges. Carnets de Finnegans Wake avec l'équipe de Daniel Ferrer. Passé en librairie. 3e tome de Mme de Sévigné en pléiade. Bière avec Patrick jusque tard dans la nuit.

André Tubeuf

A midi, je suis allée écouter une conférence de Tubeuf sur Mahler à l'opéra Bastille.














Et je n'ai rien osé mettre en ligne à l'époque car j'étais intimidée par mes potentiels lecteurs. J'écris et mets en ligne le 13 janvier 2018, sept ans plus tard.

Une existence tragique

A., quinze ans :
— Mais je ne veux pas porter de lunettes !
— Tu pourras peut-être avoir des lentilles, si tes yeux ne sont pas trop secs.
— Ça m'étonnerait, j'ai trop pleuré, il ne me reste plus de larmes.

Les livres

Hier, vu L'histoire sans fin.

Je me suis un peu fait avoir, l'idée était de voir en allemand un livre que nous lisons en allemand… finalement il était en VF.

De beaux personnages (le dragon, l'homme de pierre (je veux dire: de beaux effets spéciaux, de belles marionnettes)), un héros un peu niais et un doublage catastrophique (ceci n'aidant pas cela).

Cette histoire est une ode à la lecture et aux lecteurs. Elle parle de ce moment dans l'évolution d'un lecteur où celui-ci s'identifie encore aux personnages.


Vient un jour où ce qui le tient, c'est la communauté d'esprit avec l'auteur. Le lecteur part à la recherche d'amis et de héros, de gens à qui il aimerait ressembler, mais ces amis ne sont plus les personnages (qui entretemps sont souvent devenus des idées ou des sensations, les livres lus n'étant plus les mêmes), mais les auteurs — d'où sans doute d'ailleurs cette attirance vers les correspondances, journaux ou autobiographies: l'auteur est alors immédiatement accessible, bien plus que dans un ouvrage de philosophie ou un roman (et pourtant, comme Kantorowicz est proche).

Typographie

Le début de cette vidéo m'a fait rire. Je me souviens très bien d'une période où nous ne pouvions attendre le bus sans qu'une affichette n'attire le regard de H. : « Oh, regarde cette police… » Moi j'aimais bien. (Ce n'était pas la typographie que j'aimais, mais la folie douce, l'obsession. Aujourd'hui encore, j'ai droit parfois à : « Ah non, pas ce film, il est nul, c'est sûr: tu as vu la typo de l'affiche ?)

Pour info: vers la fin, cette vidéo raconte les origines de la police Comic sans.


Peut-être est-ce la raison pour laquelle un soir de novembre, station Franklin Roosevelt, bloquée par la neige/les accidents de circulation, je ne trouvai rien d'autre à faire pour tromper mon ennui que de photographier ces quelques renseignements :

2010_1201_station_franklin.jpg


Cela m'avait fait rire un peu jaune. Sur une ligne capable de nous transporter: si seulement…

Invité surprise

J'ai essayé d'être à l'heure au Raspail vert pour Philippe[s] qui nous avait prévenus devoir partir tôt.
Quand je suis arrivée, RC était là.
Je finis par ne plus très bien savoir comment séparer mes vies entre FB, Alice et VS (c'est plutôt bon signe, je pense). Je vais garder le plus technique pour VS et raconter ici toujours cette légère détresse de savoir que je parle trop que combat une sorte de détermination à ne rien changer quand "il" est là parce qu'il n'y a pas de raison.

Deuxième partie de soirée, après le repas, plus calme, commentaires de RC qui parle doucement, amenant une sorte d'apaisement dans la palpitation des explications qui échappent, insaisissables.

La Palatine (« Pas le couvent ! », c'était la Palatine, merci Laurent!), Theilhard de Chardin, Péguy, tout ce qui unit élève, des rires, Camus et Drouet échangés contre Madame Royale… « Mais c'est une imposture, vous n'êtes pas du tout sérieux! ? Nous l'avons toujours dit! »

Guet-apens

Straub, O somma luce.
Enregistrement de Varèse coupé par des sifflets. Enregistrement au théâtre des Champs-Elysées, pas fait attention à la date.
Trois "pièces", jeu du soleil, jeu de la lumière, aveuglement. Cependant, je doute de l'intérêt de mettre du texte sur des plans fixes et répétitifs à l'heure de Youtube.
M'enfin bon.
Il fera partie de ces films intermittents qui finissent par peupler mon sommeil parce que j'ai essentiellement dormi pendant leur projection. Des films rêvés plutôt que vus.

Trahison, pas de Guinness au James Joyce. Je pensais l'appartement désert, il s'ouvre sur un verre de porto et du Mozart. Rougets et galette des rois, la première de l'année. Pas de Kantorowicz dans la bibliothèque. Perruque blonde et tee-shirt de geek (presque ce que j'étais venue chercher, il ne me manque plus qu'une veste à paillettes. Personne n'a une veste à paillettes?)

J'assiste impuissante à deux désarrois.


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janvier 2018 : j'éclaire quelque peu. J'avais rendez-vous au pub avec OG. Il m'a raconté son dilemme amoureux. Puis nous sommes allés chez lui (chez son père) car il devait me prêter des éléments de déguisement. J'ai été invitée à dîner.

L'autre désarroi est celui de H. : "son" patron, LG, celui de l'entreprise d'Evry rachetée cet été par l'entreprise de Mulhouse, démissionne. Il part aux Etats-Unis. H. va se retrouver seul face à B. Il a l'impression (est-ce une impression ?) d'être trahi : LG a vendu et s'en va.

Je vais me coucher

Fatiguée.
Je rêve de blogueurs. (Si si. Je ne donne pas de noms pour ne pas faire de jaloux, mais j'aime bien).
Deux réunions aujourd'hui, une sur les "reco"1 et l'autre sur Saint-Sulpice de Favières, "la plus belle église de village de France"2.
J'ai mal aux yeux.
Ce matin j'ai conduit trois kilomètres en tenant la portière qui ne fermait pas à cause du froid.
Je crois que c'est tout pour cette journée passionnante.


Note
1 : recommandations des commissaires aux comptes sur la clôture des comptes
2 : sortie prévue avec les enfants dans le cadre de l'aumônerie

Autre chose apprise pendant les vacances

Je n'avais jamais remarqué que mon pub préféré, <a href="/dotclear/index.php?2006/10/15/152-boire-de-la-guinness-a-paris">le Bugsy</a>, se trouve rue Montalivet : c'est la rue du salon Verdurin (ce qui n'est finalement pas très étonnant si l'on considère que les parents de Marcel Proust habitèrent rue de Surène, au-dessus de l'actuel pressing (d'après l'ex-libraire de la rue d'Anjou), et que l'hôtel de Guermantes se tenait sur le boulevard Malesherbes (enfin je crois)).

La blague du week-end (pour Patrick et Maud (et pour Aymeric, un jour))

— Ma fille, il faut qu'on parle. Il est temps d'avoir quelques explications sur comment on fait les bébés, tout ça…
— D'accord papa. Qu'est-ce que tu veux savoir ?

bilan 2010

Trois cent quinze billets.
Finnegans Wake.
Bovino et Berlin.
Une certitude désormais: j'aime l'Italie comme je pensais ne jamais aimer un autre pays que la France.

Count your blessings : je remercie plus particulièrement les cruchons et les oulipiens dont la bonne humeur et l'érudition me surprennent et m'enchantent à chaque nouvelle rencontre. Ils sont une inestimable source d'énergie et de gaieté.

(Commentaire des enfants à Noël: «les amis de maman sont très gentils» ? ce qui m'a fait plaisir.)


Meilleurs vœux à tous, je nous souhaite de nombreuses rencontres IRL, car après tout, «un blog, ça sert à se faire des amis».
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